Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La métropole Nice Côte d'Azur a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler d'une part, la décision du 17 juillet 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a, en application des dispositions de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, suspendu l'effet exécutoire de la délibération du 21 juin 2013 par laquelle le conseil métropolitain de la métropole Nice Côte d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de Roquebillière et d'autre part, la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté le recours gracieux formé par le président de la métropole Nice Côte d'Azur à l'encontre de cette décision du 17 juillet 2013.
Par un jugement n° 1400268 du 26 janvier 2017 le tribunal administratif de Nice a annulé ces deux décisions des 17 juillet et 19 novembre 2013.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 mars 2017, le ministre du logement et de l'habitat durable demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;
2°) de rejeter la demande présentée par la métropole Nice Côte d'Azur devant le tribunal administratif de Nice.
Il soutient que :
- le préfet des Alpes-Maritimes pour prendre la décision du 17 juillet 2013 en litige s'est également fondé sur la directive territoriale des Alpes-Maritimes ;
- il est demandé à la Cour, le cas échéant, de procéder à une substitution de motifs, en rejetant la demande en se fondant sur l'article L. 145-3 tel qu'interprété par cette directive ;
- les possibilités de développement de l'urbanisation telles que retenues par le plan local d'urbanisme sont manifestement disproportionnées par rapport aux besoins de la commune identifiés à l'horizon 2020.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2017, la métropole Nice Côte d'Azur conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2003-1169 du 2 décembre 2003 portant approbation de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme C... Josset, présidente assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Alain Poujade, président de la 1ère chambre.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Josset,
- les conclusions de M. Gonneau,
- et les observations de Me A..., représentant la métropole Nice Cote d'Azur.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 21 juin 2013, le conseil métropolitain de la métropole Nice Côte d'Azur a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune de Roquebillière. Par décision du 17 juillet 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a, en application des dispositions de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, suspendu l'effet exécutoire de cette délibération en ce qui concernait le classement du quartier Counigou en zone UCa, des quartiers Berthemont les Bains, Capella et Lou Vivier en zone UCb et des quartiers Cervagne, Marchier et Plan Gast en zone UD. Le président de la métropole Nice Côte d'Azur a, par courrier daté du 23 septembre 2013, formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision du 17 juillet 2013, lequel a été rejeté par une décision du préfet des Alpes-Maritimes du 19 novembre 2013. Le ministre du logement et de l'habitat durable interjette appel du jugement du 26 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de la métropole Nice Cote d'Azur, annulé ces deux décisions des 17 juillet et 19 novembre 2013.
2. Aux termes de l'article L. 145-3 alors en vigueur : " ...III.-Sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants. ". Au point III-234 des orientations de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes , il est précisé que : " (...) La forme urbaine et l'inscription dans le site sont les éléments déterminants pour l'identification des bourgs, villages, hameaux et groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations ainsi que pour l'appréciation des possibilités d'extension en continuité. (...) La continuité de l'urbanisation implique la proximité visuelle mais non la contiguïté des espaces bâtis. L'urbanisation en continuité peut intégrer des espaces non bâtis de faible dimension à l'échelle de l'unité urbaine considérée (parcs, cours d'eau, places, bosquets ...) - les limites de la continuité sont établies à partir des protections existantes et des critères suivants : critères physiques liés au terrain : reliefs, secteurs de forte déclivité, cours d'eau, vallons... ;critères résultant de l'analyse du paysage et notamment : l'intérêt propre des paysages : protection des socles de villages, des secteurs à fort impact visuel, préservation de vues, l'impact qu'aurait l'urbanisation sur la structure du paysage et sur l'équilibre entre les espaces bâtis et les espaces naturels ;(...) ".
3. D'une part, de telles prescriptions apportent des précisions relatives aux modalités d'application des dispositions du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme et ne sont pas incompatibles avec elles. En conséquence, la compatibilité du plan local d'urbanisme de Roquebillière doit ainsi s'apprécier au regard des dispositions de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes.
