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04/07/2019 | FRANCE | N°19MA01638

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 04 juillet 2019, 19MA01638


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2018, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1808670 du 1er mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire, enregistrés le 3 avril 2019 et le 22 mai 2019, M. D..., représenté par MeA..., deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2018, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1808670 du 1er mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2019 et le 22 mai 2019, M. D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er mars 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous une astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le refus de séjour ne peut légalement se fonder sur l'absence d'autorisation de travail alors qu'une demande d'autorisation de travail a aussi été faite ;

- pour opposer un refus le préfet s'est borné à se fonder sur le refus de l'autorisation de travail de la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Provence-Alpes-Côte d'Azur qui ne lui a pas été communiqué, en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- le seul fait qu'il ne justifie que d'un contrat de travail à durée déterminée n'est pas suffisant pour exclure qu'il bénéficie de l'autorisation de travail au regard de l'article L. 313-10 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le motif tiré du défaut de rémunération mensuelle minimale est entaché d'erreur de fait alors qu'il percevait le SMIC horaire ;

- il bénéficiait de droits au chômage et la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation ;

- il n'est pas démontré que l'employeur ait été destinataire d'une demande de pièces complémentaires, dont il n'a au demeurant pas été informé ;

- il avait droit au renouvellement de sa carte de séjour du fait qu'il a été privé involontairement d'emploi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

La présidente de la Cour a désigné M. B...Portail, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2003-963 du 3 octobre 2003 portant publication de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Paris le 2 décembre 1992 ;

- le décret n° 2004-684 du 8 juillet 2004 portant publication de la Convention d'établissement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise, signée à Libreville le 11 mars 2002 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 27 septembre 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour en qualité de salarié que lui avait présentée le 6 mars 2018 M. D..., ressortissant gabonais, sur le fondement de l'article L. 313-10 1° et 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. D...relève appel du jugement du 1er mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 5 de la convention entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de la république gabonaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Paris le 2 décembre 1992 : " Les ressortissants de chacune des parties contractantes désireux d'exercer sur le territoire de l'autre une activité professionnelle salariée doivent en outre, pour être admis sur le territoire de cette partie, justifier de la possession : [...] 2° D'un contrat de travail visé par le Ministère du travail dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'accueil. ". Et l'article 12 de la même convention précise que : " Les dispositions de la présente convention ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux Parties contractantes sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la convention. ". L'article L. 313-10 du CESEDA dispose que : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / La carte de séjour est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail ; / 2° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée [...], dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 dudit code. Cette carte est délivrée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement, dans la limite d'un an. Elle est renouvelée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement. Elle porte la mention " travailleur temporaire " ; ". L'article L. 5221-2 du code du travail précise que : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ".

3. L'arrêté attaqué se fonde sur le défaut de contrat de travail visé prévu par l'accord franco-gabonais relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au co-développement du 5 juillet 2007 qui complète la convention relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Paris le 2 décembre 1992, ainsi que sur l'article L. 5221-2 du code du travail et sur l'avis défavorable du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur (DIRECCTE PACA) du 5 juin 2018.

4. En premier lieu, en se fondant, pour refuser à M. D... un titre de séjour en qualité de salarié, sur l'avis de la DIRECCTE PACA, le préfet doit être regardé comme ayant entendu refuser de lui délivrer une autorisation de travail. Le requérant ne peut par suite utilement soutenir que le refus de séjour ne pourrait légalement se fonder sur l'absence d'autorisation de travail alors qu'il a aussi effectué une demande d'autorisation de travail.

5. En deuxième lieu, l'article R. 5221-17 du code du travail dispose que : " La décision relative à la demande d'autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est prise par le préfet. Elle est notifiée à l'employeur ou au mandataire qui a présenté la demande, ainsi qu'à l'étranger. ". Ainsi qu'il a été dit au point 4, le préfet doit être regardé comme ayant, par l'arrêté attaqué également rejeté la demande d'autorisation de travail formulée dans l'intérêt de l'intéressé par son employeur. Le requérant ne peut par suite utilement soutenir que le refus de l'autorisation de travail ne lui aurait pas été communiqué.

6. En troisième lieu, selon l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : [...] 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1... ". Et l'article L. 3232-1 du même code prévoit que : " Tout salarié dont l'horaire de travail est au moins égal à la durée légale hebdomadaire, perçoit, s'il n'est pas apprenti, une rémunération au moins égale au minimum fixé dans les conditions prévues à la section 2. / Ces dispositions ne s'appliquent pas aux salariés temporaires. ". Il résulte de ces dispositions ainsi que de l'article L. 5221-2 du code du travail cité au point 2 que, pour remplir la condition fixée par le 6° de l'article R. 5221-20 pour la délivrance d'une autorisation de travail, la rémunération mensuelle proposée à l'étranger doit être au moins égale au montant mensuel du salaire minimum de croissance calculé sur la base la durée légale hebdomadaire, quand bien même l'emploi proposé comporterait une durée de travail inférieure à cette durée légale.

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de travail présentée par la société " Guillaume Tail " au profit de l'intéressé pour un contrat de travail d'une durée hebdomadaire de douze heures, ce qui correspond à cinquante-deux heures par mois, prévoyait une base de 9,88 euros brut par heure ce qui correspond à une rémunération mensuelle de 513,76 euros, inférieure à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 du code du travail précité et dont le montant s'établissait, en 2018, à la somme de 1 383,20 euros. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que le préfet, qui n'a pas refusé le renouvellement de la carte de séjour au motif que la demande d'autorisation de travail portait sur un contrat à durée déterminée, a entaché sa décision d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation en se fondant sur le fait qu'il ne percevait pas la rémunération minimale mensuelle. Par ailleurs, le requérant ne peut utilement soutenir que les allocations qu'il a perçues de Pôle Emploi au titre de l'aide au retour à l'emploi auraient dû être prises en compte alors que l'article R. 5221-20 6° précité du code du travail se réfère au " salaire " perçu. Il ne peut par ailleurs davantage utilement se prévaloir du fait qu'il a signé un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein postérieurement à la décision attaquée, dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du CESEDA : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié " / La carte de séjour est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail... ".

9. Le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait été involontairement privé d'emploi. Par suite il n'est pas fondé à soutenir qu'il avait droit au renouvellement de sa carte de séjour salarié en application des dispositions précitées de l'article L. 313-10 du CESEDA.

10. En cinquième et dernier lieu, il ressort de l'avis de la DIRECCTE du 5 juin 2018 que des pièces complémentaires ont été sollicitées auprès de l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 avril 2018 distribuée le 30 avril 2018. Si le requérant soutient qu'il n'est pas démontré que l'employeur ait bien été destinataire de cette demande de pièces complémentaires, il n'apporte aucun commencement de preuve au soutien de son allégation. Par ailleurs, aucun texte ne prévoit que l'intéressé aurait dû être informé de cette demande de pièces complémentaires.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2019, où siégeaient :

- M. Portail, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Gougot, premier conseiller,

- M. Silvy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juillet 2019.

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fn


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19MA01638
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : KONAN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-04;19ma01638 ?
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