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08/10/2019 | FRANCE | N°18MA02674

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre, 08 octobre 2019, 18MA02674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... H... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Salindres sur sa demande, présentée par lettre du 13 novembre 2015, tendant à ce qu'elle soit réhabilitée dans la plénitude de ses fonctions de secrétaire général de mairie au sein de la commune, d'annuler la note de service du 10 juin 2015 du maire de Salindres et d'enjoindre à ce dernier de prendre une décision mettant fin à sa " mise au placard " dans un délai

de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous ast...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme J... H... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Salindres sur sa demande, présentée par lettre du 13 novembre 2015, tendant à ce qu'elle soit réhabilitée dans la plénitude de ses fonctions de secrétaire général de mairie au sein de la commune, d'annuler la note de service du 10 juin 2015 du maire de Salindres et d'enjoindre à ce dernier de prendre une décision mettant fin à sa " mise au placard " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement du 29 mars 2018 n° 1600911, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la requête de Mme C... H....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 juin 2018 et deux mémoires complémentaires enregistrés le 5 février 2019 et le 20 juin 2019, Mme C... H..., représentée par Me E..., dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1600911 du 29 mars 2018 qui rejette sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du maire de Salindres de la réhabiliter dans la plénitude de ses fonctions de secrétaire général de mairie et à l'annulation de la note de service du 10 juin 2015 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Salindres sur sa demande, présentée par lettre du 13 novembre 2015, tendant à ce qu'elle soit réhabilitée dans la plénitude de ses fonctions de secrétaire général de mairie au sein de la commune ;

3°) d'annuler la note de service du 10 juin 2015 du maire de Salindres ;

4°) d'enjoindre au maire de Salindres de prendre une décision mettant fin à sa " mise au placard " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Salindres la somme de 4 500 euros de frais de justice.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que le débat contradictoire n'a jamais porté sur la réalité d'une délibération portant sur la création d'un poste de secrétaire général de la commune de Salindres, alors que c'est le moyen retenu par les premiers juges, pour rejeter sa requête ;

- en refusant de la positionner en qualité de secrétaire générale, la commune a méconnu les dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issues de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ;

- le refus du maire de Salindres méconnaît l'article 2 du décret n° 87-1099 du 10 décembre 1987 modifié relatifs au statut des attachés territoriaux, et l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la nomination de Mme F... B... en lieu et place de l'emploi auquel elle avait droit est illégale ;

- en l'écartant des responsabilités de secrétaire général auxquelles elle pouvait légitimement prétendre, le maire de la commune de Salernes a usé de manière détournée de ses pouvoirs, notamment en édictant sa note du 10 juin 2015, qui lui fait grief, par laquelle sont officiellement confiées à Mme F... B... des missions relevant de sa compétence, et en la plaçant ainsi dans une condition subalterne. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions dirigées contre cette note comme irrecevables ;

- sa " mise au placard " est une sanction disciplinaire déguisée, révélée par la minoration de son régime indemnitaire, ainsi que le caractère frustre de son poste de travail ;

- la présente Cour, par un arrêt du 24 juillet 2015 a reconnu sa qualité de secrétaire général de la commune de Salindres, et le préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, par le dépouillement progressif à partir de 1996, de manière humiliante et vexatoire, de la plupart des responsabilités et missions qui lui étaient confiées en cette qualité ;

- à compter du 1er mai 1990, elle a remplacé Mlle D..., nommée le 28 juin 1977 en qualité de secrétaire général de la commune de Salindres, et elle justifie avoir bénéficié de la nouvelle bonification indiciaire de 30 points réservée aux secrétaires généraux de mairie en vertu du décret du 24 juillet 1991.

Par des mémoires enregistrés le 19 décembre 2018 et le 6 mai 2019, la commune de Salindres, représentée par Me I..., dans le dernier état de ses écritures, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C... H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la note de service attaquée est un document informatif interne qui ne fait pas grief à l'intéressée ;

- la requérante, qui a été nommée en qualité d'attaché territorial, dont le cadre d'emploi est précisé par le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987, ne justifie d'aucun droit à revendiquer la qualité de secrétaire générale de la commune, lequel poste relève du décret n° 87-1103 du 30 décembre 1987 ;

- le refus de nommer aux fonctions de secrétaire générale la requérante, qui par ailleurs a été promue au principalat de son grade, n'est pas révélateur d'un harcèlement moral ;

- si la présente Cour a fait droit à la demande indemnitaire de Mme C... H..., sa situation actuelle, placée sous le mandat de M. Comte est différente de celle qu'elle a pu vivre sous l'autorité de M. G... ;

- les autres moyens articulés par la requérante sont sans incidence sur la légalité du refus de lui conférer la qualité de secrétaire générale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant Mme C... H..., et de Me I..., représentant la commune de Salindres.

