La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/01/2020 | FRANCE | N°19MA01611

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 14 janvier 2020, 19MA01611


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2016, M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Marseille :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle la régie des eaux de Venelles a refusé de régulariser son salaire, à la suite de sa demande du 6 avril 2016 ;

2°) de condamner la régie des eaux de Venelles à lui verser les sommes de 35 320,43 euros au titre des rappels de salaires bruts pour la période du 1er janvier 2014 au 25 février 2018, de 3 532,04 euros au titre des c

ongés payés pour la même période, de 1 096,93 euros au titre de l'indemnité de mise à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2016, M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Marseille :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle la régie des eaux de Venelles a refusé de régulariser son salaire, à la suite de sa demande du 6 avril 2016 ;

2°) de condamner la régie des eaux de Venelles à lui verser les sommes de 35 320,43 euros au titre des rappels de salaires bruts pour la période du 1er janvier 2014 au 25 février 2018, de 3 532,04 euros au titre des congés payés pour la même période, de 1 096,93 euros au titre de l'indemnité de mise à la retraite ;

3°) de condamner la régie des eaux de Venelles à lui verser la somme de 90 000 euros au titre de dommages et intérêts ;

4°) d'enjoindre à la régie des eaux de Venelles de régulariser son salaire dans un délai de deux mois à compter du jugement ;

5°) d'enjoindre à la régie des eaux de Venelles de lui remettre des bulletins de salaire rectifiés de décembre 2013 à février 2018 et de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux ;

6°) de mettre à la charge de la régie des eaux de Venelles la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1610350 du 4 février 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. F....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 4 avril 2019 et le 10 décembre 2019,

M. A... F..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles la régie des eaux de Venelles a refusé de régulariser son salaire, à la suite de ses demandes du 6 avril 2016 et du 18 octobre 2016 ;

3°) de condamner la régie des eaux de Venelles à lui verser les sommes de 35 320,43 euros au titre des rappels de salaires bruts pour la période du 1er janvier 2014 au 25 février 2018, de 3 532,04 euros au titre des congés payés pour la même période, de 1 096,93 euros au titre de l'indemnité de mise à la retraite ;

4°) de condamner la régie des eaux de Venelles à lui verser la somme de 90 000 euros au titre de dommages et intérêts pour faute de l'employeur et résistance abusive ;

5°) d'enjoindre à la régie des eaux de Venelles, sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants de régulariser son salaire dans un délai de deux mois à compter du jugement ;

6°) d'enjoindre à la régie des eaux de Venelles de lui remettre des bulletins de salaire rectifiés de décembre 2013 à février 2018 et de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux ;

7°) de mettre à la charge de la régie des eaux de Venelles la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête de première instance est recevable car formulée dans le délai de recours contentieux ; en tout état de cause, même si l'on tient compte de la demande du 6 avril 2016, celle-ci n'a été suivie d'aucune décision expresse ;

- sa demande de régularisation n'a pas été soumise au conseil d'administration de la régie des eaux de Venelles, seul compétent pour fixer sa rémunération, ainsi que le prévoit l'article 10 des statuts de la régie ;

- en tant que directeur, il relève du droit public ; mais il doit bénéficier des règles qui régissent l'emploi de détachement et donc du salaire conventionnel prévu pour le personnel classé dans le groupe VIII de la convention collective nationale des entreprises d'eaux et d'assainissement ; la position contraire aboutirait à une méconnaissance du principe d'égalité entre les agents de la régie ;

- il a droit à des rappels de salaires et d'indemnité de mise à la retraite ;

- la résistance abusive de l'employeur pour régulariser sa situation lui a causé un préjudice.

Par un mémoire enregistré au greffe le 15 novembre 2019, la régie des eaux de Venelles, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. F... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'arrêté du 28 décembre 2000 portant extension de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public

- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant M. F..., et de Me G..., substituant Me E..., représentant la régie des eaux de Venelles.

Une note en délibéré présentée par Me C..., pour M. F..., a été enregistrée le 17 décembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Nommé directeur la régie des eaux de Venelles, le 11 janvier 2007, M. F... a demandé au tribunal administratif de Marseille la condamnation de cet établissement public industriel et commercial, créé par la commune de Venelles et doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, à lui verser la différence entre les salaires perçus et ceux que, selon lui, il aurait dû percevoir en application de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement ainsi qu'une somme au titre des congés payés et de lui allouer la somme de 90 000 euros à titre de dommages et intérêts. Par jugement du 4 février 2019, dont il relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions implicites attaquées :

2. Les décisions implicites de la régie des eaux de Venelles rejetant les réclamations, formulées par M. F... le 6 avril 2016 et le 18 octobre 2016, en vue de la régularisation de ses salaires et des sommes dues au titre des congés payés ainsi que du versement de dommages et intérêts, ont eu pour seul effet de lier le contentieux. L'intéressé, en formulant devant le tribunal des conclusions à fin de condamnation, a donné à l'ensemble de sa requête de première instance le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui a conduit le tribunal à se prononcer sur le droit de M. F... à percevoir les sommes qu'il réclame, le vice propre invoqué par celui-ci dont seraient, le cas échéant, entachées les décisions qui ont lié le contentieux, tiré de ce que ses réclamations n'ont pas été soumises au conseil d'administration de la régie des eaux de Venelles, est sans incidence sur la solution du litige. Par suite, les conclusions à fin d'annulation des décisions implicites attaquées doivent être, en tout état de cause, rejetées.

