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24/01/2020 | FRANCE | N°17MA03708

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 24 janvier 2020, 17MA03708


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de l'Hérault a déféré au tribunal administratif de Montpellier, comme prévenu d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par les articles L. 2122-1 et L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la SARL Arche ACD et ses co-gérants M. E... B... et M. D... A..., pour avoir procédé sur le littoral de la commune de Sète, sans autorisation, à l'installation d'équipements en dehors de la zone amodiée.

Par un jugement n° 1700845 du 29 juin 2017, le

magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a condamné la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de l'Hérault a déféré au tribunal administratif de Montpellier, comme prévenu d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par les articles L. 2122-1 et L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la SARL Arche ACD et ses co-gérants M. E... B... et M. D... A..., pour avoir procédé sur le littoral de la commune de Sète, sans autorisation, à l'installation d'équipements en dehors de la zone amodiée.

Par un jugement n° 1700845 du 29 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a condamné la SARL Arche ACD et ses co-gérants à payer une amende de 1 500 euros ainsi que la somme de 50 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 août 2017, la SARL Arche ACD et ses co-gérants M. E... B... et M. D... A..., représentés par Me I..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 29 juin 2017 ;

2°) de rejeter la demande du préfet de l'Hérault ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la notification tardive du procès-verbal a méconnu le principe du contradictoire et les droits de la défense, en méconnaissance de l'article L. 774-2 du code de justice administrative ;

- aucun élément objectif du procès-verbal ne permet d'attester du dépassement de la surface autorisée, de sorte que la matérialité de l'infraction n'est pas établie ;

- les dispositions de l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques ne visent pas à réprimer l'installation temporaire de transats et matelas sur le domaine public maritime, de sorte que l'infraction litigieuse est dépourvue de base légale ;

- en tant que co-contractant de l'Etat, ils ne peuvent être poursuivis sur la base du régime délictuel de la contravention de grande voirie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de M. C...,

- les observations de Me I..., représentant M. G....

Une note en délibéré présentée pour la SARL Arche ACD et autres a été enregistrée le 13 janvier 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 12 mars 2010, le préfet de l'Hérault a concédé à la commune de Sète l'exploitation des plages naturelles situées sur le territoire communal. En application d'une convention d'exploitation conclue le 2 mai 2012 avec la commune de Sète, la SARL Arche ACD a été autorisée à exploiter chaque année du 15 mars au 15 octobre, jusqu'au 15 octobre 2017, le lot n° 9, secteur de la plage du Lido Est, d'une surface maximale de 1 000 m² dont 600 m² réservés aux activités balnéaires en vue de la location de matériels (transats, matelas, parasols) et d'une activité de restauration. A la suite d'un constat d'état des lieux du 11 juillet 2016, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 18 octobre 2016 à l'encontre de la SARL Arche ACD et ses co-gérants, M. B... et A..., pour avoir installé sans autorisation sur le domaine public maritime des transats et parasols sur une surface excédentaire de 184 m². Le préfet de l'Hérault a déféré la SARL Arche ACD et ses co-gérants devant le tribunal administratif de Montpellier qui, par jugement du 29 juin 2017, les a solidairement condamnés à payer une amende de 1 500 euros ainsi que la somme de 50 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie. La SARL Arche ACD ainsi que MM. B... et A... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité des poursuites :

2. Aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. / La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. / La notification indique à la personne poursuivie qu'elle est tenue, si elle veut fournir des défenses écrites, de les déposer dans le délai de quinzaine à partir de la notification qui lui est faite. / Il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance. ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions que le préfet est compétent dès qu'il est porté atteinte au domaine public pour engager des poursuites à l'encontre de l'auteur de cette atteinte, ce qu'il ne peut faire qu'en saisissant le tribunal administratif, juge de la contravention de grande voirie. Ce juge, dès qu'il est saisi par une autorité compétente et notamment le préfet, doit se prononcer tant sur l'action publique que sur l'action domaniale, que lui soient ou non présentées des conclusions en ce sens. Eu égard aux particularités de son office, il doit vérifier, au besoin d'office, lorsqu'est soulevé un moyen tiré de l'irrégularité de la notification des poursuites, si la procédure n'a pas été régularisée par la saisine régulière du tribunal administratif par l'autorité compétente.

