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20/02/2014 | FRANCE | N°09MA03310

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 février 2014, 09MA03310


Vu l'arrêt n° 09MA03310, en date du 3 octobre 2011, devenu définitif, par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé le jugement n° 0605541 du 2 juillet 2009 du tribunal administratif de Toulon a, avant de statuer sur les conclusions des époux H...dirigées contre le centre hospitalier d'Hyères et l'Assistance publique à Marseille, ordonné une expertise par un collège d'expert ;

Vu les ordonnances des 7 octobre et 4 novembre 2011 par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Marseille a désigné M. le professeur D...et M. le d

octeur A...en qualité d'experts et M. E...en qualité de sapiteur ;
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Vu l'arrêt n° 09MA03310, en date du 3 octobre 2011, devenu définitif, par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille, après avoir annulé le jugement n° 0605541 du 2 juillet 2009 du tribunal administratif de Toulon a, avant de statuer sur les conclusions des époux H...dirigées contre le centre hospitalier d'Hyères et l'Assistance publique à Marseille, ordonné une expertise par un collège d'expert ;

Vu les ordonnances des 7 octobre et 4 novembre 2011 par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Marseille a désigné M. le professeur D...et M. le docteur A...en qualité d'experts et M. E...en qualité de sapiteur ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2012, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie du Var qui informe la Cour de ce qu'elle n'entend pas intervenir dans la présente instance tout en indiquant que le montant des prestations versées s'élève à 59 849,04 euros ;

Vu l'arrêt n° 09MA03310, en date du 3 juillet 2012, par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la demande des consorts H...présentée le 3 avril 2012 tendant à la récusation du professeur D...ensemble l'ordonnance du Conseil d'Etat du 7 décembre 2012 donnant acte du désistement du pourvoi de M. et MmeH... ;

Vu l'ordonnance en date du 5 avril 2013 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Marseille a liquidé et taxé les frais et honoraires des opérations de l'expertise à la somme totale de 3 280,37 euros dont 1 200 euros pour M.D..., 1 480,37 euros pour M. A...et 600 euros pour M.E... ;

Vu la lettre du 8 avril 2013 invitant les parties à produire le mémoire récapitulatif prévu à l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative et les avis de réception ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 mai 2013, présenté par les consorts H...par Me C... qui concluent, à titre principal, à la condamnation du centre hospitalier d'Hyères à les indemniser des préjudices de leur fils Enzo, à défaut, de désigner un expert et de leur allouer une provision de 50 000 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice corporel, à ce que les sommes allouées portent intérêts au taux légal à compter de la demande préalable et à la mise à la charge du centre hospitalier d'Hyères, outre les dépens, la somme de 5 000 euros au titre des frais d'instance ;

...........................

Vu le mémoire, enregistré le 9 juillet 2013, présenté pour l'Assistance publique à Marseille qui conclut à sa mise hors de cause en l'absence de conclusions dirigées à son encontre dans le mémoire récapitulatif des consorts H...;

..........................

Vu le mémoire, enregistré le 19 juillet 2013, présenté pour le centre hospitalier général d'Hyères par Me G...de la Selarl Abeille et associés qui conclut au rejet des prétentions indemnitaires présentées par les consorts H...et à la mise à leur charge de la somme de 5 000 euros au titre des frais d'instance ;

..........................

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2014, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie du Var qui informe la Cour de ce qu'elle n'entend pas intervenir dans la présente instance tout en indiquant que le montant des prestations versées s'élève à la somme de 105 310,56 euros ;

Vu l'ordonnance en date du 21 juin 2007 du président du tribunal administratif de Nice fixant à la somme de 710 euros le montant des frais et honoraires d'expertise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2014,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me C...pour les consorts H...et de Me B...de la Selarl Abeille pour le centre hospitalier d'Hyères ;

