Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2017, par lequel le préfet de l'Hérault lui a enjoint de quitter le territoire sans délai à destination de son pays d'origine et lui a fait interdiction de retour.
Par un jugement n° 1700520 du 9 mars 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2017, M. B... représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier du 9 mars 2017 ;
2°) d'annuler les décisions précitées ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- sa situation personnelle n'a pas fait l'objet d'un examen sérieux avant l'édiction de la mesure d'éloignement ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement a été prise sans examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'exécution de la mesure d'éloignement à destination de la Russie alors que son épouse a obtenu la qualité de réfugiée n'est plus possible ;
- la décision d'interdiction de retour d'un an méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 31 janvier 2017, le préfet de l'Hérault a enjoint à M. B..., ressortissant russe, de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée d'un an ; que M. B... interjette appel du jugement du 9 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur l'obligation de quitter le territoire sans délai :
2. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté par adoption des motifs du tribunal qui n'appellent pas de précision en appel ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne à droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. B... allègue être entré en France le 15 juillet 2013 et s'y être maintenu de manière continue depuis cette date ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 13 octobre 2014 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 23 avril 2015 ; que sa demande de réexamen a de nouveau été rejetée par l'OFPRA le 31 août 2015 puis la CNDA le 20 septembre 2016 ; qu'il a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire le 24 juin 2015 ; que s'il se prévaut de sa relation avec une compatriote qui bénéficie d'une carte de résident de dix ans en qualité de réfugiée et avec laquelle il a eu un enfant né le 1er juillet 2015, il ressort toutefois du procès-verbal d'audition du 31 juillet 2017 qu'il a déclaré que le couple était séparé depuis 2016 ; que ni l'attestation d'hébergement du couple établie par un centre d'accueil de demandeurs d'asile du 9 juillet 2015 selon laquelle le couple et l'enfant étaient hébergés dans ce centre depuis le 1er juillet 2015, ni l'attestation de la CIMADE établie le 24 juillet 2017, dans le cadre de la présente instance, alléguant de l'existence d'une communauté de vie depuis le 23 juin 2014, en se référant à un historique non joint et sans plus de précision, ne sont suffisantes pour démontrer la stabilité de la relation du couple ; que, par ailleurs, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'il s'est marié avec l'intéressée le 18 juillet 2017 et que cette dernière serait de nouveau enceinte depuis le 9 février 2017, de telles circonstances étant postérieures à la décision contestée ; que M. B... n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'enfin alors qu'il a déclaré lors de son audition être sans ressource ni domicile fixe et a été interpellé pour vol, il ne démontre pas son insertion socio-professionnelle sur le territoire national ; que, par suite, en lui enjoignant de quitter le territoire sans délai, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que le requérant qui a déclaré lors de son audition qu'en l'absence de la mère, il s'occupait de sa fille née le 9 juillet 2015, sans plus de précision, ne démontre pas avoir tissé des liens intenses avec l'enfant en se bornant à se prévaloir d'une attestation peu circonstanciée établie par un centre d'accueil des demandeurs d'asile le 3 février 2017, dans le cadre de la présente instance, selon laquelle il participerait activement à l'éducation de cette enfant ; que par suite le requérant ne démontre pas que la mesure d'éloignement attaquée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
5. Considérant par suite que les conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'obligation de quitter le territoire sans délai doivent être rejetées ;
Sur la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :
6. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté par adoption des motifs du tribunal, qui n'appellent pas de précision en appel ;
7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " ...Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; que le requérant, dont la demande d'asile a été rejetée à deux reprises par la CNDA ainsi qu'il a été dit au point 3, n'apporte pas d'élément suffisamment probant au soutien de son allégation selon laquelle il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il ne peut à cet égard utilement se prévaloir de son mariage avec Mme D..., qui bénéficie d'une carte de réfugiée dès lors que ce mariage est postérieur à la décision contestée ainsi qu'il a été dit au point 3 ; que par suite le requérant ne démontre pas que la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant par suite que les conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement doivent être rejetées ;
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire national pour une durée d'un an :
9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 3 et 4 ;
10. Considérant que par suite les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire national pour une durée d'un an doivent être rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2017 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., au ministre de l'intérieur et à Me C...A....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2018 où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- Mme Josset, présidente assesseure,
- Mme Gougot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
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N° 17MA03306