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23/11/2015 | FRANCE | N°13MA02424

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 23 novembre 2015, 13MA02424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... et autres ont demandé au tribunal administratif de Marseille l'annulation de l'arrêté en date du 3 septembre 2012 par lequel l'adjointe au maire de Marseille a accordé un permis de construire modificatif à la société civile de construction-vente (SCCV) Rue Martinique ;

Par un jugement n° 1300123 du 27 juin 2013, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté précité.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectiveme

nt le 27 août et le 26 décembre 2013, la société SCCV Rue Martinique, représentée par Me Curetti, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... et autres ont demandé au tribunal administratif de Marseille l'annulation de l'arrêté en date du 3 septembre 2012 par lequel l'adjointe au maire de Marseille a accordé un permis de construire modificatif à la société civile de construction-vente (SCCV) Rue Martinique ;

Par un jugement n° 1300123 du 27 juin 2013, le tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté précité.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 27 août et le 26 décembre 2013, la société SCCV Rue Martinique, représentée par Me Curetti, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 27 juin 2013 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de rejeter la demande d'annulation formée par M. H... et autres ;

3°) de condamner M. H... et autres à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative outre les entiers dépens.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la requête alors que le recours était tardif, le permis de construire ayant fait l'objet d'un affichage réglementaire à compter du 11 septembre 2012 ;

- c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté querellé au motif tiré de l'absence de signature de la demande de permis de construire en méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de la demande de permis modificatif est parfaitement complet ce qui a permis au maire de délivrer le permis de construire modificatif en toute connaissance de cause ;

- aucune modification importante n'a été apportée, seule la modification de la façade Nord-ouest dans un but de déplacement de l'accès au parking du 2ème sous-sol est intervenue ;

- les places de stationnement sont conformes à la norme NF P 91-120, compte tenu des tolérances qu'elle admet ;

- le moyen des requérants de première instance tiré de la suppression de la place de stationnement pour personne à mobilité réduite est infondé dès lors que l'emplacement a été reproduit à l'identique, le seul changement intervenu étant le déplacement de cette place au 1er étage.

Par des mémoires en défense enregistrés le 9 décembre 2013, le 19 février 2014 et le 9 février 2015, M. H... et autres représentés par la société civile professionnelle A. Vidal-Naquet, Avocats Associés, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement, à l'annulation du permis de construire modificatif délivré le 3 septembre 2012 à la société SCCV Rue Martinique ainsi qu'à la condamnation de la commune de Marseille à leur verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête de première instance est infondée ;

- la demande de permis de construire n'est pas signée par son auteur, qui n'est ni identifié ni authentifié en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme ; cette irrégularité emporte l'annulation totale du permis de construire modificatif ;

- la demande de permis de construire modificatif ne comporte pas l'ensemble des documents requis, en méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ;

- contrairement à ce qu'indique la demande, les modifications apportées ne sont pas mineures, ainsi en est-il des modifications affectant les façades et du réaménagement des places de stationnement ;

- la délivrance du permis modificatif crée de nouvelles irrégularités qui se répercutent sur le permis initial et en affecte la légalité ; en déplaçant l'accès du parking du 2ème sous-sol, le permis modificatif accroît considérablement les difficultés de circulation depuis cet accès jusqu'au bout de l'impasse Lejeune, en méconnaissance de l'article R UA 3 du règlement du plan d'occupation des sols ; l'accès et la sortie de la propriété située au 6, impasse Lejeune seront rendus périlleux voire impossibles par la présence de l'entrée et de la sortie des véhicules de l'immeuble projeté ;

- le permis de construire modificatif compromet la réalisation des prescriptions du futur plan local d'urbanisme, qui prévoit pour la zone UP dont il s'agit, notamment dans son article 3.2.2.3, que "tout accès pour véhicules automobiles est interdit à moins de 10 mètres de l'intersection de deux voies" et, dans son article 3.2.2.4, que "les accès sur les voies sont aménagés de façon à ne pas créer de danger ou de perturbation pour la circulation en raison de leur position ou d'éventuels défauts de visibilité" ;

- le permis de construire modificatif ne respecte pas l'article 13.1 du règlement du futur plan local d'urbanisme, qui dispose que "les arbres existants sont maintenus ou, en cas d'impossibilité, obligatoirement remplacés par des sujets en quantité et qualité équivalente (essence et développement à terme)" ;

- le permis de construire modificatif ne respecte pas l'article 13.2 du règlement du futur plan local d'urbanisme, qui dispose que "tous les espaces libres à la fois en sur-sol et en sous-sol sont traités en pleine terre et plantés d'arbres de haute tige. Les espaces libres en sur-sol seulement sont plantés d'arbres et/ou végétalisés".

Par un mémoire enregistré le 10 décembre 2014, la commune de Marseille, représentée par son maire en exercice, par Me Mazel, avocat, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 27 juin 2013, au rejet de la requête de M. H... et autres, ainsi qu'à la condamnation de M. H... et autres à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité de la requête alors que le recours était tardif ;

- c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté querellé au motif tiré de l'absence de signature de la demande de permis de construire en méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, dès lors que le défaut de l'attestation est régularisable ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. H... et autres sont infondés.

