Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 4 829,89 euros émis à son encontre par la commune du Soler le 11 février 2016.
Par un jugement n° 1601528 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 février 2018, M. D..., représenté par la SCP Gipulo Dupettit et Murcia, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 décembre 2017;
2°) d'annuler le titre exécutoire émis par la commune du Soler le 11 février 2016 ;
3°) de mettre à la charge de la commune du Soler le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le titre exécutoire méconnaît l'article L. 1617-5 4° du code général des collectivités territoriales dès lors que la commune n'a pas produit le bordereau de titres de recette et que le courrier du 5 novembre 2015 produit ne peut pallier le défaut de signature et de mention de l'identité de l'auteur du titre en litige ;
- l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 a été méconnu dès lors que le titre ne fait pas référence au courrier précité du 5 novembre 2015 ;
- le coût des travaux d'extension du réseau électrique relevant de l'article L. 342-11 du code de l'énergie incombe à la commune ;
- les travaux en cause ne relèvent pas de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme dès lors que l'extension du réseau sur le domaine public communal, estimée à 145 mètres constitue un équipement public ;
- son engagement à prendre à sa charge le coût des travaux ne peut faire obstacle aux dispositions de l'article L. 342-11 du code de l'énergie et il ne constituait pas la condition du permis de construire ;
- les permis de construire obtenus ne prescrivaient aucune participation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2018, la commune du Soler, représentée par la SCP HG et C, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 29 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 mai 2019.
Un mémoire présenté par la SCP Gipulo Dupettit et Murcia a été enregistré le 18 juin 2020 et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;
- l'ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné par décision du 16 janvier 2020, Mme B..., présidente assesseure, pour assurer les fonctions de présidente par intérim la 9ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les conclusions de Me E..., pour la commune de Soler.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 23 janvier 2014, le maire du Soler a délivré à M. D..., gérant de l'EURL 3A, un permis de construire une serre agricole d'une surface de 3 000 m² nécessitant une puissance électrique de 36 KVa en triphase. La commune du Soler a, le 11 février 2016, émis à l'encontre de l'intéressé un titre exécutoire en vue du recouvrement de la participation au titre du raccordement de son terrain au réseau public d'électricité pour un montant de 4 829,89 euros. Par un jugement du 29 décembre 2017 dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme : " L'autorité qui délivre l'autorisation de construire, d'aménager, ou de lotir exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, du terrain aménagé ou du lotissement, notamment en ce qui concerne la voirie, l'alimentation en eau, gaz et électricité, les réseaux de télécommunication, l'évacuation et le traitement des eaux et matières usées, l'éclairage, les aires de stationnement, les espaces collectifs, les aires de jeux et les espaces plantés. / Les obligations imposées par l'alinéa ci-dessus s'étendent au branchement des équipements propres à l'opération sur les équipements publics qui existent au droit du terrain sur lequel ils sont implantés et notamment aux opérations réalisées à cet effet en empruntant des voies privées ou en usant de servitudes. / Toutefois, en ce qui concerne le réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la part de la contribution prévue au troisième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, correspondant au branchement et à la fraction de l'extension du réseau située sur le terrain d'assiette de l'opération, au sens de cette même loi et des textes pris pour son application. / L'autorisation peut également, avec l'accord du demandeur et dans les conditions définies par l'autorité organisatrice du service public de l'eau ou de l'électricité, prévoir un raccordement aux réseaux d'eau ou d'électricité empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures. ".
