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18/09/2020 | FRANCE | N°18MA03603

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 18 septembre 2020, 18MA03603


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...'em D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par deux recours distincts, d'une part d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre la décision du 11 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 22 663,72 euros, d'autre part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre a rejeté sa réclamation préalable du

7 juin 2016 ainsi que son recours administratif introduit auprès de la com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...'em D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par deux recours distincts, d'une part d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre la décision du 11 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde lui a demandé le remboursement de la somme de 22 663,72 euros, d'autre part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre a rejeté sa réclamation préalable du 7 juin 2016 ainsi que son recours administratif introduit auprès de la commission des recours des militaires le 23 août 2016 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 976 euros en réparation de ses préjudices.

Par un jugement n° 1601838, 1700026 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision implicite de rejet du recours formé par M. D... contre la décision du 11 septembre 2015 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde et a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2018, la ministre des armées demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2018 en tant qu'il annule la décision implicite de rejet de la décision du 11 septembre 2015 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde ;

2°) de fixer le montant de la somme due par M. D... à 21 790,55 euros.

Elle soutient que :

- la créance est fondée ;

- il y a lieu pour le juge saisi d'une décision ayant un caractère pécuniaire, qui relève du plein contentieux, de fixer lui-même le montant des droits et obligations en cause.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2018, M. D..., représenté par Me C..., conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que le montant de la somme réclamée par l'administration soit ramené à 5 447,64 euros, à titre incident à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 7 976 euros correspondant aux préjudices subis, et demande que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que la requête est irrecevable, que la créance n'est pas justifiée et comporte des erreurs et qu'il justifie des préjudices qu'il a subis à raison de la faute commise par l'administration.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions indemnitaires incidentes présentées par M. D... se rapportent à un litige distinct de l'appel principal et sont par suite irrecevables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 59-1193 du 13 octobre 1959 ;

- le décret n° 97-215 du 10 mars 1997 ;

- le décret n° 97-900 du 1er octobre 1997 ;

- le décret n° 2006-1642 du 20 décembre 2006 ;

- l'arrêté du 28 mars 2012 fixant par situation et par pays ou par localité les coefficients servant au calcul des majorations familiales servies à l'étranger pour enfant à charge ;

- l'arrêté du 25 juillet 2012 fixant les taux annuels de l'indemnité pour charges militaires ;

- l'arrêté du 28 décembre 2012 fixant les taux annuels de l'indemnité forfaitaire de congé des militaires pour l'année 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. Par lettre du 11 septembre 2015, le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde, après avoir rappelé que les nombreux dysfonctionnements du calculateur de la solde dit " Louvois " avaient entraîné, pour la majeure partie du personnel militaire, le paiement de soldes ne correspondant pas aux droits réels de chacun, a informé M. D..., capitaine de l'armée de terre qui a exercé ses fonctions au Gabon du 5 juillet 2011 au 5 juillet 2013, qu'il était redevable, en rapprochant les indemnités diverses qui lui ont été indûment versées au cours de la période du 30 septembre 2011 au 30 novembre 2014 et celles auxquelles il avait droit et qui n'ont pas fait l'objet d'un versement, de la somme de 22 663,72 euros. M. D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par deux recours distincts, d'une part d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre cette décision du 11 septembre 2015, d'autre part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre a rejeté sa réclamation préalable du 7 juin 2016 ainsi que son recours administratif introduit auprès de la commission des recours des militaires le 23 août 2016 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 976 euros en réparation de ses préjudices. Par jugement du 29 mai 2018, le tribunal, à l'article 1er, a annulé la décision implicite de rejet du recours formé par M. D... contre la décision du 11 septembre 2015 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde et, à l'article 2, a rejeté le surplus des demandes. La ministre des armées relève appel de l'article 1er de ce jugement et demande à la Cour de fixer le montant de la créance de M. D... envers l'Etat à la somme de 21 790,55 euros. M. D... demande, à titre incident, la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 7 976 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la recevabilité des écritures :

2. En premier lieu, par décision du 5 septembre 2017, librement consultable sur le site Légifrance, Mme B... E..., conseillère d'administration de la défense, chef du bureau du contentieux de la fonction militaire au ministère de la défense, a reçu délégation de signature à l'effet de signer au nom du ministre, notamment, les recours et mémoires devant les juridictions à l'exception de ceux qui sont présentés devant le tribunal des conflits et le Conseil d'Etat. Elle était dès lors compétente pour signer la requête d'appel.

