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19/12/2019 | FRANCE | N°18MA05423

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 19 décembre 2019, 18MA05423


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 23 novembre 2015 du président du conseil départemental des Alpes-Maritimes procédant au retrait de son agrément d'assistante maternelle et de condamner le département des Alpes-Maritimes à lui verser une somme de 12 800 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1505068 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté

sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 23 novembre 2015 du président du conseil départemental des Alpes-Maritimes procédant au retrait de son agrément d'assistante maternelle et de condamner le département des Alpes-Maritimes à lui verser une somme de 12 800 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1505068 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2018, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 30 octobre 2018 en tant qu'il a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation ;

2°) d'annuler la décision du 23 novembre 2015 portant retrait de son agrément d'assistante maternelle ;

3°) de mettre à la charge du département des Alpes-Maritimes la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est entachée de vices de procédure eu égard à la tardiveté de la convocation devant la commission consultative paritaire départementale et à l'absence de communication du rapport établi par le médecin de la protection maternelle et infantile ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2019, le département des Alpes-Maritimes, représenté par la SELARL Bazi et Cazelles, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de production du jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le décret n° 2012-364 du 15 mars 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Argoud, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., agréée en qualité d'assistante maternelle depuis le 12 janvier 1988 pour l'accueil de 3 enfants, relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 30 octobre 2018 en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 23 novembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes a procédé au retrait de son agrément.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été convoquée à la réunion de la commission consultative paritaire départementale du 4 novembre 2015 par un courriel du 22 octobre 2015 et par un courrier du même jour. Mme A... est donc fondée à soutenir que le délai de quinze jours prévu par l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et de la famille n'a pas été respecté.

4. Il est toutefois constant que, après que son agrément eut été suspendu par une décision motivée du 24 juillet 2015, Mme A... a reçu un courrier daté du 7 septembre 2015 l'informant de la saisine de la commission paritaire départementale en vue du retrait de son agrément, lui rappelant les motifs de la décision envisagée et l'informant qu'elle avait la possibilité de consulter son dossier et de présenter des observations orales devant cette commission. Il est également établi qu'elle avait déjà consulté son dossier, accompagnée de son conseil, dès le 27 août 2015. Dans ces conditions, l'irrégularité relevée au point précédent, qui ne peut être regardée comme l'ayant privée d'une garantie, n'est pas susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée.

5. La requérante n'a pas davantage été privée d'une garantie du fait de l'absence de communication du rapport établi le 4 septembre 2015 par le médecin du service de la protection maternelle et infantile qui ne se trouvait pas dans son dossier lorsqu'elle l'a consulté le 27 août 2015 dès lors que ce rapport, qui rappelle les griefs qui lui sont reprochés et résume l'entretien qu'elle a eu avec le médecin le 24 juillet 2015, ne contient aucun élément nouveau par rapport aux éléments figurant dans son dossier et aux courriers des 7 septembre 2015 et 22 et 23 octobre 2015.

6. Il résulte des dispositions des articles L. 421-3 et L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies.

7. Par ailleurs, le référentiel fixant les critères de l'agrément des assistants maternels par le président du conseil départemental, annexé au décret du 15 mars 2012 relatif au référentiel fixant les critères d'agrément des assistants maternels, prévoit, dans la sous-section 2 de la section 1 relative aux capacités de communication et de dialogue, qu'il convient " de prendre en compte : (...) 2° L'aptitude à la communication et au dialogue nécessaire pour l'établissement de bonnes relations avec l'enfant, ses parents et les services départementaux de protection maternelle et infantile ; (...) " et à la sous-section 5 de la même section, relative au rôle et aux responsabilité de l'assistant maternel, qu'il convient " de prendre en compte (...) 4° La compréhension et l'acceptation du rôle d'accompagnement, de contrôle et de suivi des services départementaux de protection maternelle et infantile. ". Ce même référentiel prévoit dans la sous-section 1 de la section 2, relative aux conditions matérielles d'accueil et de sécurité qu'il convient " de prendre en compte (...) 1° La conformité du lieu d'accueil aux règles d'hygiène (...) " et qu'en " termes de sécurité, une vigilance particulière doit être apportée : / 1° A la capacité à prévenir les accidents domestiques et les risques manifestes pour la sécurité de l'enfant (rangement des produits, notamment d'entretien ou pharmaceutiques et objets potentiellement dangereux hors de la vue et de la portée de l'enfant accueilli), en proposant spontanément les aménagements nécessaires ou en acceptant ceux prescrits par les services départementaux de protection maternelle et infantile ; (...) ".

