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21/12/2015 | FRANCE | N°15MA02676

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 21 décembre 2015, 15MA02676


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nice :

- d'annuler les décisions implicites par lesquelles le président de la Poste et le ministre délégué à l'industrie ont rejeté les demandes préalables du 9 juin 2006 tendant à l'indemnisation du préjudice résultant du blocage de sa carrière ;

- de condamner solidairement la Poste et l'Etat à lui verser une somme totale de 80 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la demande préalable et de leur capitalisat

ion, en réparation de ses préjudices ;

- de mettre à la charge de la Poste et de l'Etat les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nice :

- d'annuler les décisions implicites par lesquelles le président de la Poste et le ministre délégué à l'industrie ont rejeté les demandes préalables du 9 juin 2006 tendant à l'indemnisation du préjudice résultant du blocage de sa carrière ;

- de condamner solidairement la Poste et l'Etat à lui verser une somme totale de 80 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la demande préalable et de leur capitalisation, en réparation de ses préjudices ;

- de mettre à la charge de la Poste et de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 0702578 du 16 décembre 2011, le tribunal administratif de Nice a :

- annulé les décisions implicites de rejet nées du silence gardé par la Poste et l'Etat sur les demandes préalables de M. C... du 9 juin 2006 ;

- condamné l'Etat et la Poste à verser solidairement à M. C... une indemnité de 5 000 euros tous intérêt échus et capitalisation des intérêts compris à la date dudit jugement ;

- mis à la charge solidaire de l'Etat et la Poste une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n° 12MA00578 du 16 juillet 2013, la cour administrative d'appel de Marseille, avant dire droit, a enjoint à la Poste de communiquer l'entier dossier de M. C....

Par un arrêt n° 12MA00578 du 10 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Marseille dans son article 1er, a réformé l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nice et a porté le montant alloué à M. C... en réparation de ses préjudices à la somme de 27 000 euros tous intérêts compris et a rejeté dans ses articles 4 et 5 le surplus des conclusions de M. C... et l'appel incident du ministre de l'économie et des finances.

Par une décision n° 384886 du 3 juin 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur pourvoi de La Poste, annulé l'arrêt susmentionné en tant qu'il a condamné La Poste à verser à M. C... une indemnité, tous intérêt compris, de 8 000 euros au titre du préjudice de carrière et une indemnité de 14 000 euros au titre de préjudice de retraite et renvoyé l'affaire devant la Cour dans la mesure de la cassation prononcée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 14 février 2012, 26 avril 2012, 4 juin 2013, 9 janvier 2014, 7 mars 2014 et le 20 août 2015, M. C..., représenté par la SELARL Horus avocats, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0702578 du 16 décembre 2011 par lequel tribunal administratif de Nice a condamné solidairement La Poste et l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros, qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subis du fait du blocage de sa carrière ;

2°) de porter le montant de son indemnisation à la somme totale de 80 000 euros au titre des différents préjudices subis ;

3°) de rejeter l'appel incident de l'Etat ;

4°) de mettre à la charge de la Poste et de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, l'Etat a commis une faute lourde en qualité d'autorité de tutelle de nature à engager sa responsabilité ; que c'est à tort que les premiers juges ont écarté ce moyen ;

- le tribunal administratif a fait reposer la charge de la preuve de la perte de chance sérieuse de promotion sur le requérant alors qu'il n'était pas en mesure d'en apporter la preuve ; qu'il justifie de bonnes notations ; sa manière de servir n'a jamais été critiquée par la Poste ;

- l'indemnisation allouée en première instance est insuffisante pour réparer l'intégralité des ses préjudices matériel, professionnel et moral ; il a subi un manque à gagner au niveau de son traitement et va subir un préjudice au moment du calcul de sa retraite ; ses préjudices sont certains ;

- les notations et appréciations depuis 1973 sont très bonnes ; qu'il obtient entre 1985 et 1991, la note de 4.4 C ; s'il a obtenu la note de B entre 2000 et 2003, il s'agit d'une bonne note.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 avril 2012 le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, représenté par la SCP Saidji Moreau, conclut à:

1°) à l'annulation du jugement n° 0702578 du 16 décembre 2011 ;

2°) au rejet de la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nice.

Il fait valoir que :

- les préjudices indemnisés par le tribunal administratif ne sont pas certains ; l'intéressé ne démontre pas que ses chances de promotions étaient sérieuses ;

- les préjudices subis par le requérant résultent non pas de l'inaction fautive de l'Etat mais plutôt du choix de cet agent de ne pas profiter des possibilités d'intégration et de promotion.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 mai 2013 et le 9 janvier 2014, La Poste, représenté par la SCP Granrut, conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la réformation du jugement n° 0702578 du 16 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a condamné solidairement La Poste et l'Etat à verser à M. C... une somme de 5 000 euros ;

- à la limitation du montant de l'indemnisation de M. C... à la somme totale 1 000 euros ;

- à la condamnation de M. C... à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- dans une décision du 19 juillet 2010, le Conseil d'Etat a définitivement reconnu la responsabilité de La Poste et de l'Etat résultant de l'illégalité des décrets régissant les statuts particuliers des corps de reclassement en ce qu'ils n'organisent pas des voies de promotion interne ;

- il appartient à chaque agent de démontrer qu'il justifie d'une chance sérieuse d'être promu ; en l'absence de chance sérieuse aucun préjudice même moral ne peut être indemnisé ;

- l'unique évaluation de M. C... à exercer des fonctions relevant d'un grade supérieur ne fait nullement état d'une notation excellente ; M. C... est parti à la retraite en 2003 ; il ne démontre pas qu'il aurait pu bénéficier d'une promotion postérieurement au décret du 14 décembre 2009 ; ainsi, il ne démontre pas avoir des chances sérieuses d'atteindre un grade supérieur.

