Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille, comme prévenue d'une contravention de grande voirie, la société Levant'In et a demandé à ce que le tribunal la condamne à la peine d'amende de 10 000 euros résultant de l'infraction aux dispositions des articles L. 5334-5 et L. 5337-5 du code des transports et de la réitération du manquement commis moins de cinq ans après le prononcé d'une première condamnation.
Par un jugement n° 1609448 du 7 juin 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a condamné la société Levant'In à payer une amende de 8 000 euros.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 8 novembre 2019, sous le n° 19MA04767, la société Levant'In, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2019 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 19 octobre 2015 ;
3°) de la relaxer des fins de la poursuite ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il a méconnu le principe du respect des droits de la défense ;
- il n'a pas été signé ;
- l'action publique était prescrite ;
- le procès-verbal du 19 octobre 2015 est imprécis ;
- l'élément matériel de l'infraction n'est pas caractérisé.
Dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :
- l'action publique était prescrite ;
- la notification de la contravention est tardive ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle n'a jamais été invitée à présenter ses observations en méconnaissance du respect des droits de la défense ;
- le procès-verbal du 19 octobre 2015 est imprécis ;
- la matérialité des faits n'est pas établie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est tardive ;
- les moyens soulevés par la société Levant'In ne sont pas fondés.
Le mémoire, enregistré le 3 février 2020, présenté pour la société Levant'In n'a pas été communiqué.
II. Par une seconde requête, enregistrée le 14 novembre 2019, sous le n° 19MA04876, la société Levant'In représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) à titre principal, d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 juin 2019 ;
2°) à titre subsidiaire, d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 juin 2019.
Elle soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens énoncés dans sa requête sont sérieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 janvier 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société Levant'In ne sont pas fondés.
Le mémoire, enregistré le 3 février 2020, présenté pour la société Levant'In n'a pas été communiqué.
Vu :
- le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 19 octobre 2015 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des transports ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la société Levant'In.
Considérant ce qui suit :
1. Les deux requêtes n° 19MA04767 et 19MA04876, qui sont présentées par le même requérant, sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.
2. Un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 19 octobre 2015 par M. Kerduel, maître de port du Vieux-Port de Marseille, surveillant de port assermenté, à l'encontre de la société Levant'In, au motif tiré du non respect de l'article 5 de la délibération n° 14/12342/CC du 22 décembre 2014 portant règlement particulier de police des ports de plaisance de la Communauté urbaine de Marseille Provence Métropole (CUMPM), de l'article L. 5334-5 du code des transports et du refus d'obtempérer aux signaux réglementaires et ordres donnés par les surveillants du port. Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille, comme prévenue d'une contravention de grande voirie, la société Levant'In et a demandé à ce que le tribunal la condamne à la peine d'amende de 10 000 euros résultant de l'infraction aux dispositions des articles L. 5334-5 et L. 5337-5 du code des transports et de la réitération du manquement commis moins de cinq ans après le prononcé d'une première condamnation. La société Levant'In relève appel du jugement du 7 juin 2019, par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à la peine d'amende de 8 000 euros résultant de l'infraction aux dispositions des articles L. 5334-5 et L. 5337-5 du code des transports et de la réitération du manquement commis moins de cinq ans après le prononcé d'une première condamnation et demande à la Cour de sursoir à l'exécution de ce jugement.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre de la transition écologique et solidaire :
3. Si la ministre de la transition écologique et solidaire fait valoir que la requête d'appel est tardive, il ressort des pièces du dossier que la société Levant'In a pris connaissance de l'existence de ce jugement par un acte d'huissier du 15 octobre 2019. Ainsi, son appel enregistré le 8 novembre 2019 n'était pas tardif.
Sur la requête n° 19MA04767 :
En ce qui concerne la prescription de l'action publique :
4. Aux termes du premier alinéa de l'article 7 du code de procédure pénale : " En matière de crime, l'action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite ". Et aux termes de l'article 9 du même code : " En matière de contravention, la prescription de l'action publique est d'une année révolue ; elle s'accomplit selon les distinctions spécifiées à l'article 7 ci-dessus ".
5. Il résulte de ces dispositions que seules peuvent être regardées comme des actes d'instruction ou de poursuite, en matière de contraventions de grande voirie, outre les jugements rendus par les juridictions et les mesures d'instruction prises par ces dernières, les mesures qui ont pour objet soit de constater régulièrement l'infraction, d'en connaître ou d'en découvrir les auteurs, soit de contribuer à la saisine du tribunal administratif ou à l'exercice par le ministre de sa faculté de faire appel ou de se pourvoir en cassation.
6. Il résulte de l'instruction que le procès-verbal de contravention de grande voirie établi le 19 octobre 2015, qui doit être regardé comme étant le premier acte d'instruction ou de poursuite au sens de l'article 7 du code de procédure pénale, a été adressé à la société Levant'In par courrier du 13 octobre 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône, soit dans un délai d'un peu moins d'un an. Cependant, si le déféré préfectoral, enregistré le 28 novembre 2016 a été notifié le 19 décembre 2016 à la société Levant'In, il s'est écoulé plus d'un an entre cet acte d'instruction et le courrier du 6 juillet 2018 du greffe du tribunal par lequel la requérante a été mise en demeure de produire, dans un délai de trente jours, ses observations. Dans ces conditions, la société Levant'In est fondée à soutenir que la prescription de l'action publique engagée à son encontre était acquise à la date à laquelle l'audience s'est tenue le 16 mai 2019 et la date à laquelle le jugement a été lu le 7 juin 2019 et qu'elle ne saurait être condamnée au paiement d'une amende. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur l'action publique.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que la société Levant'In est fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à la peine d'amende de 8 000 euros.
Sur la requête n° 19MA04876 tendant au sursis à exécution du jugement contesté :
8. La Cour statuant au fond dans la présente affaire, il n'y a plus lieu pour elle de se prononcer sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué, enregistrée sous le n° 19MA04876.
Sur les frais liés au litige :
9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Levant'In présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19MA04876.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 juin 2019 est annulé.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur l'action publique.
Article 4 : Les conclusions de la société Levant'In présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Levant'In et à la ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 7 février 2020, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 21 février 2020.
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N° 19MA04767, 19MA04876
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