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06/07/2017 | FRANCE | N°15MA03167

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 06 juillet 2017, 15MA03167


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et M. A... E...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 22 octobre 2012 et du 9 novembre 2012 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société d'exploitation Vinissol deux permis de construire en vue de la création de deux centrales solaires photovoltaïques, l'une sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux, Saint-Couat-d'Aude et Roquecourbe-Minervois, et l'autre sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux et

Saint-Couat-d'Aude.

Par un jugement n° 1205574 - 1300158 du 28 mai 2015 l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...et M. A... E...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 22 octobre 2012 et du 9 novembre 2012 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société d'exploitation Vinissol deux permis de construire en vue de la création de deux centrales solaires photovoltaïques, l'une sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux, Saint-Couat-d'Aude et Roquecourbe-Minervois, et l'autre sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux et Saint-Couat-d'Aude.

Par un jugement n° 1205574 - 1300158 du 28 mai 2015 le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 juillet 2015 et le 21 octobre 2016, MM. B... etE..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler ces arrêtés des 22 octobre et 9 novembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Vinissol une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en raison de la mise en ligne tardive du sens des conclusions du rapporteur public ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la société ne disposait d'aucun titre pour déposer une demande de permis de construire ;

- l'étude d'impact est insuffisante et comporte des inexactitudes ;

- l'enquête publique est entachée d'irrégularités en ce qui concerne l'avis d'ouverture d'enquête publique et l'affichage sur le terrain qui n'était pas visible depuis la voie publique ;

- la commission d'enquête n'a pas pris en compte les observations de M. E... et son avis est insuffisamment motivé ;

- le dossier de demande de permis de construire méconnaît les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme et n'a pas permis au service instructeur de se prononcer en connaissance de cause ;

- les arrêtés sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que les permis de construire se situent en grande partie dans une zone AOC et AOP ;

- ils méconnaissent les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme en ce qu'ils sont de nature à compromettre les activités agricoles existantes ;

- ils méconnaissent les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme en ce qu'ils portent atteinte au caractère des lieux ;

- ils méconnaissent les dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme en ce qu'ils ne sont pas nécessaires à une exploitation agricole.

Le syndicat viticole du Cru Minervois et l'EARL Escoi Domaine Montaude ont présenté des mémoires en intervention le 27 septembre et le 2 novembre 2016.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2016, le ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête et à ce que l'intervention de l'EARL Escoi Domaine Montaude ne soit pas admise.

Il soutient que :

- les requérants n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 décembre 2015 et les 21 octobre et 22 novembre 2016, la société Vinissol conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme globale de 5 000 euros soit mise à la charge de MM. B... et E...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérants n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Josset,

- les conclusions de Mme Giocanti,

- et les observations de Me C..., représentant MM. B...etE....

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 22 juin 2017 et le 26 juin 2017 présentées respectivement par MM. B... et E...et par la société d'exploitation solaire Vinissol.

1. Considérant que, par arrêtés du 22 octobre 2012 et du 9 novembre 2012, le préfet de l'Aude a délivré à la société d'exploitation Vinissol deux permis de construire pour la création de deux centrales solaires photovoltaïques, l'une sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux, Saint-Couat-d'Aude et Roquecourbe-Minervois, comportant huit postes de transformation, deux postes de livraison et deux locaux techniques, pour une surface hors oeuvre nette créée de 246 m², et, l'autre sur le territoire des communes de Montbrun-des-Corbières, Moux et Saint-Couat-d'Aude, comportant cinq postes de transformation, un poste de livraison et un local technique, pour une surface hors oeuvre nette créée de 147 m² ; que M. B... et M. E... interjettent appel du jugement du 28 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande d'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur les interventions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de ses statuts, le syndicat viticole du cru Minervois " contribue à la mission d'intérêt général de préservation et de mise en valeur des terroirs, des traditions locales et des savoirs faire, ainsi que des produits d'AOC qui sont issus de l'aire géographique d'appellation d'origine contrôlée Minervois (...) il participe aux actions de défense et de protection du nom, du produit et du terroir, à la valorisation du produit ainsi qu'à la connaissance statistique du secteur (...) " ;