Un mémoire présenté pour M. C... a été enregistré le 27 juin 2013 et n'a pas donné lieu en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, à communication.

Par un courrier du 31 août 2015 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle la clôture de l'instruction sera susceptible d'être prononcée et de la date prévisionnelle de l'audience.

Un mémoire présenté pour La Poste a été enregistré le 28 septembre 2015 et n'a pas donné lieu, en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, à communication.

Par une ordonnance du 1er octobre 2015 la clôture de l'instruction a été prononcée à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 90-1235 du 31 décembre 1990 ;

- le décret n° 92-930 du 7 septembre 1992 ;

- le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Giocanti,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me B... représentant M. C... et celles de Me A... représentant la Poste.

1. Considérant que M. C..., agent d'administration principal du service général, a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la condamnation solidaire de la Poste et de l'État à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis du fait du blocage de sa carrière depuis 1993 en raison de l'absence d'organisation de concours internes et d'établissement de tableaux d'avancement et de listes d'aptitude dans les grades et corps dit de "reclassement" ; que, par un jugement du 16 décembre 2011, le tribunal administratif de Nice a reconnu que les fautes commises par la Poste et l'Etat étaient de nature à engager leur responsabilité et a condamné solidairement la Poste et l'Etat au versement d'une indemnité, au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence de M. C... à hauteur de 5 000 euros, tous intérêts confondus ; qu'en revanche, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. C... tendant à ce que la Poste et l'Etat soient condamnés à lui verser la somme de 80 000 euros en réparation des préjudices financier et professionnel ; que, saisie de l'appel dirigé par M. C... contre ce jugement ainsi que d'un appel incident du ministre de l'économie et des finances, la cour administrative d'appel de Marseille , après avoir rendu un premier arrêt avant dire droit le 16 juillet 2013, a, par un arrêt du 10 juillet 2014, réformé le jugement du tribunal administratif de Nice et solidairement condamné la Poste et l'Etat à verser à M. C... la somme globale de 27 000 euros tous intérêts confondus ; que, par une décision du 3 juin 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi formé par la Poste, a annulé l'arrêt du 10 juillet 2014 en tant qu'il avait condamné la Poste à verser à M. C... une indemnité tous intérêts confondus, de 8 000 euros au titre du préjudice de carrière et de 14 000 euros au titre du préjudice de retraite et, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

2. Considérant que M. C... agent d'administration principal du service général de la Poste depuis 1984, a demandé au président de la Poste l'indemnisation des préjudices financiers et de carrière qu'il estimait avoir subis et résultant de la perte de chance sérieuse de promotion au grade de contrôleur de la Poste ; qu'il est constant que M. C..., qui a été admis à la retraite en 2003, remplissait les critères statutaires d'ancienneté dans son grade pour prétendre au grade de contrôleur ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les évaluations, au titre des années 1974 à 1991, comportent les notes de 4 et 4 sur une échelle de 5, correspondant à une manière de servir et un rendement très satisfaisants ; qu'en outre, M. C... se prévaut de l'obtention d'une médaille de bronze de la Poste ainsi que d'une évaluation au titre de l'année 2001 laquelle mentionne qu'il a obtenu pour " l'aptitude à exercer des fonctions différentes de même niveau ou d'un niveau supérieur " une note au niveau maximal de E signifiant " excellent " ; que, toutefois, l'évaluation de ses autres compétences au titre de l'année 2001 a donné lieu dans l'ensemble à une note simplement " bonne " ; que l'ensemble de ces évaluations ne démontrent pas que la valeur professionnelle de M. C... serait largement supérieure aux exigences de son poste ; qu'ainsi, il ne justifie pas d'appréciations de nature à lui conférer une chance sérieuse de promotion au grade de contrôleur ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription quadriennale, que M. C... n'est pas fondé à demander réparation à ce titre de pertes financières sur son traitement, ses primes ou sa pension de retraite, ni de préjudices professionnels ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'indemnisation de ces chefs de préjudice ; que, dès lors, il n'est pas fondé à demander la réformation dudit jugement sur ce point, qui seul reste en litige eu égard à la cassation partielle prononcée par le Conseil d'Etat ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Poste et de l'Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme sollicitée par la Poste au titre des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Poste tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à la Poste et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Giocanti, conseiller,

Lu en audience publique, le 21 décembre 2015.

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N° 15MA02676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02676
Date de la décision : 21/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Avancement - Avancement de grade.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Statut général des fonctionnaires de l'État et des collectivités locales - Droits et obligations des fonctionnaires (loi du 13 juillet 1983).

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Fleur GIOCANTI
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-21;15ma02676 ?
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