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05/12/2019 | FRANCE | N°18MA02290

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 05 décembre 2019, 18MA02290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nice a nommé le professeur Emile D... responsable du service de cardiologie à compter du 10 octobre 2015, ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur général de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur sur le recours hiérarchique dirigé contre cette décision.

Par un jugement n° 1600649 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Nice a annulé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nice a nommé le professeur Emile D... responsable du service de cardiologie à compter du 10 octobre 2015, ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur général de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur sur le recours hiérarchique dirigé contre cette décision.

Par un jugement n° 1600649 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du directeur du CHRU de Nice du 9 octobre 2015, a mis à la charge du CHRU de Nice des frais de procédure et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2018, le CHRU de Nice, représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 14 mars 2018 en tant que par ce jugement, le tribunal a annulé la décision du directeur du CHRU de Nice du 9 octobre 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont accueilli un moyen qui n'avait pas été soulevé ;

- la procédure ayant abouti à la décision contestée, en ce que celle-ci a été prise après avis du chef de pôle, a été régulière ;

- l'existence d'un vice de procédure, à le supposer établi, doit être exclue en application de la théorie de la formalité impossible ;

- les moyens soulevés par M. E... devant le tribunal doivent être écartés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2018, M. E..., représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du CHRU de Nice d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le CHRU de Nice ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. D... qui n'a pas produit de mémoire.

Un mémoire présenté pour le CHRU de Nice a été enregistré le 11 octobre 2019 après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H...,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant le CHRU de Nice.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... E..., professeur des universités-praticien hospitalier, a été nommé responsable du service de cardiologie au sein du pôle " spécialités médicales et chirurgie Haut Pasteur " du CHRU de Nice par une décision du directeur général de cet établissement du 10 octobre 2011. Le CHRU de Nice fait appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 14 mars 2018 en tant que par ce jugement, le tribunal a, à la demande de M. E..., annulé la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général a nommé le professeur Emile D... responsable du service de cardiologie à compter du 10 octobre 2015.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes de la demande présentée par M. E... devant le tribunal qu'a été soulevé le moyen tiré de l'existence d'un vice de procédure tenant à ce que la décision contestée nommant M. D... a été prise sur proposition de celui-ci, émise en qualité de chef de pôle, alors en particulier qu'il manifestait depuis de nombreuses années à son encontre une animosité notoire. Les premiers juges, qui ont accueilli ce moyen, n'ont pas irrégulièrement retenu un moyen qui n'était pas soulevé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande présentée par M. E... devant le tribunal :

3. Aux termes de l'article R. 6146-4 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Dans les centres hospitaliers et les centres hospitalo-universitaires, les responsables de structure interne, services ou unités fonctionnelles des pôles d'activité clinique ou médico-technique sont nommés par le directeur sur proposition du chef de pôle, après avis du président de la commission médicale d'établissement, selon des modalités fixées par le règlement intérieur ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la nomination de M. E..., le 9 octobre 2011, aucune disposition du règlement intérieur du CHRU de Nice ne prévoyait que la durée des fonctions des responsables de structure interne, service ou unité fonctionnelle était limitée à 4 ans. La modification du règlement intérieur en ce sens, adoptée après la séance de la commission médicale d'établissement du 12 décembre 2011, ne saurait donc s'appliquer rétroactivement à la nomination de M. E.... Dès lors, la décision contestée du 9 octobre 2015 a révélé non pas une décision de non-renouvellement de M. E... dans ses fonctions au terme de celles-ci, mais une décision mettant fin à ses fonctions. Dans ces conditions, il existe un lien indivisible entre cette décision et la décision du 9 octobre 2015 nommant M. D... responsable du service de cardiologie. M. E... justifie ainsi d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette dernière.

En ce qui concerne la légalité de la décision contestée :

5. Si l'omission d'une formalité obligatoire entache la légalité d'une décision, l'administration n'est néanmoins pas tenue d'exécuter une formalité impossible.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général du CHRU de Nice l'a nommé responsable du service de cardiologie, M. D... était chef du pôle " spécialités médicales et chirurgie Haut Pasteur " et a émis, en cette qualité, un avis favorable à sa propre nomination.

7. Le fait que la décision contestée a été prise au vu de l'avis favorable à sa propre nomination émis par son bénéficiaire caractérise, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, un manquement à l'obligation d'impartialité qui ne peut être pallié par la circonstance que cette même décision a été prise après que l'avis du président de la commission médicale d'établissement eut été également recueilli. L'administration ne peut davantage se prévaloir utilement de ce qu'elle se serait trouvée, en l'absence de suppléant de M. D... dans ses fonctions de chef de pôle, dans l'impossibilité de respecter une formalité obligatoire, puisque dans une telle hypothèse, il lui aurait été légalement permis de passer outre comme il a été dit au point 5. Ainsi, et comme l'a à bon droit retenu le tribunal, la nomination de M. D... dans les fonctions de responsable du service de cardiologie est entachée d'un vice de procédure qui, en raison de sa nature même, n'a pu demeurer sans influence sur le sens de la décision contestée.

8. Il résulte de ce qui précède que le CHRU de Nice n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice du 14 mars 2018.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le CHRU de Nice au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du CHRU de Nice une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du CHRU de Nice est rejetée.

Article 2 : Le CHRU de Nice versera à M. E... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier régional universitaire de Nice, à M. C... E... et à M. A... D....

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme H..., présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.

2

N° 18MA02290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02290
Date de la décision : 05/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-11-01 Fonctionnaires et agents publics. Dispositions propres aux personnels hospitaliers. Personnel médical.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : BIENFAIT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-05;18ma02290 ?
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