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03/07/2012 | FRANCE | N°10MA00721

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 03 juillet 2012, 10MA00721


Vu la requête, enregistrée le 18 février 2010 sur télécopie confirmée le 23 février 2010, présentée par Me Claire Groussard, avocat, pour Mme Agnès A, élisant domicile ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0703579-0703863-0703865-0705258 en date du

15 décembre 2009 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté :

- sa demande d'annulation de la décision datée du 2 mars 2007 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier lui a infligé la sanction disciplinaire du blâme, et les con

clusions indemnitaires y afférentes ;

- sa demande d'annulation de la décision implicite par...

Vu la requête, enregistrée le 18 février 2010 sur télécopie confirmée le 23 février 2010, présentée par Me Claire Groussard, avocat, pour Mme Agnès A, élisant domicile ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0703579-0703863-0703865-0705258 en date du

15 décembre 2009 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté :

- sa demande d'annulation de la décision datée du 2 mars 2007 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier lui a infligé la sanction disciplinaire du blâme, et les conclusions indemnitaires y afférentes ;

- sa demande d'annulation de la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection juridique des fonctionnaires, et les conclusions indemnitaires y afférentes ;

- sa demande d'annulation de la décision du 11 juillet 2007 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier a prononcé son changement d'affectation, et les conclusions indemnitaires y afférentes ;

2°) d'annuler :

- la décision datée du 2 mars 2007 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier lui a infligé la sanction disciplinaire du blâme, et de condamner l'État à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence occasionnés par cette sanction, majorée des intérêts de droit à compter du jour de sa demande ;

- la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection juridique des fonctionnaires, et de condamner l'État à lui verser une somme de 90 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence occasionnés par cette décision ;

- la décision du 11 juillet 2007 par laquelle le recteur de l'académie de Montpellier a prononcé son changement d'affectation, et de condamner l'État à lui verser une somme de 400 000 euros en réparation du préjudice subi consécutif à cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2012 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public ;

Considérant que le tribunal administratif de Montpellier a rendu le 15 décembre 2009 un jugement joignant plusieurs requêtes présentées par Mme Agnès A, professeur certifié en sciences de la vie et de la Terre, par lesquelles l'intéressée demandait notamment, en premier lieu, l'annulation d'un blâme en date du 2 mars 2007 infligé par le recteur de l'académie de Montpellier et la réparation des préjudices consécutifs à cette sanction, en deuxième lieu l'annulation du refus implicite du même recteur de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et la réparation des préjudices consécutifs à cette décision, en troisième lieu l'annulation de la décision du 11 juillet 2007 par laquelle ledit recteur avait prononcé son changement d'affectation et la réparation des préjudices consécutifs à cette décision ; que Mme A interjette appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté l'ensemble des conclusions sus rappelées ;

En ce qui concerne le blâme du 2 mars 2007 :

S'agissant des conclusions en annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes./ Premier groupe : /- l'avertissement ; /- le blâme. (...) / Parmi les sanctions du premier groupe, seul le blâme est inscrit au dossier du fonctionnaire. Il est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la réponse datée du

25 mai 2012 faite par le ministre à la mesure d'instruction effectuée en date du 14 mai précédent, qu'aucune sanction n'a été infligée à Mme A, fonctionnaire titulaire de l'État, sur une période de trois ans courant à compter du 2 mars 2007, date du blâme en litige ; qu'en application des dispositions précitées, ce blâme a été automatiquement effacé du dossier postérieurement à l'introduction de la requête de Mme A ; que, par suite, les conclusions de Mme A tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette sa demande d'annulation dudit blâme sont devenues sans objet ;

S'agissant des conclusions en réparation :

Considérant que Mme A ne réitère plus en appel la demande, présentée en première instance, tendant à la réparation du préjudice moral causé par le blâme, mais demande la réparation de troubles dans les conditions d'existence qui lui auraient été causés par cette sanction ; que cependant, elle ne justifie pas de la réalité d'un tel préjudice en se bornant à solliciter l'allocation de 15 000 euros à titre de réparation du préjudice allégué ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la légalité de la sanction précitée, les conclusions indemnitaires y afférentes ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne le refus implicite de protection fonctionnelle :