Considérant ce qui suit:

1. Par une délibération du 3 septembre 1989, le conseil municipal de la commune de Salindres a créé un poste d'attaché territorial. Mme J... H..., attachée territoriale de 2ème classe, y a été affectée, le 13 septembre 1989, et elle a, dans les faits, exercé les fonctions de secrétaire générale de la mairie de Salindres. La requérante a estimé qu'à compter de 1996, et plus encore, après son retour de congé de maladie ordinaire à compter du 6 octobre 2008, et de sa réintégration à mi-temps thérapeutique à compter du 5 octobre 2009, puis à temps complet à compter du 5 janvier 2010, une partie substantielle de ses attributions antérieures lui avait été retirée au profit d'un autre agent, de catégorie C, et qu'elle avait subi un préjudice moral du fait de sa souffrance au travail. Par un arrêt du 24 juillet 2015 n° 13MA03470, la présente Cour a reconnu le préjudice de Mme C... H... et a condamné la collectivité à l'indemniser à hauteur de 9 500 euros. Par la suite, Mme C... H..., a adressé au maire une lettre du 13 novembre 2015, reçue le 20 novembre suivant, lui demandant de la réhabiliter dans la plénitude de ses fonctions de secrétaire général de mairie, et d'annuler sa note du 10 juin 2015 par laquelle, selon elle, Mme F... B..., ingénieure territoriale, se voit chargée de l'ensemble des taches qui jusqu'alors lui incombaient. Par un jugement du 29 mars 2018 n° 1600911, dont l'intéressée demande l'annulation, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence du maire de la reconnaître comme secrétaire générale de la commune de Salindres, ainsi que de la note du 10 juin 2015.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient l'appelante, le premier mémoire en défense de la commune de Salindres présenté devant le tribunal administratif de Nîmes, en

page 8, fait expressément état de l'absence d'une délibération de création de l'emploi de secrétaire général, sur laquelle notamment s'appuie la motivation du jugement attaqué. Par suite, Mme C... H... qui n'a pas cru devoir répondre à cet argument, n'est pas fondée à soutenir, pour demander l'annulation de ce jugement, que le principe du contradictoire a été méconnu, faute d'un débat entre les parties sur l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, lequel prévoit la création des emplois par l'organe délibérant de la collectivité.

3. Mme C... H... soutient, en deuxième lieu, que, c'est à tort que, le jugement attaqué a rejeté comme irrecevables ses conclusions dirigées contre la note du 12 juin 2015 du maire de la commune de Salindres. Elle estime que cette note lui fait grief, en tant qu'elle nomme à sa place Mme B..., secrétaire général de la commune. Or, d'une part, par délibération du 22 janvier 2015, la commune de Salindres a créé le poste d'ingénieur territorial, lequel a été confié à Mme F... B..., qualifiée de " responsable des ressources humaines en charge des relations avec l'intercommunalité ", ce que l'appelante n'a pas contesté. Et selon ses termes, la note du 12 juin 2015, se borne à informer les agents municipaux du recrutement d'une directrice des ressources humaines en leur demandant de contacter celle-ci pour tout problème les concernant. Ainsi, elle présente un simple caractère informatif et ne comporte aucune prescription. D'autre part, contrairement à ce que fait valoir Mme C... H..., cette note qui ne fait aucunement référence au poste de secrétaire général de la commune, ne saurait être regardée comme le support de la nomination de Mme B... à un tel poste. Par suite, Mme C... H... n'est pas fondée à soutenir que cette instruction municipale présente un caractère décisoire et qu'elle est susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme C... H... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation ;

5. L'article 12 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée susmentionnée dispose que : " Le grade est distinct de l'emploi. Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. Toute nomination ou toute promotion dans un grade qui n'intervient pas exclusivement en vue de pourvoir à un emploi vacant et de permettre à son bénéficiaire d'exercer les fonctions (...) ". Aux termes de l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement. / La délibération précise le grade ou, le cas échéant, les grades correspondant à l'emploi créé. (...) ". Et, l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 détermine la liste des emplois fonctionnels pour lesquels, eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions de la part de l'autorité territoriale, implique nécessairement que la nomination à un tel emploi repose sur des considérations liées à la personne destinée à l'occuper.

