Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 4 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Collobrières a approuvé son plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 1702002, 1702008 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du 4 mai 2017 en ce que le plan local d'urbanisme classe la parcelle cadastrée section B n° 2115 en secteur Nco dans la partie Sud-Est, non incluse dans la zone d'enjeu majeur pour la protection de la tortue d'Hermann.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 20 novembre 2019, M. B..., représenté par l'AARPI Pierre ESCLAPEZ - Olivier SINELLE-Grégory PILLIARD, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 décembre 2018 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) d'annuler la délibération du 4 mai 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Collobrières une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la convocation des conseillers municipaux n'a pas respecté les dispositions des articles L. 2121-10 et L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales ;
- la délibération attaquée méconnaît l'article L. 1221-13 du code général des collectivités territoriales car les conseillers municipaux n'ont pu prendre connaissance du projet de plan local d'urbanisme que 2 jours avant la réunion du conseil municipal ;
- en méconnaissance de l'article L. 123-1-2 du code de l'urbanisme, le rapport de présentation n'établit pas de diagnostic territorial, il n'analyse pas la consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l'approbation du plan local d'urbanisme, car cette analyse a été faite pour la période de 2003 à 2014, il n'établit pas l'inventaire des capacités de stationnement des véhicules motorisés ;
- la délibération attaquée méconnaît l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme eu égard aux modifications apportées au projet de plan local d'urbanisme après l'enquête publique ;
- le plan local d'urbanisme règlemente des réseaux privés qui ne sont pas visés par l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme ;
- le plan local d'urbanisme n'a pas à régir les plantations des terrains en application de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme ;
- le classement en zone Nco des parcelles cadastrées section F n° 278 et section B n° 2115, anciennement 1972, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 14 octobre 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 20 décembre 2019, la commune de Collobrières, représentée par le cabinet d'avocats In Extenso, demande à la Cour de réformer le jugement attaqué du 18 décembre 2018 en ce qu'il a reconnu une erreur manifeste d'appréciation dans le classement de la partie Sud-Est de la parcelle B n° 2115 en secteur Nco et par voie de conséquence a annulé partiellement le plan local d'urbanisme de la commune de Collobrières, de rejeter la requête d'appel de M. B... et de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le classement en zone Nco de la parcelle B n° 2115 dans sa totalité n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Collobrières.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 4 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de Collobrières a approuvé le plan local d'urbanisme. Par un jugement du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a annulé la délibération du 4 mai 2017 en ce que le plan local d'urbanisme classe la parcelle cadastrée section B n° 2115 dans sa partie Sud-Est en secteur Nco, et a rejeté le surplus de la demande de M. B.... Celui-ci relève appel de ce jugement en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande. La commune de Collobrières, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour d'annuler le jugement du 18 décembre 2018 en ce qu'il a fait partiellement droit à la demande du requérant.
Sur la légalité de la délibération du 4 mai 2017 :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. En premier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 2121-10, L. 2121-11 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme, applicable à la date de la délibération en litige : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services. Il analyse la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l'approbation du plan ou depuis la dernière révision du document d'urbanisme et la capacité de densification et de mutation de l'ensemble des espaces bâtis, en tenant compte des formes urbaines et architecturales. Il expose les dispositions qui favorisent la densification de ces espaces ainsi que la limitation de la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers. Il justifie les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques. Il établit un inventaire des capacités de stationnement de véhicules motorisés, de véhicules hybrides et électriques et de vélos des parcs ouverts au public et des possibilités de mutualisation de ces capacités. ".
