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10/07/2019 | FRANCE | N°18MA05507

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2019, 18MA05507


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

La société Bureau européen d'assurance hospitalière a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler ou de résilier avec effet différé le marché public de prestation d'assurance en responsabilité civile passé entre le centre hospitalier de Perpignan et la Société hospitalière d'assurances mutuelles et, d'autre part, de condamner le centre hospitalier de Perpignan à lui verser une indemnité de 247 270 euros en réparation des conséquences dommageables de son éviction ir

régulière de cette procédure de marché.

Par un jugement n° 1301730 du 1er avril ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

La société Bureau européen d'assurance hospitalière a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler ou de résilier avec effet différé le marché public de prestation d'assurance en responsabilité civile passé entre le centre hospitalier de Perpignan et la Société hospitalière d'assurances mutuelles et, d'autre part, de condamner le centre hospitalier de Perpignan à lui verser une indemnité de 247 270 euros en réparation des conséquences dommageables de son éviction irrégulière de cette procédure de marché.

Par un jugement n° 1301730 du 1er avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la société Bureau européen d'assurance hospitalière.

Par un arrêt n° 15MA02295 du 24 avril 2017, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2015 et rejeté la demande présentée par la société Bureau européen d'assurance hospitalière devant le tribunal administratif de Montpellier.

Par une décision n° 411832 du 21 décembre 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par la société Bureau européen d'assurance hospitalière, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédures devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 juin 2015, 5 août 2015 et 17 août 2016 sous le n° 15MA02295, puis les 7 février 2019, 12 avril 2019 et 6 mai 2019 sous le n° 18MA05507, la société Bureau européen d'assurance hospitalière, représentée par la SCP Lyon-Caen et F..., avocat aux conseils, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 1er avril 2015 ;

2°) d'annuler le marché n° 126041 de prestations d'assurances en responsabilité civile ou, à défaut, de le résilier avec effet différé ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Perpignan au paiement d'une indemnité de 247 270 euros ou, subsidiairement, de 8 000 euros ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Perpignan une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car il a retenu à tort la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande ;

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne répond pas au moyen tiré de ce que l'exemplaire du formulaire DC1 produit à l'instance a été élaboré pour les besoins de la cause ;

- le formulaire DC1 comportant la lettre de candidature de la société hospitalière d'assurances mutuelles n'était pas signée et l'offre était dès lors irrégulière, de telle sorte que les articles 45 et 52 du code des marchés publics ont été méconnus ;

- le formulaire DC2 ne comportait pas la mention des nom, prénom et qualité de la personne physique ayant le pouvoir d'engager cette société ;

- aucun justificatif prouvant l'habilitation à engager le candidat n'a été joint à ce même formulaire ;

- la candidature de la société hospitalière d'assurances mutuelles était irrégulière dès lors que son état annuel des certificats de reçus de déclarations fiscales et sociales (NOTI2) datait du 17 janvier 2011 et était arrêté au 31 décembre 2010 alors que l'article 46 du code des marchés publics impose que cette pièce date de moins de six mois ;

- cette candidature était irrégulière au regard du même article en ce que le formulaire DC6 ne comportait aucune date ;

- les pièces, déclarations et certificats mentionnés au I de l'article 46 du code des marchés publics n'ont pas été fournis dans le délai imparti et, tout en état de cause, avant la signature du marché, ce qui imposait le rejet de l'offre de la société hospitalière d'assurances mutuelles, en application du III du même article ;

- les articles 5 et 7 du règlement de consultation du marché étaient entachés de contradiction, le second prévoyant une variante interdite par le premier, de telle sorte que, une variante ayant été acceptée, il a été porté atteinte à l'égalité entre les candidats ;

- le centre hospitalier a usé de critères discriminatoires ;

- le centre hospitalier a méconnu l'article 53 du code des marchés publics et l'article 9.2 du règlement de consultation car il n'a pas examiné les offres au regard du critère technique " accompagnement du centre hospitalier à la formation de la gestion des risques et des plaintes " mais au regard d'un critère dénommé " accompagnement à la formation " ;