Sur les conclusions à fin de condamnation :

3. Aux termes de l'article 6 du décret du 13 janvier 1986 dans sa rédaction en vigueur à la date du détachement de M. F... : " Le détachement ne peut être accordé que lorsque la rémunération afférente à l'emploi de détachement n'excède pas la rémunération globale perçue dans l'emploi d'origine, majorée, le cas échéant, de 15 p. 100.(...). Le détachement a lieu à indice égal ou, à défaut, à indice immédiatement supérieur lorsque le corps, le cadre d'emplois ou l'emploi d'accueil ouvre droit à pension de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ou à pension du code des pensions civiles et militaires de retraite de l'Etat ". Ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir aux fonctionnaires concernés le droit de voir la rémunération globale qu'ils percevaient dans leur corps d'origine, majorée forfaitairement de 15 % mais instituent seulement un plafonnement de la rémunération de l'emploi d'accueil au-delà duquel le détachement ne peut pas être prononcé.

4. M. F..., fonctionnaire de la commune de Venelles, a été désigné par délibération du conseil municipal en date du 12 décembre 2006, pour exercer par voie de détachement les fonctions de directeur de la régie des eaux de Venelles. Le conseil d'administration de la régie, par sa délibération n° 5 du 11 janvier 2007, a approuvé la nomination de l'intéressé au poste de directeur et a fixé sa rémunération avec " un salaire proposé (qui) correspond à une augmentation de 5 % " et une rémunération d'ensemble comprenant une indemnité de détachement de 15 %. M. F... se prévaut de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement du 12 avril 2000, étendue par arrêté du 28 décembre 2000, pour demander que son salaire et ses indemnités de congés payés soient revalorisés par application de cette convention, et que lui soit versée une indemnité de mise à la retraite.

5. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, selon les stipulations de l'article 1er de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement du 12 avril 2000, étendue par arrêté du 28 décembre 2000, le champ d'application de cette convention est limité aux entreprises et établissements exerçant leurs activités dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché, ce qui n'est pas le cas de la régie des eaux de Venelles. Par ailleurs, M. F... ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article L. 2211-1 du code du travail qui rendent applicable le livre II de ce même code relatif à la négociation collective et aux conventions et accords collectifs de travail, aux établissements publics à caractère industriel et commercial alors que l'article L. 2222-1 dudit code prévoit expressément que " Les conventions et accords collectifs de travail, ci-après désignés " conventions " et " accords " dans le présent livre, déterminent leur champ d'application territorial et professionnel ". Or, précisément, les régies des communes exploitant directement le service public de l'eau et de l'assainissement sont exclues du champ d'application de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement. Dès lors, M. F... n'est pas fondé à soutenir que cette convention collective s'applique d'office à la régie des eaux de Venelles.

6. En deuxième lieu, alors même que les bulletins de paye de l'intéressé portent la mention de la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement, et à partir de 2016, font état du groupe VIII qui est un des groupes de classement des salariés soumis à cette convention, sans que la régie ait procédé à un changement de rémunération, ces seules circonstances ne suffisent pas à établir que cet établissement public a eu l'intention d'y soumettre volontairement et dans son ensemble, la rémunération de M. F... dès lors que son salaire de détachement a, ainsi qu'il a été dit au point 4, été clairement fixé, en 2007, par référence à sa rémunération antérieure en tant que fonctionnaire territorial de la commune de Venelles.

7. En troisième lieu, dès lors que la régie n'a pas entendu soumettre volontairement l'ensemble de ses agents à la convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement, et que M. F... était soumis aux règles posées par la délibération de 2007 régissant sa rémunération dans le cadre de sa fonction de directeur exercée par voie de détachement, il ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement du fait que les autres agents de la régie seraient eux soumis à cette convention ou qu'à sa mise à la retraite, elle lui aurait été appliquée.

8. En l'absence de faute susceptible d'engager la responsabilité de la régie des eaux de Venelles, la demande par M. F... de réparation des préjudices allégués ne peut qu'être rejetée.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de

non-recevoir opposée par la régie des eaux de Venelles, que M. F... n'est pas fondé à demander à la Cour d'annuler le jugement attaqué et de condamner la régie des eaux de Venelles. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Venelles, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. F... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F... le versement à la régie des eaux de Venelles d'une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : M. F... versera à la régie des eaux de Venelles une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F... et à la régie des eaux de Venelles.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2019, où siégeaient :

- M. B..., président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2020.

2

N° 19MA01611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01611
Date de la décision : 14/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

33-02-06 Établissements publics et groupements d'intérêt public. Régime juridique des établissements publics. Personnel.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Alexandre BADIE
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : BIUNNO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-01-14;19ma01611 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award