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04/04/2018 | FRANCE | N°16MA03699

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 04 avril 2018, 16MA03699


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E..., M. A... E...et Mme D... E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 juin 2014 par lequel le maire de la commune d'Orgon a délivré un permis de construire à la société par actions simplifiée (SAS) " Activités pour promouvoir le logement évolutif " (APPLE Promotion) ;

Par un jugement n° 1406187 du 18 juillet 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire

, enregistrés le 15 septembre 2016 et le 21 juillet 2017, M. B... E..., M. A... E...et Mme D...E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E..., M. A... E...et Mme D... E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 juin 2014 par lequel le maire de la commune d'Orgon a délivré un permis de construire à la société par actions simplifiée (SAS) " Activités pour promouvoir le logement évolutif " (APPLE Promotion) ;

Par un jugement n° 1406187 du 18 juillet 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 septembre 2016 et le 21 juillet 2017, M. B... E..., M. A... E...et Mme D...E..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Orgon la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier, le tribunal ayant omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, selon lequel le dossier de permis de construire était insuffisant au regard, tout d'abord, des éléments paysagers existants aux abords du terrain d'assiette du projet, ensuite, du document graphique et des plans de façades et enfin du maintien de la construction existante destinée au service public de La Poste ;

- le jugement est insuffisamment motivé sur la réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 11 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) ;

- le dossier de permis de construire est insuffisant au regard des articles R. 423-1, R. 431-7 à R. 431-10, R. 431-16, R. 423-50 et R. 425-18 du code de l'urbanisme ;

- en déclarant avoir qualité pour demander l'autorisation en litige en application de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, la SAS APPLE Promotion a induit le service instructeur en erreur ;

- le projet méconnaît les articles R. 431-5 et R. 431-6 du code de l'urbanisme :

- il méconnaît aussi les articles R. 423-50 et R. 425-18 du même code ;

- le projet porte sur des parties de parcelles sans qu'il soit justifié d'une division foncière préalable ;

- l'avis du service territorial du patrimoine du 24 juin 2014, qui revêt le caractère d'un avis conforme pour la partie démolition, ne comporte pas la mention des prénoms, nom et qualité de son signataire, en méconnaissance de la loi du 12 avril 2000 ;

- le projet n'a pas été précédé d'une autorisation de lotir, en méconnaissance des articles L. 421-6, L. 442-1, L. 442-1-1 et R. 442-1 du code de l'urbanisme ;

- le projet méconnaît les articles L. 451-1 et R. 431-21 du code de l'urbanisme ;

- il méconnaît également l'article UD 6 du règlement du POS communal ;

- il méconnaît aussi l'article UD 10 du même POS ;

- il viole en outre l'article UD 11 du POS ;

- l'article UD 14 du POS est enfin méconnu ;

Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 janvier 2017 et le 17 août 2017, la SAS APPLE Promotion conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge des requérants la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance est irrecevable au regard de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens des requérants ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 mars et 23 juillet 2017, la commune d'Orgon demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge solidaire des requérants la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance est irrecevable, à défaut d'intérêt à agir ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 15 février 2018, la SAS APPLE Promotion, représentée par la SELARL AEGIS, mandataire judiciaire, demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de mettre à la charge solidaire des requérants la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que par un jugement du 12 octobre 2017 le tribunal de commerce de Toulouse a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire en faveur de la SAS APPLE Promotion et a désigné la SELARL AEGIS pour la représenter ; elle s'approprie les écritures de la SAS APPLE.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- l'arrêté du 13 juin 2008 relatif à la performance énergétique des bâtiments existants de surface supérieure à 1 000 mètres carrés, lorsqu'ils font l'objet de travaux de rénovation importants ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gougot,

- les conclusions de M. Gonneau, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. et Mme E....

1. Considérant que le maire de la commune d'Orgon a, par arrêté du 26 juin 2014, accordé à la SAS " APPLE Promotion " un permis de construire pour la réhabilitation d'une construction existante, anciennement affectée à des logements de fonction pour la gendarmerie, sur un terrain situé avenue du Colonel Reynaud, en zone UDa du plan d'occupation des sols (POS), pour un projet visant à réaliser vingt-et-un logements ; que les consorts E...interjettent appel du jugement du 18 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Marseille a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les consorts E...; qu'en particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre aux moyens tirés, d'une part, de l'insuffisante composition du dossier de permis de construire et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article UD 11 du règlement du POS ; que, par suite, les consorts E...ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire [...] que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. " ; qu'il résulte de cette disposition qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ; qu'il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ; que le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ; qu'eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ;

