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22/09/2020 | FRANCE | N°20MA00814

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 22 septembre 2020, 20MA00814


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé une interdiction de retour pour une durée de quatre mois et a fixé des mesures de surveillance.

Par un jugement n° 1903956 du 3 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête

de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé une interdiction de retour pour une durée de quatre mois et a fixé des mesures de surveillance.

Par un jugement n° 1903956 du 3 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2020, et un mémoire complémentaire enregistré le 14 mai 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 septembre 2019 du tribunal administratif de

Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 portant les décisions attaquées du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- suite à l'échec d'une procédure d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, par son caractère automatique, est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation, notamment caractérisée par le fait qu'il souffre d'une affection de longue durée dite neuropathie Charcot Marie-Tooth ;

- en raison de sa prise en charge médicale en France, la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions des articles L. 313-14 et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en outre, n'ayant pas sollicité de titre de séjour " étranger malade " au titre de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal a commis dès lors une erreur de droit ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen et d'une erreur de droit au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant ayant indiqué encourir des risques en cas de retour dans son pays d'origine, lesquels n'ont pas été examinés par le préfet ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français de quatre mois est entachée d'illégalité dès lors qu'elle se fonde sur une décision portant obligation de quitter le territoire français qui est illégale ;

- celle-ci est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1- III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les mesures de surveillance prononcées à son encontre sont entachées d'un vice d'incompétence ;

- en raison de sa maladie il ne peut respecter les obligations de pointage au commissariat ; en ne prenant pas en compte son état de santé, le préfet qui s'est cru à tort en situation de compétence liée, a entaché sa décision d'un défaut d'examen réel et complet et de motivation et, en outre, a méconnu les dispositions de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête comme n'étant pas fondée et s'en remet à l'argumentation qu'il a déjà exposée en première instance.

Par une décision du 29 novembre 2019, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à

M. C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Badie, président rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité géorgienne, relève appel du jugement du

3 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé une interdiction de retour pour une durée de quatre mois et a fixé des mesures de surveillance.

2. En premier lieu, M. C... reprend en appel à l'encontre de l'arrêté attaqué portant sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination, et prononçant une interdiction de retour pour une durée de quatre mois, les moyens tirés du défaut d'examen, de motivation, d'incompétence, de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des dispositions des articles L. 313-14, L. 511-1 III,

L. 513-2 et L. 511- 4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sans les assortir d'aucun élément complémentaire ou déterminant. S'il invoque son état de santé concernant sa maladie neurologique au soutien du moyen relatif aux dispositions de l'article L. 511-4 10°, il ressort des pièces du dossier que les documents médicaux produits par le requérant ne permettent pas d'établir que le défaut de prise en charge médicale pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni que cette prise en charge ne pourrait être assurée dans son pays d'origine, comme l'a considéré à bon droit le premier juge dans le jugement attaqué. En outre le certificat médical du 16 septembre 2019 du docteur Somrani, produit en appel, mentionne que l'état de santé de M. C... nécessite un suivi spécialisé régulier mais n'indique pas l'indisponibilité d'un traitement dans le pays d'origine. Enfin le requérant, dont la demande d'asile a été rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 avril 2019, ne démontre pas, tant en première instance qu'en appel, les risques actuels, directs et personnels qu'il encoure en Géorgie. Dès lors, dans ces circonstances, il y a lieu d'écarter l'ensemble des moyens soulevés par M. C... qui ont été précédemment invoqués dans les mêmes termes devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier, par adoption des motifs retenus aux points 3, 5, 6, 8, 9, 11 à 20 de son jugement aussi bien s'agissant de l'obligation de quitter le territoire, de la désignation de la Georgie comme pays de destination que de l'interdiction de retour en France pour une durée de quatre mois.

3. En second lieu, M. C... soutient que la décision relative aux mesures de surveillance est entachée d'un défaut d'examen, d'erreur de droit, et d'insuffisance de motivation.

4. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes desquels : : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ (...) ". Aux termes de l'article R. 513-3 de ce code : " L'autorité administrative désigne le service auprès duquel l'étranger doit effectuer les présentations prescrites et fixe leur fréquence qui ne peut excéder trois présentations par semaine. "

5. L'arrêté litigieux, en ses articles 2 et 3, prononce une mesure d'assignation à résidence et oblige M. C... à se présenter trois fois par semaine au commissariat de police de Montpellier. S'il comporte les éléments de droit et de fait, et n'est donc pas entaché d'un défaut de motivation ni d'examen de la situation particulière du requérant, au regard de son obligation de quitter le territoire dans un délai d'un mois, obligation qu'il n'a du reste pas exécutée, cet arrêté cite néanmoins ainsi l'article L.513-4 précité : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 est astreint (...) ", de manière à faire considérer à tort que le prononcé d'une mesure de surveillance est une obligation et non une faculté pour l'auteur de la décision. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que les mesures de surveillance prises à son encontre sont entachées d'erreur de droit et donc à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué ainsi que des articles 2 et 3 de l'arrêté attaqué.

6. Il résulte de ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué en ce que, en ses articles 2 et 3, il édicte des mesures de surveillance.

7. Le présent arrêt qui annule seulement les mesures de surveillance, n'implique pas nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de la situation de M. C....

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me B..., avocat de M. C..., au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 2 et 3 de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 28 mars 2019 prononçant à l'encontre de M. C... une mesure d'assignation à résidence et l'obligeant à se présenter trois fois par semaine au commissariat de police de Montpellier, sont annulés.

Article 2 : Le jugement n° 1903956 du 3 septembre 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier est réformé ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera à Me B..., avocat de M. C..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

2

N° 20MA00814


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00814
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Alexandre BADIE
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-22;20ma00814 ?
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