Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 du maire de la commune de Péone accordant, au nom de l'État, à la société d'économie mixte (SEM) Habitat 06, un permis de construire un ensemble immobilier mixte comportant des locaux à usage d'habitation et de commerces et des places de stationnement automobiles sur un terrain situé rue du Mont Mounier sur le territoire communal et la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 19 novembre 2016 tendant au retrait de cet arrêté.
Par un jugement n° 1501024 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistré le 24 janvier 2017, le 22 décembre 2017 et le 5 janvier 2018, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park ", représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 1er décembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2014 portant délivrance d'un permis de construire à la société d'économie mixte (SEM) Habitat 06 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Péone et de la SEM Habitat 06 la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2017, la société d'économie mixte (SEM) Habitat 06, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête d'appel du syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " ;
2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer par application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre la régularisation d'éventuels vices par un permis modificatif ;
3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " la somme de 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire, enregistré le 10 novembre 2017, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er décembre 2016 ;
2°) à titre subsidiaire, de faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre la régularisation, le cas échéant, de l'omission de l'accord du gestionnaire du domaine prévu par les dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme par un permis modificatif.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2017, la commune de Péone, représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel du syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " ;
2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer par application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour permettre la régularisation d'éventuels vices par un permis modificatif ;
3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " à lui verser la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un arrêt du 28 février 2019, la cour a estimé que le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " est fondé à soutenir que le permis de construire en litige est entaché d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 413-13 du code de l'urbanisme et a sursis à statuer pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser, par la délivrance d'un permis de conduire modificatif, la méconnaissance de ces dispositions.
Par des mémoires, enregistrés le 11 mars 2019 et le 29 mars 2019, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " conclut aux mêmes fins que précédemment.
Il soutient que :
- le permis de construire contesté ne peut être régularisé dès lors que l'emprise définitive sur le domaine public routier de la commune méconnaît les dispositions de l'article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques relatives au caractère temporaire des occupations du domaine public ;
- la fin de non-recevoir opposé par la commune de Péone doit être écartée ;
- le déclassement du terrain d'assiette du projet envisagé par la commune méconnaitrait les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques et ne permettrait pas la délivrance d'un permis de construire modificatif.
Par un mémoire, produit le 14 mars 2019, la SEM Habitat 06 demande à la Cour :
1°) à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la régularisation du vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme par un permis de construire modificatif ;
2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la régularisation par un permis de construire modificatif des vices tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme et l'absence de déclassement du terrain d'assiette.
Elle soutient que :
- le moyen nouveau tiré de ce qu'aucune autorisation d'édifier un bâtiment sur le domaine public ne pouvait être accordée sans qu'il ait été préalablement procédé au déclassement de cette portion du domaine public communal est irrecevable à ce stade de la procédure dès lors que le juge a fait usage de la faculté de surseoir à statuer ouverte par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
- le vice tiré de l'absence de la pièce prescrite à l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme est régularisable par un permis de construire modificatif ;
- le délai imparti pour le sursis à statuer devra prendre en compte les délais d'instruction par les services de l'État de la demande de permis de construire modificatif et être fixé de dix à douze mois.
Par un mémoire, produit le 5 avril 2019, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut aux mêmes fins que précédemment.
Elle soutient que :
- les critiques du syndicat requérant relatives à l'illégalité de l'empiétement du projet sur le domaine public sont nouvelles et, par suite, irrecevables ;
- les irrégularités soulevées sont régularisables par la délivrance d'un permis de construire modificatif ;
- le terrain en cause peut faire l'objet d'un déclassement anticipé par application des dispositions de l'article L. 2142-2 du code général de la propriété des personnes publiques.
Par une lettre du 18 juin 2019, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur la question de savoir si la délibération du conseil municipal de la commune de Péone du 15 avril 2019 portant déclassement anticipé du terrain cadastré section AC n° 571 permet une régularisation en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme des vices de l'arrêté du 22 septembre 2014 portant permis de construire tirés de la méconnaissance de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance de l'article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques.