- l'élément d'évaluation relatif aux " équipes dédiées à la responsabilité civile ", qui comptait pour quinze points dans l'analyse du sous-critère " modalité de gestion des sinistres ", constituait un critère de sélection des offres et sa mise en oeuvre n'a pas été portée à la connaissance des candidats dès le début de la procédure de consultation ;

- l'élément d'évaluation " équipes dédiées à la responsabilité civile ", valant pour la moitié de la notation, ne visait pas à apprécier les " modalités de gestion des sinistres " mais la capacité technique de l'entreprise à se porter candidate à la consultation lancée par le centre hospitalier de Perpignan ;

- l'évaluation des critères techniques relatifs aux " modalités de gestion des sinistres " et aux " modalités de gestion des risques ", faite en fonction de l'expérience du précédent marché, caractérise une méconnaissance de l'article 53 du code des marchés publics et une violation du principe d'égalité de traitement des candidats ;

- le pouvoir adjudicateur a fait une appréciation manifestement erronée de la valeur des offres.

Par des mémoires en défense enregistrés les 19 octobre 2015, 27 février 2017, 30 janvier 2019 et 2 avril 2019 le centre hospitalier de Perpignan, représenté par la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Bureau européen d'assurance hospitalière au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation du marché sont irrecevables dès lors que le délai de recours court à compter de la date de publication de l'avis d'attribution et non de la date à laquelle le marché a été effectivement signé ;

- les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés ;

- la demande d'annulation ou de résiliation du marché, même avec effet différé, porte une atteinte excessive à l'intérêt général ;

- la société Bureau européen d'assurance hospitalière ne saurait être indemnisée ni des frais de soumission, ni moins encore de son manque à gagner ;

- cette société ne justifie pas du préjudice allégué.

Par des mémoires enregistrés les 2 août 2016, 30 janvier 2019, 5 avril 2019 et 29 mai 2019, la société hospitalière d'assurances mutuelles, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Bureau européen d'assurance hospitalière au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation du contrat sont irrecevables ;

- le marché contesté est régulier ;

- la sauvegarde de l'intérêt général fait obstacle à l'annulation ou à la résiliation du marché qui a été entièrement exécuté et s'est achevé en juin 2016.

Un mémoire présenté pour la société Bureau européen d'assurance hospitalière a été enregistré le 9 mars 2017 et n'a pas été communiqué.

Par courrier du 19 juin 2019 les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de fonder son arrêt sur un moyen relevé d'office, tiré de l'absence de toute chance, pour la société Bureau européen d'assurance hospitalière, de remporter le marché dès lors que son offre, qui ne comprenait pas de précision en matière de formation, était incomplète.

Par un mémoire du 26 juin 2019, la société Bureau européen d'assurance hospitalière a présenté des observations en réponse à ce moyen.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... Grimaud, rapporteur,

- les conclusions de M. C... Thiele, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., substituant Me F..., représentant la société Bureau européen d'assurance hospitalière, de Me B... représentant le centre hospitalier de Perpignan et de Me G..., substituant Me E..., représentant la société hospitalière d'assurances mutuelles.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier de Perpignan a lancé le 29 mars 2012 un appel d'offres ouvert en vue de l'attribution d'un marché public d'assurance relatif à sa responsabilité civile. L'offre présentée par la société Bureau européen d'assurance hospitalière, conjointement avec les sociétés Amtrust International Underwriters et Areas Assurance, a été rejetée le 8 juin 2012 et le marché litigieux a été attribué, pour une durée de douze mois renouvelable trois fois, à la société hospitalière d'assurances mutuelles.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. Ainsi saisi de telles conclusions par un concurrent évincé, il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat.

3. Il résulte de l'instruction que les avis d'attribution du marché publiés au Journal officiel de l'union européenne et au Bulletin officiel des annonces et des marchés publics les 28 et 29 juin 2012 ne mentionnent ni la conclusion du contrat, lequel avait été signé le 20 juin 2012, ni les modalités de sa consultation. Ils n'ont donc pu suffire à déclencher le délai de recours. La circonstance que la société Bureau européen d'assurance hospitalière ait obtenu, par le biais de différentes correspondances du centre hospitalier, les informations devant faire l'objet de la publicité visée au point 2 demeure sans incidence sur ce point. Le centre hospitalier et la société hospitalière d'assurances mutuelles ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la demande de la société Bureau européen d'assurance hospitalière était tardive.

