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01/10/2020 | FRANCE | N°18MA05342

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 01 octobre 2020, 18MA05342


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A..., Mme H... A... et M. E... A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 11 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Bouzigues a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1704326 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 18 décembre 2018, 21 janvier, 12 mars, 13 m

ars, 26 avril et 19 juin 2019, les consorts A..., représentés par la SCP Waquet, Farge, Haza...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A..., Mme H... A... et M. E... A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 11 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Bouzigues a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1704326 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 18 décembre 2018, 21 janvier, 12 mars, 13 mars, 26 avril et 19 juin 2019, les consorts A..., représentés par la SCP Waquet, Farge, Hazan, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du 11 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Bouzigues a approuvé le plan local d'urbanisme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bouzigues la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a omis de statuer sur certains moyens ;

- le jugement est suffisamment motivé ;

- les dispositions des articles L. 300-2 et L. 153-19 du code de l'urbanisme sont méconnues ;

- l'extension des zones à urbaniser méconnait les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, est incompatible avec le SCOT du bassin de Thau et méconnait le principe d'équilibre énoncé à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- le classement de la parcelle AB 79 en zone AP est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'exclusion de trois parcelles dont la parcelle AA 28 du périmètre de la zone à urbaniser du Moulin est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone naturelle de parcelles destinées à terme à être transformées en parking est entaché de détournement de procédure, de détournement de pouvoir et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'exclusion des arbres plantés autour du Moulin à vent de la liste des espaces boisés classés est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit ;

- les délibérations des 12 avril et 26 octobre 2016 méconnaissent les dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 avril 2019, la commune de Bouzigues, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de première instance était irrecevable faute d'avoir été motivée dans le délai de recours contentieux ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales est irrecevable et infondé ;

- les autres moyens sont infondés.

Un courrier du 21 janvier 2019 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 1er octobre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire a été présenté pour les consorts A..., enregistré le 1e octobre 2019, soit postérieurement à cette clôture d'instruction, et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Mme D... A....

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts A... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 11 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Bouzigues a approuvé le plan local d'urbanisme.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, si les appelants soutiennent, dans leur requête sommaire, que le tribunal aurait omis de statuer " sur un certain nombre de moyens ", ils n'apportent aucune précision à l'appui de cette allégation, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le tribunal aurait omis de statuer sur un moyen soulevé en première instance.

3. D'autre part, le tribunal administratif a répondu, en son considérant 33, au moyen tiré de l'incompatibilité du plan local d'urbanisme avec le SCOT du bassin de Thau, en indiquant les raisons pour lesquelles le document d'urbanisme ne méconnaissait pas les objectifs de mise en valeur des richesses paysagères, de limitation de l'étalement urbain et de fragmentation des espaces naturels et agricoles, et en son considérant 36 au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de la parcelle AB 79 en zone agricole protégée, en indiquant notamment, s'agissant des caractéristiques de la parcelle, que celle-ci était exploitée, localisée en grande partie en zone inondable, et présentait un intérêt paysager. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement en litige serait, s'agissant de la réponse à ces deux moyens, insuffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

