La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2020 | FRANCE | N°19MA05520

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 29 septembre 2020, 19MA05520


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée.

Par un jugement n° 1902144 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête enregistrée le 13 décembre 2019, Mme C..., représentée par Me B.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée.

Par un jugement n° 1902144 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 décembre 2019, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 28 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à venir, ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il comporte une date erronée d'enregistrement de sa demande ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'irrégularité de la délégation de signature ;

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa demande et a commis plusieurs erreurs de droit à cet égard ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et le tribunal a commis une erreur de droit ;

- la décision de refus de titre de séjour et la mesure d'éloignement méconnaissent le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les observations de Me B..., représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 juin 2019 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité invoqué, Mme C... est fondée à soutenir que ce jugement est irrégulier et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. En premier lieu, par un arrêté du 8 juin 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Hérault, M. Pascal Othéguy, secrétaire général de cette préfecture et signataire de l'arrêté contesté, a reçu délégation à l'effet de signer notamment tous les actes administratifs relatifs au séjour et à la police des étrangers. Cette délégation n'est, contrairement à ce que soutient Mme C..., ni trop générale ni absolue. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet de l'Hérault a estimé que la demande de titre de séjour de Mme C... était présentée tant au titre de la vie privée et familiale qu'en qualité de salarié et a recherché si l'intéressée pouvait soit se voir délivrer un titre de séjour de plein droit soit bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour sur ces deux fondements.

6. D'une part, il résulte de la combinaison des articles 3 et 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, des articles L. 111-2 et L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile, auquel cet accord ne déroge pas, et des articles R. 5221-1, R. 5221-3, R. 5221-11, R. 5221-14 et R. 5221-15 du code du travail que, si la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord franco-marocain, la délivrance à un tel ressortissant du titre de séjour portant la mention " salarié " prévu à l'article 3 de cet accord est subordonnée, en vertu de son article 9, à la condition, prévue à l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la production par ce ressortissant d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois.

7. En l'absence de production, par Mme C..., d'un visa de long séjour et dès lors que l'intéressée était en situation irrégulière, le préfet de l'Hérault a pu, sans commettre d'erreur de droit, rejeter sa demande de titre de séjour portant la mention " salarié " au seul motif qu'elle ne présentait pas un tel visa, sans exiger la délivrance préalable d'une autorisation de travail accordée par l'autorité administrative compétente dans les conditions et selon les modalités fixées par le code du travail.

8. D'autre part, les stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.

9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault, qui a estimé que le contrat de travail présenté par Mme C... en qualité d'employée familiale ne constitue pas un motif exceptionnel d'admission au séjour, n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de l'intéressée sur ce point, ni qu'il aurait méconnu l'étendue de son pouvoir de régularisation.

10. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C... avant de rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile.

11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7, 9 et 10 que le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen complet de la demande de titre de séjour de Mme C... et de ce qu'il aurait commis plusieurs erreurs de droit à cet égard doit être écarté en toutes ses branches.

12. En troisième lieu, s'il ressort des pièces du dossier que Mme C... exerce une activité professionnelle à temps partiel chez un particulier depuis 2016 et qu'elle a conclu avec celui-ci un contrat à durée indéterminée, également à temps partiel, en 2018, ces éléments ne suffisent pas à établir qu'en refusant de régulariser sa situation au titre du travail, le préfet de l'Hérault aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

13. En quatrième et dernier lieu, Mme C... soutient qu'elle réside en France depuis plus de cinq ans, que plusieurs membres de sa famille y vivent également et qu'elle bénéficie d'une bonne insertion professionnelle et personnelle sur le territoire français. Toutefois, la requérante, qui est célibataire et sans charge de famille, n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, compte tenu en particulier des conditions du séjour en France de Mme C... et en dépit de ses efforts d'insertion professionnelle, l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour et la mesure d'éloignement en litige méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Il en va de même du moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 28 janvier 2019. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 juin 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., au ministre de l'intérieur et à Me B....

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près du tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme E..., première conseillère,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.

5

N° 19MA05520


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05520
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-29;19ma05520 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award