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03/11/2014 | FRANCE | N°13MA00673

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 03 novembre 2014, 13MA00673


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le numéro 13MA00673, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Sebag avocat ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101940 du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 13 juin 2011 du maire de Lambesc refusant de retirer le refus d'autorisation du raccordement de sa propriété au réseau de distribution d'électricité et, d'autr

e part à la condamnation de la commune de Lambesc à lui payer une indemnité me...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le numéro 13MA00673, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Sebag avocat ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101940 du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 13 juin 2011 du maire de Lambesc refusant de retirer le refus d'autorisation du raccordement de sa propriété au réseau de distribution d'électricité et, d'autre part à la condamnation de la commune de Lambesc à lui payer une indemnité mensuelle de 1 200 euros en réparation du préjudice matériel subi à compter du mois de septembre 2009 et jusqu'à la date d'annulation de la décision de refus d'autorisation de raccordement ainsi qu'une indemnité de 20 000 euros au titre du préjudice moral à l'indemniser des préjudices subis du fait de ces refus fautifs ;

2°) d'annuler ladite décision et de condamner la commune de Lambesc, ainsi qu'il le demandait au tribunal, à lui payer une indemnité mensuelle de 1 200 euros en réparation du préjudice matériel subi à compter du mois de septembre 2009 et jusqu'à la date d'annulation de la décision de refus d'autorisation de raccordement ainsi qu'une indemnité de 20 000 euros au titre du préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lambesc une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Josset, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

- les observations de Me Sebag, pour M.B..., et de MeC..., pour la commune de Lambesc ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la maison d'habitation dont M. B... a hérité le 22 octobre 1999 a été détruite par un incendie le 30 juillet 2003 ; qu'ayant rebâti cette habitation, il a fait l'objet de poursuites pénales, au motif que la construction de la maison d'habitation détruite n'avait jamais été autorisée, et a été condamné, par jugement en date du 1er septembre 2009 du tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence, à une amende délictuelle de 1 500 euros ; que, par lettre du 11 janvier 2010, le maire de la commune de Lambesc a décidé, de s'opposer au raccordement de la construction au réseau de distribution électrique demandé par M.B..., au motif que la construction à raccorder n'avait pas été régulièrement édifiée ; que, le 22 novembre 2010, M. B...a présenté un recours gracieux tendant au retrait de cette décision, ainsi qu'une réclamation préalable tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il estimait avoir subi du fait de cette décision ; qu'il demande l'annulation du jugement en date du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 13 juin 2011 ainsi "le cas échéant (...) de " toutes décisions antérieures ", par laquelle le maire de Lambesc a refusé de retirer le refus d'autorisation du raccordement de sa propriété au réseau de distribution d'électricité, et a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cette commune à indemniser le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de ce refus de raccordement ;

Sur la légalité des décisions :

2. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d'affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que la décision administrative refusant le raccordement d'une construction à usage d'habitation irrégulièrement implantée aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone est de nature à constituer une ingérence d'une autorité publique dans le droit au respect de la vie privée et familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si une telle ingérence peut être justifiée par le but légitime que constituent le respect des règles d'urbanisme et de sécurité ainsi que la protection de l'environnement, il appartient, dans chaque cas, à l'administration de s'assurer et au juge de vérifier que l'ingérence qui découle d'un refus de raccordement est, compte tenu de l'ensemble des données de l'espèce, proportionnée au but légitime poursuivi ;

4. Considérant qu'il est constant que la maison de M.B..., située dans une zone de protection de la nature classée ND par le plan local d'urbanisme où les nouvelles constructions sont interdites, n'a pas été régulièrement édifiée, pas plus d'ailleurs que l'habitation anciennement détruite par un incendie qu'elle a remplacée ; que l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée et familiale de M.B..., constituée par l 'opposition du maire à son raccordement au réseau électrique, trouve cependant ainsi son fondement dans les dispositions du règlement de la zone ND, édictées notamment dans un but de protection de l'environnement, qui faisaient obstacle à la reconstruction menée par l'intéressé ; que la circonstance que M. B... a offert de prendre intégralement à sa charge le raccordement au réseau d'électricité est inopérante, dès lors qu'il n'appartient qu'à la seule collectivité publique d'apprécier si une extension de réseaux correspond aux besoins de celle-ci compte tenu des perspectives d'urbanisation, qui ne sont en l'espèce pas avérées, s'agissant d'une zone ND ; que devant l'administration, l'intéressé s'est borné à faire état du jugement déjà évoqué du tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence du 1er septembre 2009, devenu définitif, qui l'a déclaré coupable de construction sans autorisation et l'a condamné à une amende sans ordonner la démolition de ladite construction ; que toutefois, ce jugement, qui ne lie l'administration qu'au regard des constatations de fait opérées par le juge pénal, ne faisait pas obligation à cette dernière et en l'espèce le maire d'autoriser le raccordement sollicité du seul fait qu'il n'enjoignait pas la démolition de cette construction ; que le requérant ne peut dès lors et en tout état de cause invoquer que la confiance légitime qu'il pouvait placer dans la portée de ce jugement a été méconnue ;

5. Considérant qu'en appel, M. B...fait valoir l'atteinte particulière à sa vie privée et familiale que constitue cette décision compte tenu de la pathologie broncho-pulmonaire dont est atteinte sa compagne, en soutenant que l'absence d'électricité sur la propriété, fait obstacle à l'utilisation d'un appareil respiratoire adéquat ; que, toutefois, M. B...qui fait usage depuis 1999 d'un groupe électrogène, n'établit ni même ne soutient que le choix qu'il a opéré d'établir à cet endroit, avec sa compagne, son lieu de résidence aurait été dicté par des motifs impérieux dont l'importance excèderait celle imposant aux administrés de se conformer au respect des règles d'urbanisme ; qu'en outre, il n'est pas contesté que cette parcelle isolée se situe en bordure de zone boisée et que plusieurs incendies ont déjà eu lieu notamment en 1995 et 2003, ce dernier ayant détruit entièrement son habitation ; qu'il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, l'ingérence du maire dans le droit garanti de M. B...au respect de sa vie familiale du fait d'un refus de raccordement au réseau d'électricité n'a pas porté en l'espèce une atteinte disproportionnée à ce droit au regard du but poursuivi à cette occasion, tenant notamment au respect de ses propres décisions, des règles d'urbanisme et de sécurité ; que dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le maire de la commune de Lambesc a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant que la décision attaquée, qui relève de la police de l'urbanisme et tend seulement à interdire le raccordement définitif à un réseau d'alimentation électrique d'une constructions non autorisée, ne porte aucune atteinte illégale au droit de propriété protégé par l'article 1er du 1er protocole annexé à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont se prévaut le requérant ;

Sur les conclusions indemnitaires :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points n° 5 et 6 que les conclusions indemnitaires doivent être rejetées par voie de conséquence de l'absence d'illégalité fautive du refus de raccordement en litige ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté tant ses demandes en annulation que celles à fin de condamnation de la commune de Lambesc ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Lambesc, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer quelque somme que ce soit à M. B...en remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

10. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. B...à payer à la commune de Lambesc une somme de 1 600 euros en application de ces mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B...versera à la commune de Lambesc une somme de 1 600 (mille six cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la commune de Lambesc.

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N° 13MA00673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00673
Date de la décision : 03/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SEBAG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-11-03;13ma00673 ?
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