Vu la procédure suivante :
Par un arrêt avant dire droit n° 17MA03491 du 7 février 2019, la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur l'appel formé par le centre hospitalier de Salon-de-Provence tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 juin 2017 le condamnant à verser les sommes de 30 944,97 euros à Mme D... B..., de 2 000 euros à M. A... B... et de 18 052,87 euros à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, a ordonné une expertise médicale en vue de déterminer notamment si la pose d'un cathéter a été à l'origine de la lésion d'une veine de la requérante, si les soins qui lui ont été prodigués ont été adaptés, les conséquences qu'a pu avoir une telle lésion sur le fonctionnement de la perfusion et d'évaluer les préjudices qui ont résulté de cette lésion.
Par un mémoire, enregistré le 16 décembre 2019, le centre hospitalier de Salon-de-Provence, représenté par la SELARL Chauplannaz et Associés, conclut aux mêmes fins que sa requête et ses précédents mémoires.
Il soutient, en outre, que :
- la thrombose sur mise en place d'un cathéter périphérique au niveau du pli du coude est un aléa thérapeutique ;
- l'embolie pulmonaire sur thrombose veineuse est une complication rare ;
- l'impotence fonctionnelle du membre supérieur gauche est sans lien avec la perfusion ;
- aucune maladresse fautive de l'infirmière ne peut être retenue ;
- il n'y a pas de faute présumée dans l'organisation ou le fonctionnement du service ;
- la patiente n'a gardé aucune séquelle de la phlébite et de l'embolie pulmonaire ;
- les sommes demandées au titre des préjudices subis ne sont pas justifiées ;
- en présence d'un aléa thérapeutique, les conclusions indemnitaires de la CPCAM des Bouches-du-Rhône doivent être rejetées ;
- le lien de causalité entre, d'une part, les frais médicaux et d'appareillage et les indemnités journalières versées à Mme B... et, d'autre part, l'accident médical non fautif n'est pas établi.
Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Saint-Pierre, déclarent se désister de leurs conclusions d'appel incident et demandent que les frais d'expertise soient partagés par moitié avec le centre hospitalier de Salon-de-Provence.
Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2020, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représentée par Me de la Grange, conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire et déclare, en outre, se désister de ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et demande de donner acte à M. et Mme B... du désistement de leurs conclusions à son encontre.
Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2020, le centre hospitalier de Salon-de-Provence déclare accepter le désistement de M. et Mme B... et demande, en outre, que les frais d'expertise soient partagés par moitié avec les consorts B....
Vu :
- le rapport des experts enregistré les 6 et 7 novembre 2019 au greffe de la Cour ;
- l'ordonnance du 12 novembre 2019, par laquelle la présidente de la Cour a liquidé et taxé les frais et honoraires des expertises ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de Me Boughanmi, représentant le centre hospitalier de Salon-de-Provence.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 6 juin 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier de Salon-de-Provence à verser les sommes de 30 944,97 euros à Mme B... et de 2 000 euros à M. B... en réparation des préjudices consécutifs aux modalités de prise en charge de Mme B... au sein de cet établissement de soins le 5 novembre 2012. Par un arrêt avant dire droit du 7 février 2019, la cour a ordonné une expertise médicale en vue de déterminer notamment l'existence d'une lésion de la veine de l'intéressée lors de la pose d'un cathéter.
Sur la responsabilité du centre hospitalier :
2. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise diligentée par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de la région Provence Alpes Côte-d'Azur et des rapports des expertises cardiologique et psychiatrique ordonnées par l'arrêt avant dire droit de la cour du 7 février 2019, que les examens, diagnostics, indications thérapeutiques et soins dont a bénéficié Mme B... qui souffrait de coliques néphrétiques étaient appropriés à son état et conformes aux règles de l'art. La thrombose veineuse du poignet présentée par l'intéressée à la suite de la mise en place d'un cathéter périphérique au niveau du pli du coude constitue un accident médical rare non fautif. En outre, la complication par survenue d'une embolie pulmonaire de faible importance sur thrombose veineuse est également un aléa thérapeutique décrit par la littérature médicale comme rare. L'impotence fonctionnelle du membre supérieur dont se plaint par ailleurs l'intéressée n'a jamais été évoquée dans la documentation médicale comme favorisée par une thrombose veineuse ou une embolie pulmonaire. Ainsi, il ne peut être retenu que la veine du bras gauche de Mme B... aurait été lésée lors de la pose du cathéter ni que le blocage du cathéter aurait eu pour origine la lésion de cette veine.
4. En deuxième lieu, il résulte des conclusions de l'expert psychiatre que le syndrome anxio-dépressif que présente Mme B... ne peut pas être imputé à la thrombose veineuse même compliquée d'une embolie pulmonaire.
5. Il résulte de ce qui vient d'être dit que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la responsabilité du centre hospitalier de Salon-de-Provence n'est pas susceptible d'être engagée pour faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service du fait des conséquences dommageables d'un geste de soins courants sans rapport avec l'état initial de la patiente.
Sur l'obligation d'indemnisation de l'ONIAM :
6. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " II. Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I (...) n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ".
7. Il résulte de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise mentionnés au point 4, que Mme B... ne conserve aucune séquelle de l'accident médical qualifié de mineur par l'expert cardiologue dès lors que dès le 12 mars 2013 la re-perméabilisation de la thrombose veineuse profonde brachiale et ulnaire était acquise et que, comme indiqué au point 4, l'impotence fonctionnelle du membre supérieur gauche n'a pas pour origine l'aléa thérapeutique. Ainsi, et alors que l'expert psychiatre ne retient aucun déficit fonctionnel permanent sur le plan psychiatrique, qu'il n'est pas davantage établi que l'inaptitude à l'exercice d'une activité professionnelle serait imputable à l'accident médical et en l'absence de tout élément pertinent de nature médicale susceptible de contredire les conclusions des expertises sur ce point, doit être retenu le taux de déficit fonctionnel permanent de 15% comme l'a retenu l'expert. Ce dernier taux étant inférieur à celui fixé par les dispositions de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, la responsabilité de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale n'est pas susceptible d'être engagée.
8. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de rejeter tant les demandes présentées devant le tribunal administratif de Marseille, par M. et Mme B... et la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, que, en tout état de cause, les conclusions d'appel incident présentées devant la cour par M. et Mme B....
Sur les dépens :
9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais des expertises ordonnées par l'arrêt de la Cour du 7 février 2019 liquidés et taxés à la somme de 1 600 euros, par une ordonnance du 12 novembre 2019 de la présidente de la Cour, pour moitié à la charge du centre hospitalier de Salon-de-Provence et pour moitié à la charge de la M. et Mme B....
Sur les frais liés au litige :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties en litige la charge de ses propres frais de procédure et de rejeter les conclusions qu'elles ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 juin 2017 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme B... et la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille sont rejetées.
Article 3 : Les frais de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 600 euros sont mis pour moitié à la charge du centre hospitalier de Salon-de-Provence et pour moitié à la charge de M. et Mme B....
Article 4 : Les conclusions de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du centre hospitalier de Salon-de-Provence est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Salon-de-Provence, à M. et Mme A... B..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
Copie en sera adressée pour information aux docteurs Paganelli et Bottai.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2020 où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Lu en audience publique, le 2 juillet 2020.
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N° 17MA03491