Par un mémoire, produit le 19 juin 2019, la commune de Péone a présenté ses observations.
Par un mémoire, produit le 24 juin 2019, la SEM Habitat 06 a présenté ses observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. C... Portail en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Silvy, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., de la société d'avocats LLC et associés, représentant le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park ", de Me E... substituant Me D..., représentant SEM Habitat 06 et de MeF..., représentant la commune de Péone.
Considérant ce qui suit :
1. Par son arrêt susvisé du 28 février 2019, la Cour a jugé que le seul moyen soulevé par le syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " tant en première instance qu'en appel, susceptible de fonder l'annulation du permis de construire délivré le 22 septembre 2014 par le maire de la commune de Péone à la SEM Habitat 06, est celui tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme relatif à la production au dossier de demande de permis de construire d'une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine public. Après avoir constaté que ce vice apparaissait susceptible d'être régularisé, la Cour, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la légalité du permis de construire en litige pour inviter les parties à lui présenter leurs observations sur l'éventualité d'une telle régularisation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de son arrêt. Suite à la production par la commune de Péone d'une délibération de son conseil municipal du 15 avril 2019, les parties ont également été invitées à présenter leurs observations sur l'effet de cette délibération dans la présente instance.
2. En vertu des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 désormais applicable : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
3. Aux termes, d'une part, de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. ".
4. Aux termes, d'autre part, de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. (...) ". Aux termes de l'article L. 2122-2 de ce code : " L'occupation ou l'utilisation du domaine public ne peut être que temporaire. (...) ". Aux termes de l'article L. 2141-1 de ce code : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement. ". Et aux termes de l'article L. 2141-2 de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 applicable à la date du 15 avril 2019 : " Par dérogation à l'article L. 2141-1, le déclassement d'un immeuble appartenant au domaine public artificiel des personnes publiques et affecté à un service public ou à l'usage direct du public peut être prononcé dès que sa désaffectation a été décidée alors même que les nécessités du service public ou de l'usage direct du public justifient que cette désaffectation ne prenne effet que dans un délai fixé par l'acte de déclassement. Ce délai ne peut excéder trois ans. Toutefois, lorsque la désaffectation dépend de la réalisation d'une opération de construction, restauration ou réaménagement, cette durée est fixée ou peut être prolongée par l'autorité administrative compétente en fonction des caractéristiques de l'opération, dans une limite de six ans à compter de l'acte de déclassement. (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, postérieurement à l'arrêt avant-dire droit du 28 février 2019, le conseil municipal de Péone a prononcé le déclassement par anticipation du terrain d'assiette du projet en litige par une délibération n° 9 du 15 avril 2019, communiquée le même jour au préfet des Alpes-Maritimes au titre du contrôle de légalité, par application des dispositions précitées de l'article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques en fixant le délai nécessaire à la désaffectation de ce terrain à six années au regard de l'opération de construction projetée. Cette délibération, qui a transféré à sa date d'entrée en vigueur le terrain cadastré section AC n° 571 dans le domaine privé de la commune, est susceptible de permettre la régularisation du vice tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme. Le vice de légalité en cause est, en conséquence, susceptible de faire l'objet d'un permis de construire de régularisation. Dès lors, il y a lieu de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de fixer à la SEM Habitat 06 et à la commune de Péone un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins de produire le permis de construire de régularisation nécessaire.
D É C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête du syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park " jusqu'à l'expiration du délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, imparti à la SEM Habitat 06 et à la commune de Péone pour notifier à la Cour le permis de construire de régularisation prescrite au point 5.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires de la résidence " Le Central Park ", à la SEM Habitat 06, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la commune de Péone.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019, où siégeaient :
- M. Portail, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Silvy, premier conseiller.
- Mme Baizet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 juillet 2019.
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N° 17MA00337
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