Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement la société Orange et l'Etat à lui verser, d'une part, la somme de 118 653,27 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis dans le déroulement de sa carrière et, d'autre part, la somme de 2 006,76 euros par mois au titre du préjudice de retraite, ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable et de leur capitalisation.
Par un jugement n° 1600049 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 avril 2018, M. D..., représenté par la SCP Pellegrin-Soulier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 mars 2018 ;
2°) de condamner solidairement la société Orange et l'Etat à lui verser, d'une part, la somme de 118 653,27 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis dans le déroulement de sa carrière et, d'autre part, la somme de 2 006,76 euros par mois au titre du préjudice de retraite, ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la société Orange et de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- il n'a pu bénéficier d'aucune promotion interne dès lors qu'aucun concours n'a été organisé à cette fin par son employeur, en méconnaissance de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 ;
- il remplissait les conditions pour bénéficier d'une promotion interne au grade III.2 ;
- en ne veillant pas au respect des dispositions de la loi du 11 janvier 1984, la société Orange et l'Etat ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité ;
- il a subi un préjudice en raison du blocage de sa carrière ;
- il a subi un préjudice moral ainsi que des troubles dans ses conditions d'existence ;
- il a subi un préjudice lié à " l'exécution déloyale de la relation de travail ".
Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2019, ainsi qu'un mémoire non communiqué enregistré le 13 février 2020, la société Orange, représentée par l'AARPI de Guillenchmidt et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est insuffisamment motivée ;
- les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 octobre 2019, le ministre de l'économie et des finances, représenté par la SCP Roth-Pignon, Leparoux et associés, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 93-515 du 25 mars 1993 ;
- le décret n° 2004-768 du 29 juillet 2004 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., fonctionnaire des postes et télécommunications depuis 1975, a été intégré dans l'un des nouveaux corps de France Télécom créés en 1993 et a opté en faveur d'un grade dit de " reclassification ". L'intéressé a été promu au grade d'agent de maîtrise de niveau II.3 en 1995 et a conservé ce grade jusqu'à la fin de sa carrière en 2016. Par lettre du 2 septembre 2015, M. D... a saisi le président directeur général de la société Orange, venue aux droits de France Télécom, ainsi que le ministre de l'économie et des finances, d'une demande tendant à obtenir, d'une part, sa promotion au grade de niveau III.2 et, d'autre part, réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du blocage de sa carrière. A la suite du rejet implicite de sa demande, il a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement la société Orange et l'Etat à réparer les différents préjudices qu'il estime avoir subis. M. D... relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement :
2. A supposer que M. D..., en indiquant qu'" il n'a pas été répondu aux moyens développés " dans sa demande de première instance, ait entendu arguer de l'irrégularité du jugement au regard des exigences de l'article L. 9 du code de justice administrative, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par l'intéressé, ont écarté l'ensemble de ses moyens aux points 3 à 5 du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...), mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Examen professionnel ; / 2° Liste d'aptitude établie après avis de la commission administrative paritaire du corps d'accueil, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents (...) ".
4. D'une part, il résulte des dispositions de l'article 5 du décret du 25 mars 1993, relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des cadres de La Poste et au corps des cadres de France Télécom, et de celles de l'article 4 du décret du 29 juillet 2004, relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des cadres de France Télécom, que les cadres de premier niveau de France Télécom peuvent être recrutés notamment par la voie d'un concours interne ouvert aux agents de maîtrise.
5. D'autre part, à supposer que M. D... ait entendu soutenir que la promotion par voie de nomination, suivant l'une des modalités prévues par les dispositions citées au point 3, n'aurait pas été mise en oeuvre par France Télécom, il n'assortit pas ses allégations sur ce point de précisions suffisantes. Au demeurant, l'article 4 du décret du 29 juillet 2004 prévoit que les cadres de premier niveau de France Télécom peuvent être recrutés à l'issue d'un examen professionnel réservé à certains fonctionnaires de cette société devenue la société Orange.
6. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que M. D... n'est pas fondé à soutenir que les modalités de promotion interne des fonctionnaires ayant choisi d'intégrer les corps dits de " reclassification " de France Télécom, seraient contraires aux dispositions de la loi du 11 janvier 1984. L'intéressé, qui ne fait état d'aucun élément probant de nature à établir que son employeur aurait commis une faute en ne mettant pas effectivement en oeuvre ces modalités de promotion interne, n'est pas davantage fondé à soutenir que le ministre compétent aurait commis une faute en ne veillant pas au respect de ces dispositions.
7. En second lieu, si M. D... soutient que, compte tenu de ses compétences et de son expérience, il aurait dû être promu au grade III.2, par le biais d'une promotion par " reconnaissance des compétences " ou par " parcours qualifiant ", il n'assortit pas ses allégations sur ce point de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par ailleurs, l'intéressé n'établit pas avoir présenté sa candidature à l'un des concours internes ou à l'un des examens professionnels organisés par son employeur en vue de favoriser la promotion interne des agents de maîtrise à ce grade correspondant à un poste de cadre de premier niveau. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la société Orange aurait commis une faute en s'abstenant de le promouvoir au grade III.2.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société Orange, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge solidaire de la société Orange et de l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. D.... Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Orange sur le fondement de ces dispositions.
10. La présente instance ne comporte pas de dépens. Dès lors, les conclusions de M. D... tendant à la condamnation de la société Orange aux dépens ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à la société Orange et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président de chambre,
- Mme C..., première conseillère,
- M. B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
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N° 18MA01679