Vu, la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 27 août 2012, sous le numéro 12MA03696, présentée pour Mme J...D..., demeurant ..., M. A... I..., demeurant..., et M. F...B..., demeurant..., par Me E...; Mme D...et autres demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1007166 en date du 28 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à titre principal à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mai 2010 par lequel le maire de la ville de Marseille a délivré à la société en nom collectif (SNC) François Mauriac le permis de construire un ensemble de 117 logements collectifs de 6867 m² de surface hors oeuvre nette (SHON) et subsidiairement au sursis à statuer;
2°) d'annuler ledit arrêté et la décision tacite de rejet de leur recours gracieux du 13 septembre 2010 ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Marseille et de la SNC BNP Paribas chacune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son préambule ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la décision du Conseil constitutionnel du 22 septembre 2010 n° 2010-33 QPC ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2013 :
- le rapport de M. Revert, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Massin, rapporteur public ;
- et les observations de Me E... pour Mme D...et autres, de Me H...substituant Me C...pour la commune de Marseille et de Me G...substituant la SCP Berenger et associès pour la SNC rue François Mauriac ;
1. Considérant que jugement du 28 juin 2012, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande Mme D...et autres tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mai 2010 par lequel le maire de la Ville de Marseille a accordé à la SNC rue François Mauriac le permis de construire un ensemble immobilier de 117 logements collectifs ; que Mme D...et autres relèvent appel de ce jugement ;
Sur la recevabilité de la requête d'appel :
2. Considérant que par lettre enregistrée au greffe de la Cour le 1er octobre 2012, les appelants ont justifié de la notification de leur requête d'appel tant à la commune de Marseille qu'à la société bénéficiaire du permis en litige, dans le délai de quinze jours francs posé par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi la fin de non-recevoir opposée par la commune de Marseille ne peut qu'être écartée ;
Sur la régularité du jugement :
3. Considérant, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. (...) ; que l'article R. 613-2 de ce code dispose : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne. (...) " ; que selon l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. / Si les parties présentent avant la clôture de l'instruction des conclusions nouvelles ou des moyens nouveaux, la juridiction ne peut les adopter sans ordonner un supplément d'instruction. " ; que l'article R. 613-4 du même code dispose : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. / Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprise entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il décide de verser au contradictoire après la clôture de l'instruction un mémoire qui a été produit par les parties avant ou après celle-ci, le président de la formation de jugement du tribunal administratif doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction ; qu'il lui appartient dans tous les cas de clore l'instruction ainsi rouverte ou, le cas échéant, de fixer une nouvelle date d'audience ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été rendu à l'issue d'une audience publique en date du 14 juin 2012 ; qu'en l'absence d'ordonnance précisant la date de clôture de l'instruction, l'instruction a été close, en application des dispositions précitées, trois jours francs avant la date d'audience, soit le 10 juin 2012 à minuit ; qu'il ressort des pièces du dossier que la SNC rue François Mauriac a produit un nouveau mémoire reçu par télécopie au greffe le 8 juin 2012 ; que la fiche de suivi de l'instruction, dont les mentions sont corroborées par la lettre d'envoi dudit mémoire aux appelants, montre également que ce mémoire a été communiqué aux demandeurs et à la commune de Marseille le 11 juin 2012, soit postérieurement à la clôture de l'instruction ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que si pour rejeter au fond la demande de Mme D...et autres, le tribunal, qui a certes visé et analysé ce mémoire, n'a pas statué sur les deux nouvelles fins de non-recevoir qui y étaient développées, cette communication a eu pour effet de rouvrir l'instruction et que, par suite, en s'abstenant de clore à nouveau l'instruction ou de fixer une nouvelle date d'audience dans des conditions de nature à respecter les exigences du contradictoire, le tribunal a irrégulièrement statué ; que par conséquent et pour ce motif le jugement attaqué doit être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'irrégularité ;
5. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme D...et autres ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
6. Considérant que l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme dispose que : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. Cet affichage n'est pas obligatoire pour les déclarations préalables portant sur une coupe ou un abattage d'arbres situés en dehors des secteurs urbanisés. / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable (...). / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage " ; qu'aux termes de l'article R. 600-1 du même code : " En cas de (...) recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation ( ...). / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux " ; qu'il résulte de ces dispositions que si l'absence de mention dans l'affichage d'un permis de construire de l'obligation de notification du recours n'empêche pas le déclenchement du délai de recours contentieux mentionné à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, elle a en revanche pour effet de rendre inopposable l'irrecevabilité prévue à l'article R. 600-1 du même code ;
7. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est du reste pas contesté que Mme D...et autres n'ont notifié leur recours contentieux présenté au greffe du tribunal administratif de Marseille qu'à la SNC rue François Mauriac, et non également à la commune de Marseille ; qu'il résulte en outre de trois procès-verbaux de constat d'huissier établis les 25 mai, 28 juin et 26 juillet 2010, que le permis de construire en litige a été, à ces trois dates, l'objet sur le terrain d'assiette du projet d'un affichage sur un panneau visible et lisible depuis la voie publique et contenant les mentions requises par les dispositions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, dont l'obligation de notifier tout recours administratif ou contentieux à l'auteur de la décision et à son bénéficiaire ; que pour mettre en doute la réalité de cet affichage, les appelants produisent trois attestations de voisins, dont l'une du 4 mai 2012 indique inutilement que le panneau a été retiré dès le 5 juin 2011 et qui pour les deux autres, compte tenu de leurs termes, peuvent uniquement établir que le permis en litige ainsi que les informations prévues par lesdites dispositions n'ont pas commencé à être affichées sur le terrain avant le 28 juin 2010 ; que faute pour les appelants, qui se bornent à s'en remettre auxdites attestations, de contester la continuité de l'affichage à compter de cette dernière date, le permis de construire en litige doit être regardé comme ayant reçu la publication requise par les dispositions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, laquelle a de la sorte rendu opposable aux appelants la formalité de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que la circonstance que l'arrêté en litige, lequel n'était pas joint au panneau d'affichage, indique seulement, au nombre des mentions des voies et délais de recours, que tout recours juridictionnel doit être notifié au titulaire de l'autorisation s'avère sans incidence sur l'opposabilité aux requérants de ladite formalité ;
8. Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutiennent Mme D...et autres, les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, qui poursuivent un objectif de sécurité juridique, imposent la notification du recours juridictionnel tant au bénéficiaire de l'autorisation contestée qu'à son auteur, alors même que le recours gracieux contre cet acte aurait donné lieu quant à lui à la double notification ; que ni la lettre de ce texte ni son interprétation n'ont pour objet ou pour effet de porter une atteinte excessive ou substantielle au droit au recours juridictionnel des intéressés tel que protégé par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
9. Considérant que le moyen tiré de ce que l'application des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme conduiraient à la méconnaissance des dispositions de l'article 34 de la Constitution n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ; qu'il y a donc lieu d'accueillir la fin de non-recevoir opposée par la SNC rue François Mauriac et tirée du défaut de notification de la demande à la commune de Marseille, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des écritures de cette dernière ;
10. Considérant que dans la mesure où Mme D...et autres demandent expressément à la fois l'annulation de la décision portant rejet du recours gracieux formé le 13 septembre 2010 et celle du permis de construire contre lequel ce recours gracieux était dirigé et où sont irrecevables leurs conclusions contre la décision administrative ayant donné naissance au litige, l'ensemble de leur demande doit être regardé comme irrecevable, alors même que ne sont pas par elles-mêmes soumises à la formalité de notification et donc irrecevables leurs conclusions dirigées contre la décision portant rejet du recours gracieux ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer, que la demande de Mme D...et autres doit être rejetée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la commune de Marseille, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, et que la SNC Bnp Paribas, qui n'y a pas la qualité de partie, versent quelque somme que ce soit à Mme D...et autres au titre de leurs frais d'instance ; que les conclusions présentées à ce titre par ces derniers doivent donc être rejetées ; qu' il n'y a pas lieu au titre de ces dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux prétentions tendant aux mêmes fins et présentées par la commune de Marseille et la SNC rue François Mauriac ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1007166 du tribunal administratif de Marseille en date du 28 juin 2012 est annulé.
Article 2 : La demande de Mme D...et autres ainsi que leurs conclusions d'appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Marseille et de la SNC rue François Mauriac présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à Mme J...D..., à M. A...I..., M. F...B..., à la commune de Marseille et à la SNC Rue François Mauriac.
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N°12MA036962
CB