4. Considérant qu'en l'espèce, les requérants dont les propriétés sont soit limitrophes à l'Est du projet, soit à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet en cause soutiennent que ce projet de construction qui porte sur la réhabilitation de vingt et un logements aura des conséquences sur leur cadre de vie, alors notamment qu'ils bénéficient sur le terrain d'assiette du projet d'une servitude de passage ; qu'ils justifient ainsi d'un intérêt à agir contre le permis de construire en litige ;

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire [...] sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés :/ a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux... " ; que selon l'article R. 431-5 du même code, en vigueur à la date de la demande en litige: " La demande de permis de construire précise : / a) L'identité du ou des demandeurs ; [...] c) La localisation et la superficie du ou des terrains ; / d) La nature des travaux ; / e) La destination des constructions, par référence aux différentes destinations définies à l'article R*123-9 ; / f) La surface de plancher des constructions projetées, s'il y a lieu répartie selon les différentes destinations définies à l'article R*123-9 [...] La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R*423-1 pour déposer une demande de permis. " ; qu'il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus ; que les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur ; qu'ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande ; qu'il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude ; qu'il ressort de la demande de permis de construire qu'elle porte sur les parcelles AC 202p, AM 289, AM 294p, AM 304, AM 315p et AM 370p d'une contenance de 4 037 mètres carrés, pour lesquelles la société pétitionnaire a attesté avoir qualité à déposer cette demande que la seule circonstance qu'il ressorte de la délibération du conseil municipal du 29 avril 2013 que lors de cette séance seules étaient l'objet d'une vente à la société Cabrita Promotion, dont le directeur général est le représentant légal de la société pétitionnaire, les parcelles AC 202, AM 294, 315 et 370, n'est pas suffisante pour démontrer l'absence de qualité de la SAS APPLE Promotion en raison de l'existence d'une fraude ; que par ailleurs, la discordance relevée par les requérants entre le formulaire Cerfa, qui mentionne en effet, en case 5.5, 159 m² de surface créée, tandis que l'arrêté fait état de 186 m² de surface de plancher, n'est pas de nature à révéler l'existence d'une telle fraude ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural définit, par des plans et documents écrits, l'implantation des bâtiments, leur composition, leur organisation et l'expression de leur volume ainsi que le choix des matériaux et des couleurs. / Il précise, par des documents graphiques ou photographiques, l'insertion dans l'environnement et l'impact visuel des bâtiments ainsi que le traitement de leurs accès et de leurs abords. " ; que selon l'article R. 431-7 du même code : " Sont joints à la demande de permis de construire : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12. " ; que l'article R. 431-8 du même code dispose que : " Le projet architectural comprend une notice précisant :/ 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ; que l'article R. 431-9 du même code précise que : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement... ; " ; que selon l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. " ; que l'article R. 431-16 du même code, en vigueur à la date de la demande d'autorisation, dispose que : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas [...] / a) L'étude d'impact, lorsqu'elle est prévue en application du code de l'environnement, (...) i) Lorsque le projet est tenu de respecter les dispositions mentionnées à l'article R. 111-20 du code de la construction et de l'habitation, un document établi par le maître d'ouvrage attestant la prise en compte de la réglementation thermique, en application de l'article R. 111-20-1 de ce code, et pour les projets concernés par le cinquième alinéa de l'article L. 111-9 du même code, la réalisation de l'étude de faisabilité relative aux approvisionnements en énergie, en application de l'article R. 111-20-2 dudit code " ; qu'enfin selon l'article R. 131-28-2 du code de la construction et de l'habitation : " A l'achèvement de travaux de réhabilitation thermique visés aux articles R. 131-26 et R. 131-28 et soumis à la délivrance d'une autorisation de construire, le maître d'ouvrage fournit à l'autorité compétente qui a délivré l'autorisation : / - un document attestant que le maître d'oeuvre a pris en compte la réglementation thermique, si le maître d'oeuvre désigné est à la fois chargé de la conception des travaux de réhabilitation, de leur réalisation et de leur suivi ; / - un document attestant qu'il a pris en compte la réglementation thermique, si le maître d'oeuvre désigné n'est en charge que de la conception des travaux de réhabilitation ou s'il n'a pas désigné de maître d'oeuvre. / Cette attestation est établie sur un formulaire conforme à des prescriptions fixées par arrêté du ministre chargé de la construction. Elle est jointe à la déclaration d'achèvement des travaux dans les conditions prévues à l'article R. 462-4-2 du code de l'urbanisme. " ;

