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17/07/2020 | FRANCE | N°19MA04635

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 17 juillet 2020, 19MA04635


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... née C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Etat de destination de la mesure d'éloignement ainsi que la décision du 8 novembre 2018 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1805419 du 19 février 2019, le tribunal administratif de Montpel

lier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... née C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Etat de destination de la mesure d'éloignement ainsi que la décision du 8 novembre 2018 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1805419 du 19 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2019, Mme B... D... née C..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 août 2018 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Etat de destination de la mesure d'éloignement ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " à compter de la notification du présent arrêt et, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me E... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

le jugement attaqué a omis de statuer sur la demande d'annulation du rejet de son recours gracieux ;

- l'arrêté et le rejet du recours gracieux sont entachés d'un défaut d'examen exhaustif de sa situation ;

- le préfet a entaché ces décisions d'erreurs de fait s'agissant de sa situation familiale en lui opposant la circonstance que son frère pouvait aider leur père malade alors que ce frère est décédé depuis le 6 juin 2017, qu'elle réside à Agde et son père à Paris, ou qu'elle n'aurait pas justifié que l'état de santé de celui-ci rendait sa présence indispensable auprès de lui ;

- le préfet a entaché ces décisions d'erreurs de droit en refusant d'examiner sa demande d'admission exceptionnelle au séjour par le travail au motif de l'irrégularité du séjour et de son absence de visa en violation des articles R. 5221-14 et R. 5221-15 du code du travail et faute de prendre en compte d'autres éléments que son contrat de travail ;

- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête de Mme C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance de la présidente de la Cour administrative d'appel de Marseille n° 19MA02527 du 20 septembre 2019, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. F... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222 26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... née C..., ressortissante algérienne, fait appel du jugement du 19 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation des décisions de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 17 août 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant l'Etat de destination de la mesure d'éloignement ainsi que du rejet de son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du point 6 du jugement attaqué que " pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés, les moyens tirés de l'erreur de fait, du défaut d'examen particulier et de l'erreur manifeste d'appréciation dirigés contre la décision du préfet de l'Hérault portant rejet du recours gracieux formé contre l'arrêté du 17 août 2018 ne peuvent qu'être écartés ". Le moyen tiré de ce que le jugement ne se serait pas prononcé sur la demande d'annulation du rejet du recours gracieux de Mme D... doit donc être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault, qui n'était pas tenu de mentionner tous les éléments portés à sa connaissance lors du recours gracieux et à plus forte raison ceux dont il ignorait l'existence à la date de l'arrêté du 17 août 2018, n'aurait pas procédé à un examen particulier et complet de la situation de Mme D....

4. Il ressort du formulaire de demande de titre de séjour du 15 mai 2018 que Mme D... a mentionné la présence, à Saint-Maur-des-Fossés, de son frère, né le 14 août 1973, de nationalité française, sans faire état de ce qu'il était décédé le 6 juin 2017. Si l'intéressée reproche au préfet d'avoir indiqué que son père résidait à Paris et non auprès d'elle à Agde, il ressort du contrat de réexpédition du courrier dont elle se prévaut à cet effet que celui-ci n'a été conclu que le 1er octobre 2018, soit postérieurement aux décisions contestées. Alors que l'arrêté indique que " celle-ci fait valoir les problèmes de santé de son père, sans établir le caractère indispensable de sa présence à ses côtés par des documents médicaux probants ", le certificat médical du 28 septembre 2018 produit en vue de le contredire est également postérieur aux décisions attaquées. En tout état de cause, le préfet de l'Hérault a relevé dans son arrêté la possibilité pour son père de faire appel à une assistance extérieure. Le moyen tiré d'erreurs de fait n'est pas fondé.

5. Aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes les professions et toutes les régions, renouvelable et portant la mention " salariée " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5,7,7bis al. 4 (lettre c et d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...) ". Par ailleurs, le préfet peut toujours exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un ressortissant algérien en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait.

6. Le préfet de l'Hérault a pu légalement refuser la délivrance du certificat de résidence mentionné au b) du 7 de l'accord franco-algérien au motif que Mme D... ne produisait pas le visa long séjour exigé par les stipulations précitées. Il était tout aussi fondé à opposer la situation irrégulière de l'intéressée à supposer une demande de sa part d'admission exceptionnelle au séjour par le travail, présentée sur le territoire français. S'il a indiqué que le contrat de travail conclu le 4 avril 2018 pour un emploi de saisonnier en qualité d'employée pâtisserie et cuisine orientale ne constituait pas en soi un motif exceptionnel d'admission au séjour, il ressort de cette motivation de l'arrêté qu'il a examiné l'opportunité d'une mesure de régularisation au titre du pouvoir discrétionnaire qu'il détient et qu'il exerce à titre gracieux en l'occurrence au regard de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, qui ne saurait au demeurant reprocher que d'autres que ceux produits n'aient pas été pris en compte. Le moyen tiré d'erreurs de droit des décisions en cause doit, par suite, être écarté.

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme D..., née le 11 octobre 1977, est entrée en France de manière régulière sous couvert d'un visa de court séjour le 19 août 2016, soit depuis un peu plus de deux ans à la date des décisions attaquées. Il ressort des pièces du dossier que son père, né le 30 septembre 1948, est veuf depuis le 22 septembre 2015 et a perdu son fils le 6 juin 2017. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, y compris du certificat médical produit postérieurement et peu circonstancié, pour se borner à indiquer que " M. C...... doit rester près de sa fille... pour raisons de santé ", que l'assistance de Mme D... née C... serait indispensable pour accompagner son père dans les gestes de la vie quotidienne, en dépit de la procuration qu'il lui a donnée pour gérer son compte bancaire. Si la requérante est présente en France avec sa fille ainée et ses garçons mineurs, nés respectivement en 2002, 2007 et 2011, il ressort pour autant des pièces du dossier que son époux ainsi qu'une soeur résident en Algérie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 39 ans. Par ailleurs, l'appelante ne peut se prévaloir de l'ancienneté de son intégration compte tenu de sa durée de présence malgré un engagement associatif et des attestations d'enseignants en sa faveur. Ainsi, Mme D... ne justifie pas suffisamment avoir durablement fixé sur le territoire français le centre de sa vie personnelle et familiale ni de l'existence de motifs exceptionnels, en dépit de son souhait de scolariser ses enfants en France pour les " soustraire à l'influence négative de l'islamisme radical et à la dégradation de l'enseignement en Algérie ". Dans ces conditions, le moyen invoqué tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de chacune des décisions sur sa situation personnelle ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté du 17 août 2018 et du rejet de son recours gracieux. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle a présentées aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée dans les conditions de l'aide juridictionnelle au titre des frais exposés par Mme D... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... née C..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020, où siégeaient :

- M. F..., président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. A..., premier conseiller,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

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N° 19MA04635

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04635
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Julien JORDA
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-17;19ma04635 ?
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