Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2014 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles applicable sur la commune de Corneilla-la-Rivière ainsi que la décision du préfet du 29 janvier 2015 rejetant leur recours gracieux contre cet arrêté et, à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2014 en tant qu'il classe les parcelles 1120, 1121, 1117, 1492 et 1118 en tout ou partie en secteur R2.
Par un jugement n° 1501867 du 28 février 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 avril 2017, M. et Mme B..., représentés par Me E..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 février 2017 ;
2°) d'annuler la décision du préfet des Pyrénées-Orientales du 29 janvier 2015 rejetant leur recours gracieux ;
3°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2014 du préfet des Pyrénées-Orientales ;
4°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2014 du préfet des Pyrénées-Orientales en tant qu'il classe les parcelles 1120, 1121, 1117, 1492 et 1118 en tout ou partie en secteur R2 ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les premiers juges n'ont pas répondu à plusieurs moyens, tirés de ce que seules leurs parcelles sont concernées par un classement en zone inconstructible, la mémoire de l'homme prise en considération par les auteurs du plan est trop courte pour apprécier un aléa, une réunion de concertation a eu lieu après l'approbation du plan de prévention des risques naturels (PPRN), les attestations produites qui couvrent une période supérieure au risque " trentennal " retenu par le bureau d'études BRL n'ont pas été prises en compte, le guide d'élaboration des PPRI n'a pas été pris en compte ;
- des réunions de concertation se sont tenues après l'approbation du PPRN par l'arrêté contesté et n'ont pas été reportées dans le bilan de la concertation ;
- le comité de suivi mis en place par le préfet pendant la phase de concertation est illégal car non prévu par les textes de loi et composé de manière irrégulière au regard de la non représentation des associations protectrices de l'environnement et de la répartition inégale des sièges entre les communes ;
- le commissaire enquêteur a été fortement influencé par l'existence de ce comité de suivi ainsi que par les réponses des services de l'Etat aux observations du public ;
- la détermination du risque inondation est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que, selon de nombreuses attestations produites, la crue de référence intervenue en 1940 n'a pas concerné leur quartier qui de plus est aujourd'hui totalement urbanisé ; le bureau d'études BRL a basé son calcul théorique sur un aléa erroné ; le guide d'élaboration des PPRN n'a pas été pris en compte ;
- le zonage réglementaire de leurs parcelles est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elles sont classées en zone NA d'urbanisation future du plan d'occupation des sols et qu'elles ne se situent pas, comme il a été considéré, dans un couloir d'écoulement d'aléa trentennal ;
- ce zonage est constitutif d'une rupture d'égalité devant les charges publiques dès lors que leurs parcelles sont dans la même situation que celles classées en zone B et que leur demande de modification du PPRN n'a pas été traitée de la même manière que celle présentée par le maire de Théza qui a obtenu satisfaction.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Une ordonnance portant clôture d'instruction immédiate a été émise le 21 janvier 2019.
Un mémoire présenté par M. et Mme B... a été enregistré le 27 février 2019, postérieurement à la clôture d'instruction et non communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 1er octobre 2008, le préfet des Pyrénées-Orientales a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels sur les cinq communes du bassin versant " Têt moyenne ", portant sur le territoire des communes de Corneilla-la-Rivière, Pézilla-la-Rivière, Villeneuve-la-Rivière, Baho et Saint-Estève. Après enquête publique qui s'est déroulée du 16 décembre 2013 au 31 janvier 2014, par arrêté du 29 septembre 2014, le préfet des Pyrénées-Orientales a approuvé le plan de prévention des risques naturels de la commune de Corneilla-la-Rivière, celui-ci prenant à la fois en considération les risques d'inondation et de mouvements de terrain. Par courrier du 10 décembre 2014, M. et Mme B... ont formé un recours gracieux contre cet arrêté, qui a été rejeté par le préfet par décision du 29 janvier 2015. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 19 juin 2014.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Montpellier a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les requérants. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a suffisamment motivé le jugement attaqué en relevant aux points 4 et 5, pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de leurs parcelles au titre du zonage règlementaire, que les attestations établies par cinq particuliers affirmant n'avoir jamais constaté d'inondation dans le secteur de " Camp des Capelas " où se situent les parcelles des requérants ne sont pas de nature à remettre en cause les résultats issus de l'étude réalisée par le bureau d'études BRL ingénierie en 2012, que le classement des parcelles résulte de la prise en compte de leur caractère et de leur situation effective dans un couloir d'écoulement préférentiel susceptible d'être inondé dès l'occurrence trentennale et que la circonstance que des terrains soumis à un même aléa fassent l'objet d'un zonage différent demeure sans effet sur la légalité du classement dès lors qu'ont été classés en zone B2 les terrains situés en zone urbaine ou en zone d'urbanisation future déjà construits, les terrains situés en zone naturelle agricole, même comportant une construction, étant classés en zone rouge. Par ailleurs, il ne ressort pas des écritures présentées par les requérants qu'ils aient contesté la légalité externe de l'arrêté du 29 septembre 2014 en faisant valoir que deux réunions de concertation auraient eu lieu après l'approbation du PPRN. Enfin, le guide méthodologique pour l'élaboration des PPR inondation édité par le ministère de l'environnement en 1996 dont les requérants se seraient prévalus n'a en tout état de cause aucune valeur règlementaire et ne peut donc être invoqué devant le juge administratif qui n'est pas tenu de répondre à un moyen inopérant. Par suite, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la consultation publique organisée par le préfet des Pyrénées-Orientales :
3. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. / Sont associés à l'élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés (...) ". Selon l'article R. 562-2 du même code, dans sa version antérieure au 1er août 2011 applicable au litige : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. (...) / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet. (...) ". La concertation à destination du public prévue par ces dispositions doit porter sur la nature et les options essentielles du projet et se dérouler avant que celui-ci ne soit arrêté. Il incombe, par ailleurs, à l'autorité administrative de veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu'elle a elle-même fixées.