4. Par ailleurs, si le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance et impose que ce destinataire ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable, ce principe n'a pas pour effet d'enfermer le recours décrit ci-dessus, lequel est dirigé contre un contrat, dans un délai de six mois, contrairement à ce que soutient la société hospitalière d'assurances mutuelles.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Bureau européen d'assurance hospitalière est fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a retenu la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de sa demande et qu'il est dès lors entaché d'irrégularité en ce qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation.

6. En second lieu, le tribunal administratif de Montpellier n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que la deuxième version du formulaire DC1 (identification du candidat) émanant de la société hospitalière d'assurances mutuelles, produit à l'instance par le centre hospitalier, avait été établi pour les besoins de la cause et ne constituait pas, en réalité, une pièce produite par l'attributaire dans le cadre de la procédure de passation du marché. Le jugement attaqué est donc entaché de défaut de motivation en ce qu'il rejette les conclusions indemnitaires de la requérante.

7. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué dans son intégralité et de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées par la société Bureau européen d'assurance hospitalière devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la recevabilité :

8. Ainsi qu'il vient d'être dit aux points 3 et 4, la demande présentée par la société Bureau européen d'assurance hospitalière devant le tribunal n'était pas tardive. Il y a lieu, dès lors, d'écarter cette fin de non-recevoir.

En ce qui concerne la légalité du contrat :

9. Aux termes de l'article 53 du code des marchés publics alors en vigueur : " I. - Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde : / 1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protection de l'environnement, les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, les performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté, le coût global d'utilisation, les coûts tout au long du cycle de vie, la rentabilité, le caractère innovant, le service après-vente et l'assistance technique, la date de livraison, le délai de livraison ou d'exécution, la sécurité d'approvisionnement, l'interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles. D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ; / 2° Soit, compte tenu de l'objet du marché, sur un seul critère, qui est celui du prix (...) ". Il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur est tenu, pour attribuer le marché, de se fonder exclusivement sur la valeur intrinsèque des offres.

10. Le rapport d'analyse des offres établi par le centre hospitalier de Perpignan mentionne, en ce qui concerne l'examen de l'offre de la société hospitalière d'assurances mutuelles, au regard de l'élément d'appréciation " équipes dédiées à la responsabilité civile " du sous-critère " modalités de gestion des sinistres " : " (+++) un réseau d'expert solide et expérimenté en RC médicale : expérience CHP (une vingtaine d'interlocuteurs récurrents toute catégorie confondue) ". En ce qui concerne le sous-critère " modalités de gestion des risques ", ce même rapport mentionne : " (++) bonification financière systématique si respect des préconisations suite à l'audit de risque ; vérifié eu égard à l'expérience du précédent marché : réduction de cotisation de 5 % par tranche biennale ". Si le centre hospitalier de Perpignan et la société hospitalière d'assurances mutuelles, antérieurement liés par un marché similaire, soutiennent que ces mentions ne constitueraient que de simples commentaires formulés par l'établissement quant à l'offre de l'attributaire, il résulte au contraire de l'instruction et des termes et symboles ainsi employés que ces indications portées sur le rapport d'analyse des offres, mises en rapport direct avec la notation attribuée aux offres respectives de la société hospitalière d'assurances mutuelles et de la requérante, ne peuvent être regardées comme incidentes et étrangères à l'opération d'évaluation des offres mais reflétaient directement le jugement du centre hospitalier sur l'offre de la société hospitalière d'assurances mutuelles. Il en résulte que le pouvoir adjudicateur a évalué la pertinence de celle-ci au regard non de ses seules qualités intrinsèques, mais de considérations relatives aux prestations fournies et au comportement de cet assureur à l'occasion de l'exécution du précédent marché et à la satisfaction qu'en avait éprouvée ses services. La société Bureau européen d'assurance hospitalière est dès lors fondée à soutenir qu'en examinant, ne serait-ce qu'en partie, l'offre de la société hospitalière d'assurances mutuelles sur le fondement de telles considérations, qui sont sans rapport avec les qualités intrinsèques de cette offre, le centre hospitalier de Perpignan a méconnu les dispositions précitées et le principe d'égalité des candidats.