1. Considérant que Mme H...s'est présentée dans l'après-midi du 31 mai 1997 à la maternité du centre hospitalier d'Hyères pour une fissuration de la poche des eaux à 33 semaines et cinq jours de grossesse ; qu'après avoir été examinée à 16 heures 30, elle a accouché d'un fils, Enzo, en présentation du siège décomplété par voie naturelle cinq heures plus tard ; que l'enfant, en état de mort apparente et atteint d'une paralysie du plexus brachial droit, a été transféré aux environs de minuit dans le service de néonatalogie de l'hôpital de la Timone à Marseille où il est resté jusqu'au 7 juillet 1997 ; que la Cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 3 octobre 2011 devenu définitif, après avoir annulé le jugement n° 0605541 du 2 juillet 2009 du tribunal administratif de Toulon contesté par les épouxH..., a, avant de statuer sur leurs conclusions dirigées contre le centre hospitalier d'Hyères et l'Assistance publique à Marseille tendant à l'allocation d'une provision de 15 000 euros à valoir sur le préjudice définitif d'Enzo et à l'octroi d'une somme de 15 000 euros en réparation de leur préjudice moral et à ce que les condamnations prononcées soient assorties des intérêts au taux légal avec capitalisation, ordonné une expertise par un collège d'experts ; que, par un arrêt n° 09MA03310 du 3 juillet 2012, la Cour administrative d'appel de Marseille a rejeté la demande de récusation du professeur D...présentée par les consortsH... ; que le Conseil d'Etat, par une ordonnance du 7 décembre 2012 a donné acte du désistement du pourvoi de M. et MmeH... ; que les appelants, par le mémoire récapitulatif qu'ils ont produit le 23 mai 2013 en application des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, sollicitent du juge d'appel, à titre principal, la condamnation du centre hospitalier d'Hyères à les indemniser des préjudices de leur fils mineur, à défaut, la désignation d'un expert et une allocation provisionnelle de 50 000 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice corporel, et en tout état de cause, à ce que les montants alloués soient assortis des intérêts au taux légal à compter de la demande préalable ; que les époux H...doivent être ainsi regardés comme se désistant de leurs conclusions développées dans leur requête enregistrée le 31 août 2009 aux fins de condamnation de l'Assistance publique à Marseille ;

Sur la régularité des opérations d'expertise :

2. Considérant que les consortsH..., qui ne contestent pas avoir pu faire valoir leur point de vue auprès du collège d'experts et ne contestent pas davantage le caractère contradictoire des opérations de l'expertise diligentée devant la Cour de céans, mettent en cause la partialité de l'un des trois experts désignés par la Cour ; qu'ils reprochent ainsi à l'expert D...d'avoir rédigé un rapport médical en 2008 pour le cabinet Abeille représentant alors les intérêts d'un médecin exerçant dans une clinique privée dans le cadre d'une affaire médicale dont l'enjeu financier était très important et qui, dans la présente instance, représente les intérêts du centre hospitalier d'Hyères alors que cet expert a déclaré sur l'honneur, dans son pré-rapport d'expertise " n'avoir aucun lien, direct ou indirect, avec les parties en la cause ou leurs conseils désignés " ; qu'en outre, les appelants soutiennent que le professeur D...a pris le parti de l'exonération de la responsabilité du centre hospitalier d'Hyères dans son pré-rapport d'expertise ; que, toutefois, d'une part, ni la rédaction d'un avis technique quatre ans avant le déroulement des opérations de la présente expertise pour le cabinet d'avocats représentant dans la présente affaire le centre hospitalier d'Hyères, ni la circonstance que l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, confirmé par la Cour de Cassation, a adopté une solution différente de celle prise par le professeur D...dans ladite note médicale vis-à-vis du praticien mis en cause exerçant dans le secteur privé ne sauraient constituer des motifs sérieux de mettre en doute l'impartialité et l'indépendance du professeur D...qui a pour mission d'éclairer la Cour sur la responsabilité du centre hospitalier d'Hyères à leur égard dans la présente instance qui les oppose, ni à entacher par voie de conséquence d'irrégularité les opérations de l'expertise ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le professeur D...et le conseil du centre hospitalier d'Hyères entretiendraient des liens étroits ou qu'il existerait entre eux un lien de subordination de nature à affecter son impartialité et à entacher ainsi d'irrégularité les opérations de l'expertise ; que, d'autre part, la circonstance que les éléments du pré-rapport d'expertise du professeur D...tendraient, selon les épouxH..., à écarter la responsabilité du centre hospitalier d'Hyères dans la survenue des séquelles dont souffre leur enfant ne suffit pas à caractériser son impartialité ou à mettre en doute celle-ci ni à entacher, par voie de conséquence, d'irrégularité les opérations de l'expertise ;

3. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de l'ordonnance n° 362490 en date du 7 décembre 2012 du Conseil d'Etat que les consorts H...se sont désistés le 22 octobre 2012 du pourvoi qu'ils ont formé le 5 septembre 2012 contre l'arrêt du 3 juillet 2012 par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille a rejeté leur demande de récusation de l'expertD... ;

4. Considérant qu'il ne résulte pas, en outre, de l'instruction que les droits de la défense et le principe du contradictoire auraient été méconnus s'agissant du déroulement des opérations d'expertise ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité des opérations d'expertise doit être écarté ;

Sur la responsabilité pour faute du centre hospitalier d'Hyères :

Sur la responsabilité sans faute :

5. Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

6. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expertise diligentée devant la Cour administrative d'appel de Marseille, rapport non contesté par les parties sur ce point, que l'enfant de M. et MmeH..., bien que son état ne soit pas encore consolidé, restera atteint d'un déficit fonctionnel permanent de l'ordre de 30 % lié aux séquelles motrices de la paralysie du plexus brachial droit ; que, toutefois, les troubles ainsi subis, pour importants et invalidants qu'ils soient, ne présentent pas le caractère d'extrême gravité auquel est subordonnée la mise en jeu de la responsabilité sans faute du centre hospitalier d'Hyères ;

Sur la responsabilité pour faute :

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : "La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision " ;

8. Considérant, qu'alors même que les opérations de l'expertise diligentée devant la Cour de céans ne sont pas entachées d'irrégularité, ainsi qu'il a été dit aux points 2, 3 et 4, les consorts H...opposent aux conclusions du rapport de l'expertise diligentée devant la Cour des critiques d'ordre médical étayées, documentées et circonstanciées notamment en ce qui concerne les données acquises de la science à la date des faits au regard, d'une part, des recommandations de bonnes pratiques applicables à la date des faits en litige et, d'autre part, des débats et publications de la communauté scientifique également applicables à la date des faits en litige ; que l'état du dossier ne permet ainsi pas à la Cour de statuer en toute connaissance de cause sur les demandes des consortsH... ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner une nouvelle expertise aux fins précisées ci-après ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions des consorts H...dirigées contre l'assistance publique de Marseille.

Article 2 : Il sera, avant de statuer sur les conclusions des consortsH..., procédé à une nouvelle expertise par un expert spécialisé en gynécologie-obstétrique.

Article 3 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 4 : L'expert devra :

- examiner les deux rapports d'expertise existants, les éléments médicaux concernant Mme H...au cours de la grossesse, de l'accouchement et postérieurs à l'accouchement, et notamment ceux produits par les parties ainsi que tous les éléments de nature à les éclairer, d'entendre les parties et tout sachant, le cas échéant, procéder à la réalisation d'actes médicaux complémentaires nécessaires et, dans la mesure du possible, d'entendre le praticien qui a réalisé l'accouchement ;

- dire si, au vu des données cliniques dont disposait l'équipe médicale et des données de la science applicables à la date des faits, les examens ou gestes médicaux nécessités par l'état de Mme H...à son admission à la maternité du centre hospitalier général d'Hyères dans l'après-midi du 31 mai 1997 pour une fissuration de la poche des eaux à 33 semaines et cinq jours de grossesse ont été réalisés ;

- déterminer la ou les causes de la paralysie du plexus brachial dont souffre EnzoH... ;

- dire si certains actes auraient pu être de nature à éviter les séquelles liées à la paralysie du plexus brachial dont est atteint Enzo H...et dans quelles mesure et proportion ;

- indiquer s'il existait des risques particuliers liés à l'état de la parturiente et à la position en siège décomplété du foetus rendant prévisible l'exécution d'actes médicaux et de dire si ces risques se sont réalisés ;

- préciser si, au vu des données acquises de la science à la date des faits, il existait une alternative thérapeutique à la décision de réaliser un accouchement par voie naturelle compte-tenu de l'état de Mme H...à son admission à la maternité et de la position en siège décomplété du foetus et, pour le cas où une telle alternative existait, les risques inhérents à ce choix tant pour la mère que pour l'enfant ;

- décrire la nature et l'étendue des séquelles d'EnzoH..., dire si son état est consolidé, déterminer, le cas échéant, la date de consolidation de celui-ci, rechercher et quantifier tous les éléments de préjudice pouvant être regardés comme directement et exclusivement imputables à des manquements commis par le centre hospitalier d'Hyères tels notamment le déficit fonctionnel temporaire, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice scolaire, le préjudice d'agrément, les douleurs endurées, le préjudice esthétique temporaire et le préjudice esthétique permanent, le préjudice moral et le préjudice d'établissement ;

Article 5 : En application des dispositions de l'article R. 621-9 du code de justice administrative, l'expert déposera son rapport au greffe en 2 exemplaires dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et en notifiera une copie aux parties intéressées.

Article 6 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...H..., Mme F...H..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, à l'Assistance publique de Marseille et au centre hospitalier général d'Hyères.

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N°09MA03310 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03310
Date de la décision : 20/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Instruction - Moyens d'investigation - Expertise - Recours à l'expertise - Mission de l'expert.

Procédure - Incidents - Récusation.


Composition du Tribunal
Président : M. BENOIT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-20;09ma03310 ?
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