7. Considérant, d'une part, que le dossier de demande comporte un document d'insertion en pièce " PC 6 " qui représente une vue de près du projet et en pièces " PC 7 " et " PC 8 " des photographies de l'environnement proche et lointain, complétées par une description des lieux dans la notice ; que contrairement à ce que soutiennent les requérants, ces éléments étaient suffisants pour permettre à l'autorité administrative d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement ; que l'absence de précision sur le fait que les abords du terrain d'assiette sont qualifiés de remarquables par la directive de protection et de mise en valeur des paysages des Alpilles, et que la commune d'Orgon appartient au site inscrit de la chaîne des Alpilles n'est pas de nature à caractériser une insuffisance du dossier de demande d'autorisation alors que les requérants ne démontrent, ni même n'allèguent qu'il existerait dans les espaces riverains du projet un alignement d'arbres remarquables que la directive précitée prévoirait de pérenniser ; qu'en outre, le projet qui porte seulement sur une partie non construite de la parcelle AC 202 n'avait pas à mentionner la présence d'un bâtiment de La Poste sur la partie restante de cette parcelle, qui n'est pas incluse dans le terrain d'assiette du projet ; que l'état initial des façades et de la toiture ressort des photographies et de la notice descriptive, qui retrace le contexte de l'opération qui porte sur une construction ayant servi de logements de fonction de la gendarmerie d'Orgon dans les années 1960 ; que ces éléments étaient suffisants pour permettre à l'autorité administrative d'apprécier la légalité du projet ;

8. Considérant, d'autre part, que les requérants ne peuvent utilement soutenir que n'était pas jointe au dossier de demande l'attestation de prise en compte de la réglementation thermique prévue par les dispositions précitées de l'article R. 431-16 i) du code de l'urbanisme, ces dispositions n'étant applicables qu'aux bâtiments neufs en application de l'article R. 111-20-6 du code de la construction et de l'habitation, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point 1 le projet vise à réhabiliter une construction existante ; qu'à supposer qu'en se prévalant de l'arrêté du 13 juin 2008 relatif à la performance énergétique des bâtiments existants de surface supérieure à 1 000 mètres carrés, lorsqu'ils font l'objet de travaux de rénovation importants, les requérants aient entendu soulever un moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 131-28-2 précité du code de la construction et de l'habitation, un tel moyen ne pourra qu'être écarté comme inopérant dès lors que ces dispositions trouvent seulement à s'appliquer à l'achèvement des travaux et non au stade de la demande d'autorisation ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire [...] ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. " ; que l'article L. 442-1 du même code alors en vigueur dispose que : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. " ; que selon l'article L. 442-1-1 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat énumère les divisions en vue de construire qui, en fonction de leur objet particulier ou par suite de leur contrôle au titre d'une autre procédure, ne sont pas constitutives d'un lotissement au sens de l'article L. 442-1. " ; que l'article R. 442-1 du code de l'urbanisme en vigueur à la date de la décision contestée précise que : " Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager : / [...] e) Les détachements de terrains supportant des bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis... " ; que la notice du dossier de demande précise dans la " présentation de l'opération " que le terrain d'assiette du projet se constitue de huit parcelles, entières ou pour parties qui devront être définitivement arrêtées par le plan de bornage ; qu'est joint au dossier de demande un plan de géomètre qui délimite en pointillés rouges la " limite parcelle du projet " ; que la division de certaines parcelles d'assiette du projet n'était pas soumise à une formalité préalable, en application du e) de l'article R. 442-1 du code de l'urbanisme, dès lors que le projet porte sur une construction pré-existante et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres parcelles issues de la division soient destinées à être bâties ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorisation accordée est illégale, à défaut de division préalable autorisée ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article UD 10 du règlement du POS communal : " 10.1 La hauteur des constructions en tout point du bâtiment mesurée à partir du sol existant jusqu'à l'égout du toit ne pourra excéder 7 mètres " ; qu'aux termes de l'article 4 des dispositions générales dudit règlement : " Lorsqu'un immeuble bâti existant n'est pas conforme aux règles édictées par le règlement applicable à la zone, le permis de construire ne peut être accordé que pour des travaux qui ont pour objet d'améliorer la conformité de ces immeubles avec lesdites règles ou qui sont sans effet à leur égard " ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des plans de façade du projet, que l'égout du toit de la construction projetée, est situé à la même hauteur que celui de la construction existante, qui ne respectait pas la limite maximale de 7 mètres fixée par le POS ; que les travaux en cause ne sont pas sans effet au regard de la règle de hauteur dès lors qu'il est prévu de modifier la toiture en implantant sur l'ancienne toiture-terrasse une couverture courbe en zinc dont l'égout est à la même hauteur que l'ancien ; que les travaux en litige n'améliorant pas la conformité à la règle de hauteur, les requérants sont par suite fondés à soutenir que le projet méconnait les dispositions précitées de l'article UD 10 du règlement du POS ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que l'article UD 14 du règlement du POS communal dispose que : " Le coefficient d'occupation du sol est fixé à : 0,30 dans le secteur Uda " ; que contrairement à ce que soutient la société pétitionnaire, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, au demeurant postérieure à la demande d'autorisation, qui supprime les coefficients d'occupations des sols, n'est pas applicable aux plan d'occupation des sols ; qu'aux termes de l'article R. 123-10 du code de l'urbanisme alors applicable : " Le coefficient d'occupation du sol qui détermine la densité de construction admise est le rapport exprimant le nombre de mètres carrés de surface de plancher ou le nombre de mètres cubes susceptibles d'être construits par mètre carré de sol. / Pour le calcul du coefficient d'occupation du sol, la superficie du ou des terrains faisant l'objet de la demande d'autorisation de construire ou de lotir comprend, le cas échéant, les terrains classés comme espaces boisés en application de l'article L. 130-1 et les terrains cédés gratuitement dans les conditions fixées par les articles R.* 332-15 et R.* 332-16. La surface de plancher ou, le cas échéant, le volume des bâtiments existants conservés sur le ou les terrains faisant l'objet de la demande est déduit des possibilités de construction.... " ; qu'en l'espèce, le terrain d'assiette du projet, d'une superficie de 4 037 m², autorisait ainsi une construction de 1 211,10 m² maximum , soit inférieure à la surface de la construction du projet, d'une surface existante de 1 046 m² outre 159 m² de surface créée, soit 1205 m² ; que contrairement à ce que soutiennent les requérants, il y a lieu, pour l'application des dispositions précitées de l'article UD 14 du règlement du POS, de se référer à la superficie du terrain d'assiette de la construction projetée qui inclut seulement une partie de la parcelle AM 202 et non à l'entière parcelle AM 202, qui supporte déjà une construction abritant La Poste, mais n'est pas incluse dans le projet, ainsi qu'il a été dit au point 7 ;

