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27/06/2017 | FRANCE | N°17MA00691

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 27 juin 2017, 17MA00691


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 et de l'obligation de payer procédant d'un commandement émis le 1er avril 2011 pour avoir paiement de la somme de 96 254 euros correspondant à ces impositions supplémentaires.

Par un jugement n° 1200099 du 19 décembre 2013 le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête, enregistrée sous le n° 14...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 et de l'obligation de payer procédant d'un commandement émis le 1er avril 2011 pour avoir paiement de la somme de 96 254 euros correspondant à ces impositions supplémentaires.

Par un jugement n° 1200099 du 19 décembre 2013 le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête, enregistrée sous le n° 14MA00797 le 19 février 2014 et un mémoire, enregistré le 2 février 2015, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et de l'obligation de payer procédant du commandement émis le 1er avril 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Toulon a omis de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige ;

- la somme réclamée n'est pas exigible dès lors qu'il n'a pas été tenu compte de la situation de la SCEA Saint-Jean, qui est constituée d'associés rapatriés d'Algérie bénéficiant à ce titre du dispositif de suspension des poursuites prévu par les dispositions de 1'article 44-I de la loi de finances du 30 décembre 1997 ;

- une demande d'éligibilité au dispositif de désendettement prévu par le décret du 4 juin 1999 est toujours pendante devant la Mission interministérielle aux rapatriés depuis 1998, ce qui a pour effet de figer l'ensemble des créances dans l'attente du plan d'apurement ;

- la SCEA Saint-Jean a été déclarée éligible au bénéfice des dispositions prévues par le décret du 4 juin 1999 ;

- il peut se prévaloir de l'instruction référencée 13 5-1-00 du 29 décembre 1999 prévoyant que le profit né de l'effacement des dettes ne doit pas constituer une charge fiscale pour le contribuable ;

- les intérêts d'emprunts ne peuvent être imposés comme produits latents ;

- le passif constitué par les dettes fournisseurs ne peut être réintégré aux bénéfices de la SCEA faute de bénéficier d'une prescription extinctive et du renoncement à poursuites des créanciers ;

- l'administration a commis une faute dans le traitement fiscal de remise de dettes consenties avec l'accord de l'Etat ;

- 1'imposition litigieuse est contraire à l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 octobre 2014 et le 18 mars 2015, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Toulon est tardive en tant qu'elle concerne le contentieux du recouvrement ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un arrêt n° 14MA00797 du 21 avril 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête de M. D... tendant à l'annulation du jugement le tribunal administratif de Toulon du 19 décembre 2013.

Par une décision n° 391228 du 8 février 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur le pourvoi de M. D..., annulé cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige, et a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par des mémoires, enregistrés le 15 mars et le 8 juin 2017, M. D... demande à la Cour de prononcer la décharge des impositions contestées et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que, ainsi que l'a reconnu le Conseil d'Etat dans sa décision du 8 février 2017, il justifie des dettes dont l'inscription au bilan de la SCEA Saint-Jean a été remise en cause par l'administration.

Par deux mémoires, enregistrés le 22 mai 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de M. D...dirigées contre le commandement de payer émis le 1er avril 2011 ne sont pas recevables, dès lors qu'elles ne sont pas visées par le renvoi prononcé par le Conseil d'Etat ;

- le requérant n'est pas davantage recevable à contester, dans le cadre d'un contentieux du recouvrement, l'assiette de l'impôt sur le revenu mis à sa charge ;

- les moyens soulevés par le requérant à l'appui de sa demande de décharge des impositions en litige ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 ;

- le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert,

- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M.D....

1. Considérant que la SCEA Saint-Jean, dont MM. A... D...,E... D... et B...D...étaient associés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de l'année 2007, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause les dettes inscrites au passif du bilan, constituées de dettes fournisseurs pour un montant de 249 556 euros, d'intérêts d'emprunts auprès des établissements de crédit pour un montant de 248 197 euros et de provisions pour risques pour un montant de 75 618 euros ; que chacun des associés a fait l'objet d'un redressement en matière d'impôt sur le revenu, à proportion de sa participation dans cette société, qui relevait du régime fiscal des sociétés de personnes ; que par un jugement du 19 décembre 2013 le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de M. A...D...tendant à la décharge de l'imposition à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 et de l'obligation de payer procédant du commandement émis à son encontre le 1er avril 2011 ; que par un arrêt n° 14MA00797 du 21 avril 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la requête de M. D...tendant à l'annulation de ce jugement ; que par une décision n° 391228 du 8 février 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur le pourvoi de M.D..., annulé cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions tendant à la décharge des impositions en litige, au motif que la Cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que le requérant n'établissait pas le bien-fondé des écritures comptables de l'exercice 2007 constituées des dettes ci-dessus mentionnées ; que le Conseil d'Etat a renvoyé dans cette mesure l'affaire devant la Cour ;

Sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre de l'action et des comptes publics :

2. Considérant, en premier lieu, que M. D..., dans le dernier état de ses écritures d'appel, déclare admettre que le litige, compte tenu des termes de la décision rendue le 8 février 2017 par le Conseil d'Etat, ne porte plus que sur l'assiette des impositions contestées ; que, dès lors, il n'y a pas lieu pour la Cour de constater, comme le demande le ministre, que les conclusions présentées par le requérant en matière de recouvrement ne sont pas recevables ;

3. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient le ministre, il résulte de l'examen du dossier de première instance que M. D...doit être regardé comme ayant contesté devant le tribunal administratif de Toulon non seulement l'obligation de payer procédant du commandement délivré le 1er avril 2011 mais également les impositions supplémentaires qui ont donné lieu à l'émission de cet acte de poursuite ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que M. D..., du fait qu'il se serait placé sur le seul terrain du contentieux du recouvrement en première instance, ne serait pas recevable à présenter en appel des conclusions tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 4 juin 1999 relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée : " Il est institué un dispositif de désendettement au bénéfice des personnes mentionnées à l'article 2 qui, exerçant une profession non salariée ou ayant cessé leur activité professionnelle ou cédé leur entreprise, rencontrent de graves difficultés économiques et financières, les rendant incapables de faire face à leur passif. " ; que selon l'article 8 du même décret : " Si la demande est déclarée éligible, le préfet assure le traitement du dossier ; avec le concours du trésorier-payeur général, il invite les créanciers et le débiteur à négocier un plan d'apurement global et définitif de l'ensemble de la dette de l'intéressé. Le plan établi comporte les abandons de créances librement acceptés et les modalités de paiement des sommes restant dues par le débiteur en fonction de ses capacités contributives et de la valeur de ses actifs. " ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : " Si les éléments du dossier le rendent indispensable, une aide de l'Etat peut être attribuée par le ministre chargé des rapatriés dans les limites de 0,5 MF et de 50 % du passif. " ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret : " Lorsque le plan d'apurement signé par le débiteur et par ses créanciers comporte une demande d'aide de l'Etat, le préfet transmet le dossier à la commission. Celle-ci examine le plan d'apurement et statue sur la demande d'aide. Elle peut renvoyer le dossier au préfet pour qu'il procède à un examen complémentaire dans un délai de trois mois. " ;

5. Considérant qu'il est constant que la demande du GAEC Saint-Jean, devenu SCEA Saint-Jean, tendant au bénéfice du dispositif de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée prévu par le décret du 4 juin 1999, a été déclarée éligible le 4 avril 2002 ; que M. D...a produit une proposition de plan d'apurement sollicitant l'aide de l'Etat, non finalisée faute de l'obtention de la signature de l'ensemble des créanciers, qui a été adressée le 30 octobre 2004 par la SCEA Saint-Jean à la préfecture du Var et portait sur un total de créances bancaires et de créances fournisseurs de 746 598,72 euros ; que le requérant a également versé aux débats des courriers du 30 juin 2010 et du 20 avril 2011 du secrétaire général et du président de la Mission interministérielle aux rapatriés, dont il ressort que cette mission avait adressé à la SCEA Saint-Jean, le 14 octobre 2008, une proposition de plan d'apurement de ses dettes comprenant une aide d'Etat de 217 098,68 euros ; que ces documents sont de nature à établir le bien-fondé des écritures comptables de l'exercice 2007, constituées de dettes fournisseurs pour un montant de 249 556 euros, d'intérêts d'emprunts auprès des établissements de crédit pour un montant de 248 197 euros et de provisions pour risques pour un montant de 75 618 euros ; que le ministre n'apporte pas d'éléments susceptibles de remettre sérieusement en cause leur valeur probante ; que c'est donc à tort que l'administration a estimé que les dettes et dotations dont il s'agit étaient éteintes du fait de la cessation de l'activité de la SCEA Saint-Jean au cours de l'année 2007, les a réintégrées dans le bénéfice imposable et a assujetti M. D...à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu à proportion de sa participation dans cette société ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : M. D... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 et des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1200099 du 19 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera à M. D...la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est et à la direction des finances publiques Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2017, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2017.

2

N° 17MA00691


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00691
Date de la décision : 27/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-01-03 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Action en recouvrement. Actes de poursuite.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-27;17ma00691 ?
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