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08/12/2016 | FRANCE | N°16MA00565

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 08 décembre 2016, 16MA00565


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, ensemble la décision en date du 14 avril 2015 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1502410 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 30 janvier 201

5.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, ensemble la décision en date du 14 avril 2015 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1502410 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2015.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, M. A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 juillet 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 30 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault à titre principal de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois sous mêmes conditions d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à Me B... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que

- la décision contestée portant refus d'admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entachée d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa demande en qualité de commerçant ;

- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur de droit en fondant son refus sur la circonstance que l'activité de la société avait débuté dès le mois de mars 2014 sans attendre l'autorisation préfectorale ;

- la décision en litige porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen complet et sérieux ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique, notamment son article 37 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Féménia a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que, par jugement en date du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A..., de nationalité chinoise, tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ladite décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A... relève appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : (...) / 2° A l'étranger qui vient exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale, à condition notamment qu'il justifie d'une activité économiquement viable et compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques et qu'il respecte les obligations imposées aux nationaux pour l'exercice de la profession envisagée. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-16-1 du même code : " L'étranger qui envisage de créer une activité ou une entreprise doit présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique du projet. L'étranger qui envisage de participer à une activité ou une entreprise existante doit présenter les justificatifs permettant de s'assurer de son effectivité et d'apprécier la capacité de cette activité ou de cette société à lui procurer des ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein. / Dans tous les cas, l'étranger doit justifier qu'il respecte la réglementation en vigueur dans le domaine d'activité en cause. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle à l'étranger qui vient exercer en France une profession commerciale, industrielle ou artisanale est subordonnée, notamment, à la viabilité économique de l'activité envisagée ; que, lorsque l'étranger est lui-même le créateur de l'activité qu'il vient exercer, il lui appartient de présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique de son activité ou entreprise, que celle-ci soit encore au stade de projet ou déjà créée ; que, lorsque l'étranger n'est pas le créateur de l'activité qu'il entend exercer, il lui appartient de présenter les justificatifs permettant de s'assurer de son effectivité et d'apprécier la capacité de cette activité ou de cette entreprise à lui procurer des ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 8 septembre 2010 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant " ; que, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", laquelle a été renouvelée jusqu'au 3 septembre 2014, il a sollicité le 19 août 2014 auprès du préfet de l'Hérault son changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour mention " commerçant " ; que le projet présenté par M. A... à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité de commerçant consistait en l'exploitation depuis le 3 février 2014 par la société à responsabilité limitée dénommée " Hevedo ", immatriculée au registre du commerce et des sociétés, au capital social de laquelle il participait, d'un fonds de commerce à usage d'établissement de bains, de remise en forme, sauna et hammam ; que, pour rejeter cette demande, le préfet de l'Hérault a considéré que M. A... avait déjà commencé à exercer son activité professionnelle au sein de cette société avant même d'en avoir reçu l'autorisation préalable sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, ces dispositions supposent d'apprécier la capacité économique de la société à procurer à l'intéressé des ressources suffisantes ; qu'est à cet égard sans incidence la circonstance que le ressortissant étranger aurait déjà pris part à cette activité en qualité d'associé, alors au demeurant que son titre étudiant lui permettait d'exercer une activité professionnelle à titre accessoire ; que, par suite, le motif unique retenu par le préfet de l'Hérault pour rejeter la demande de carte de séjour temporaire " commerçant " présentée par M. A... est entaché d'erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, ensemble la décision en date du 14 avril 2015 de rejet de son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;

7. Considérant que l'annulation des décisions refusant un titre de séjour à

M. A... et lui faisant obligation de quitter le territoire français implique seulement, compte tenu du motif d'annulation retenu ci-dessus, que le préfet de l'Hérault procède à un réexamen de la demande de titre de séjour de M. A... ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

9. Considérant que le requérant a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me B... ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1502410 du 7 juillet 2015 et l'arrêté du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français, ensemble la décision en date du 14 avril 2015 de rejet de son recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me B... la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 sous réserve que l'intéressé renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et à MeB....

Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Féménia, première conseillère.

Lu en audience publique, le 8 décembre 2016.

2

N°16MA00565


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00565
Date de la décision : 08/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-08;16ma00565 ?
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