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27/03/2020 | FRANCE | N°18MA02706

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 27 mars 2020, 18MA02706


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler le titre de perception émis à son encontre par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur le 11 février 2010 pour avoir paiement de la somme de 31 436 euros correspondant à l'indemnité due pour l'occupation du domaine public maritime par le restaurant L'Abri Cotier situé boulevard des Baigneurs au lieu-dit " Anse du Fortin " à Marseille au titre de l'année 2009, le titre émis le 31 août

2012 pour un montant de 25 274 euros au titre de l'année 2011, le titre ém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler le titre de perception émis à son encontre par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur le 11 février 2010 pour avoir paiement de la somme de 31 436 euros correspondant à l'indemnité due pour l'occupation du domaine public maritime par le restaurant L'Abri Cotier situé boulevard des Baigneurs au lieu-dit " Anse du Fortin " à Marseille au titre de l'année 2009, le titre émis le 31 août 2012 pour un montant de 25 274 euros au titre de l'année 2011, le titre émis le 22 avril 2013 pour un montant de 23 443 euros au titre de l'année 2012 et celui émis le 20 juin 2014 pour un montant de 22 315 euros au titre de l'année 2013 ainsi que les actes de recouvrement y afférents, d'autre part, de le décharger de l'obligation de payer les sommes ainsi mises à sa charge ainsi que celles également mises à sa charge au titre de la taxe foncière pour les années 2011 à 2014.

Par un jugement n° 1503666 du 6 avril 2018, le tribunal administratif de Marseille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondant à la taxe foncière et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 11 juin 2018, le 28 novembre 2018, le 6 janvier 2019 et le 18 janvier 2019, M. C..., représenté par Me Lê, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 6 avril 2018 ;

2°) d'une part d'annuler les titres de perception du 11 février 2010, du 31 août 2012, du 22 avril 2013 et du 20 juin 2014 ainsi que les actes de recouvrement y afférents, d'autre part de le décharger de l'obligation de payer les sommes ainsi mises à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il ne vise pas les " motifs de droit des moyens invoqués " ;

- les titres de perception sont illégaux et mal dirigés ;

- en laissant perdurer la situation d'occupation sans titre, l'administration a implicitement renouvelé l'autorisation au bénéfice de la SARL L'Abri Cotier et/ou de son nouveau gérant, lesquels sont dès lors redevables de la redevance domaniale ;

- l'abstention de l'administration à mettre un terme à la situation irrégulière de la société après qu'il en a abandonné la gérance est fautive et lui a causé un préjudice ;

- les véritables occupants de la parcelle en litige sont la SARL L'Abri Cotier et son nouveau gérant ;

- le tribunal les a d'ailleurs condamnés à la démolition du restaurant en les reconnaissant occupants irréguliers du domaine public.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 septembre 2018 et le 18 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un mémoire, présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, enregistré le 25 janvier 2019, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me Lê, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... relève appel du jugement du 6 avril 2018 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des titres de perception du 11 février 2010, du 31 août 2012, du 22 avril 2013 et du 20 juin 2014 émis à son encontre par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur pour avoir paiement respectivement des sommes de 31 436 euros, 25 274 euros, 23 443 euros et 22 315 euros au titre de l'occupation du domaine public maritime au cours des années 2009, 2011, 2012 et 2013 ainsi que les actes de recouvrement y afférents.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En jugeant d'abord, après avoir rappelé que le gestionnaire d'une dépendance du domaine public est fondé à réclamer à un occupant sans titre, à raison de la période d'occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période, que M. C... était redevable des sommes réclamées par la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur aux motifs que, alors même qu'il n'assurait plus les fonctions de gérant de la SARL L'Abri Cotier depuis le 10 mai 2010, l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime lui avait antérieurement été délivrée en son nom propre, qu'il n'alléguait pas ne pas avoir effectivement continué à occuper cette dépendance domaniale au titre des années en litige, qu'il était resté détenteur de 10 % du capital social de la société exploitante, enfin qu'il a lui-même sollicité des délais pour s'acquitter de la redevance due au titre de l'occupation sans titre pour l'année 2014, sans toutefois alors contester en être redevable, reconnaissant ainsi implicitement la persistance de sa qualité d'occupant au titre de cette année, le tribunal a répondu en droit de manière suffisamment précise et détaillée au moyen soulevé par M. C... tiré de ce qu'il n'aurait pas méconnu les dispositions de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques relatif aux redevances dues en contrepartie d'une occupation du domaine public, au demeurant non invocable en l'espèce eu égard à l'absence d'autorisation dûment délivrée par l'administration. Les premiers juges n'ont ainsi pas entaché d'irrégularité leur jugement en s'abstenant de mentionner, dans l'analyse de ce moyen, cet article L. 2125-1.