8. La décision portant retrait de l'agrément de Mme A... en qualité d'assistante maternelle est fondée sur le caractère récurrent de faits de maltraitance à l'égard de certains enfants accueillis, les manquements aux règles d'hygiène et de sécurité ainsi que ses difficultés à accepter de faire évoluer sa pratique professionnelle.

9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le service de la protection maternelle et infantile des Alpes-Maritimes a été alerté par les parents d'enfants gardés par Mme A... d'acte de maltraitance en 2011, en 2013 et en 2015. Les trois attestations d'assistantes-maternelles présentes avec elle dans un jardin public le matin du 20 juillet 2015 si elles peuvent jeter un doute sur l'exactitude de l'attitude qu'elle aurait adoptée ce jour-là à l'égard d'une jeune enfant confiée à sa garde, qui a été dénoncée par courriers anonymes, ne permettent pas, à elles seules, de remettre en cause la réalité des autres situations de même nature relevées à son encontre en 2011 et en 2013, qui sont suffisamment établies par les pièces du dossier. Ainsi, et alors même que ces faits sont antérieurs au dernier renouvellement de l'agrément de Mme A... le 13 mai 2013, au demeurant assorti de réserves, le président du conseil départemental a pu valablement en tenir compte dans l'appréciation de la situation de l'intéressée pour considérer que Mme A... ne pouvait plus garantir la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants.

10. En second lieu, à la suite de sa demande de renouvellement de son agrément en 2013, Mme A... a fait l'objet de 3 visites les 24 avril 2013 et 3 et 6 mai 2013 par des puéricultrices du service de la protection maternelle et infantile sans qu'un résultat définitif ne soit obtenu sur les aménagements de son logement en matière de sécurité ainsi que sur le rangement de l'habitation contrairement à ce que la requérante soutient. Son agrément n'a d'ailleurs été prolongé que sous réserve d'amélioration et de conservation de la sécurité et de l'ordre de son appartement ainsi que d'un suivi par la psychologue du service avec laquelle l'intéressée a eu 3 entretiens dont il ressort qu'elle est réticente à remettre en cause ses pratiques professionnelles et à accepter les remarques des agents du département chargés d'assurer le contrôle, la surveillance et l'accompagnement des assistants maternels sur l'hygiène et la sécurité de son domicile. Il ressort, de plus, du rapport dressé par le médecin du service à l'issue de l'entretien qu'il a eu avec elle le 24 juillet 2015, que persistent des difficultés de dialogue avec l'intéressée depuis sa dernière demande de renouvellement d'agrément.

11. Eu égard au caractère récurrent des manquements rappelés ci-dessus tant dans le comportement de Mme A... à l'égard des enfants confiés à sa garde, que dans les conditions d'accueil de ces derniers, et alors même que certains parents des enfants accueillis lui ont manifesté leur confiance, le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes a pu légalement, sans fonder son appréciation sur des faits matériellement inexacts, estimer que les conditions d'accueil proposées par la requérante ne garantissaient pas la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis, et prononcer le retrait de son agrément.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du conseil départemental des Alpes-Maritimes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le conseil départemental des Alpes-Maritimes.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera au conseil départemental des Alpes-Maritimes une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au conseil départemental des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2019 où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme D..., présidente-assesseure,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.

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N° 18MA05423


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA05423
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Aide sociale - Différentes formes d'aide sociale - Aide sociale à l'enfance - Placement des mineurs - Placement familial.

Collectivités territoriales - Département - Attributions - Compétences transférées - Action sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : HARMONIA JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-19;18ma05423 ?
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