12. Considérant, en sixième et dernier lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 431-5 et R. 431-6, R. 423-50 et R. 425-18 du code de l'urbanisme, de l'illégalité de l'avis conforme du service territorial du patrimoine du 24 juin 2014 pour la partie démolition au regard de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations, de la méconnaissance des articles L. 451-1 et R. 431-21 du code de l'urbanisme et des articles UD 6 et UD 11 du règlement du POS communal doivent être écartés, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges et qui n'appellent pas de précision en appel ;

Sur l'application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire [...] estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation. " ; que, d'une part, lorsque les éléments d'un projet de construction ou d'aménagement ayant une vocation fonctionnelle autonome auraient pu faire, en raison de l'ampleur et de la complexité du projet, l'objet d'autorisations distinctes, le juge de l'excès de pouvoir peut prononcer une annulation partielle de l'arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux ; que, d'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 600-5 citées ci-dessus qu'en dehors de cette hypothèse, le juge administratif peut également procéder à l'annulation partielle d'une autorisation d'urbanisme dans le cas où une illégalité affecte une partie identifiable du projet et où cette illégalité est susceptible d'être régularisée par un arrêté modificatif de l'autorité compétente, sans qu'il soit nécessaire que la partie illégale du projet soit divisible du reste de ce projet ; que le juge peut, le cas échéant, s'il l'estime nécessaire, assortir sa décision d'un délai pour que le pétitionnaire dépose une demande d'autorisation modificative afin de régulariser l'autorisation subsistante, partiellement annulée ;

14. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 10 le projet méconnaît l'article UD 10 du règlement du POS ; que rien ne fait obstacle à ce que la commune d'Orgon délivre un permis modificatif à la SAS Apple Promotion autorisant à régulariser sa demande de permis de construire sur ce point ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler l'arrêté du maire de la commune en tant seulement qu'il autorise la réhabilitation de la construction existante à une hauteur supérieure à 7 mètres ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts E...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2014, en tant qu'il autorise une réhabilitation de la construction existante à une hauteur supérieure à 7 mètres en méconnaissance des articles 4 des dispositions générales et UD 10 du règlement du POS ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des consorts E...dirigées contre la commune d'Orgon qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des consorts E...la somme de 1 000 euros, à verser solidairement à la commune d'Orgon en application de ces dispositions ; qu'en outre, les consorts E...verseront à la société " APPLE Promotion " la somme de 1 000 euros au titre des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 juillet 2016 et l'arrêté de permis de construire du 26 juin 2014 sont annulés, en tant que le projet méconnaît les articles 4 des dispositions générales et UD 10 du règlement du POS communal.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts E...est rejeté.

Article 3 : Les consorts E...verseront solidairement à la commune d'Orgon une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les consorts E...verseront à la SAS APPLE Promotion une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à M. A... E..., à Mme D...E..., à la SAS " APPLE Promotion " et à la commune d'Orgon.

Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2018, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 4 avril 2018.

2

N° 16MA03699


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03699
Date de la décision : 04/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale - Règlement national d'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale - POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. GONNEAU
Avocat(s) : GUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-04-04;16ma03699 ?
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