3. Considérant qu'eu égard à la nature et à l'objet du litige, le syndicat viticole du cru Minervois justifie d'un intérêt suffisant à intervenir au soutien des conclusions présentées par MM. B... etE... ; que son intervention doit dès lors être admise ;

4. Considérant que l'EARL Escoi Domaine Montaude, qui n'établit pas exploiter des terres agricoles à proximité du périmètre du parc photovoltaïque en litige, ne justifie pas d'un intérêt suffisant à l'annulation du jugement attaqué ; que, par suite, son intervention ne peut être admise ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne " ; qu'en l'espèce, il ressort du relevé de l'application Sagace que le sens des conclusions du rapporteur public a été porté à la connaissance des parties le 28 avril 2015 à 12 heures, un peu moins de 48 heures avant l'audience qui s'est tenue le 30 avril 2015 à 9 heures 30 ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article R. 711-3 du code de justice administrative doit être écarté ;

6. Considérant que le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au motif que le terrain d'assiette des projets se situe en zone AOC et AOP n'a pas été soulevé par les requérants en première instance ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer doit être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'étude d'impact :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-8 du code de l'urbanisme, dans ses dispositions en vigueur à la date de dépôt des demandes de permis de construire, " Ne sont pas soumis à la procédure de l'étude d'impact, sous réserve des dispositions de l'article R. 122-9, les aménagements, ouvrages et travaux dont le coût total est inférieur à 1 900 000 euros. En cas de réalisation fractionnée, le montant à retenir est celui du programme général de travaux. II.-Toutefois, la procédure de l'étude d'impact est applicable quel que soit le coût de leur réalisation, aux aménagements, ouvrages et travaux définis ci-après : ....16° Travaux d'installation d'ouvrages de production d'électricité à partir de l'énergie solaire installés sur le sol dont la puissance crête est supérieure à deux cent cinquante kilowatts .. " ; qu'aux termes de l'article R. 122-3 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. II. - L'étude d'impact présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ;2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ;3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ;4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ;5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ;6° Pour les infrastructures de transport, l'étude d'impact comprend en outre une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu'une évaluation des consommations énergétiques résultant de l'exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu'elle entraîne ou permet d'éviter. III. - Afin de faciliter la prise de connaissance par le public des informations contenues dans l'étude, celle-ci fait l'objet d'un résumé non technique (...) " ;

8. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et, par conséquent, d'entraîner l'illégalité de la décision d'autorisation subséquente que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'expression de ses observations par la population à l'occasion de l'enquête publique ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative en la conduisant à sous-estimer l'importance des conséquences du projet sur l'environnement et sur la commodité du voisinage ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude d'impact de novembre 2010 complétée en juin 2011 jointe au dossier de demande de permis de construire, que les projets en litige se situent sur le territoire de quatre communes dans un secteur viticole en déclin et en difficulté et concernent 61,86 ha de vignes, 35,79 ha de champs constitués majoritairement de vignes arrachées de plus d'un an et 9,64 ha de friches et landes ; qu'il résulte du diagnostic agricole de la chambre d'agriculture de l'Aude et des analyses économiques et agronomique reprises dans l'étude d'impact qu'en moyenne les surfaces de vignes impactées par le projet ne représentent que 16 % des surfaces de vignes détenues par les exploitants, sans compter les surfaces potentiellement libérées par l'arrachage en dehors de ce périmètre permettant ainsi aux agriculteurs et à quelques exploitants de continuer leur activité ; que la circonstance que le document dont s'agit ne serait pas signé ne suffit pas à remettre en cause son bien-fondé ; que l'institut national de l'origine et de la qualité ( INAO ) a souligné que très peu de cette partie du vignoble est déclarée en appellation Minervois ou Corbières ; que l'étude comporte une analyse détaillée des impacts temporaires liés à la période des travaux et des conséquences des rejets de poussière sur les parcelles voisines, réduites et uniquement liées à la phase des travaux et des mesures prises pour compenser les effets néfastes sur l'environnement ; que cette même étude fait état de la proximité du canal du Midi et précise que les parcelles sont utilisées pour la chasse ; qu'elle comprend une analyse de l'impact économique du projet et comporte notamment des développements sur les intérêts des propriétaires fonciers des terrains d'assiette, le remplacement d'une activité viticole peu ou pas productive par une production d'énergie rentable assurant des ressources financières nouvelles ; que si les requérants font valoir que la commission d'enquête publique a considéré que certains impacts auraient été sous-estimés, cette sous-estimation n'a pas en tout état de cause paru déterminante puisque cette commission a émis un avis favorable au projet ; que les intéressés n'apportent aucun élément de nature à démontrer que l'étude comporterait des insuffisances ou des erreurs qui auraient eu pour effet de nuire à l'expression de ses observations par la population à l'occasion de l'enquête publique ou auraient été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative en la conduisant à sous-estimer l'importance des conséquences du projet sur l'environnement et sur la commodité du voisinage ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 122-3 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne l'enquête publique :

10. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-14 du code de l'environnement dans ses dispositions applicables au présent litige : " Un avis portant ces indications à la connaissance du public est, par les soins du préfet, publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. Pour les opérations d'importance nationale, ledit avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale quinze jours au moins avant le début de l'enquête. Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant toute la durée de celle-ci, cet avis est publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tous autres procédés, dans chacune des communes désignées par le préfet. Cette désignation porte au minimum sur toutes les communes sur le territoire desquelles l'opération doit avoir lieu. L'accomplissement de cette mesure de publicité incombe au maire et est certifié par lui. Lorsque certaines de ces communes sont situées dans un autre département, le préfet prend l'accord du préfet de ce département pour cette désignation. Ce dernier fait assurer la publication de l'avis dans ces communes selon les modalités prescrites à l'alinéa précédent. En outre, dans les mêmes conditions de délai et de durée, et sauf impossibilité, il est procédé, par les soins du maître de l'ouvrage, à l'affichage du même avis sur les lieux ou en un lieu situé au voisinage des aménagements, ouvrages ou travaux projetés et visible de la voie publique. " ;

11. Considérant que le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'environnement, qui prévoient la publication de l'avis d'ouverture de l'enquête publique sur le site internet de la préfecture, est inopérant dès lors que ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juin 2012, soit postérieurement à l'avis d'enquête publique en litige du 16 janvier 2012 ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis de la commission d'enquête publique que la commission regroupée s'est rendue sur les sites des demandes de permis de construire pour notamment vérifier la présence de l'avis d'enquête ; que, selon un constat d'huissier du 19 janvier 2012, ces affichages étaient visibles depuis la voie publique ; que si les appelants font valoir que tel n'était pas le cas, ils ne l'établissent pas ; que s'il est vrai que l'avis d'ouverture d'enquête a été affiché en mairie de Roquecourbe-Minervois du 6 février au 9 mars 2012, soit seulement durant l'enquête, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de la commission d'enquête que trois permanences ont été tenues dans cette mairie les 6 février, 23 février et 9 mars 2012 et que le registre de cette commune qui comporte 120 habitants a enregistré 58 prises de position dont 39 défavorables au projet ; que, compte tenu de cette participation élevée du public à l'enquête, le défaut d'affichage en mairie 15 jours avant l'enquête publique comme l'exige les dispositions précitées de l'article R. 123-11 n'a pas été susceptible de nuire à l'information du public ni été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision contestée ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-22 du code de l'environnement dans ses dispositions applicables au présent litige : " A l'expiration du délai d'enquête, le ou les registres d'enquête sont clos et signés par le préfet ou par le sous-préfet, lorsque le lieu d'enquête est la préfecture ou la sous-préfecture, et par le maire dans tous les autres cas, puis transmis dans les 24 heures, avec le dossier d'enquête et les documents annexés, au commissaire enquêteur ou au président de la commission d'enquête. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête entend toute personne qu'il lui paraît utile de consulter ainsi que le maître de l'ouvrage lorsque celui-ci en fait la demande. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération. Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête transmet au préfet le dossier de l'enquête avec le rapport et les conclusions motivées dans un délai d'un mois à compter de la date de clôture de l'enquête. " ;