5. D'une part, comme le soutiennent les appelants, la circonstance que Mme F..., conseillère municipale, est propriétaire d'un terrain classé dans une future zone à urbaniser, dès lors qu'il ne ressort pas du dossier que sa participation à l'élaboration du document d'urbanisme, notamment à la délibération approuvant ce document, a été de nature à exercer une influence sur la délibération, ne saurait suffire à la qualifier de conseiller municipal intéressé au sens des dispositions précitées.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme F... n'a pas participé aux délibérations des 12 avril et 26 octobre 2016 portant respectivement sur le débat sur les orientations du PADD et l'approbation du bilan de la concertation. Les consorts A... soutiennent que Mme F... aurait été exclue des débats et aurait dû sortir, contrainte et forcée, du conseil municipal, ce qui l'aurait privée des discussions et votes sur l'élaboration du plan local d'urbanisme et aurait entaché les délibérations d'incompétence et la procédure d'irrégularité. Toutefois, il ressort de l'extrait du registre des délibérations que Mme F... était absente excusée, sans autre précision, de la séance du 26 octobre 2016. S'agissant de la délibération du 12 avril 2016, le procès-verbal de séance, qui indiquait initialement que Mme F... était absente, a été modifié le 31 mai suivant, à la demande de Mme B..., afin qu'il soit indiqué que l'intéressée était sortie " à la demande du maire ". Une attestation rédigée par l'intéressée près de trois ans plus tard, en mars 2019, mentionne que le maire aurait exigé qu'elle sorte malgré la réaction des autres élus. Or, à supposer que Mme F... aurait effectivement été forcée de quitter la salle lors du débat sur les orientations du PADD, cette circonstance n'a pu exercer aucune influence sur le sens de la délibération en litige ni priver l'intéressée d'une garantie dès lors qu'il n'est pas établi que celle-ci n'aurait pu exercer normalement sa mission lors de l'approbation du plan local d'urbanisme, cette conseillère étant en effet présente et ayant pu voter utilement contre l'approbation du document. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la délibération serait entachée d'un vice de procédure du fait de l'évincement irrégulier d'une conseillère municipale.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Il résulte de ces dispositions que le plan local d'urbanisme d'une commune littorale peut prévoir l'extension de l'urbanisation soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, soit en délimitant une zone destinée à l'accueil d'un hameau nouveau intégré à l'environnement.

8. Aux termes de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec : 1° Les dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres I et II du titre II ou les modalités d'application de ces dispositions particulières lorsqu'elles ont été précisées pour le territoire concerné par une directive territoriale d'aménagement prévue par l'article L. 172-1 ". En vertu de l'article L. 131-4 : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ".

9. Enfin, aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux ; c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; d) La sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel ; e) Les besoins en matière de mobilité ".

10. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, pour l'application de la loi " littoral ", le SCOT du Bassin de Thau a délimité sur la commune de Bouzigues une enveloppe correspondant à l'agglomération support d'extension urbaine. Les secteurs de Moulin à vent, Chemin du Bosc, Moulin Neuf et Avenue Bouat dont l'urbanisation est prévue par le plan local d'urbanisme, sont situés en continuité directe de cette enveloppe urbaine, chacun de ces secteurs étant directement relié à des secteurs urbanisés comportant un nombre et une densité suffisamment importante de constructions. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté le moyen tiré de ce que l'urbanisation de ces secteurs méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 121-8 précité.

11. D'autre part, le SCOT du Bassin de Thau comporte notamment pour objectif de " contenir et organiser le développement urbain ", " freiner l'étalement urbain et les consommations foncières " en consolidant les polarités existantes et en utilisant tout le potentiel de renouvellement, de " concentrer le développement urbain et limiter la fragmentation des espaces naturels et agricoles ", d' " encadrer strictement l'urbanisation dispersée et le mitage par cabanisation " ou encore de " rationaliser la consommation foncière en produisant des formes urbaines compactes et intégrées ". Il ressort des pièces du dossier que, pour faire face à l'objectif de conforter l'attractivité de la commune et de favoriser la mixité sociale en atteignant 2 200 habitants en 2030 et en créant deux cent dix logements supplémentaires, la commune a prévu en premier lieu de réaliser les constructions au sein de l'enveloppe urbaine disponible, par la mobilisation des dents creuses et des logements vacants, la densification à travers le redécoupage parcellaire et la mutation du tissu urbain. Face à ces possibilités limitées, notamment en comblement de dents creuses du fait de la rétention foncière de certains propriétaires, la commune a ensuite décidé d'ouvrir cinq secteurs à l'urbanisation, qui seront aménagés dans le cadre d'opération d'ensemble et ont donné lieu à des orientations d'aménagement et de programmation. Toutefois cette consommation foncière sur des espaces naturels ou agricoles reste limitée, comme le démontrent d'ailleurs les objectifs de limitation de consommation de l'espace qui sont conformes aux prévisions du SCOT. Il ressort par ailleurs du rapport de présentation que la commune a entendu préserver les espaces agricoles compte tenu notamment de leur intérêt paysager et de leur participation à la définition de la silhouette du village ainsi que les espaces naturels, en particulier ceux situés en espaces remarquables, au sein des Trames bleue et verte ou délimités en tant que coupures d'urbanisation par le SCOT. Dans ces conditions, l'extension de l'urbanisation prévue, qui reste limitée à l'échelle du territoire de la commune, n'est pas incompatible avec les objectifs précités du SCOT et ne méconnait pas le principe d'équilibre prévu par les dispositions de l'article L. 102-1 précité.

