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15/09/2020 | FRANCE | N°19MA05110

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 15 septembre 2020, 19MA05110


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 13 novembre 2017 par laquelle le préfet du Gard a rejeté sa demande de regroupement familial présentée en faveur de son épouse.

Par un jugement n° 1800098 du 20 septembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 novembre 2019 et le 27 avril 2020, M. D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 septembre 2019 ;

2°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 13 novembre 2017 par laquelle le préfet du Gard a rejeté sa demande de regroupement familial présentée en faveur de son épouse.

Par un jugement n° 1800098 du 20 septembre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 novembre 2019 et le 27 avril 2020, M. D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 septembre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Gard du 13 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard d'autoriser le regroupement familial sollicité ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet, qui s'est à tort estimé lié par le non-respect de la condition des ressources, a commis une erreur de droit ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle contrevient à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né en 1950 et résidant régulièrement en France depuis 1971, s'est marié en secondes noces avec une compatriote au mois de février 2017. Il a sollicité le bénéfice du regroupement familial en faveur de celle-ci. Cette demande a été rejetée par une décision du préfet du Gard du 13 novembre 2017. Par un jugement du 20 septembre 2019 dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 stipule que : " (...) Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants :

/ 1 - le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille (...) ".

3. Lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial présentée par un ressortissant algérien, le préfet est en droit de rejeter celle-ci dans le cas, notamment, où l'intéressé ne justifierait pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Néanmoins, le préfet, qui dispose d'un pouvoir d'appréciation de la situation personnelle et familiale du demandeur, n'est pas tenu par la condition de ressources prévue par l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, en particulier dans l'hypothèse où un éventuel refus opposé à la demande de regroupement familial porterait une atteinte excessive au droit de l'intéressé de mener une vie familiale normale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ou serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du demandeur.

4. La décision litigieuse, qui relève que les ressources de M. D... sont insuffisantes, indique par ailleurs que l'intéressé a épousé une compatriote en 2017 et qu'aucun enfant n'est issu de leur union. Elle précise, en outre, que la situation particulière de l'intéressé a été examinée et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée aux droits de M. D... au respect de sa vie privée et familiale. Il ressort ainsi des termes de la décision litigieuse que, pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. D..., le préfet du Gard ne s'est pas uniquement fondé sur l'insuffisance de ses ressources. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit, en s'estimant à tort lié par le non-respect de la condition de ressources prévue par les stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ne saurait être accueilli.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a divorcé de sa première épouse en 2016 et qu'il s'est remarié en Algérie, l'année suivante, avec une compatriote au profit de laquelle il a sollicité le bénéfice du regroupement familial. Si l'intéressé soutient que la présence à ses côtés de son épouse actuelle serait indispensable compte tenu de son état de santé, il n'établit pas que l'assistance dont il indique avoir besoin dans la vie quotidienne ne pourrait lui être apportée que par cette dernière, dont le rôle effectif auprès de lui n'est attesté par aucune pièce du dossier, et ce alors que les cinq enfants majeurs nés de sa précédente union vivent en France. Enfin, l'appelant n'établit pas qu'il serait dans l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale en Algérie où son épouse actuelle a toujours vécu. Dans ces conditions, et compte tenu notamment du caractère très récent du mariage de M. D... à la date de la décision attaquée, en rejetant la demande de regroupement familial présentée par ce dernier, le préfet du Gard n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes raisons, la décision litigieuse n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. D....

7. En troisième et dernier lieu, le principe de non-discrimination garanti par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne concerne que la jouissance des droits et libertés reconnus par cette convention et ses protocoles additionnels. La décision litigieuse ne portant pas, ainsi qu'il a été dit, une atteinte disproportionnée au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations combinées des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Au surplus, la condition de ressources exigée de tous les candidats au regroupement familial, y compris de ceux de nationalité algérienne, n'a ni pour objet ni pour effet de créer une discrimination au détriment des étrangers âgés mais tend seulement, d'une manière générale, à permettre de garantir un accueil décent aux personnes désireuses de s'installer en France au titre du regroupement familial.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre de l'intérieur et à Me F....

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020, où siégeaient :

- Mme A..., présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme E..., première conseillère,

- M. B..., premier conseiller.

4

N° 19MA05110


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05110
Date de la décision : 15/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIMON
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : GIRONDON

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-09-15;19ma05110 ?
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