3. Ensuite, il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal qu'après avoir constaté que l'administration a prononcé le dégrèvement, en droits, des sommes relatives à la taxe foncière auxquelles M. C... a été assujetti au titre des années 2011 à 2014, le tribunal a jugé que les conclusions présentées par l'intéressé relatives à cette imposition étaient devenues sans objet et qu'il n'y avait donc pas lieu d'y statuer. Le moyen soulevé par M. C... devant les premiers juges tiré de la méconnaissance de l'article 1400 du code général des impôts relatif à l'identification du redevable de la taxe foncière était ainsi, en tout état de cause, inopérant et le tribunal n'avait donc pas à y répondre. Est donc sans effet sur la régularité du jugement la circonstance selon laquelle la mention de cet article du code général des impôts n'a pas été mentionné dans l'analyse de ce moyen.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Conformément aux principes applicables au domaine public qui résultent des dispositions de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques et de son article L. 2122-8, toute occupation du domaine public donne lieu au paiement d'une redevance. Sans préjudice de la répression éventuelle des contraventions de grande voirie, le gestionnaire d'une dépendance du domaine public est fondé à réclamer à un occupant sans titre, à raison de la période d'occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période.

En ce qui concerne le titre de perception relatif à l'année 2009 :

5. Il résulte de l'instruction que les autorisations d'occupation temporaire du domaine public dont a bénéficié M. C... pour l'exploitation du restaurant l'Abri Cotier au titre de la période allant du 1er janvier 1992 au 31 décembre 2007 ont été délivrées en son nom propre, et non en sa qualité de gérant, alors, de la SARL L'Abri Cotier. Il est constant que M. C... a, postérieurement au 31 décembre 2007, continué à occuper le domaine public maritime en cause pour l'exploitation du restaurant l'Abri Cotier, au moins pour la période allant du 1er janvier 2008 au 10 mai 2010, date à laquelle il a abandonné ses fonctions de gérant de la société exploitant le restaurant. La circonstance qu'il a fait l'objet d'un dégrèvement de taxe foncière, laquelle est attachée à la qualité de propriétaire et non d'occupant, est sans influence sur le litige et c'est dès lors à bon droit que le titre de perception contesté du 11 février 2010 a été établi à son encontre au titre de l'occupation domaniale.

En ce qui concerne les titres de perception relatifs aux années 2011, 2012 et 2013 :

6. Outre le fait qu'il a, ainsi qu'il a été dit au point précédent, abandonné juridiquement la gérance du restaurant l'Abri Cotier à compter du 10 mai 2010 et qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait personnellement occupé les lieux en cause depuis cette date, M. C... établit expressément, par les pièces qu'il produit dans l'instance, notamment une déclaration de transfert de ses effets mobiliers dans ce pays établie par le consulat suisse et un certificat d'établissement en Suisse daté du 16 janvier 2012, qu'il ne pouvait plus être considéré comme tel au moins à cette dernière date. Par ailleurs, si l'administration s'est fondée, pour estimer que l'intéressé avait continué de se comporter comme un occupant de cette parcelle, sur un courrier daté du 30 décembre 2014 par lequel il sollicitait des délais pour s'acquitter de la redevance due au titre de l'occupation sans titre pour l'année 2014, sans contester en être redevable, il résulte de l'instruction que, par une attestation établie le 10 janvier 2019 et produite pour la première fois devant le juge d'appel, le nouveau gérant de la SARL L'Abri Cotier, M. B..., a admis être l'auteur de ce courrier qu'il a signé en empruntant l'identité de M. C... afin d'éviter, selon ses déclarations, que le règlement qu'il avait adressé ainsi que cette demande de délai ne s'égarent, l'administration ne le connaissant pas. Dans ces conditions, M. C... est fondé à soutenir que les titres de perception émis le 31 août 2012, le 22 avril 2013 et le 20 juin 2014 l'ont été à tort à son encontre.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception émis le 31 août 2012 pour un montant de 25 274 euros au titre de l'année 2011, de celui émis le 22 avril 2013 pour un montant de 23 443 euros au titre de l'année 2012, enfin de celui émis le 20 juin 2014 pour un montant de 22 315 euros au titre de l'année 2013. Par suite, il y a lieu de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes qui résultent de ces titres.

Sur les frais liés au litige :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le titre de perception émis à l'encontre de M. C... le 31 août 2012 pour un montant de 25 274 euros au titre de l'année 2011, le titre de perception émis le 22 avril 2013 pour un montant de 23 443 euros et celui émis le 20 juin 2014 pour un montant de 22 315 euros sont annulés.

Article 2 : M. C... est déchargé de l'obligation de payer les sommes résultant des titres de perception mentionnés à l'article 1 du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 avril 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. C... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2020.

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N° 18MA02706

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02706
Date de la décision : 27/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Domaine - Domaine public - Protection du domaine - Protection contre les occupations irrégulières.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) :

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-03-27;18ma02706 ?
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