4. D'autre part, par groupe " de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ", au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme, il convient d'entendre un groupe de plusieurs bâtiments qui, bien que ne constituant pas un hameau, se perçoivent, compte tenu de leur implantation les uns par rapport aux autres, notamment de la distance qui les sépare, de leurs caractéristiques et de la configuration particulière des lieux, comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment des documents photographiques produits par le préfet des Alpes-Maritimes que les zones UCa du quartier Counigou, Ucb des quartiers Berthemont-les-Bains, Capella et Lou Vivier et les zones UD des quartiers Cervagne, Marchier et Plan Gast, d'une superficie variant de 7 ha à 17,5 ha sont situées en discontinuité du village, d'une superficie environ de 7,6 ha, et sont constituées d'un habitat diffus ne se percevant pas comme appartenant à un même ensemble dont les caractéristiques et l'organisation s'inscriraient dans les traditions locales. Un tel habitat ne peut être regardé, dans les zones considérées, ni comme constituant des hameaux, quelque soit l'appellation retenue dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme, ni comme formant des groupes " de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ", tels que définie au point 4. Ainsi, compte tenu notamment du nombre et des modalités d'implantation des constructions existantes, en continuité desquelles l'urbanisation est prévue, et alors que les secteurs d'urbanisation nouvelle intègrent des espaces non bâtis d'une superficie importante, les zones d'urbanisation en litige ne peuvent être regardées comme réalisées en continuité avec des hameaux ou des groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existant au sens l'article L. 145-3-III tel qu'interprété par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes.
6. En second lieu, il appartenait d'office au tribunal, d'examiner la légalité des dispositions du plan local d'urbanisme au regard des précisions apportées par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes. Par suite, la métropole Nice Côte d'Azur ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes aurait commis une erreur de droit en ne fondant pas sa décision également sur les précisons apportées par cette directive.
7. Par suite, le ministre du logement et de l'habitat durable est fondé à soutenir, pour ce seul motif, sans qu'il y ait lieu de procéder à une substitution de motifs, que c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 145-3-III, tel qu'interprété par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes.
8. Il y a donc lieu, pour la Cour de statuer par la voie de l'effet dévolutif sur les autres moyens invoqués par la métropole Nice Côte d'Azur.
9. Aux termes de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans les communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale, l'acte publié approuvant le plan local d'urbanisme devient exécutoire un mois suivant sa transmission au préfet./ Toutefois, il ne devient exécutoire qu'après l'intervention des modifications demandées par le préfet lorsque celui-ci, dans le délai d'un mois mentionné au premier alinéa, notifie par lettre motivée (...) à la commune les modifications qu'il estime nécessaire d'apporter au plan, lorsque les dispositions de celui-ci :/ a) Ne sont pas compatibles avec les directives territoriales d'aménagement maintenues en vigueur après la publication de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ou avec les prescriptions particulières prévues par le III de l'article L. 145-7 et, en l'absence de celles-ci, avec les dispositions particulières aux zones de montagne et au littoral mentionnées à l'article L. 111-1-1.../ ".
10. Par lettre du 17 juillet 2013, le préfet des Alpes-Maritimes, après avoir rappelé que le territoire de la commune de Roquebillière était soumis à la loi montage dont certaines dispositions ont été précisées par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes approuvé le 2 décembre 2003, a rappelé que l'un des principes d'aménagement de cette loi est celui de la réalisation de l'urbanisation en continuité défini par l'article L. 145-3-III du code de l'urbanisme, il a ensuite indiqué que les secteurs, identifiés dans ce courrier, classés en zone urbaine étaient situés en discontinuité des bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants en précisant, pour quels motifs selon lui, et a demandé que ces terrains soient classés en zone N. Dans ce même courrier, le préfet demandait au président d'inviter son conseil à rapporter ladite délibération et à modifier les dispositions fixées pour les terrains précités. Cette lettre du 17 juillet 2013 est, dès lors, suffisamment motivée.
11. Il résulte de ce qui précède que le ministre du logement et de l'habitat durable est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision du 17 juillet 2013, ensemble la décision du 19 novembre 2013 portant rejet du recours gracieux de la métropole Nice Côte d'Azur contre cette décision.
Sur les frais d'instance :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
13. Ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse quelque somme que ce soit à la métropole Nice Côte d'Azur au titre de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 janvier 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la métropole Nice Côte d'Azur devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la métropole Nice Côte d'Azur tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la cohésion des territoires et à la métropole Nice Côte d'azur.
Copie en sera adressée à la commune de Roquebillière.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2018, où siégeaient :
- Mme Josset, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme B..., première conseillère,
- M. Silvy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
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N° 17MA01305