12. Enfin, le rapport de présentation du plan local d'urbanisme indique que l'extension de l'urbanisation dans les secteurs retenus est compatible avec le SCOT dès lors que la desserte par les différents réseaux est possible. Contrairement à ce qui est soutenu, les personnes publiques associées, notamment le préfet ou l'ARS, qui ont indiqué que l'alimentation en eau potable était possible sous réserve de la mise en place d'une nouvelle station de potabilisation et de forages pour lesquels les travaux ne sont actuellement pas programmés, n'ont nullement considéré que les secteurs ne pouvaient être desservis par les réseaux. En outre, les requérants n'apportent aucun élément de nature à démontrer que la desserte par les divers réseaux serait impossible ou que la desserte en voirie ne pourrait s'effectuer dans des conditions satisfaisantes, notamment s'agissant du secteur de l'Avenue Bouat classé en zone UCc. Enfin, le classement en zone 2 AU des quatre autres secteurs en OAP, qui suppose que les réseaux existants ne soient pas encore suffisants pour desservir l'ensemble des zones en question, nécessitera, avant leur ouverture à l'urbanisation, une modification du document d'urbanisme lorsque la capacité de ces réseaux sera suffisante. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'urbanisation de ces secteurs méconnaîtrait, pour ces dernières raisons, le principe d'équilibre ou serait incompatible avec le SCOT du Bassin de Thau.

13. En troisième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 112-2 du code rural et de la pêche maritime : " Des zones agricoles dont la préservation présente un intérêt général en raison soit de la qualité de leur production, soit de leur situation géographique, soit de leur qualité agronomique peuvent faire l'objet d'un classement en tant que zones agricoles protégées. Celles-ci sont délimitées par arrêté préfectoral pris sur proposition ou après accord du conseil municipal des communes intéressées (...).

14. Les requérants ne peuvent utilement soutenir que le classement de la parcelle AB 79 en zone Ap méconnaitrait les dispositions précitées en ce que la préservation de cette parcelle ne présenterait aucun intérêt général en raison de la qualité de leur production, de leur situation géographique, ou de leur qualité agronomique, dès lors que de telles dispositions sont applicables au classement en zone agricole protégée par arrêté préfectoral et non au classement, par un plan local d'urbanisme, en zone agricole, sous-secteur protégé.

15. D'autre part, aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme applicable au projet : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

16. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle AB 79 a été classée en zone agricole protégée Ap, zone réservée aux espaces agricoles d'intérêt paysager. Le rapport de présentation indique que cette parcelle, d'une superficie importante et située au coeur du village, comporte une vigne toujours exploitée et constitue un ensemble paysager remarquable et de grande valeur en raison de la présence des vignes accompagnées d'éléments de patrimoine et de murs de clôtures en pierre. Si les requérants indiquent que le bâtiment qu'ils ont construit dans les années 2 000 n'est pas un bâtiment traditionnel ou un bâtiment remarquable, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation, de la carte graphique et de l'annexe n° 1 au règlement répertoriant les éléments patrimoniaux à préserver, que la commune a entendu préserver deux éléments présentant un intérêt patrimonial, le vieux puits des Aiguilles, situé à proximité sur le chemin du Ravin des Aiguilles, ainsi que le mur en pierre des Aiguilles ceinturant cette grande parcelle de vignes. Il ressort des pièces du dossier que cette parcelle ainsi que les éléments ainsi décrits présentent un intérêt paysager à préserver. La circonstance que la parcelle, d'une superficie importante, est située au coeur du village et à proximité des zones urbanisées, alors qu'elle est également située à proximité d'une zone naturelle longeant le ravin des Aiguilles, n'est pas de nature à entacher son classement en zone Ap d'erreur manifeste d'appréciation. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement de la parcelle AB 79 ne peut donc qu'être écarté.

