Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... G... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 7 novembre 2006 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de la décision du 18 octobre 2006 portant autorisation de défrichement sur les parcelles cadastrées section A n° 1300 et 1437 sur la commune de Cantaron.
Par un jugement n° 1403320 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 janvier 2018, M. G..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 9 novembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 7 novembre 2006 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont retenu à tort que sa demande était irrecevable pour cause de tardiveté ;
- la décision de retrait de l'autorisation de défrichement est entachée d'illégalité dès lors qu'il justifiait de sa qualité de mandataire de la propriétaire des parcelles objet de la demande d'autorisation de défrichement, en étant titulaire d'une promesse de vente.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 février 2010, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code forestier ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les conclusions de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Le 26 mars 2006, M. G... a demandé un permis de construire pour réaliser un ensemble immobilier comportant quatorze logements sur un terrain appartenant à Mme A..., pour lequel il était titulaire d'une promesse de vente. Dans ce cadre, M. G... a déposé une demande d'autorisation de défrichement le 25 mars 2006 en se présentant comme le mandataire de Mme A.... Par un courrier du 6 avril 2006, le service de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF) en charge de l'instruction du dossier a demandé à M. G... de produire l'original du mandat de la propriétaire. Par un courrier du 24 avril 2006, le pétitionnaire a opposé un refus à cette demande en estimant que l'attestation notariale certifiant de son engagement à acquérir les terres de Mme A... était suffisante. Par un courrier du 29 mai 2006, le service instructeur a admis la recevabilité de la demande. L'autorisation sollicitée a été délivrée le 18 octobre 2006 et adressée à Mme A... ainsi qu'à M. G.... Cependant, par un courrier du 26 octobre 2006, Mme A... a informé la DDAF qu'elle n'avait ni demandé d'autorisation de défrichement, ni mandaté quiconque pour le faire. Elle a demandé en conséquence le retrait de cette autorisation. Par une décision du 7 novembre 2006 notifiée à Mme A..., le préfet des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de la décision du 18 octobre 2006 portant autorisation de défrichement. Par ailleurs, le maire de Cantaron a opposé à la demande de permis de construire un refus notifié à M. G... le 23 juin 2006. Par un arrêt du 20 octobre 2011, la Cour a annulé cette décision de refus ainsi que le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er octobre 2009 rejetant la demande d'annulation présentée par M. G.... Ce dernier a confirmé sa demande de permis de construire le 31 octobre 2011. Par un arrêté du 15 décembre 2011, le maire de Cantaron a de nouveau refusé de délivrer le permis de construire sollicité, en se fondant notamment sur le retrait de l'autorisation de défrichement. M. G... a formé un recours contre ce refus qui a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Nice du 7 mai 2014, confirmé par un arrêt de la Cour du 21 juillet 2016. Le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt n'a pas été admis par le Conseil d'Etat. Parallèlement, par une requête enregistrée le 30 juillet 2014, M. G... a demandé l'annulation de la décision du 7 novembre 2006 portant retrait de l'autorisation de défrichement. Par un jugement du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette dernière demande. M. G... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Il résulte des dispositions de l'article R. 421-5 du même code que ce délai n'est opposable qu'à la condition d'avoir été mentionné, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision.
3. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.
4. D'autre part, en vertu de l'article R. 311-1 du code forestier, la demande d'autorisation de défrichement est introduite soit par le propriétaire des terrains ou son mandataire soit par une personne morale habilitée à présenter la demande.
5. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 1, que l'administration a délivré l'autorisation du 18 octobre 2006 à M. G... au vu de la promesse de vente consentie par Mme A..., c'est-à-dire au vu de sa qualité de propriétaire apparent, conformément à l'article 1589 du code civil aux termes duquel " la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix ". C'est en cette qualité que l'autorisation de défrichement, créatrice de droit au profit de M. G..., lui a été notifiée. Dès lors, si le retrait de cette autorisation devait être notifiée à Mme A..., tiers à l'autorisation, en sa qualité de demanderesse du retrait, il aurait également dû être notifié à M. G..., au titre du retrait d'une autorisation créatrice de droit dont il était bénéficiaire, avec la mention des voies et délais de recours. A défaut de notification de cette décision expresse à M. G..., le délai de recours contentieux de deux mois ne lui est pas opposable. Toutefois, M. G... a eu connaissance de la décision de retrait du 7 novembre 2006 à la date à laquelle lui a été notifié l'arrêté du 15 décembre 2011 portant refus d'autorisation de construire, fondé notamment sur le motif de retrait de cette autorisation de défrichement ou, à défaut, en l'absence de date certaine de notification, à la date à laquelle l'intéressé a saisi le tribunal administratif en vue de l'annulation de cet arrêté, soit le 31 janvier 2012. Si M. G... soutient qu'il n'a pris connaissance des motifs de la décision de retrait du 7 novembre 2006 que lorsque celle-ci lui a été communiquée à sa demande par le préfet, soit le 23 décembre 2013, de sorte que sa demande d'annulation du 30 juillet 2014 est intervenue dans le délai raisonnable d'un an, il ne peut être regardé comme se prévalant de circonstances particulières au sens de la règle mentionnée au point 3, dès lors que d'une part, il a nécessairement eu connaissance de la date et du sens de la décision de retrait en litige et en conséquence apprécié l'opportunité pour lui d'introduire un recours contentieux contre cette décision dès le 31 janvier 2012 et d'autre part, en a demandé la communication au préfet des Alpes-Maritimes, bien après l'expiration du délai raisonnable d'un an et au demeurant a encore attendu plus de six mois après cette communication pour introduire sa demande de première instance. A cet égard, est sans incidence sur l'appréciation du délai de recours juridictionnel, la circonstance que, lorsque M. G... a contesté par voie d'exception la légalité de la décision de retrait dans sa demande enregistrée le 31 janvier 2012 tendant à l'annulation de l'arrêté de refus de permis de construire du 15 décembre 2011, la commune de Cantaron a refusé de verser cette décision aux débats dès lors qu'en tout état de cause l'auteur de cette décision est le préfet et non la commune. Il en est de même des vaines recherches ultérieures de l'intéressé, respectivement en mai et juillet 2014, pour obtenir auprès du service des archives départementales, la date de publication au recueil des actes administratifs de la préfecture de la décision en litige, si tant qu'une telle publication soit nécessaire, ou auprès des services préfectoraux, la date de notification de cette décision à Mme A.... Par suite, en retenant l'irrecevabilité de sa demande pour cause de tardiveté, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par le préfet des Alpes-Maritimes, que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation la décision du 7 novembre 2006 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de la décision du 18 octobre 2006 portant autorisation de défrichement.
Sur les frais liés au litige :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. G... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
Copie en sera délivrée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 26 juin 2020, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme E..., première conseillère,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2020.
N° 18MA00007
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