3. En second lieu, aux termes de l'article R. 811-13 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires prévues par le présent titre, l'introduction de l'instance devant le juge d'appel suit les règles relatives à l'introduction de l'instance de premier ressort définies au livre IV. ". Aux termes de l'article R. 411-1 figurant au livre IV de ce code : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. ".

4. La requête d'appel, qui comporte des conclusions dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 mai 2018, si elle reprend la structure du mémoire en défense présentée par l'administration devant le tribunal, y ajoute toutefois la base légale correspondant à chacune des indemnités concernées par des " trop-perçus " ou des sommes dues et affirme qu'ainsi, la créance est juridiquement fondée. Elle répond dès lors au motif d'annulation retenu par le tribunal tiré de ce que l'administration n'établissait pas que cette créance était certaine dans son principe et son montant et que le moyen tiré de l'absence de bien-fondé de cette créance devait être accueilli. Cette requête est donc suffisamment motivée au regard des dispositions citées au point précédent.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance concernant l'indemnité pour charges militaires :

5. Aux termes de l'article 1er du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires : " 1. L'indemnité représentative de frais dite indemnité pour charges militaires est attribuée aux officiers et militaires non officiers à solde mensuelle, ainsi qu'aux volontaires dans les armées, pour tenir compte des diverses sujétions spécifiquement militaires, et notamment de la fréquence des mutations d'office. / 2. Cette indemnité est acquise : / Aux officiers, sous-officiers de carrière et militaires non officiers à solde mensuelle en activité de service (...) / 3. L'indemnité pour charges militaires varie en fonction du grade, de la situation de famille et des conditions de logement des militaires. ". L'article 3 du même décret énonce que : " Les militaires visés à l'article 1er bénéficient, quelle que soit leur situation de famille, d'un taux de base. / Sous réserve du quatrième alinéa du présent article, les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, conclu depuis au moins deux ans ou ayant un ou deux enfants à charge ou vivant avec leur mère veuve, sous condition qu'elle réside habituellement sous leur toit et ne soit pas assujettie à l'impôt sur le revenu, peuvent bénéficier en plus du taux de base d'un taux particulier correspondant à cette situation de famille (...) ". Selon l'arrêté du 25 juillet 2012 fixant les taux annuels de l'indemnité pour charges militaires, qui n'a pas été produit par la ministre mais qui est librement accessible sur Légifrance, les officiers subalternes qui ne sont pas logés gratuitement et ayant trois enfants à charge bénéficient d'une indemnité d'un montant de 10 712,70 euros correspondant à l'addition d'un " taux de base " d'un montant de 4 222,59 euros et de deux " taux particuliers " d'un montant respectif de 3 349,04 et 3 141,07 euros, soit une indemnité mensuelle d'un montant de 892,73 euros.

6. M. D... ne conteste pas l'affirmation de la ministre selon laquelle il n'avait plus, à compter du 1er janvier 2014, que deux enfants à charge. Dès lors, en application du barème de l'arrêté du 25 juillet 2012, il n'avait seulement droit, à compter de cette date, qu'à une indemnité d'un montant de 7 571,63 correspondant à l'addition du taux de base et du premier des deux taux particuliers, soit une indemnité mensuelle d'un montant de 630,97 euros. Or il résulte de l'instruction que l'intéressé a continué à percevoir, de janvier à novembre 2014, la somme de 892,73 euros. L'administration était par suite fondée à demander à M. D... le remboursement de la somme de 2 879,36 euros correspondant à la différence entre ces deux montants, somme qui lui a été indument versée durant onze mois. Elle a par ailleurs, à bon droit, abandonné la créance résultant de trop-versés pour cette indemnité sur les mois de juillet et août 2013 dès lors que, en vertu de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 dans sa rédaction issue de l'article 94 (V) de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, cette créance était prescrite.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance concernant l'indemnité forfaitaire de congé (partie principale), l'indemnité forfaitaire de congé (majoration conjoint) et l'indemnité forfaitaire de congé (majoration enfant de plus de douze ans) :

7. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 décembre 2006 : " Les militaires relevant au titre de leur affectation des dispositions du décret du 1er octobre 1997 susvisé perçoivent une indemnité forfaitaire de congé, destinée à prendre forfaitairement en charge les frais qu'ils engagent à l'occasion d'un congé administratif annuel pris en cours de séjour, d'une durée minimale de dix jours. / Cette indemnité annuelle est versée au cours du premier semestre de l'année civile, à l'exclusion de l'année au cours de laquelle le militaire rejoint son affectation et celle au cours de laquelle le militaire quitte son affectation. / Elle est remboursée si le militaire, avant la fin de l'année civile au titre de laquelle le droit est ouvert, cesse ses fonctions à l'étranger, ou n'a pris aucun congé, dans les conditions fixées par le premier alinéa du présent article, sauf raison impérieuse de service dûment motivée ". Aux termes de l'article 4 de ce décret : " Le montant de l'indemnité est majoré, sur la base de la situation familiale du militaire déclarée à l'administration au 1er janvier de l'année au titre de laquelle le droit est ouvert : / - de 100 % pour les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité conclu depuis au moins deux ans ; / - de 10 % pour chaque enfant à charge de moins de deux ans, de 70 % pour chaque enfant à charge de deux à moins de douze ans et de 100 % pour chaque enfant à charge âgé de douze ans et plus. / Ces majorations ne s'appliquent pas aux militaires visés par l'article 2. / La notion et les limites d'âge des enfants à charge s'apprécient selon les dispositions de l'article 9 du décret du 1er octobre 1997 susvisé. ". L'arrêté du 28 décembre 2012 fixant les taux annuels de l'indemnité forfaitaire de congé des militaires pour l'année 2012, qui n'a pas été produit par la ministre mais qui est librement accessible sur Légifrance, fixe à 1 412 euros le taux annuel de l'indemnité forfaitaire de congé pour les militaires affectés au Gabon.

8. Il résulte de l'instruction que, alors qu'il a séjourné au Gabon du 5 juillet 2011 au 5 juillet 2013 et qu'il n'avait droit, en vertu des dispositions de l'article 1er du décret du 20 décembre 2006 précité, au versement de l'indemnité forfaitaire de congé des militaires qu'au titre de l'année 2012, soit la somme de 1 412 euros en application des dispositions de l'arrêté du 28 décembre 2012, M. D... a perçu la somme de 3 842,28 euros à ce titre par plusieurs versements entre décembre 2011 et mars 2014. Si l'intéressé conteste avoir effectivement perçu en juillet 2013 la somme de 936,28 euros, qui selon le tableau produit par l'administration apparaît avoir été versée au titre du " PUM ", pour " plan d'urgence ministériel ", il résulte de l'instruction que la ministre a abandonné comme étant prescrite la totalité de la créance résultant de trop-versés pour cette indemnité jusqu'en juillet 2013 inclus. Dans ces conditions, l'administration était fondée à réclamer à M. D... le remboursement de la somme de 1 453,00 euros correspondant au versement indu au titre de cette indemnité en mars 2014.

9. Par ailleurs, l'administration indique elle-même qu'elle est redevable envers M. D... de la somme de 475,72 euros correspondant à la différence entre ses droits au titre de l'indemnité forfaitaire de congé (majoration conjoint) pour l'année 2012 et ce qui lui a été versé, soit 936,28 euros en juillet 2013. L'intéressé conteste cependant avoir perçu cette somme de 936,28 euros et la ministre n'apporte dans l'instance aucun élément permettant d'attester la réalité de ce versement. Il y a lieu dans ces conditions de considérer que l'administration est redevable envers M. D... de la somme de 1 412 euros au titre de cette indemnité, somme venant minorer la créance de l'intéressé.