Par ordonnance du 4 août 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 août 2015 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 5 octobre 2015.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Féménia, première-conseillère,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me AE...substituant Me Curetti représentant la société SCCV Rue Martinique et celles de Me Mazel représentant la commune de Marseille.

1. Considérant que, par arrêté du 3 septembre 2012, le maire de Marseille a délivré un permis de construire modificatif à la société SCCV Rue Martinique, suite à l'annulation partielle, par un jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 28 juin 2012, du permis initial délivré le 17 août 2010, pour la construction d'un ensemble immobilier ; que la société SCCV Rue Martinique interjette appel du jugement en date du 27 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande de M. H... et autres, le permis de construire modificatif au motif tiré de l'absence de signature du formulaire de demande d'autorisation de construire par le représentant de la société, ne permettant pas au service instructeur de s'assurer des conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme ;

Sur la recevabilité des conclusions de la commune de Marseille :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. " ;

3. Considérant que la commune de Marseille a produit un mémoire qualifié d'appel incident par lequel elle conclut à l'annulation du jugement attaqué et à la condamnation de M. H... et autres, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que toutefois, un appel incident formé par l'auteur de la décision annulée à la demande d'un tiers par le jugement attaqué, ne peut être admis ; que ce mémoire qui n'a été enregistré au greffe de la Cour qu'après l'expiration du délai d'appel ne peut davantage être assimilé à une requête d'appel recevable ; qu'enfin une intervention au soutien de la requête de la société SCCV Rue Martinique présentée par la commune, qui avait la qualité de défendeur en première instance, ne peut davantage être admise, alors même que ce mémoire a été produit en réponse à la communication de la requête par le greffe de la Cour pour d'éventuelles observations ; qu'il suit de là que la commune de Marseille ne peut avoir d'autre qualité dans l'instance que celle d'observatrice ; qu'à ce titre, si elle peut faire valoir tout éclaircissement de fait et de droit dans le cadre du débat contentieux tel qu'il est délimité par les conclusions et les moyens des parties, elle n'est en revanche pas recevable à présenter des conclusions ou des moyens qui lui soient propres ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d' une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 " ;

5. Considérant que s'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis ; que la société SCCV Rue Martinique a produit deux procès-verbaux dressés par un huissier de justice respectivement le 11 septembre 2012 et le 12 novembre 2012 , selon lesquels l'affichage du permis de construire aurait été constaté à ces dates sur le terrain d'assiette du projet ; que toutefois, M. H... et autres , ont produit plus de trente attestations circonstanciées et concordantes, rédigées pour la plupart en mars 2013, qui font état de ce qu'aucun affichage sur le terrain n'est intervenu entre ces deux dates ; que, dans ces conditions, en présence de ces attestations contradictoires de valeur probante équivalente, alors même que certaines ne sont pas contemporaines des faits et émanent de personnes ayant fait connaître leur opposition au projet, la date à compter de laquelle l'affichage du permis de construire accordé à la société Rue Martinique aurait été continu pendant une durée de deux mois ne peut être regardée comme établie ; que, dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que la demande enregistrée le 9 janvier 2013 au greffe du tribunal administratif de Marseille n'est pas tardive ;

Sur la légalité du permis de construire modificatif délivré le 3 septembre 2012 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, issu du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris en application de l'ordonnance du 8 décembre 2005 portant réforme des autorisations en matière d'urbanisme, applicable au litige : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 431-5 du même code : "La demande de permis de construire précise : / a) L'identité du ou des demandeurs ; (...).La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis." ; qu'il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 précité ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que le formulaire de demande du permis de construire modificatif en litige, revêtu du tampon du service chargé du contrôle de légalité et versé au dossier par la commune de Marseille, ne comporte pas la signature du représentant de la société au nom de laquelle la demande d'autorisation de construire a été présentée ; que, comme l'a jugé le tribunal, en l'absence de cette signature, la société pétitionnaire ne peut être regardée comme ayant régulièrement attesté remplir les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme pour déposer une demande de permis de construire ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SCCV Rue Martinique n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 3 septembre 2012 par laquelle l'adjointe au maire de Marseille lui a délivré un permis de construire modificatif ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M. H... et autres , qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la société SCCV Rue Martinique au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas a lieu de mettre à la charge de la commune de Marseille le versement à M. H... et autres de la somme qu'ils demandent au titre de ces dispositions ; qu'enfin les conclusions tendant au bénéfice de ces mêmes dispositions présentées par la commune de Marseille à l'encontre de M. H... et autres, ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société SCCV Rue Martinique est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. H... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Marseille sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société SCCV Rue Martinique, à M. V... H..., à M. AB... H..., à Mme F... AC...veuveAA..., à Mme J...K..., à Mme W...T..., à la société civile immobilière GI, à M. B... S..., à M. X... AD..., à M. N... G..., à Mme AI... AF...Q...veuveY..., à Mme AF...Y..., à M. I... R..., à Mme L... U...épouseZ..., à M. A... Z..., à Mme M... O...néeE..., à M. AG... P..., à Mme AH..., à M. C... D...et à la commune de Marseille.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. d'Hervé, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Féménia, première-conseillère.

Lu en audience publique, le 23 novembre 2015.

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N° 13MA02424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02424
Date de la décision : 23/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Procédure d'attribution - Demande de permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Permis modificatif.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : CURETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-23;13ma02424 ?
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