4 D'une part, le rapport de présentation comprend en pages 10 et suivantes un diagnostic territorial établi conformément aux dispositions précitées. D'autre part, il analyse l'évolution de la consommation d'espace. La circonstance que cette analyse couvre la période 2003-2014, c'est-à-dire les dix années précédant l'établissement du projet de plan local d'urbanisme, et non la période 2008-2017, n'a pas été de nature à entacher le rapport de présentation d'irrégularité car il ne ressort pas des pièces du dossier une évolution de la consommation d'espace sensiblement différente sur la période 2008-2017. Enfin, le rapport de présentation, qui ne devait pas nécessairement comprendre un relevé chiffré du nombre de places de stationnement existantes, établit en page 40 un diagnostic en matière de capacité de stationnement des véhicules. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 151-4 doit dès lors être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 15321 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 1538 ". Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête. En outre, ces dispositions, qui attribuent au seul conseil municipal la compétence pour arrêter le plan soumis à l'enquête publique, et l'approuver ensuite après modifications éventuelles, font obstacle à ce que le maire en cette qualité propose au cours de l'enquête toute modification du projet soumis, dans l'état adopté par le conseil municipal, à cette enquête.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les " modifications " 5.4 et 5.6 dont fait état le requérant ne concernent que des corrections purement matérielles apportées au plan local d'urbanisme et ne constituent pas des modifications au sens des dispositions précitées. Il en est de même de l'ajout d'une définition dans les annexes du règlement.
7. D'autre part, les modifications listées par la délibération du 20 avril 2017 portent sur des précisions apportées au rapport de présentation, des ajustements en limites de zones, des modifications de faible importance du règlement. En dépit de leur nombre, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces modifications remettent en cause l'économie générale du projet.
8. Enfin, il ressort du rapport du commissaire enquêteur que les modifications proposées par le maire en cours d'enquête publique reprennent certaines des remarques formulées par le représentant de l'État et doivent, dans les circonstances de l'espèce, être regardées comme résultant des avis émis par les autorités consultées et joints au dossier de l'enquête. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme doit dès lors être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne :
9. En premier lieu, aux termes de l'article 12 VI du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme : " Les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016... ". L'article R. 123-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2015, dispose: " Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes :1° Les occupations et utilisations du sol interdites ; 2° Les occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières ; 3° Les conditions de desserte des terrains par les voies publiques ou privées et d'accès aux voies ouvertes au public ; 4° Les conditions de desserte des terrains par les réseaux publics d'eau, d'électricité et d'assainissement, ainsi que, dans les zones relevant de l'assainissement non collectif délimitées en application de l'article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, les conditions de réalisation d'un assainissement individuel ;5° La superficie minimale des terrains constructibles, lorsque cette règle est justifiée par des contraintes techniques relatives à la réalisation d'un dispositif d'assainissement non collectif ou lorsque cette règle est justifiée pour préserver l'urbanisation traditionnelle ou l'intérêt paysager de la zone considérée ; 6° L'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; 7° L'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ; 8° L'implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété ; 9° L'emprise au sol des constructions ; 10° La hauteur maximale des constructions ; 11° L'aspect extérieur des constructions et l'aménagement de leurs abords ainsi que, éventuellement, les prescriptions de nature à assurer la protection des éléments de paysage, des quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger mentionnés au h de l'article R.* 123-11 ; 12° Les obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d'aires de stationnement compatibles, lorsque le plan local d'urbanisme ne tient pas lieu de plan de déplacements urbains, avec les obligations définies par le schéma de cohérence territoriale en application des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 122-1-8 ;13° Les obligations imposées aux constructeurs en matière de réalisation d'espaces libres, d'aires de jeux et de loisirs, et de plantations ; 14° Le coefficient d'occupation du sol défini par l'article R.* 123-10 et, le cas échéant, dans les zones d'aménagement concerté, la surface de plancher nette dont la construction est autorisée dans chaque îlot ; 15° Les obligations imposées aux constructions, travaux, installations et aménagements, en matière de performances énergétiques et environnementales ; 16° Les obligations imposées aux constructions, travaux, installations et aménagements, en matière d'infrastructures et réseaux de communications électroniques. ".
10. D'une part, les dispositions critiquées du plan local d'urbanisme qui règlementent les conditions de collecte des eaux pluviales présentent un lien avec les conditions de desserte des terrains par les réseaux publics d'eau, d'électricité et d'assainissement. Il en est de même des dispositions qui règlementent les forages, les captages, les puits et le traitement des eaux de piscine.