10. Il en est de même s'agissant de l'indemnité forfaitaire de congé (majoration enfant de plus de douze ans), pour les mêmes montants.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance concernant la majoration familiale à l'étranger et la majoration pour enfant de plus de quinze ans de la majoration familiale étranger :

11. Aux termes des dispositions de l'article 2 du décret du 1er octobre 1997 : " Les émoluments des militaires visés par le présent décret comprennent limitativement : / 1° Au titre de la rémunération principale : /- la solde de base ; / - l'indemnité de résidence à l'étranger, dans le sens de l'article L. 4123-1 du code de la défense. / 2° Au titre des avantages familiaux : / - le supplément familial, dans les conditions définies à l'article 7 du présent décret, pour les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité de plus de deux ans dont le conjoint ou le partenaire n'exerce pas d'activité professionnelle et pour les militaires célibataires, veufs, séparés de corps ou divorcés ayant au moins un enfant à charge ; / - les majorations familiales pour enfant à charge qui tiennent lieu de suppléments pour charges de famille au sens de l'article L. 4123-1 du code de la défense, dans les conditions définies à l'article 8 du présent décret (...)". Aux termes de l'article 8 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout militaire qui a au moins un enfant à charge peut prétendre aux majorations familiales, quel que soit le lieu de résidence de cet enfant. / Le montant de ces majorations est obtenu par l'application d'un coefficient au montant du traitement brut soumis à retenue pour pension afférent à l'indice brut 585. Ce montant est majoré de 25 % pour les enfants âgés de dix à quinze ans et de 50 % pour les enfants âgés de plus de quinze ans. / Les coefficients applicables pour chaque enfant à charge sont prévus, pour chaque pays, par l'arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre des affaires étrangères pris pour l'application du troisième alinéa de l'article 8 du décret du 28 mars 1967 susvisé. (...) ". L'arrêté du 28 mars 2012 fixant par situation et par pays ou par localité les coefficients servant au calcul des majorations familiales servies à l'étranger pour enfant à charge, qui n'a pas été produit par la ministre mais qui est librement accessible sur Légifrance, fixe pour le Gabon les taux de 0,2741, de 0,3427 et de 0,4112 selon que l'enfant est âgé de moins de 10 ans, de 10 à 15 ans ou de plus de 15 ans.

12. L'indice brut 585 correspond à l'indice majoré 494 et la valeur du point d'indice était, pour la période en cause, de 4,63029 euros. Le montant du traitement brut auquel doit être appliqué le coefficient prévu à l'article 8 du décret du 1er octobre 1997 précité pour obtenir le montant de la majoration familiale à l'étranger était donc de 2287,37 euros. M. D... ne conteste pas l'affirmation de la ministre selon laquelle il n'avait plus, durant son séjour au Gabon, qu'un enfant à charge âgé de plus de quinze ans. Il avait ainsi droit, par application du taux de 0,2741 fixé par l'arrêté du 28 mars 2012, majoré de 50 %, aux sommes mensuelles de 626,97 et 313,49 euros, respectivement au titre de la majoration familiale à l'étranger et de la majoration pour enfant de plus de quinze ans de la majoration familiale étranger.

