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18/10/2018 | FRANCE | N°17MA00344

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2018, 17MA00344


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 12 août 2016 par lequel le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1605239 du 21 décembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 12 août 2016 par lequel le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1605239 du 21 décembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 août 2016 du préfet de la Haute-Savoie ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux ;

- elle ne pouvait avoir pour base légale le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît le 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'erreur de fait concernant l'absence de vie commune avec son épouse ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Merenne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 avril 2015, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande présentée par M. C..., ressortissant algérien né le 28 février 1985, tendant au renouvellement du certificat de résidence qui lui avait été précédemment délivré en qualité de conjoint de français, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 1502785 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le recours pour excès de pouvoir formé par M. C...contre cet arrêté. Ce jugement a été confirmé par un arrêt n° 16MA00511 du 3 octobre 2016 de la présente cour. Suite à l'interpellation de M. C... à Thonon-les-Bains, le préfet de la Haute-Savoie, par un arrêté du 12 août 2016, l'a de nouveau obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement n° 1605239 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce second arrêté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Il ressort de l'arrêté du 12 août 2016 lui-même, dont les motifs circonstanciés précisent les raisons pour lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a obligé M. C... à quitter le territoire français, que le préfet a bien procédé à l'examen particulier de la situation de ce dernier. Le moyen tiré de l'absence d'un tel examen manque ainsi en fait et doit être écarté.

3. Il résulte du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour lui a été refusé ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré.

4. Dans le cas où, comme en l'espèce, le juge administratif a, par une décision de justice devenue définitive, rejeté le recours pour excès de pouvoir dirigé par un étranger contre le refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour au motif que l'intéressé n'entre pas dans un cas déterminé de délivrance d'un titre de séjour de plein droit, l'autorité relative de la chose jugée qui s'attache à cette décision de justice fait obstacle, en l'absence de circonstances nouvelles de droit ou de fait, à ce que l'intéressé puisse faire valoir qu'il entre dans un tel cas de délivrance d'un titre de séjour de plein droit à l'appui d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 précité suite à la décision de refus de séjour.

5. Par l'arrêt du 6 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté le recours pour excès de pouvoir formé par M. C...contre l'arrêté du 13 avril 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de délivrer un titre de séjour à M. C...en qualité de conjoint d'un ressortissant français au motif qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par le 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Il résulte de ce qui a été vu au point précédent qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Montpellier et que le faisait valoir le préfet de Haute-Savoie dans ses écritures en première instance, M. C...n'est pas fondé à soutenir à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français entrer dans le cas de délivrance de plein droit d'un titre de séjour prévu par le 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

6. En outre, la demande de M. C...tendant au renouvellement de son certificat de résidence, ainsi qu'il a été dit, avait fait l'objet d'un refus par un arrêté du 13 avril 2015 du préfet de l'Hérault. En l'absence de circonstance nouvelle, le préfet de la Haute-Savoie pouvait en conséquence édicter à son encontre une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de l'instruction que le préfet de la Haute-Savoie aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif, indépendamment de l'existence ou de l'absence d'une communauté de vie entre M. C... et son épouse à la date de l'arrêté contesté. M. C...ne peut donc utilement critiquer à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français l'appréciation portée par le préfet sur ce point.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Montpellier aurait à tort rejeté sa demande dirigée contre l'obligation de quitter le territoire français.

Sur l'interdiction de retour du territoire français :

9. Il ressort des pièces du dossier que M.C..., ressortissant algérien, est entré régulièrement en France le 2 janvier 2013 après avoir épousé le 31 août 2012 une ressortissante française. Les pièces du dossier, constituées de documents bancaires, de courriers de Pôle emploi et d'organismes de sécurité sociale, de factures variées, de bulletins de salaire, d'attestations émanant de proches, de photos et d'avis d'imposition commune, permettent d'établir que M. C...réside avec son épouse à Montpellier. La seule circonstance que MmeC..., après une première visite domiciliaire en juin 2014 dont il n'est pas contesté qu'elle a permis de constater la présence des effets de M. C...au domicile conjugal, ait écourté en décembre 2014 une nouvelle enquête domiciliaire conduite le matin alors qu'elle se rendait à son travail, et les doutes exprimés à cette occasion par les services de la police aux frontières, ne suffisent pas à remettre en cause l'existence de cette vie commune. L'interdiction de retour sur le territoire français porte ainsi une atteinte disproportionnée au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu en conséquence de réformer le jugement attaqué et d'annuler l'arrêté contesté en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M.C....

10. Il n'est dès lors pas nécessaire pour la cour de se prononcer sur l'autre moyen invoqué par le requérant à l'encontre de cette décision.

11. L'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français n'appelle aucune mesure d'exécution de la part du préfet. Les conclusions à fin d'injonction présentées par

M. C...sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative doivent en conséquence être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à M. C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 12 août 2016 du préfet de la Haute-Savoie est annulé en tant qu'il prononce une interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M.C....

Article 2 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 décembre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 octobre 2018.

2

N° 17MA00344


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00344
Date de la décision : 18/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-18;17ma00344 ?
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