11. D'autre part, les dispositions qui règlementent les citernes présentent un lien avec la règlementation de l'aspect extérieur des constructions.
12. En outre, en imposant des plantations dans la bande de 5 mètres de l'alignement, le règlement se borne à imposer des obligations aux constructeurs en matière de plantations, dans le respect des dispositions de l'article R. 123-9 13° du code de l'urbanisme.
13. Enfin, si le requérant souligne que les règles d'implantation par rapport aux voies et emprises publiques en zone 2AU consistent en un simple renvoi aux règles fixées par une future OAP, cette circonstance est sans influence sur la légalité du plan local d'urbanisme puisque l'ouverture à l'urbanisation des secteurs concernés est subordonnée à une modification ou une révision du plan local d'urbanisme.
14. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme: " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. (...) ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de définir des zones urbaines normalement constructibles et des zones dans lesquelles les constructions peuvent être limitées ou interdites. Ils ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme ou par la qualification juridique qui a pu être reconnue antérieurement à certaines zones sur le fondement d'une réglementation d'urbanisme différente. L'appréciation à laquelle se livrent les auteurs d'un plan local d'urbanisme lorsqu'ils entendent soustraire pour l'avenir des parcelles à l'urbanisation ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts, si elle est entachée d'erreur manifeste ou de détournement de pouvoir.
15. D'une part, si la parcelle cadastrée section F n° 278 est desservie par les réseaux, comporte une construction et est proche de parcelles elles-mêmes bâties, elle s'intègre dans une vaste zone naturelle. Les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en intégrant cette parcelle dans une zone naturelle Nco.
16. D'autre part, si la parcelle cadastrée section B n° 2115, anciennement 1972, est desservie par les réseaux divers et située à proximité d'un lotissement, elle est également intégrée dans une vaste zone naturelle. Elle est classée en zone Nco qui, aux termes du rapport de présentation, représente un intérêt écologique majeur (continuité écologique dont réservoir de biodiversité majeur), et, par son rôle de corridor biologique, permet le maintien des continuités écologiques sur l'ensemble du territoire communal et en relation avec les communes voisines (Réservoir de biodiversité du Massif des Maures). Le rapport de présentation souligne aussi, en page 115, que la délimitation du zonage Nco s'appuie sur les enjeux faunistiques majeurs identifiés par le schéma départemental des espaces naturel à enjeux (SDENE), réalisé par le département et les espaces de sensibilité notable et majeure pour la tortue d'Hermann (espèce emblématique choisie pour le suivie de la Trame Verte et Bleue communale) issus de la cartographie du plan national d'action en faveur de cette espèce. La commune de Collobrières a fait réaliser par un bureau d'études une superposition des documents graphiques du plan local d'urbanisme et du SDENE. Il en résulte que le SDENE inclut la totalité de la parcelle cadastrée section B n° 2115. Alors même que la totalité de cette parcelle, d'une superficie d'environ 9 000 m², ne correspond pas à une zone de sensibilité majeure pour la tortue d'Hermann, les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en la classant entièrement en zone Nco.
17. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la requête de M. B.... En revanche, la commune de Collobrières est fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que le classement en zone Nco de la totalité de la parcelle cadastrée section B n° 2115 n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ainsi qu'il a été dit précédemment. Elle est fondée dès lors à demander l'annulation du jugement du 18 décembre 2018 en tant qu'il a procédé à l'annulation partielle de la délibération du 4 mai 2017.
Sur les frais liés au litige :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Collobrières, qui n'est pas partie perdante, la somme que demande le requérant sur le fondement de ces dispositions. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge M. B... la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Collobrières au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le jugement du 18 décembre 2018 du tribunal administratif de Toulon est annulé en tant qu'il a annulé partiellement la délibération du 4 mai 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune de Collobrières.
Article 3 : M. B... versera à la commune de Collobrières la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Collobrières.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. D... président-assesseur,
- Mme Gougot, premier conseiller;
Lu en audience publique, le 17 septembre 2020.
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N° 19MA00874
hw