13. M. D... ne conteste pas avoir perçu, au titre de la majoration familiale à l'étranger et de la majoration pour enfant de plus de quinze ans de la majoration familiale étranger, les sommes respectives de 626,97 et de 313,48 euros pour chacun des mois entre octobre 2011 et juin 2013 inclus, les sommes de 83,60 euros et de 41,80 euros pour le mois de juillet 2013 et, alors qu'il n'était plus en service au Gabon, les sommes de 434,87 euros et de 217,43 euros en décembre 2013. Le versement de ces dernières sommes était donc indu. C'est dès lors à bon droit que l'administration a demandé à l'intéressé de lui rembourser les sommes de 309,48 euros et de 154,52 euros correspondant à ces versements indus, minorés des sommes de 125,39 euros et de 62,91 euros correspondant à la différence entre les sommes auxquelles il avait droit au cours de la période d'octobre 2011 à juillet 2013 pour chacune de ces deux majorations et les sommes qui lui ont été effectivement versées.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance concernant l'indemnité de résidence à l'étranger et le supplément familial de solde à l'étranger :

14. Aux termes de l'article 5 du décret du 1er octobre 1997, dans sa rédaction applicable au litige : " L'attribution de l'indemnité de résidence est destinée à compenser forfaitairement les charges liées aux fonctions exercées, aux conditions d'exercice de ces fonctions et aux conditions locales d'existence. / Les montants annuels de l'indemnité de résidence sont prévus, pour chaque pays et par groupe, par l'arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé du budget pris pour l'application de l'article 5 du décret du 28 mars 1967 susvisé. / Un arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé du budget, du ministre de la défense et du ministre chargé de la fonction publique classe les militaires visés par le présent décret dans les groupes d'indemnités de résidence prévus à l'alinéa précédent. / Les montants de l'indemnité de résidence varient en fonction de la durée des services continus dans une même localité d'affectation. Ils sont réduits : / - au-delà de six années révolues, de 25 % ; / - au-delà de neuf années révolues, de 55 % ; / - au-delà de douze années révolues, de 85 %. / Les taux d'ajustement de l'indemnité de résidence, pour tenir compte notamment des variations des changes et du coût de la vie à l'étranger, sont fixés par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé du budget. ". Aux termes de l'article 7 de ce même décret : " Tout militaire marié ou lié par un pacte civil de solidarité dont le conjoint ou le partenaire n'exerce pas d'activité professionnelle, ainsi que le militaire célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, qui a au moins un enfant à charge ouvrant droit aux majorations familiales prévues à l'article 8 ci-dessous, peut prétendre au supplément familial. (...) / Le supplément familial est égal à 10 % de l'indemnité de résidence perçue par le militaire. (...) ".

15. Ces dispositions, citées par la ministre, ne permettent pas à elles-seules de déterminer, au regard de la situation de M. D... durant son séjour au Gabon, le montant de l'indemnité de résidence à l'étranger ni celui du supplément familial de solde à l'étranger auxquelles il a droit. A défaut de toute indication complémentaire sur les éléments qui ont conduit l'administration à fixer ce droit à la somme de 4 739,19 euros pour l'indemnité de résidence à l'étranger et à 473,92 euros pour le supplément familial de solde à l'étranger, les allégations de la ministre selon lesquelles les sommes qui ont été versées à l'intéressé au mois de mars 2014 à titre de régularisation pour ces deux éléments de rémunération, respectivement pour un montant de 18 533,40 et de 1 853,39 euros, l'ont été indûment ne peuvent être tenues pour établies. Les créances correspondant à ces prétendus trop-versés ne sont ainsi pas certaines dans leur montant et ne peuvent dès lors être regardées comme étant fondées.

En ce qui concerne le bien-fondé de la créance concernant l'indemnité exceptionnelle allouée à certains militaires à solde mensuelle :

16. Aux termes de l'article 1er du décret du 10 mars 1997, applicable au litige : " Une indemnité exceptionnelle, non soumise à retenue pour pension, est attribuée aux (...) militaires à solde mensuelle dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent décret. ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " L'indemnité est servie lorsque la rémunération annuelle perçue au titre de l'activité principale au cours de l'année courante, nette de cotisation maladie et de contribution sociale généralisée aux taux appliqués au 1er janvier 1997, est inférieure à cette même rémunération annuelle affectée des taux de cotisation maladie et de contribution sociale généralisée appliqués au 31 décembre 1996. / Le montant de l'indemnité est alors égal à la différence ainsi constatée. / La rémunération annuelle comprend le traitement, l'indemnité de résidence prévue par le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié, le supplément familial de traitement et les primes et indemnités prévues par un texte législatif ou réglementaire en vigueur et assujetties à la contribution sociale généralisée. ".