6. En premier lieu, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, faute de délibération du conseil municipal créant l'emploi de secrétaire général de la commune de Salindres, Mme C... H..., qui relève du cadre d'emplois des attachés territoriaux et qui certes a exercé, dans les faits, les fonctions de secrétaire général de cette commune, ne pouvait néanmoins se prévaloir d'aucun droit à être nommée dans un tel emploi. Si l'appelante se prévaut d'un arrêté municipal du 29 juillet 1991 lui accordant une bonification indiciaire de 30 points majorés, attribuée aux attachés territoriaux exerçant les fonctions de secrétaire général, cette circonstance ne saurait pas davantage lui conférer un tel droit.

7. En deuxième lieu, dans sa lettre du 13 novembre 2015, dans laquelle elle demande au maire de la commune de Salindres de la réhabiliter dans la plénitude de ses fonctions, Mme C... H... se prévaut de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille, en date du 24 juillet 2015, par lequel son préjudice résultant " d'un ensemble d'agissements qui ont eu pour effet de dégrader ses conditions de travail et sa santé, ainsi que de compromettre son avenir professionnel au sens des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1983 et qui présentent dès lors le caractère d'un harcèlement moral " a été indemnisé à hauteur de 9 500 euros. Cependant, cette condamnation est relative à une période antérieure à 2011 et ne permet pas d'établir qu'à la date de l'acte attaqué, la commune de Salindres méconnaitrait la règle selon laquelle tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir une affectation correspondant à son grade. Dans un document intitulé curriculum vitae et postérieur à la décision attaquée, produit à l'instance et accompagnant sa candidature à l'emploi fonctionnel de directeur général des services (DGS) de la mairie de Salindres à compter du 1er janvier 2016, créé par une délibération du conseil municipal du 13 novembre 2015, l'intéressée décrit le large champ de ses compétences. Elle ne démontre pas s'être vue dépouillée de l'ensemble de ses attributions de manière à n'exercer aucune des missions prévues par l'article 2 du décret du 30 décembre 1987 portant statut particulier des attachés territoriaux et à être maintenue en situation de n'exercer que des tâches subalternes ne correspondant pas à ces missions.

8. Ainsi, compte tenu de ce qui vient d'être dit ci-dessus aux points 6 et 7, en rejetant implicitement la demande de Mme C... H..., le maire de la commune de Salindres n'a pas davantage eu un comportement susceptible d'être qualifié de harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983, commis un détournement de pouvoir, ou méconnu les droits statutaires de Mme C... H..., pas plus qu'il ne lui a infligé une sanction déguisée. Par ailleurs, les circonstances alléguées par l'intéressée, tirées notamment qu'elle aurait été dotée d'un espace de travail indigne de ses fonctions, qu'elle aurait subi une perte de traitement, qu'elle n'aurait pas accédé au grade supérieur, et qu'elle n'aurait pas perçu d'indemnités forfaitaires pour travaux supplémentaires sont sans influence au soutien de la contestation de la légalité de la décision attaquée. Il résulte de ce qui vient d'être dit, que la décision attaquée n'est pas entachée d'excès de pouvoir.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... H... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des actes attaqués, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de Mme C... H... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Salindres et non compris dans les dépens. Ces dispositions font obstacle à ce que la somme que la requérante demande au même titre soit mise à la charge de ladite commune, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... H... est rejetée.

Article 2 : Mme C... H... versera à la commune de Salindres une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme J... H... et à la commune de Salindres.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2019, où siégeaient :

M. Badie, président,

M. Izarn de Villefort, président assesseur,

M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.

N° 18MA02674 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02674
Date de la décision : 08/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité régie par des textes spéciaux.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : ABESSOLO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-10-08;18ma02674 ?
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