11. Le vice ainsi relevé, qui est insusceptible de régularisation, affecte directement le choix de l'attributaire du contrat, eu égard au faible écart de notation entre les deux offres et à la proportion de cet écart découlant de la notation de l'élément d'appréciation et du sous-critère ci-dessus évoqués au point 10, tout en révélant la volonté de l'établissement de favoriser un candidat à raison des conditions d'exécution, par ses soins, d'un précédent marché, et présente donc une particulière gravité. Il implique dès lors l'annulation du contrat litigieux. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le marché a été entièrement exécuté, de telle sorte que son annulation est dépourvue d'incidence sur l'exécution du service public confié au centre hospitalier de Perpignan comme sur une éventuelle demande de reprise des relations contractuelles émanant de la société hospitalière d'assurances mutuelles. Enfin, la circonstance, au demeurant invoquée de manière imprécise, que les conséquences d'une telle mesure seraient coûteuses pour l'établissement ne porte aucune atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants. Il y a lieu, dès lors, d'annuler le contrat litigieux.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

12. Aux termes du III de l'article 53 du code des marchés publics : " Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées (...) ". En vertu de l'article 8.3 du règlement de consultation du marché relatif aux modalités d'envoi des offres : " L'envoi contiendra (...) A/ documents obligatoires : / (...) 4) l'offre qui comprendra : / (...) 7) l'annexe n° 5 " formulaire tableau de réponse " (...) 11) une note de présentation de l'offre (sous forme libre) (...) ". En vertu de l'article 9.2 du règlement de consultation du marché relatif à l'analyse des offres : " Le C.H.P choisira, après analyse et étude des offres, la proposition classée au premier rang en tenant compte (...) des critères suivants : / (...) accompagnement du CHP à la formation de gestion des risques et des plaintes / (...). L'analyse des critères techniques sera réalisée entre autres sur la base de l'annexe 5 " tableau de réponse ". Toute proposition devra intégrer obligatoirement cette annexe n° 5 (...) sans exclure, à titre de compléments d'information, tout document propre au soumissionnaire et permettant de parfaire l'analyse de son offre ".