3. D'autre part, l'article 4 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité a été abrogé par l'ordonnance du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie. Aux termes de l'article L. 342-1 du code de l'énergie : " Le raccordement d'un utilisateur aux réseaux publics comprend la création d'ouvrages d'extension, d'ouvrages de branchement en basse tension et, le cas échéant, le renforcement des réseaux existants (...) ". Aux termes de l'article L. 342-6 du même code : " La part des coûts de branchement et d'extension des réseaux non couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux publics peut faire l'objet de la contribution due par le redevable défini à l'article L. 342-7 ou par les redevables définis à l'article L. 342-11. La contribution est versée au maître d'ouvrage des travaux, qu'il s'agisse d'un gestionnaire de réseau, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un syndicat mixte. ". Enfin, l'article L. 342-11 de ce code dispose que : " La contribution prévue à l'article L. 342-6 pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution est versée, dans des conditions, notamment de délais, fixées par les cahiers des charges des concessions ou les règlements de service des régies ou, à défaut, par décret en Conseil d'État, par les redevables mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° suivants : / 1° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération ayant fait l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable, située en dehors d'une zone d'aménagement concerté et ne donnant pas lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels ou à la participation pour voirie et réseaux mentionnées à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution correspondant aux équipements mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est versée par le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition. / La part de contribution correspondant à l'extension située hors du terrain d'assiette de l'opération reste due par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour la perception des participations d'urbanisme. / Toutefois, les coûts de remplacement ou d'adaptation d'ouvrages existants ou de création de canalisations en parallèle à des canalisations existantes afin d'en éviter le remplacement, rendus nécessaires par le raccordement en basse tension des consommateurs finals, ne sont pas pris en compte dans cette part. Ces coûts sont couverts par le tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution mentionné à l'article L. 341-2 lorsque ce raccordement est effectué par le gestionnaire du réseau de distribution ; / 2° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération donnant lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels mentionnée à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution est versée par le bénéficiaire de l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est acquitté du paiement de la contribution au titre du branchement au réseau public au droit de son terrain d'assiette pour une somme de 1 568,99 euros toutes taxes comprises. En outre, lors de l'instruction de la demande de permis de construire ERDF, gestionnaire du réseau public et maître d'ouvrage a, dans son avis émis le 6 décembre 2013, estimé que compte tenu de la puissance de raccordement de 36 kVa, le projet nécessitait l'" allongement BT (basse tension) de 145 mètres sur le domaine public à partir du réseau BT (basse tension) ", hors le périmètre du terrain d'assiette. Le montant de cette contribution a été fixé à la somme de 10 270,89 euros hors taxe (HT) correspondant à la différence entre le coût total des travaux d'extension s'élevant à la somme de 17 118,15 euros HT et le montant pris en charge au titre du tarif d'utilisation des réseaux publics de transports et de distribution d'électricité. La commune, bénéficiaire d'une subvention du conseil général des Pyrénées-Orientales pour un montant de 5 441 euros correspondant à 60 % du montant des travaux tel qu'estimé par le gestionnaire du réseau. La commune du Soler a, le 11 février 2016, émis à l'encontre de l'intéressé un titre exécutoire en vue du recouvrement de la participation au titre du raccordement de son terrain au réseau public d'électricité pour un montant de 4 829,89 euros restant dû. En application des dispositions combinées de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme et l'article L. 342-11 du code de l'énergie, il appartient à la commune compétente pour la perception des participations d'urbanisme, de prendre à sa charge la part de la contribution correspondant aux travaux d'extension du réseau, situés hors du terrain d'assiette de l'opération dont il est constant qu'elle a été rendue nécessaire par l'opération de construction ayant fait l'objet du permis de construire délivré le 23 janvier 2016. Dès lors, en mettant à la charge de M. D... une partie de la contribution au titre du raccordement du terrain lui appartenant au réseau public d'électricité, couvrant l'extension du réseau sur ce terrain, par le titre exécutoire émis le 11 février 2016, le maire du Soler a méconnu les dispositions des article L. 332-15 du code de l'urbanisme et L. 342-11 du code de l'énergie. Enfin, la commune du Soler ne peut utilement se prévaloir de ce que les travaux correspondaient exclusivement aux besoins du projet sans être destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de décharger le requérant de l'obligation de payer la somme de 4 829,89 euros.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune du Soler demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune du Soler une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 décembre 2017 est annulé.
Article 2 : M. D... est déchargé de l'obligation de payer la somme de 4 829,89 euros.
Article 3 : La commune de Soler versera à M. D... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et à la commune du Soler.
Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2020, où siégeaient :
- Mme B..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme F..., première conseillère,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 juillet 2020.
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N° 18MA00860