13. Considérant que les conclusions émises par le commissaire-enquêteur à l'issue de l'enquête publique doivent être motivées ; que ces règles imposent à la commission d'enquête ou au commissaire enquêteur d'indiquer au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis, mais ne l'obligent pas à répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête ; que ces réponses peuvent revêtir une forme synthétique ; que les observations émises par M. E..., premier-adjoint au maire de Rocquecourbe-Minervois, ont fait l'objet d'une analyse spécifique dans la rubrique " avis émis par les élus " ; que la commission d'enquête n'avait pas à répondre spécifiquement à chacune des observations présentées ; qu'il ressort du rapport d'enquête publique que les observations émises sont recensées et analysées en pages 19 et suivantes du rapport d'enquête, notamment celles émises par les habitants de la commune de Rocquecourbe-Minervois ; que la commission a ensuite donné un avis favorable au projet en indiquant les raisons qui ont déterminé le sens de cet avis ; qu'en se prononçant ainsi, cette commission a satisfait aux exigences précitées ;

En ce qui concerne le dossier de demande de permis de construire :

14. Considérant qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés :a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". ; qu'aux termes de l'article R. 431-5 de ce code : " (...) La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R*423-1 pour déposer une demande de permis. " ; qu'il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus ; que les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur ; qu'ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que dans la demande de permis de construire le pétitionnaire a attesté avoir qualité pour solliciter une telle autorisation ; que dès lors, en l'absence de toute fraude alléguée, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. " ; que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard desdites dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées ;

16. Considérant que les dossiers de permis de construire comportent trois documents cotés PC6, PC7, et PC8, relatifs aux vues proches et lointaines du site ; que l'étude d'impact comprend, en outre, des photomontages complémentaires et des indications précises concernant respectivement l'impact visuel lointain, depuis les abords immédiats du projet et depuis les habitations ; que le service instructeur a ainsi été à même d'apprécier l'impact du projet tant sur le paysage que sur le centre bâti de la commune de Roquecourbe-Minervois ; que le dossier de permis de construire comporte également deux plans de situation cotés PC1a et PC1b qui mentionnent les accès aux terrains d'assiette du projet ; que le plan de masse coté PC2 localise l'accès pour les arrivées des convois ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme :

17. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme dans ses dispositions applicables au présent litige : " En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés ; b) A compromettre les activités agricoles ou forestières, notamment en raison de la valeur agronomique des sols, des structures agricoles, de l'existence de terrains faisant l'objet d'une délimitation au titre d'une appellation d'origine contrôlée ou d'une indication géographique protégée ou comportant des équipements spéciaux importants, ainsi que de périmètres d'aménagements fonciers et hydrauliques(...) " ;

18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet d'une superficie de 105 hectares se répartissant en 145 parcelles cadastrées prévoit la mise en place de 151 860 panneaux solaires répartis sur une surface totale d'un peu moins de 25 ha et la construction de 28 postes de transformation et 4 postes de livraison ; que le parc en cause représente 5,75 % des surfaces agricoles utiles ( SAU ) communales et l'emprise au sol 13,4 ha, soit 12,75 % de la superficie totale ; qu'il ressort de l'analyse agronomique de la chambre d'agriculture de l'Aude, qui a émis un avis favorable au projet, que si le projet porte sur des terrains occupés pour environ 70 % par des vignes, le reste se répartissant en champs constitués majoritairement de vignes arrachées de plus d'un an, de friches, de landes et de vignes récemment arrachées, le vignoble est en forte régression sur le secteur ; qu'il ressort également de l'étude d'impact qu'en moyenne les surfaces de vignes impactées par le projet représentent 16 % des surfaces de vignes détenues par les exploitants, sans compter les surfaces potentiellement libérées par l'arrachage en dehors du périmètre étudié ; que si, selon une étude agronomique, le projet concerne des terrains délimités en majeure partie en zone AOC et AOP Corbières et Minervois, les vignes implantées sont anciennes et ne sont pas vouées à être replantées ; que les jeunes vignes plantées s'avèrent peu adaptées au contexte pédoclimatique ; que les parcelles se situant en zone non irrigable, la diversification économique, en céréales, maraichage ou arboriculture est très difficile ; que, selon l'avis également favorable de l'INAO, les superficies relativement importantes amputées à l'AOP Minervois portent finalement peu atteinte à son potentiel de production ; que, dans ces conditions, et même si la commission départementale de consommation des espaces agricoles a, le 7 octobre 2011, rendu un avis défavorable au projet, le préfet de l'Aude n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard du b) de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme en délivrant les permis de construire contestés ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :

19. Considérant que le document cartographique régional relatif au potentiel agronomique produit par les requérants ne permet pas d'identifier les parcelles concernées par les zones 1 et 2 du projet en cause et n'est ainsi pas de nature à remettre en cause les conclusions concordantes de la chambre d'agriculture de l'Aude et de l'avis de l'INAO déjà évoqués ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude d'impact que la société pétitionnaire a examiné la compatibilité du projet avec les documents d'urbanisme en cours d'élaboration et notamment avec la future carte communale de Roquecourbe-Minervois prévoyant de localiser le terrain d'assiette du projet en zone Ner ou sont autorisées les centrales photovoltaïques ; que les appelants ne peuvent en tout état de cause utilement se prévaloir de la carte communale approuvée postérieurement à la délivrance des permis de construire ; que l'importance de l'impact négatif du projet sur les activités touristiques n'est pas établi ; que dans ces conditions, et compte tenu des motifs exposés au point précédent, le préfet de l'Aude, en autorisant l'implantation du projet en zone AOC et AOP, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme :

20. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

21. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales ; que, pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site ; que les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé dans le second temps du raisonnement, pour apprécier la légalité des permis de construire délivrés, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux visés à l'article R. 111-21 cité ci-dessus ;

22. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude d'impact que le terrain d'assiette du projet est implanté en dehors de zones protégées ou inventoriées, la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique ( ZNIEFF ) la plus proche se situant à 200 mètres au nord du projet, les autres étant localisées à plus de 1,5 km au sud ; que des réseaux électriques haute tension sont installés dans la plaine ; que le paysage est caractérisé par la présence de vignes, de friches et de vignes arrachées ; qu'il résulte de cette même étude qu'il n'existe aucune co-visibilité entre le projet et le château de Roquecourbe-Minervois situé à 510 mètres de la zone n° 1, compte tenu de l'existence de l'espace urbanisé du village et de haies qui constituent des barrières visuelles entre le projet et le château, ni avec le canal du midi situé à 1 km du projet en litige ; que, s'agissant de l'aire AOC, les deux permis de construire en litige sont assortis de prescriptions tenant à l'implantation de 8 200 mètres linéaires de haies pour créer des lisières et dissimuler les clôtures des centrales, limitant ainsi la perception visuelle proche ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en accordant les permis contestés le préfet de l'Aude n'a pas entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme :

23. Considérant que l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme dispose que : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune :.....; 2° Les constructions et installations nécessaires.... à des équipements collectifs, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées... " ; qu'eu égard à leur importance et à leur destination, les panneaux photovoltaïques en cause, destinés à la production d'électricité et contribuant ainsi à la satisfaction d'un intérêt public, doivent être regardés comme des installations nécessaires à un équipement collectif au sens des dispositions l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ; que, comme il a été dit au point 18, l'implantation envisagée par la société pétitionnaire ne peut être regardée comme incompatible avec l'exercice d'une activité agricole ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

24. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance et de la requête d'appel, que M. B... et M. E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Aude du 22 octobre 2012 et du 9 novembre 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

26. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat et la société Vinissol, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, versent quelque somme que ce soit à MM. B... et E...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

27. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu de mettre à la charge de MM. B... et E...la somme globale de 2 000 euros à verser à la société Vinissol au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention du syndicat viticole du cru Minervois est admise.

Article 2 : L'intervention de l'EARL Escoi Domaine Montaude n'est pas admise.

Article 3 : La requête de MM. B... et E... est rejetée.

Article 4 : MM. B... et E...verseront à la société Vinissol une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à M. A... E..., au syndicat viticole du cru Minervois, à l'EARL Escoi Domaine de Montaude, au ministre de la cohésion des territoires et à la société Vinissol.

Copie en sera également adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2017, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 juillet 2017.

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N° 15MA03167

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03167
Date de la décision : 06/07/2017
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : VOLTA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-07-06;15ma03167 ?
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