Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. I... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 10 novembre 2015 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité des troubles de santé qu'il a connus à compter du 3 février 2015 à l'accident de service dont il a été victime le 9 septembre 1999 et, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de reconnaître cette imputabilité et de fixer son taux d'incapacité permanente partielle à un niveau correspondant à son état de santé actuel, dès la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1601820 du 20 novembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 janvier 2018, 11 janvier 2019 et 18 décembre 2019, M. D..., représenté par Me H..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler la décision du 10 novembre 2015 du recteur de l'académie d'Aix-Marseille ;
3°) d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de reconnaître l'imputabilité au service des troubles constatés à compter du 3 février 2015 et de fixer un taux d'incapacité permanente partielle supérieur à 10 %, dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin de déterminer si les troubles constatés à compter du 3 février 2015 sont en lien direct avec l'accident du 9 septembre 1999 et de fixer le taux d'incapacité fonctionnelle à un taux supérieur à 10 % ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'auteur de l'acte est incompétent ;
- le recteur n'a pas examiné sa situation personnelle et s'est cru tenu par l'avis rendu par le docteur Daoud le 4 mai 2015, de telle sorte qu'il a commis une erreur de droit ;
- la rechute du 3 février 2015 est imputable à l'accident de service du 9 septembre 1999.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 décembre 2018, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a conclu au rejet de la requête au fond.
Par un arrêt n° 18MA00342 du 5 mars 2019, la Cour a ordonné qu'il soit procédé, avant dire droit, à une expertise médicale en vue de déterminer si l'état pathologique du requérant, à compter du 3 février 2015, est en relation directe et certaine avec son accident de service du 9 septembre 1999 et, le cas échéant, de déterminer le taux d'incapacité dont il reste atteint du fait de cet accident de service à la date de la décision attaquée, soit le 10 novembre 2015.
Par ordonnance du 18 mars 2019, la présidente de la Cour a désigné le docteur Claude G... en qualité d'expert.
L'expert a rendu son rapport le 14 octobre 2019. Ce rapport d'expertise a été communiqué aux parties, qui ont été invitées à produire leurs observations, le 15 octobre 2019.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 19 décembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 14 janvier 2020.
Par ordonnance du 15 octobre 2019, la présidente de la Cour a liquidé et taxé les frais de l'expertise à la somme de 840 euros toutes taxes comprises.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. B... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., substituant Me H..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. Aux termes des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dans leur rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. ". Le bénéfice de ces dispositions est subordonné, en cas d'accident de service, non pas à l'existence d'une rechute ou d'une aggravation de la pathologie du fonctionnaire, mais à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain avec l'accident de service, alors même que l'état préexistant de l'intéressé y aurait concouru.
2. Si le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse estime insuffisantes les conclusions du rapport d'expertise, l'auteur de celui-ci, le docteur G..., après avoir admis qu'un état antérieur a contribué à l'état de santé du requérant tel qu'il a été constaté à la date du 3 février 2015, évalue l'incapacité fonctionnelle totale à 14 % dont 5 % seulement, selon lui, sont imputables à cet état antérieur, au titre des conséquences de la méniscectomie intervenue en 1984 et du genu varum constaté avant 2007. Il s'en déduit qu'une partie de la raideur du genou droit et du syndrome rotulien invalidant affectant M. D... est, selon l'expert, dont les conclusions sont ainsi suffisamment motivées, imputable à l'accident du 9 septembre 1999, la participation de chacune des deux causes à ce phénomène étant en tout état de cause difficilement discernable dans ses proportions, ainsi que l'avait d'ailleurs déjà relevé le docteur Daoud lors de l'expertise réalisée le 4 mai 2015 à la demande de l'administration. Si le rapport du docteur Daoud aboutissait quant à lui à une conclusion contraire en ce qui concerne l'imputabilité au service, il ne recelait pas d'élément de démonstration de nature à remettre en cause les conclusions du docteur G... et indiquait d'ailleurs lui-même que " la demande (...) n'est pas en relation directe et certaine et exclusive avec l'accident de travail du 9 septembre 1999 ", alors que, comme a été dit ci-dessus, l'application des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 n'implique pas un lien exclusif entre l'accident de service et les troubles médicaux constatés.
3. Il résulte ainsi de l'instruction, et notamment du rapport du docteur G..., que les troubles du genou droit ayant affecté le requérant et constatés le 3 février 2015 doivent être regardés comme présentant un lien direct et certain, fût-ce non exclusif, avec l'accident de service du 9 septembre 1999. M. D... est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ces troubles.
4. En conséquence, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 novembre 2015 et à demander, par suite, l'annulation de ce jugement et de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Aux termes des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".
6. Il résulte de l'instruction que M. D... n'a demandé, dans son courrier adressé au recteur de l'académie d'Aix-Marseille le 3 février 2015, que la reconnaissance de l'imputabilité au service des troubles survenus à compter de cette date. La décision contestée n'a, par ailleurs, statué que sur ce point, en l'absence de toute demande présentée par le requérant à l'administration en ce qui concerne le quantum de son taux d'incapacité fonctionnelle. L'annulation de la décision du 10 novembre 2015 implique dès lors seulement qu'il soit enjoint au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de déclarer les congés et soins liés au trouble constaté au 3 février 2015 imputables au service. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais d'expertise :
7. Il y a lieu de mettre les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 840 euros toutes taxes comprises par l'ordonnance de la présidente de la Cour en date du 15 octobre 2019, à la charge de l'Etat.
Sur les frais liés au litige :
8. Il y a lieu de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat, à verser à M. D... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1601820 du tribunal administratif de Marseille du 20 novembre 2017 et la décision du recteur de l'académie d'Aix-Marseille du 10 novembre 2015 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de déclarer les congés et soins liés au trouble du genou droit ayant affecté M. D... et constatés le 3 février 2015 imputables au service.
Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 840 euros toutes taxes comprises, sont mis à la charge de l'Etat.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... D..., au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à M. A... G..., expert.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Aix-Marseille.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2020, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- Mme F... J..., présidente assesseure,
- M. E... Grimaud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 février 2020.
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N° 18MA00342