4. D'autre part, le délai de dix jours fixé par les dispositions de l'article L. 774-2 du code de justice administrative pour la notification au contrevenant par le préfet du procès-verbal de contravention de grande voirie n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure.

5. Il résulte de l'instruction que le procès-verbal établi le 18 octobre 2016 a été notifié aux contrevenants le 25 octobre suivant, soit dans le respect du délai de 10 jours prévu par les dispositions du premier alinéa de l'article L. 774-2 précitées. Si les requérants soutiennent que la notification du procès-verbal est intervenue plus de trois mois après le constat des lieux effectué le 11 juillet 2016, il ne résulte pas de l'instruction que ce délai aurait porté atteinte aux droits de la défense quand bien même les installations de plage auraient été démontées après la période d'exploitation de la plage. En particulier, le caractère aisément transportable des matelas et parasols retire toute utilité à un constat d'huissier établi postérieurement au procès-verbal de contravention de grande voirie. Par ailleurs, est sans incidence sur le respect des droits de la défense, la circonstance que le procès-verbal de contravention, qui ne saurait être imprécis pour ce seul motif, ne rappelle pas la répartition des surfaces autorisées en fonction des activités de l'exploitant, dès lors que les contrôleurs du domaine public, qui ne sont pas chargés de vérifier le respect des stipulations contractuelles entre la commune et la société, ont constaté le dépassement global de la superficie autorisée et donc l'occupation irrégulière du domaine public maritime. Par suite, le moyen tiré du non-respect des droits de la défense, en violation de l'article L. 774-2 du code de justice administrative doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des poursuites :

6. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ". Aux termes de l'article L. 2132-3 du même code : " Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende. Nul ne peut en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations ".

7. Il résulte de l'instruction, et notamment des énonciations du procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 18 octobre 2016, par des agents assermentés de la direction départementale des territoires et de la mer de l'Hérault dont un dessinateur et qui font foi jusqu'à preuve contraire, qu'a été constatée, le 11 juillet 2016, la présence sur le domaine public maritime, d'une emprise totale au sol de 1 184 m², soit un excédent de 184 m² par rapport à la superficie autorisée. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les mesures de la surface totale n'auraient pas été prises et que les agents verbalisateurs auraient procédé à une affirmation arbitraire de la surface excédentaire alors que le procès-verbal qui comporte en outre deux photographies, précise par ailleurs que les mesures ont été prises avec un décamètre et un mètre-laser. Dans ces conditions, la matérialité de l'occupation irrégulière du domaine public maritime par des transats et parasols est établie et constitue une infraction aux dispositions des articles L. 2122-1 et L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la preuve contraire n'étant pas rapportée par les contrevenants.

8. Enfin, si les requérants soutiennent qu'en tant que cocontractant de l'Etat, ils ne pouvaient être poursuivis pour contravention de grande voirie, seule leur responsabilité contractuelle pouvant être engagée, la convention d'exploitation de plage prise en application du cahier des charges annexé à l'arrêté préfectoral du 12 mars 2010 n'a pas été conclue entre la SARL Arche ACD et l'Etat, mais entre cette société et la commune de Sète, elle-même concessionnaire de l'Etat. Dans ces conditions et en l'absence de disposition contractuelle liant l'Etat et la SARL Arche ACD, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'ils ne pouvaient être poursuivis pour contravention de grande voirie.

9. Il résulte de ce qui précède que la SARL Arche ACD et ses co-gérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier les a condamnés à payer solidairement une amende de 1 500 euros ainsi que la somme de 50 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie. Par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Arche ACD et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Arche ACD, M. E... B..., M. D... A... et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 24 janvier 2020.

N° 17MA03708

nl


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA03708
Date de la décision : 24/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : DUHIL DE BENAZE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-01-24;17ma03708 ?
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