Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Dépannage Location Mécanique Corse a demandé au tribunal administratif de Bastia de lui accorder le remboursement d'une somme de 72 260 euros correspondant au crédit d'impôt pour investissements réalisés en Corse au titre de l'exercice clos en 2016.
Par un jugement n° 1701105 du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er mars 2019, la SARL Dépannage Location Mécanique Corse, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 27 décembre 2018 ;
2°) de prononcer le remboursement de la somme de 72 260 euros au titre d'un crédit d'impôt constitué pour l'exercice clos en 2016 ;
3°) de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à l'interprétation des dispositions du point 49 de l'article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'acquisition du camion de dépannage, qui ne correspond pas à une dépense de remplacement, est éligible au crédit d'impôt pour investissement en Corse ;
- l'acquisition de la nouvelle dépanneuse doit être regardée comme un investissement initial au sens du point 49 de l'article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 ;
- la valeur comptable nette du camion cédé était presque nulle, de sorte que le coût de la nouvelle immobilisation dépasse de plus de 200 % la valeur de l'immobilisation cédée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2019, le ministre de l'action et des comptes public conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Dépannage Location Mécanique Corse ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Dépannage Location Mécanique Corse, qui a pour activité le commerce de véhicules automobiles, a demandé à l'administration fiscale le remboursement d'une somme de 84 144 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt pour investissement en Corse au titre de l'exercice clos en 2016. Par décision du 3 août 2017, l'administration fiscale a partiellement rejeté sa demande à hauteur de 72 260 euros. La SARL Dépannage Location Mécanique Corse fait appel du jugement du 27 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant au remboursement de cette somme.
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 244 quater E du code général des impôts : " 1° Les petites et moyennes entreprises relevant d'un régime réel d'imposition peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des investissements, autres que de remplacement, financés sans aide publique pour 25 % au moins de leur montant, réalisés (...) et exploités en Corse pour les besoins d'une activité industrielle, commerciale, artisanale, libérale ou agricole (...) ". Aux termes de l'article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 : " Aux fins du présent règlement, on entend par : / (...) 49. " investissement initial " : / a) tout investissement dans des actifs corporels et incorporels se rapportant à la création d'un établissement, à l'extension des capacités d'un établissement existant, à la diversification de la production d'un établissement vers des produits qu'il ne produisait pas auparavant ou à un changement fondamental de l'ensemble du processus de production d'un établissement existant (...) ".
3. D'une part, il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que la SARL Dépannage Location Mécanique Corse a fait l'acquisition, le 18 avril 2016, d'un camion de dépannage de marque Iveco, après avoir revendu quelques jours auparavant un camion de dépannage de marque Scania. Si la société fait valoir que le camion dont elle a fait l'acquisition est équipé d'une grue lui permettant de réaliser des opérations de dépannage avec rotation de la charge, ce nouveau camion est utilisé, comme le précédent, afin de dépanner d'autres véhicules, y compris des poids-lourds. L'investissement qu'elle a ainsi réalisé doit être regardé comme un remplacement. La circonstance que la grue dont le nouveau camion est équipé permet d'éviter d'avoir recours, pour certaines opérations de dépannage, à une grue externe, est sans incidence à cet égard.
4. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que l'acquisition du camion de dépannage en cause ne saurait être regardée comme ayant permis à la société requérante, qui était en mesure d'effectuer les mêmes opérations de dépannage avant cette acquisition, en ayant le cas échéant recours à une grue externe, d'étendre les capacités de son établissement ou de diversifier sa production au sens de l'article 2 du règlement (UE) n° 651/2014. Ainsi, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, le camion de dépannage, qui ne constituait pas un investissement initial mais un remplacement, n'était pas éligible au crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater E du code général des impôts.
5. En second lieu, aux termes du point 7 de l'article 14 du règlement (UE) n° 651/2014 : " (...) En ce qui concerne les aides octroyées en vue de la diversification des activités d'un établissement existant, les coûts admissibles doivent excéder d'au moins 200 % la valeur comptable des actifs réutilisés, telle qu'enregistrée au cours de l'exercice précédant le début des travaux ".
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la SARL Dépannage Location Mécanique Corse ne saurait être regardée comme ayant diversifié les activités de son établissement grâce à l'achat du nouveau camion de dépannage. Par suite et en tout état de cause, elle ne peut utilement soutenir que ce camion serait éligible au crédit d'impôt pour investissement en Corse dans la mesure où le coût de cette nouvelle immobilisation dépasse de plus de 200 % la valeur de l'immobilisation cédée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Dépannage Location Mécanique Corse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par voie de conséquence être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Dépannage Location Mécanique Corse est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Dépannage Location Mécanique Corse et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020, où siégeaient :
- Mme B..., présidente de la Cour,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
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N° 19MA01064
nc