4. L'arrêté du 1er octobre 2008 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prescrit l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant " Têt moyenne ", prévoit en ses articles 3 et 4 que la concertation liée à l'élaboration de ce document se déroulerait selon les modalités suivantes : - la création d'un comité de suivi de l'élaboration du projet de PPRN,/ - la tenue de deux réunions de ce comité aux différentes phases de l'élaboration du projet (présentation de l'aléa et lancement de la réflexion sur les enjeux, définition des principes de zonage et de règlement associé) - / la tenue de deux réunions publiques (une réunion de présentation de la démarche et des études préliminaires d'aléa - / une réunion de présentation du projet préalablement aux consultations réglementaires - / la mise à disposition en mairie des communes concernées, après chaque réunion publique, pendant une durée d'un mois, d'un dossier provisoire et d'un registre afin de recueillir les observations du public - / la mise à disposition tout au long de la procédure et au fur et à mesure de l'avancement du dossier des documents provisoires sur le site www.risques-majeurs66.coM. De telles prescriptions étaient suffisantes pour satisfaire aux exigences des dispositions précitées des articles L. 562-3 et R. 562-2 du code de l'environnement en matière de concertation.
5. Il ressort du bilan de concertation réalisé par la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), qu'elle s'est déroulée conformément aux dispositions des articles 3 et 4 de l'arrêté préfectoral du 1er octobre 2008. Si les requérants soutiennent sans autre précision que deux réunions de concertation auraient eu lieu le 18 novembre et le 4 décembre 2014, postérieurement à l'approbation du PPRN, dont en outre il n'a pas été fait état dans le bilan de concertation, il ressort des pièces du dossier, notamment de la décision du 29 janvier 2015 du préfet des Pyrénées-Orientales rejetant le recours gracieux des intéressés, que la réunion du 18 novembre 2014 a eu pour objet la présentation d'une étude de réduction du risque inondation que la commune a souhaité lancer dans le cadre du programme de prévention des inondations sur le bassin de la Têt et que celle qui s'est tenue le 4 décembre 2014 a consisté en une présentation du PPRN approuvé à la population en présence des services de la DDTM à la demande du conseil municipal de Corneilla-la-Rivière. La circonstance que, lors de ces réunions, les services de l'Etat auraient communiqué aux participants une information erronée quant au délai de recours dont ils disposaient à l'encontre de l'arrêté d'approbation du PPRN, est sans incidence sur le respect des obligations relatives aux modalités de concertation.
6. Ainsi qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, conformément aux dispositions précitées des articles L. 562-3 et L. 562-2 du code de l'environnement, par arrêté du 1er octobre 2008, le préfet des Pyrénées-Orientales a défini les modalités de concertation dont la création d'un comité de suivi de l'élaboration du projet de PPRN. Il en a également fixé la composition par arrêté du 8 décembre 2008. Ce comité a été constitué de deux collèges, le premier dénommé collège des acteurs locaux, a regroupé les maires des cinq communes concernées, des représentants de la société civile de ces communes, les présidents des établissements publics de coopération intercommunale concernés et celui du syndicat mixte SCOT Plaine du Roussillon. Le second collège, dénommé collège des services associés a regroupé des membres des administrations concernées. Aucune disposition ni aucun principe n'imposait à l'autorité administrative d'y inviter des représentants d'associations départementales ou d'instaurer une parfaite égalité entre les représentants de chacune des communes.
En ce qui concerne la régularité de l'enquête publique :
7. Si les requérants soutiennent que des pressions auraient été exercées sur le commissaire enquêteur, ni les réponses apportées par les services de l'Etat aux remarques du public lors de l'enquête publique, ni la note intitulée " remarques formulées lors de la mise à disposition du dossier aléa de 2013 " ne sauraient être regardées comme des pressions exercées sur le commissaire enquêteur de nature à avoir entaché d'irrégularité le déroulement de l'enquête publique.
8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la procédure d'adoption du plan de prévention en litige serait viciée doit être écarté.