17. En quatrième lieu, le plan local d'urbanisme prévoit la création d'une zone à urbaniser dite du Moulin à vent dont le périmètre initialement envisagé, comprenant 3 parcelles à l'ouest dont la parcelle cadastrée AA 28 appartenant aux requérants, a été réduit. Les requérants, qui ne peuvent utilement soutenir que leur parcelle aurait dû être classée en zone à urbaniser, et qui ne contestent pas par ailleurs le classement en zone agricole protégée de leur parcelle, soutiennent que la réduction du périmètre de la zone à urbaniser en cours d'élaboration du document d'urbanisme serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Lors de l'élaboration du document d'urbanisme, le préfet a demandé à la commune de réduire la surface de la zone à urbaniser du Moulin à vent sur sa partie ouest pour prendre en compte le cône de vue entre la RD 613 et l'étang de Thau. Il ressort en effet des pièces du dossier, notamment des photographies produites par la commune ainsi que de la carte graphique du SCOT intitulée " préserver le paysage identitaire du bassin de Thau ", reprise dans le rapport de présentation, que ces parcelles sont concernées par un cône de vue majeur sur l'étang de Thau. La circonstance que les parcelles seraient situées en contrebas de la route départementale n'est pas de nature à remettre en cause la nécessaire protection de ce cône de vue, et par suite, l'exclusion des parcelles de la zone à urbaniser. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés, en tout état de cause, à soutenir que la réduction du périmètre de la zone 2 AU du Moulin à vent serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

18. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme applicable au projet : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

19. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle AB 237 a été classée en zone naturelle. Cette parcelle, à l'état naturel et située à proximité du chemin des Aiguilles, ne présente, contrairement à ce qui est soutenu, qu'un potentiel grande culture moyen. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à démontrer que les caractéristiques de la parcelle, dont le potentiel agricole n'est pas démontré, ferait obstacle à un classement en zone naturelle. En outre, il ne ressort pas de la seule lettre d'observation présentée par Mme A... lors de l'enquête publique que la commune envisage de créer un parking sur la parcelle AB 237 dans le cadre de son agenda 21. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le classement de la parcelle AB 237 serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir et de procédure.

20. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. ". En vertu de l'article L. 121-27 du même code, applicable aux communes littorales : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. ".

21. Il ressort du rapport de présentation que la commune a répertorié six espaces boisés classés significatifs au titre de la loi littoral ainsi que deux espaces boisés classé non significatifs. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à la configuration des lieux et au caractère des trois pins d'Alep situés à proximité du Moulin à vent, par rapport aux autres espaces boisés de la commune, que ces trois arbres feraient partie des parcs et ensembles les plus significatifs de la commune de Bouzigues et auraient ainsi dû être classés en EBC au titre de l'article L. 121-27 précité. D'autre part, la circonstance que ces trois pins, qui seraient âgés de soixante ans, sont situés à proximité du Moulin à vent, répertorié comme élément de patrimoine bâti, alors qu'ils sont par ailleurs situés dans une zone où le maintien ou le remplacement des arbres de haute tige est une obligation, n'est pas de nature à établir que l'absence de classement de ces arbres en espace boisé classé serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant l'absence de classement en espace boisé classé de ces arbres doit être écarté.

22. En treizième et dernier lieu, les moyens tirés de l'absence de respect des modalités de la concertation et de l'irrégularité de l'enquête publique doivent être écartés pour les motifs exposés aux points 8 à 21 du jugement en litige, qui n'appellent pas de précisions en appel.

23. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que les consorts A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif a rejeté leur demande en annulation de la délibération du 11 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Bouzigues a approuvé le plan local d'urbanisme.

Sur les frais exposés dans l'instance :

24. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais exposés sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête des consorts A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., Mme H... A... et M. E... A... et à la commune de Bouzigues.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020 où siégeaient :

- M. Poujade, président

- M. Portail, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

2

N° 18M05342

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18MA05342
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SCP WAQUET-FARGE-HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-10-01;18ma05342 ?
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