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22/09/2020 | FRANCE | N°20MA00254-20MA01019

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 22 septembre 2020, 20MA00254-20MA01019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés du 12 décembre 2019 par lesquels le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1910571 du 20 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le

18 janvier 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés du 12 décembre 2019 par lesquels le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1910571 du 20 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler les arrêtés du 12 décembre 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- il n'a pas été assisté d'un interprète au cours de la procédure ni pu bénéficier d'informations au cours de la procédure, en méconnaissance des articles L. 111-7 à L. 111-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 4 et 5 du règlement Dublin du 26 juin 2013 ;

- il n'a pas été mis à même de présenter ses observations de manière utile et n'a pas bénéficié d'un entretien individuel en violation des dispositions précitées du règlement Dublin ;

- il n'a pas déposé de demande d'asile en Italie ; les décisions sont dès lors entachées d'une erreur de droit et de fait ;

- il réside en France depuis le mois de mai 2019 où il y est bien intégré, bénéficie de soins médicaux et de cours d'apprentissage de français, en exerçant diverses taches notamment auprès de l'association du secours catholique ; les décisions de transfert et d'assignation à résidence sont illégales et portent une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale.

Par un mémoire additionnel, enregistré le 27 août 2020, M. B... fait connaître à la Cour que le préfet des Bouches-du-Rhône lui a remis une attestation de demande d'asile, reconnaissant de fait sa compétence pour statuer sur sa demande d'asile. Il conclut à ce que soit constatée la caducité de l'arrêté en litige, et demande à la Cour d'enjoindre au préfet territorialement compétent d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de trois jours, et de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 3 000 euros au titre des frais d'instance, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par une décision du 21 février 2020, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B....

II. Par une requête, enregistrée le 21 février 2020, sous le n° 20MA01019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement de l'article

L. 521-1 du code de justice administrative la suspension des arrêtés en litige ;

Il soutient que l'urgence due à la nécessité d'un suivi médical, justifie la suspension des décisions préfectorales en litige et qu'il existe un doute sérieux sur leur légalité.

Les requêtes de M. B... ont été communiquées les 3 février et 4 mars 2020 au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire, malgré une mise en demeure de produire adressée le 15 juillet 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Badie, président rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., de nationalité malienne, relève appel du jugement du

20 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 12 décembre 2019 par lesquels le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 20MA00254 et n° 20MA01019 de M. B... présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.

Sur la requête n° 20MA00254 :

Sur les conclusions dirigées contre la décision de transfert :

3. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Il résulte des dispositions de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 que le transfert du demandeur doit s'effectuer au plus tard, dans un délai de six mois, à défaut " l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant ". Ce même article prévoit que " ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois maximum si la personne concernée prend la fuite ".

4. L'introduction d'un recours contre la décision de transfert, sur le fondement du I de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être regardé comme interrompant le délai de six mois prévu à l'article 29 du règlement du 26 juin 2013 jusqu'à la notification du jugement du tribunal administratif. Ce délai court, de nouveau, à compter de la date de la dernière notification de ce jugement, l'appel dépourvu de caractère suspensif n'ayant pas pour effet d'interrompre ce nouveau délai.

5. Il ressort des pièces du dossier que le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder au transfert de M. B... à compter de la décision d'acceptation des autorités italiennes a été interrompu par la présentation, le 13 décembre 2019, de la demande de l'intéressé devant le tribunal administratif de Marseille tendant à l'annulation de la décision de transfert en litige. Compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, ce délai a recommencé à courir à compter de la date de la dernière notification du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a statué sur la demande, soit à compter du 20 décembre 2019. Aucune des parties ne fait valoir que la décision de transfert aurait été depuis exécutée et le préfet des Bouches-du-Rhône ne soutient pas que ce délai aurait été prolongé, étant précisé qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait été emprisonné ou aurait pris la fuite.

6. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté de transfert en litige est devenu caduc au

21 juin 2020 sans avoir reçu de commencement d'exécution. En conséquence, le litige n'ayant plus d'objet, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête M. B....

Sur les conclusions dirigées contre la mesure d'assignation à résidence :

7. M. B..., requérant, critique la légalité de l'arrêté l'ayant assigné à résidence en se bornant à faire valoir qu'il est disproportionné. Par un jugement précisément motivé en son

point 13, le tribunal a écarté l'argumentation développée par M. B.... Il y a lieu, alors que la décision de remise est devenue caduque, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges d'écarter le moyen ainsi renouvelé devant la Cour par le requérant, qui ne présente aucun élément de fait ou de droit nouveau, par rapport à l'argumentation qu'il avait développée devant le tribunal.

Sur la requête n° 20MA01019 :

8. Par le présent arrêt, il est conclu au non-lieu sur la requête d'appel n° 20MA00254. Par conséquent, les conclusions à fin de suspension d'exécution des arrêtés préfectoraux contenant les décisions attaquées, formulées dans la requête n° 20MA01019, sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

10. Le constat de la caducité de l'arrêté de transfert qui constitue le soutien nécessaire du non-lieu à statuer prononcé par le présent arrêt implique, à tout le moins, par l'effet des dispositions précitées de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013, que le préfet des Bouches-du-Rhône, ou le préfet territorialement compétent au regard du lieu de résidence actuel de l'intéressé, enregistre la demande d'asile de M. B..., en application des articles L. 741-1 et

L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, de faire droit à la demande en ce sens de M. B..., dans un délai de trois jours à compter de sa présentation à l'autorité compétente. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande le conseil de M. B..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n° 20MA00254 et

n° 20MA01019 tendant à l'annulation de la décision de transfert et à la suspension des décisions en litige.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône, ou au préfet territorialement compétent au regard du lieu de résidence actuel de l'intéressé, de faire droit à la demande de M. B... en vue de l'enregistrement de sa demande d'asile, dans un délai de trois jours à compter de sa présentation à l'autorité compétente.

Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., à Me C..., au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2020, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2020.

2

N° 20MA00254, 20MA01019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00254-20MA01019
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Alexandre BADIE
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : VARTANIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-22;20ma00254.20ma01019 ?
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