En ce qui concerne le classement en zone d'aléa fort des terrains en litige :
9. Aux termes de l'article L. 562-8 du code de l'environnement : " Dans les parties submersibles des vallées et dans les autres zones inondables, les plans de prévention des risques naturels prévisibles définissent, en tant que de besoin, les interdictions et les prescriptions techniques à respecter afin d'assurer le libre écoulement des eaux et la conservation, la restauration ou l'extension des champs d'inondation. "
10. Selon les extraits du rapport de présentation, le plan de prévention des risques d'inondation de la commune de Corneilla-la-Rivière a été élaboré, par référence au guide d'élaboration des PPRi en Languedoc-Roussillon, à partir d'une première étude hydrogéomorphologique décrivant les écoulements historiques du bassin versant de la Têt Moyenne, ainsi qu'une étude topographique permettant de préciser plus avant les conditions d'écoulement en lit majeur. Sur ces bases, une modélisation hydraulique numérique a été réalisée par le bureau d'études BRL en 2012 en vue d'apprécier le niveau d'aléa résultant du champ d'inondation pour une crue de la Têt et des ravins affluents en rive gauche pour une crue trentennale, cinquantennale et centennale. Au terme de cette étude, alors qu'aucune règle ni aucun principe n'impose au préfet de ne recourir qu'à la seule approche hydrogéomorphologique, les parcelles des requérants qui se situent dans le secteur de " Camp des Capelas " au sud-ouest de la commune de Corneilla-de-la-Rivière, en périphérie de la zone urbanisée de la commune et à proximité de terrains agricoles et naturels, sont exposées à un aléa inondation dit moyen provenant du ravin des Coules, un affluent de la Têt. Les études menées ont établi qu'en cas de crue d'occurrence centennale du ravin des Coumes concomitante avec une crue trentenale, au vu du pendage du bassin versant, les eaux débordées du ravin s'écouleraient en nappe vers l'aval rejoignant la dérivation de la Berne à Pézilla-la-Rivière. Les parcelles des requérants, situées dans l'axe de ce couloir d'écoulement, seraient alors inondées par une hauteur d'eau inférieure à 50 cm. Elles se situent donc dans un champ d'expansion des crues subissant des inondations naturelles. A ce titre, elles ont été classées dans la zone R2 du règlement du PPRN correspondant " aux zones d'expansion de crue exposées à un aléa modéré où les constructions nouvelles y sont interdites. La préservation de la capacité des champs d'expansion des crues, qui permet de limiter leur impact en aval, présente un caractère d'intérêt général et justifie conformément aux prescriptions de l'article L. 562-8 du code de l'environnement, que puissent être déclarées inconstructibles ou enserrées dans des règles de constructibilité limitée, des zones ne présentant pas un niveau d'aléa fort ". Si les requérants contestent le caractère inondable de leurs parcelles en produisant des attestations établies par cinq particuliers affirmant n'avoir jamais constaté d'inondation dans ce secteur y compris lors de la crue centennale de 1940, d'une part, ces éléments ne sont pas suffisants pour remettre en cause les résultats de l'étude technique réalisée par le bureau d'études BRL, d'autre part, la circonstance que des parcelles n'aient par le passé pas été inondées, à la supposer avérée, ne garantit pas qu'elles ne le seront pas à l'avenir, eu égard en particulier aux changements de circonstances intervenus depuis 1940. Par ailleurs, même si les parcelles des requérants ont été classées en zone d'urbanisation future par le plan d'occupation des sols de Pézilla-la-Rivière, alors qu'un plan de prévention des risques naturels constitue une servitude d'utilité publique qui s'impose au document d'urbanisme, leur qualité de champ d'expansion des crues exposé à un aléa modéré, lié à leur caractère non construit, justifie leur classement en zone R2 du PPRN et non en zone B. Il suit de là, que le moyen tiré de ce que le classement en " zone rouge " des terrains des requérants serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
11. Si les requérants soutiennent que le plan litigieux méconnaît le principe d'égalité au motif que leurs parcelles se trouvent dans une situation similaire à celles des parcelles classées en zone B, ces parcelles sont dans une situation différente de celles des requérants. En interdisant les constructions dans un champ d'expansion des crues, le plan de prévention en litige a institué une différence de traitement qui est en rapport direct avec l'objet d'un PPRN. Par ailleurs, la différence de traitement ainsi créée n'apparaît pas manifestement disproportionnée au regard de la différence de situation qui la justifie. Par suite cette première branche du moyen doit être écartée.
12. Par ailleurs, si le PPRI couvrant le territoire de la commune de Thésa a fait l'objet d'une modification, les requérants n'établissent pas en quoi cette modification révélerait une rupture du principe d'égalité dans le traitement de leurs parcelles par le PPRN contesté. Par suite, le moyen tiré de la rupture d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.
13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D É C I D E :
Article 1er : La requête M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... B... et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2019.
N° 17MA01752
ia