13. Il résulte de l'instruction, et notamment d'un courriel en date du 30 mai 2012, émanant du centre hospitalier de Perpignan, que l'offre de la société Bureau européen d'assurance hospitalière ne comprenait, selon l'établissement, aucun élément permettant d'évaluer le sous-critère " accompagnement du centre hospitalier à la formation de la gestion des risques et des plaintes ". L'annexe 5 de l'offre de la société requérante comportait en effet seulement, en ce qui concerne le volet " accompagnement du CHP à la formation de gestion des risques et des plaintes ", les mentions suivantes : " Le BEAH et la compagnie AMTRUST proposent une prestation de gestion des risques mise en oeuvre en priorité par le Dr B. X, responsable de cette prestation dans sa précédente activité pour le compte d'une mutuelle spécialisée dans l'assurance des hôpitaux publics (Voir détail et CV en annexe). / Pour cette prestation de gestion des risques le Dr A...pourra se faire assister des ingénieurs de la compagnie AMTRUST qui est l'une des compagnies leader européen dans le domaine de l'assurance de responsabilité des établissements de soin. / Le BEAH propose de répondre à la demande du CHP de toute action dans le domaine de la gestion des plaintes ; cette prestation qui rejoint la notion de gestion des risques est mise en oeuvre par le Dr A...et C. Y (25 ans d'expérience dans le domaine d'audit de la responsabilité hospitalière). Aucune limite en nombre de jours n'est prévue dans la mesure où cette prestation ne se détermine pas en temps passé mais en efficacité de l'identification des problèmes et des solutions apportées. Autant de jours que nécessaire ". Quant au mémoire présentant l'offre de la société Bureau européen d'assurance hospitalière, daté du 3 mai 2012, il se bornait à indiquer sur ce point : " Nous proposons une prestation de gestion des risques (...) / Le BEAH propose également de mettre en oeuvre avec l'établissement hospitalier des procédures de formation à la gestion des risques et d'amélioration de la gestion des plaintes notamment par des séances d'information et de formation en direction des personnels médicaux (...). Notre intervention dans ce domaine peut se traduire par des études sur des points particuliers (respect du secret médical selon les procédures sinistres - gestion des conventions dans le cadre de GCS - adaptation des règlements et des contrats à la nouvelle instruction du 5 juillet 2010 relative aux modalités de mise en oeuvre de la réforme LMD au sein des instituts de formations en soins infirmiers, etc...) / Nous réalisons également des séances d'information ou de formation directement dans les établissements qui nous le demandent sur des questions plus sensibles telles que l'assurance responsabilité personnelle des médecins ou personnels médicaux hospitaliers. / Ainsi, par exemple, à la suite du dramatique accident d'avion qui a coûté la vie à deux médecins préleveurs du CHU de Besançon, M. A... a, à la demande du CHU, organisé une formation complète pour les praticiens hospitaliers sur les risques qu'ils encouraient et sur les couvertures d'assurance dont ils disposaient dans le cadre de leur activité hospitalière ". Enfin, il résulte de l'instruction que le document intitulé " accompagnement du centre hospitalier de Perpignan à la gestion des risques et à la gestion des plaintes et des réclamations / l'offre du BEAH ", s'il présente l'offre de formation de la requérante, n'a été produit qu'en réponse à la demande présentée par l'établissement le 30 mai 2012 et ne faisait donc pas partie de l'offre initialement déposée par la requérante.

14. Ainsi que l'avait constaté le centre hospitalier dans sa demande adressée à la société requérante le 30 mai 2012, ces éléments épars et imprécis contenus dans la soumission de la requérante ne pouvaient être regardés comme présentant une offre en matière d'accompagnement du centre hospitalier à la formation de la gestion des risques et des plaintes, de telle sorte que l'établissement était fondé à constater qu'il ne disposait, à cette date, d'aucun élément permettant d'évaluer ce sous-critère. Il était dès lors tenu de rejeter l'offre de la société Bureau européen d'assurance hospitalière, sans pouvoir faire procéder à sa régularisation ainsi qu'il l'a fait en sollicitant indument des pièces complémentaires. Il en résulte que l'offre de la société Bureau européen d'assurance hospitalière, qui devait en tout état de cause être rejetée, était dépourvue de toute chance d'obtenir le marché. Le préjudice invoqué par cette société est donc en tout état de cause dépourvu de lien de causalité avec l'irrégularité commise par le pouvoir adjudicateur dans l'attribution du marché et résulte de la seule insuffisance de son offre. Ses conclusions indemnitaires doivent en conséquence être rejetées.

15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la société Bureau européen d'assurance hospitalière est seulement fondée à demander l'annulation du marché conclu le 20 juin 2012 entre le centre hospitalier de Perpignan et la société hospitalière d'assurances mutuelles.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que les sommes réclamées par la société hospitalière d'assurances mutuelles et le centre hospitalier de Perpignan sur leur fondement soit mise à la charge de la société Bureau européen d'assurance hospitalière, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Bureau européen d'assurance hospitalière sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1301730 du 1er avril 2015 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Le marché conclu le 20 juin 2012 entre le centre hospitalier de Perpignan et la société hospitalière d'assurances mutuelles est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Bureau européen d'assurance hospitalière, au centre hospitalier de Perpignan et à la société hospitalière d'assurances mutuelles.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2019, où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- M. H... Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juillet 2019.

9

N° 18MA05507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA05507
Date de la décision : 10/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-005 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Formalités de publicité et de mise en concurrence.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN et THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-10;18ma05507 ?
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