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16/12/2015 | FRANCE | N°15MA02171

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 16 décembre 2015, 15MA02171


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2014, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1500190 du 28 avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire

enregistrés le 27 mai 2015 et le 29 octobre 2015, M. D..., représenté par Me B..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2014, par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.

Par un jugement n° 1500190 du 28 avril 2015, le tribunal administratif de Montpellier rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 mai 2015 et le 29 octobre 2015, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 avril 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité ;

3°) en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour et à défaut de réexaminer sa situation, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil qui renonce dans ce cas à percevoir la part contributive de l'Etat due au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'erreur de droit commise par l'autorité administrative au regard des articles L. 121-1 et R. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en opposant à M. D... le défaut de visa de long séjour sur le fondement de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il est le conjoint d'une ressortissante de l'Union européenne n'était pas de nature à entraîner l'annulation de la décision attaquée au motif qu'il ne disposait pas de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale ;

- le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision attaquée méconnaît l'article L. 121-1 1° et 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que Mme D..., de nationalité espagnole, bénéficiait de ressources suffisantes au sens de ces dispositions afin de ne pas devenir une charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale. ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le refus de séjour qui mentionne que Mme D... ne justifie plus exercer une activité professionnelle est entachée d'erreur de fait.

Un courrier du 18 septembre 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 5 novembre 2015 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Le préfet de l'Hérault a produit un mémoire en défense le 9 novembre 2015, après la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué en application de l'article R. 613-3 du code de justice administrative.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gougot, 1ère conseillère.

1. Considérant que, par arrêté du 28 novembre 2014, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour que lui avait présentée le 5 septembre 2014 M. D..., ressortissant marocain, en qualité de " membre de la famille d'un citoyen de l'Union " et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. D... interjette appel du jugement en date du 28 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens de la requête,

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, [...] a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes :1° S'il exerce une activité professionnelle en France ;/2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie [...] 5° S'il est le conjoint [...] ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3°. " ; que selon l'article R. 121-1 du même code : " Tout ressortissant mentionné au premier alinéa de l'article L. 121-1 muni d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité est admis sur le territoire français, à condition que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Tout membre de sa famille mentionné à l'article L. 121-3, ressortissant d'un Etat tiers, est admis sur le territoire français à condition que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il soit muni, à défaut de titre de séjour délivré par un Etat membre de l'Union européenne portant la mention " Carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union en cours de validité, d'un passeport en cours de validité, d'un visa ou, s'il en est dispensé, d'un document établissant son lien familial. L'autorité consulaire lui délivre gratuitement, dans les meilleurs délais et dans le cadre d'une procédure accélérée, le visa requis sur justification de son lien familial. Toutes facilités lui sont accordées pour obtenir ce visa. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces produites pour la première fois en appel, que Mme E... A..., ressortissante espagnole, épouse de M. D..., est inscrite en qualité d'auto-entrepreneur depuis le 1er avril 2014 pour une activité d'achat et vente de produits alimentaires sur les marchés et justifie avoir déclaré des recettes d'un montant de 2 000 euros pour le 3ème trimestre 2014 et de 700 euros pour le 4ème trimestre 2014 ; que la réalité de cette activité est corroborée par une attestation établie le 21 octobre 2014 par le service " commerce artisanat " de la commune de Béziers selon laquelle Mme D... exerce son activité de commerçant non sédentaire sur le marché de la Devèze tous les mardis et samedis matin de 7 heures à 13 heures depuis le 29 mars 2014, sous réserve que des emplacements soient vacants, et qu'elle produise les documents commerciaux nécessaires dûment validés ; qu'enfin Mme D... justifie s'être approvisionnée en marchandises alimentaires, par la production d'une facture établie le 3 octobre 2014 à son nom et à son adresse ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le préfet avait pu se fonder sur le fait que son épouse ne justifiait plus exercer une activité professionnelle ; que si le préfet de l'Hérault a également relevé que M. D... avait été condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis par le tribunal correctionnel de Béziers le 26 mai 2014 pour fraude à l'obtention d'une allocation d'aide aux travailleurs privés d'emploi et usage de faux en écriture, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait pris la même décision s'il s'était seulement fondé sur ce motif ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; que, eu égard aux motifs du présent arrêt, son exécution entraîne nécessairement la délivrance à l'intéressé d'un titre de séjour en qualité de " membre de la famille d'un citoyen de l'Union ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que le requérant a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; qu'ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 avril 2015 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 28 novembre 2014 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. D... un titre de séjour en qualité de " membre de la famille d'un citoyen de l'Union " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et suivant les modalités précisées dans les motifs indiqués au point 5.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 (mille) euros à Me B..., en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre de l'intérieur et à Me B....

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béziers.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2015, où siégeaient :

- M. d'Hervé, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2015.

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N° 15MA02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02171
Date de la décision : 16/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : DHEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-16;15ma02171 ?
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