17. Dans ses écritures d'appel, la ministre, après avoir cité ces dispositions, se borne à indiquer que M. D... est entré en service au sein de l'armée de terre le 1er octobre 1986 et qu'il peut à cet égard prétendre à l'indemnité exceptionnelle, " dont le montant est calculé sur la base de chaque solde et indemnités allouées mensuellement ". Ces seules indications ne permettent pas à la Cour de se prononcer sur le bien-fondé des droits prétendument ouverts à l'intéressé à ce titre entre le 1er janvier 2013 et le 30 novembre 2014 et donc sur la différence entre les montants correspondant à ces droits et les sommes qui lui ont été effectivement versées. La créance correspondant au prétendu trop-versé n'est donc pas certaine dans son montant et ne peut dès lors être regardée comme étant fondée.

En ce qui concerne le versement à M. D... de sommes diverses :

18. Il ressort des tableaux produits par l'administration qu'elle aurait versé à M. D... " hors solde " plusieurs sommes au titre de différentes indemnités pour un total de 4 276,33 euros. Il ressort également d'un extrait du fichier des paiements " PUM " produit par la ministre qu'une somme de 3 880 euros a été versée à l'intéressé le 6 décembre 2013. Si M. D... met en doute l'indication que lui aurait donné l'administration pour justifier le fait que la différence entre le montant prétendument versé et celui effectivement perçu résulterait des cotisations sociales dès lors que le montant perçu est, de manière improbable, un montant " rond ", les avances de soldes effectuées dans le cadre du plan d'urgence ministériel mis en place pour pallier les effets pécuniaires des dysfonctionnements du calculateur de la solde dit " Louvois " sont dérogatoires et sont susceptibles de faire l'objet d'ajustements ultérieurs de cotisations sociales.

En ce qui concerne les cotisations sociales :

19. L'administration indique elle-même qu'elle est redevable, envers M. D..., d'une somme de 1 999,18 euros correspondant au montant des cotisations sociales qui lui seraient dues au regard des remboursements exigés des sommes qu'il aurait prétendument indument perçues. Alors même qu'aucune précision n'est apportée sur les modalités de calcul de cette somme, et en dépit des incertitudes relevées aux points 15 et 17 ci-dessus, il y a lieu de considérer, en l'état, que ladite somme vient minorer la créance de l'intéressé.

20. Il résulte de tout ce qui précède, en ne prenant en compte que les seuls trop-versés pouvant être regardés comme étant établis, qui sont mentionnés aux points 6, 8 et 13 ci-dessus, ainsi que les sommes restant dues à M. D..., qui sont mentionnées aux points 9, 10, et 19, que l'administration est, en l'état, elle-même redevable de la somme de 26,82 euros envers l'intéressé. Par suite, la ministre des armées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a, notamment, annulé la décision du 11 septembre 2015 par laquelle le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde a demandé à M. D... le remboursement de la somme de 22 663,72 euros.

Sur les conclusions incidentes de M. D... :

21. Les conclusions incidentes présentées par M. D... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 7 976 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis constituent un litige distinct de l'appel principal qui tend à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 mai 2018 en qu'il a annulé la décision implicite de rejet de la décision du 11 septembre 2015 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde réclamant à l'intéressé le remboursement de la somme de 22 663,72 euros correspondant à des éléments de rémunération prétendument indûment versés. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les frais liés au litige :

22. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

23. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la ministre des armées est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par M. D... sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à M. D... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. A...'em D....

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 septembre 2020.

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N° 18MA03603

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SCP SVA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Date de la décision : 18/09/2020
Date de l'import : 29/09/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18MA03603
Numéro NOR : CETATEXT000042344713 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-18;18ma03603 ?
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