Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 1er décembre 2017 du directeur du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Montpellier prononçant son licenciement, confirmée par la décision du 20 février 2018 ayant rejeté son recours gracieux, et de condamner cet établissement à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement.
Par un jugement n° 1801477 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 mai 2019, Mme B..., représentée par le cabinet Alteo, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 avril 2019 ;
2°) d'annuler les décisions du directeur du CHRU de Montpellier des 1er décembre 2017 et 20 février 2018 ;
3°) de condamner le CHRU de Montpellier à lui verser la somme de 50 000 euros à titre indemnitaire ;
4°) de mettre à la charge du CHRU de Montpellier la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande d'annulation présentée devant le tribunal n'était pas tardive et contient l'exposé des moyens soulevés à l'encontre de la décision de licenciement ;
- la demande indemnitaire présentée en première instance était également recevable ;
- la matérialité des manquements qui lui sont reprochés n'est pas établie ;
- elle a été victime de harcèlement moral et sexuel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2019, le CHRU de Montpellier, représenté par la SCP Vinsonneau-Paliès, Noy, Gauer et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les conclusions tendant à l'annulation de la décision de licenciement présentées devant le tribunal étaient tardives ;
- les conclusions à fin d'injonction présentées en première instance étaient irrecevables ;
- le licenciement est justifié ;
- l'existence des préjudices n'est pas établie ;
- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;
- le décret n° 2010-19 du 6 janvier 2010 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a désigné Mme D..., présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant le CHRU de Montpellier.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., qui a été recrutée le 13 mars 2013 par le CHRU de Montpellier par un contrat à durée indéterminée en qualité d'ingénieur qualité recherche et innovation, relève appel du jugement du 30 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 1er décembre 2017 et 20 février 2018 par lesquelles le directeur de l'établissement de soins a, d'une part, prononcé son licenciement sans préavis ni indemnité et, d'autre part, rejeté son recours gracieux, et à la condamnation de cet établissement à lui verser la somme de 50 000 euros à titre indemnitaire.
2. D'une part, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ".
3. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. D'autre part, aux termes de l'article 39 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents contractuels sont les suivantes : (...) 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement ".
5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
6. Pour prononcer le licenciement de Mme B..., le directeur du CHRU de Montpellier s'est fondé sur, en premier lieu, un comportement et un savoir-être inadaptés dans les relations professionnelles quotidiennes, aussi bien avec l'équipe de la direction au sein de laquelle l'intéressée était affectée qu'avec les équipes de soins, en deuxième lieu, des manquements aux obligations professionnelles tenant notamment à l'absence de respect des délais impartis pour accomplir les missions confiées dans le cadre d'une accréditation et des consignes de sécurité et à l'incapacité de la requérante à reconnaître sa responsabilité dans le report de l'accréditation, et, en troisième lieu, des manquements aux devoirs de réserve et de loyauté tenant à des critiques de sa hiérarchie et à la tenue de propos inadaptés et non professionnels lors d'une inspection de l'autorité de santé nucléaire et à l'extérieur de l'établissement auprès du directeur d'un autre centre hospitalier et de la directrice générale de l'agence régionale de santé.
7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du directeur général du CHRU de Montpellier, du rapport du directeur de la Qualité et de la Gestion des Risques, du courrier du chef de pôle Cliniques médicales, et du rapport des deux secrétaires de la direction de la Qualité et de la Gestion des Risques, que la requérante, d'une part, avait des difficultés relationnelles avec ses collègues, ses subordonnés, ses supérieurs hiérarchiques et les interlocuteurs institutionnels, d'autre part, a manqué de professionnalisme dans l'instruction du dossier de renouvellement de l'autorisation de greffes de cellules souches hématopoïétiques adultes et pédiatriques et que ce manquement a entraîné le report de l'accréditation de plusieurs semaines et, enfin, a dénigré les membres de l'ancienne et de l'actuelle équipe dirigeante.
8. La requérante, qui ne conteste pas sérieusement la réalité des fautes commises, impute la modification de son comportement aux refus réitérés du directeur général et du directeur adjoint de l'établissement de soins de prendre en compte sa détresse depuis plusieurs mois à la suite d'un harcèlement moral et de la recevoir en entrevue. Toutefois, elle ne produit aucun élément susceptible de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement, alors que, d'une part, elle a été reçue les 5 et 19 juillet 2017 et le 4 septembre suivant par son supérieur hiérarchique direct et le 6 septembre 2017 par la directrice des ressources humaines et, d'autre part, elle n'a pas souhaité rencontrer un médecin lorsque des rendez-vous lui ont été proposés le jour où elle a contacté la médecine du travail du service hospitalier. Contrairement à ce que soutient Mme B..., la date des faits qui lui sont reprochés, tenant plus particulièrement à son attitude inappropriée et agressive et aux critiques de sa hiérarchie, est connue, et la décision contestée n'est pas motivée par la dénonciation de faits de harcèlement moral, laquelle n'est intervenue qu'après que le directeur de la Qualité et de la Gestion des Risques a rédigé un rapport faisant état des divers manquements en cause et sollicitant la recherche d'une solution. Par ailleurs, la requérante ne produit aucun document, et notamment aucune attestation de collègue, de nature à remettre en cause l'établissement des faits qui lui sont reprochés. La circonstance qu'elle a reçu au mois de janvier 2017 les félicitations d'un supérieur pour le travail accompli n'est pas de nature à remettre en cause la réalité de l'ensemble des manquements circonstanciés qui lui sont reprochés.
9. Il suit de là que, d'une part, la sanction prononcée ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et, d'autre part, les faits en cause constituent des manquements de l'intéressée à ses obligations professionnelles de nature à justifier une sanction disciplinaire. La requérante ne soulève aucun moyen relatif à la proportion entre la sanction et les fautes commises. En l'absence d'illégalité de la décision de licenciement, les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... à l'encontre de celle-ci, ainsi que celles tendant à l'indemnisation des préjudices financier et moral qui découleraient de ce licenciement, doivent être rejetées.
10. Par ailleurs, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le CHRU de Montpellier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité susceptible d'ouvrir droit à indemnisation du fait du harcèlement sexuel dont elle soutient avoir été victime, dès lors que l'enquête interne diligentée n'a pas permis d'établir la réalité des agissements en cause et qu'elle ne produit aucun document de nature à démontrer la réalité des faits allégués, et du fait d'un harcèlement moral, en l'absence d'un tel harcèlement ainsi que cela a été exposé au point 8. Ses conclusions indemnitaires présentées à ce titre doivent donc également être rejetées.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHRU de Montpellier, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le CHRU de Montpellier.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B... versera au CHRU de Montpellier une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 où siégeaient :
- Mme D..., présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;
- Mme E..., première conseillère ;
- M. Pierre Sanson, conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juin 2020.
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N° 19MA02278