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31/12/2019 | FRANCE | N°18MA03265

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 31 décembre 2019, 18MA03265


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 2 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue a rejeté sa demande de prise en charge au titre de l'allocation de retour à l'emploi (ARE), de condamner la commune à lui verser une somme représentative des allocations chômage à compter du 1er janvier 2013, en tenant compte de ses périodes d'emploi intérimaire, ainsi que la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice moral et financier

qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1601268 du 17 mai 2018, le t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 2 juillet 2013 par laquelle le maire de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue a rejeté sa demande de prise en charge au titre de l'allocation de retour à l'emploi (ARE), de condamner la commune à lui verser une somme représentative des allocations chômage à compter du 1er janvier 2013, en tenant compte de ses périodes d'emploi intérimaire, ainsi que la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice moral et financier qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1601268 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2018, Mme C..., représentée par la SCP d'avocats Breuillot et Varo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision du maire de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue du 2 juillet 2013 ;

3°) de condamner la commune à lui verser une somme représentative des allocations chômage à compter du 1er janvier 2013, en tenant compte de ses périodes d'emploi intérimaire, ainsi que la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice moral et financier qu'elle estime avoir subi ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue la somme de 1 500 euros et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en tant qu'il est fondé sur un moyen relevé d'office par les premiers juges sans communication préalable aux parties, en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- elle aurait dû se voir proposer le poste de cuisinier, correspondant au grade d'adjoint technique de 2ème classe, laissé vacant du fait du recrutement de son titulaire au poste de chef de cuisine ;

- la commune a méconnu son obligation de lui proposer les trois premières vacances de poste contrairement à ce que prévoient les dispositions de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- l'absence de proposition en priorité à Mme C... du poste de cuisinier créé dans le cadre d'emplois des agents techniques territoriaux postérieurement à sa demande de réintégration est contraire aux dispositions de l'article 97 de la même loi dès lors que la collectivité devait la maintenir en surnombre et lui proposer en priorité tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ;

- elle a été involontairement privée d'emploi dès lors que la proposition d'emploi en qualité d'agent d'entretien n'était pas ferme et précise et a droit à percevoir l'allocation pour perte involontaire d'emploi à compter du 1er janvier 2013 ;

- les illégalités fautives commises par la commune engagent sa responsabilité.

La requête a été communiquée à la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., adjointe technique territoriale de 2ème classe employée par la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue, a bénéficié, sur sa demande, d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles de trois années à compter du 1er janvier 2010. Par courrier du 18 septembre 2012, elle a demandé à être réintégrée au terme de sa disponibilité, soit le 1er janvier 2013. A la suite de son refus du poste d'agent d'entretien à temps complet à compter de cette date qui lui a été proposé par la commune le 4 décembre 2012, elle a été maintenue en disponibilité par arrêté municipal du 28 décembre 2012. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 mai 2018 ayant rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 2 juillet 2013 par laquelle le maire a rejeté sa demande de prise en charge au titre de l'allocation de retour à l'emploi (ARE) et à la condamnation de la commune à lui verser une somme représentative des allocations chômage à compter du 1er janvier 2013, en tenant compte de ses périodes d'emploi intérimaire, ainsi que la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice moral et financier qu'elle estime avoir subi.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour rejeter les conclusions indemnitaires présentées par Mme C..., les premiers juges ont retenu que celle-ci n'établissait pas, alors que la charge de la preuve lui en incombait, que le poste de cuisinier créé postérieurement à sa demande de réintégration correspondait à son grade et aurait dû lui être prioritairement proposé. Ce faisant, le tribunal a porté une appréciation sur l'argumentation qui lui était soumise en faisant application des règles générales gouvernant l'administration de la preuve qui n'avaient pas à être préalablement soumises au débat contradictoire. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la requérante, le jugement attaqué n'est pas irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du 2 juillet 2013 :

3. D'une part, il résulte des dispositions des articles 72 et 97 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale que le fonctionnaire territorial qui demande sa réintégration après avoir été placé en disponibilité pour convenances personnelles pendant une durée n'ayant pas excédé trois années, doit se voir proposer une des trois premières vacances d'emploi dans sa collectivité d'origine et que, s'il refuse successivement trois postes correspondant à son grade qui lui sont proposés, le cas échéant par le Centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion, dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de cette réintégration, il peut être licencié.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi, (...) aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du même code : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : / 1° Les (...) agents titulaires des collectivités territoriales (...) ".

5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un fonctionnaire territorial qui, à l'expiration de la période pendant laquelle il a été placé, sur sa demande, en disponibilité pour convenances personnelles, est maintenu dans cette position, ne peut prétendre au bénéfice des allocations d'assurance chômage que si ce maintien résulte de motifs indépendants de sa volonté. Tel n'est pas le cas du fonctionnaire qui a refusé un emploi, répondant aux conditions définies par les dispositions statutaires applicables, qui lui a été proposé par la collectivité à la suite de sa demande sa réintégration.

6. Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue a, les 25 octobre et 4 décembre 2012, proposé à Mme C... deux postes à compter du 1er janvier 2013 correspondant à son grade, le premier à temps non complet, et le second, en qualité d'agent d'entretien à temps complet. Si elle a pu légitimement refuser le premier poste le 22 novembre 2012 au motif qu'il ne s'agissait pas d'un emploi à temps complet, la proposition qui lui a été faite le 4 décembre 2012 présentait un caractère suffisamment ferme et précis et répondait aux conditions définies par les dispositions statutaires dont elle relevait.

7. Le refus de la requérante du poste d'agent d'entretien à temps complet correspondant à son grade proposé le 4 décembre 2012 a contraint la collectivité à la maintenir en disponibilité par arrêté du 28 décembre 2012 au-delà de la période de trois ans de sa disponibilité pour convenances personnelles. Dans ces conditions, en l'absence de motif légitime de nature à fonder son refus, Mme C... ne peut être regardée comme ayant été maintenue en disponibilité pour des motifs indépendants de sa volonté ni, par suite, comme ayant été involontairement privée d'emploi. C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont retenu qu'elle n'était pas fondée à demander l'annulation de la décision du 2 juillet 2013 du maire de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue ayant refusé de lui accorder le bénéfice du versement d'allocations chômage à la suite de sa fin de droit auprès de Pôle Emploi.

En ce qui concerne les conclusions pécuniaires et indemnitaires :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que Mme C... n'est pas fondée à se prévaloir d'une illégalité fautive qui entacherait la décision du 2 juillet 2013 du maire de la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue.

9. En second lieu, aux termes de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. Le fonctionnaire mis en disponibilité, soit d'office à l'expiration des congés institués par les 2°, 3° et 4° de l'article 57 de la présente loi, soit de droit, sur demande, pour raisons familiales, est réintégré à l'expiration de sa période de disponibilité dans les conditions prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 67 de la présente loi. Dans les autres cas, si la durée de la disponibilité n'a pas excédé trois années, une des trois premières vacances dans la collectivité ou l'établissement d'origine doit être proposée au fonctionnaire ". Aux termes de l'article 26 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration : " (...) le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité. (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) ". Aux termes du I de cet article 97, dans la rédaction résultant de la loi du 27 décembre 1994 : " Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique paritaire. (...) Si la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Pendant cette période tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ; la collectivité ou l'établissement, la délégation régionale ou interdépartementale du centre national de la fonction publique territoriale et le centre de gestion examinent, chacun pour ce qui le concerne, les possibilités de reclassement. Est également étudiée la possibilité de détachement du fonctionnaire dans un emploi équivalent d'un autre cadre d'emplois au sein de la même collectivité ou de l'établissement. Au terme de ce délai, le fonctionnaire de catégorie A est pris en charge par le centre national de la fonction publique territoriale et le fonctionnaire de catégorie B ou C par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l'établissement ".

10. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en prévoyant que les agents intéressés sont maintenus en disponibilité " jusqu'à ce qu'un emploi leur soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ", les auteurs du décret du 13 janvier 1986 ont seulement entendu se référer aux conditions dans lesquelles des emplois sont proposés aux agents par leur collectivité ou établissement d'origine ainsi que par le centre national de la fonction publique territoriale ou par le centre de gestion, à l'exclusion des règles relatives au maintien en surnombre et à la prise en charge par le centre national de la fonction publique territoriale ou par le centre de gestion. Il s'ensuit, notamment, que le fonctionnaire arrivé au terme d'une période de disponibilité pour convenances personnelles d'une durée supérieure à trois ans ne peut demander à " être maintenu en surnombre " et ne peut se prévaloir de la règle selon laquelle " tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ".

11. Il résulte de l'instruction qu'en proposant à Mme C..., qui, au demeurant, n'avait aucun droit à être réintégrée dans le même service que celui dans lequel elle travaillait avant son départ en disponibilité, l'une des trois premières vacances et non les trois premières vacances de postes correspondant à son grade, la collectivité n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984. Par ailleurs, si Mme C... conservait le droit, après le refus mentionné au point 6, d'obtenir sa réintégration sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, elle ne pouvait ni demander à être maintenue en surnombre, ni se prévaloir de la règle selon laquelle " tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ", qui s'applique, en vertu des dispositions précitées de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, aux seuls fonctionnaires maintenus en surnombre en raison de la suppression de leur emploi. En s'abstenant de lui proposer par priorité le poste de cuisinier relevant du cadre d'emploi des adjoints techniques territoriaux créé postérieurement à sa demande de réintégration, l'administration n'a pas non plus méconnu les dispositions de l'article 97 de la même loi. Enfin, il résulte encore de l'instruction que la commune a, depuis le 1er janvier 2013, proposé à l'intéressée à plusieurs reprises un poste d'agent d'entretien répondant aux conditions définies par les dispositions statutaires qui lui sont applicables et que ces propositions sont restées sans suite. Mme C... n'est donc pas fondée à soutenir que cette collectivité aurait commis dans la gestion de sa réintégration une faute de nature à engager sa responsabilité.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune d'Entraigues-sur-la-Sorgue.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2019, où siégeaient :

- Mme D..., présidente de la cour,

- Mme E..., présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Lu en audience publique, le 31 décembre 2019.

6

N° 18MA03265


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03265
Date de la décision : 31/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité - Réintégration.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Allocation pour perte d'emploi.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : CABINET LANZARONE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-31;18ma03265 ?
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