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21/06/2018 | FRANCE | N°17MA00626

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 21 juin 2018, 17MA00626


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 29 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Drap a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1300354 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 février et 18 août 2017, M. B..., représenté par la société d'avocats Cabinet Stemmer BriceA..., demande à

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 5 janvier 2017 ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 29 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Drap a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1300354 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 février et 18 août 2017, M. B..., représenté par la société d'avocats Cabinet Stemmer BriceA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 5 janvier 2017 ;

2°) d'annuler la délibération du 29 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Drap a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Drap la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération du 27 mai 2002 n'a pas suffisamment défini les objectifs du plan local d'urbanisme, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;

- les observations du public sont présentées trop sommairement par le rapport d'enquête publique et n'ont pas fait l'objet d'une appréciation globale par thème ;

- l'absence de motivation de l'avis du commissaire-enquêteur a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision et a privé les élus d'une garantie ;

- les modifications du projet issues de l'enquête publique ont porté atteinte à son économie générale ;

- le classement du quartier des Arnulfs en secteur UA et l'augmentation de la superficie des espaces boisés classés constituent des modifications du projet qui ne sont pas issues de l'enquête publique ;

- un conseiller municipal intéressé au classement en espace boisé classé des parcelles appartenant à M. B... a participé au vote en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;

- l'institution d'un espace boisé classé sur ces parcelles est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'institution d'un espace boisé classé sur ces parcelles est entachée de détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 juin et 25 septembre 2017, la commune de Drap conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille qui désigne Mme Muriel Josset, présidente assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Alain Poujade, président de la 1ère chambre.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gonneau,

- les conclusions de Mme Giocanti,

- et les observations de Me A..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

1. Aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme applicable à la date de la délibération du 27 mai 2002 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme : " I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : a) Toute élaboration ou révision du (...) plan local d'urbanisme ; (...) ".

2. Il résulte de ces dispositions que l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme doit être précédée d'une concertation associant les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. Le conseil municipal doit, avant que ne soit engagée la concertation, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme, et, d'autre part, sur les modalités de la concertation. Si cette délibération est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération du 27 mai 2002 n'a pas suffisamment précisé les objectifs poursuivis par l'élaboration du plan local d'urbanisme est inopérant et doit être écarté.

3. Aux termes de l'article R*123-19 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à l'enquête publique par (...) le maire dans les formes prévues par les articles R. 123-7 à R. 123-23 du code de l'environnement. (...) ". Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...). ".

4. Il ressort du rapport d'enquête publique que 37 observations ont été recueillies durant celle-ci et qu'elles ont toutes été examinées par le commissaire-enquêteur qui les a résumées et a porté en face de chacune d'elle, dans un tableau, la position de la commune et la sienne. Le rapport d'enquête a ainsi été établi conformément aux dispositions précitées, et, dès lors, les moyens tirés de ce que l'analyse des observations aurait été imprécise et de ce qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une appréciation globale par thème doivent être écartés.

5. Le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable au projet de plan local d'urbanisme, aux motifs notamment que le projet d'aménagement et de développement durable a pour objectif de requalifier la traversée de Drap afin de limiter les nuisances et la pollution, la création d'une piste cyclable le long de la RD2204 allant dans le sens de l'incitation à une " mobilité douce ", que le choix des deux zones IIAU présente des perspectives intéressantes en terme d'urbanisation future, que la maîtrise de l'étalement urbain est prise en considération comme étant une priorité majeure, que les enjeux du renouvellement urbanistique du " Plan du Moulin " sont considérables tant dans sa mixité que dans sa fonction de centre vie de l'agglomération, que le maintien des activités agricoles s'inscrit dans la volonté de la commune de pérenniser l'existant voire développer une agriculture de production locale et que le plan de zonage préserve les trames " bleue et verte ", grand enjeu environnemental. Le commissaire-enquêteur a ainsi apprécié les avantages et inconvénients du projet et a indiqué, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminait le sens de cet avis. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des conclusions du commissaire-enquêteur doit être écarté.

6. Aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) Après l'enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié, est approuvé par délibération (...) du conseil municipal. (...) ". Il est toujours loisible à l'autorité compétente de modifier le plan local d'urbanisme après l'enquête publique, sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire-enquêteur, des observations du public et des avis émis par les collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

7. Les modifications tenant au classement en secteur UA du quartier des Arnulfs et à l'augmentation de la superficie des espaces boisés classés ont été apportées au projet de plan local d'urbanisme après l'enquête pour tenir compte des réserves de l'État quant au classement du quartier des Arnulfs en secteur UC alors qu'un classement en zone UA ou UB semblait plus approprié, et de sa demande de création d'espaces boisés classés sur les espaces constituant des corridors écologiques protégés par le schéma de cohérence territoriale. Le moyen tiré de ce que ces modifications ne procédaient pas de l'enquête doit, par suite, être écarté.

8. Il ressort du rapport de présentation, en premier lieu, que le secteur UA des Arnulfs, précédemment classé en zone urbaine également, ne représente qu'une petite partie du secteur UA qui lui-même ne couvre que 0,5 % de la superficie de la commune. En deuxième lieu, l'augmentation de la superficie des espaces boisés classés, qui n'est pas quantifiée par le requérant, répond au premier objectif du projet d'aménagement et de développement durable consistant à préserver l'environnement urbain et naturel. Il n'est ni établi, ni même allégué, que cette augmentation serait telle qu'elle porterait atteinte aux trois autres objectifs du projet d'aménagement et de développement durable. Enfin, la réduction de la superficie du secteur UD, qui comprend les zones d'habitat diffus, correspond à une des orientations du projet d'aménagement et de développement durable qui est de maîtriser l'étalement urbain. Dans ces conditions, il n'est pas établi par le requérant que ces modifications apportées au projet de plan local d'urbanisme après l'enquête publique porteraient atteinte au parti pris d'urbanisme et remettraient ainsi en cause l'économie générale du projet de plan local d'urbanisme.

9. Aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

10. M. B... soutient que M. Nardelli, conseiller municipal, a participé au vote alors qu'en sa qualité de voisin de ses parcelles il avait intérêt à ce qu'elles soient grevées de la servitude d'espace boisé classé instituée par la délibération en litige. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Nardelli, qui ne faisait pas partie de la majorité municipale, aurait participé aux travaux préparatoires d'élaboration du plan local d'urbanisme et aurait pris une part active aux débats relatifs à ce plan, de manière à influencer le conseil municipal afin que la délibération prenne en compte son intérêt personnel. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2131-11 précité doit, en tout état de cause, être écarté.

11. Aux termes de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. (...) ".

12. Les parcelles appartenant à M. B... sont à l'état naturel et non bâties et sont situées dans une zone d'habitat diffus, où la surface minimum pour construire est de 1 500 m² en raison d'espaces paysagers sensibles identifiés par la directive territoriale d'aménagement du territoire des Alpes-Maritimes, qui prévoit dans ce secteur " le maintien de la prédominance du végétal sur le minéral afin de préserver l'image et la perception à l'échelle du paysage lointain ". Dans ces conditions, et alors même que les parcelles sont classées en zone urbaine, que les terrains voisins sont bâtis et que le boisement des parcelles en cause serait médiocre, c'est sans erreur manifeste d'appréciation qu'elles ont été classées comme espace boisé par le plan local d'urbanisme.

13. Enfin, le détournement de pouvoir allégué par M. B... n'est pas établi.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au procès :

15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

16. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Drap, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Drap une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et à la commune de Drap.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Josset, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Gonneau, premier conseiller,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 21 juin 2018.

2

N° 17MA00626


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00626
Date de la décision : 21/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans.


Composition du Tribunal
Président : Mme JOSSET
Rapporteur ?: M. Pierre-Yves GONNEAU
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : LLC et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-21;17ma00626 ?
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