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer le cas échéant, le préjudice qui en est résulté " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration, que la principale de l'établissement dans lequel Mme A exerçait ses fonctions à Marseillan a, par deux fois, affiché dans la salle des professeurs des courriers adressés par l'appelante au recteur d'académie par la voie hiérarchique, dont le recours gracieux contre le blâme dont elle avait fait l'objet ; que si ces faits sont incontestablement fautifs, Mme A n'est pas fondée à prétendre qu'ils constitueraient une voie de fait, dès lors qu'en tout état de cause, ces affichages s'ils ont été effectués en violation du secret de la correspondance, ne constituent pas dans les circonstances de l'espèce une atteinte à la liberté de la correspondance d'une telle gravité qu'elle savait constitution d'une voie de fait ; que, par ailleurs, Mme A ne soutient pas, dans sa contestation du refus en litige, que ces mêmes faits auraient procédé d'un harcèlement moral commis par la principale à son encontre, et seraient donc de ceux qui peuvent permettre d'obtenir à ce titre la protection fonctionnelle prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas qu'elle remplissait les conditions posées par l'article 11 pour bénéficier de la protection prévue par ces mêmes dispositions ; que par suite, ses conclusions à fin d'annulation du refus implicite de protection fonctionnelle opposé à sa demande adressée au recteur en date du 1er juin 2007 ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la réparation des préjudices que lui aurait causé ce refus, dont elle n'établit pas l'illégalité ;

En ce qui concerne la décision de changement d'affectation en date du 11 juillet 2007 :

S'agissant des conclusions en annulation :

Considérant qu'il ressort de la lecture du changement d'affectation en litige qu'il a répondu, de la part du secrétaire général du rectorat de Montpellier qui l'a décidé, à un " souci d'apaisement ", " afin de permettre [à l'intéressée] de trouver un terrain plus propice à l'épanouissement de ses capacités pédagogiques " et que cette autorité y a assuré que ses services veilleraient à confier à Mme A des suppléances les moins éloignées de son domicile et qu'elle resterait titulaire de son poste au collège de Marseillan ; qu'il ressort également des pièces du dossier que la suppléance confiée à Mme A au titre de l'année scolaire 2007-2008 a été une affectation, pour l'année, au collège de Bessan, localité située à 9 km de Marseillan où habite l'intéressée ; qu'ainsi, même si en raison des trajets à accomplir, le changement d'affectation a nécessairement comporté une modification des conditions d'exercice de ses fonctions par Mme A, celle-ci n'a subi aucun amoindrissement de ses responsabilités dans l'exercice de ses fonctions d'enseignante ; que dans ces conditions, le changement d'affectation contesté ne peut être regardé comme intervenu à titre disciplinaire ; que, pris dans le seul intérêt du service, il constitue toutefois une mesure prise en considération de la personne qui nécessitait qu'en vertu des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, l'intéressée soit mise à même de consulter préalablement son dossier ; que si Mme A a été convoquée par lettre du 11 juin 2007 à un entretien, fixé au 19 suivant, avec l'adjoint du secrétaire général de l'académie, l'objet de cet entretien n'était pas indiqué, ni la possibilité de consulter le dossier ; qu'en congé maladie jusqu'au 30 juin 2007, Mme A a, par l'intermédiaire de son époux, demandé le report de cette réunion, report dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait été accordé avant la décision en litige ; que, dans ces conditions, Mme A, qui n'ayant pas été mise à même de demander la communication de son dossier a été privée d'une garantie, est fondée à demander l'annulation de la décision en date du 11 juillet 2007 pour vice de procédure ;

S'agissant des conclusions indemnitaires :

Considérant, qu'en faisant supporter à Mme A une mutation dans l'intérêt du service pour apaiser une situation conflictuelle et en l'obligeant du fait de cette mutation à des déplacements occasionnés par son affectation au collège de Bessan distant de 9 km de son domicile, alors qu'elle avait trois enfants âgés de 9, 7 et 4 ans à la date de la décision en litige, l'administration a occasionné à la requérante un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence dont il sera fait une juste appréciation en condamnant le ministre de l'éducation nationale à lui verser une indemnité de 3 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a refusé d'annuler le changement d'affectation d'office en date du 11 juillet 2007 et de réparer le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence consécutifs à cette décision ; que, dans cette mesure, elle est fondée à demander l'annulation de ce jugement et de la décision sus mentionnée du 11 juillet 2007, ainsi que le versement par l'État d'une indemnité de 3 000 euros ;

Sur les conclusions présentées tendant l'application des dispositions de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État le versement à Mme A de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation du blâme daté du 2 mars 2007.

Article 2 : La décision en date du 11 juillet 2007 prononçant le changement d'affectation d'office de Mme A est annulée.

Article 3 : L'État (ministère de l'éducation nationale) est condamné à verser à Mme A une somme de 3 000 (trois mille) euros.

Article 4 : Le jugement rendu le 15 décembre 2009 par le tribunal administratif de Montpellier est annulé en ce qu'il a de contraire au présent dispositif.

Article 5 : L'État (ministère de l'éducation nationale) versera à Mme A la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme A est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Agnès A et au ministre de l'éducation nationale.

Copie en sera adressée pour information au recteur de l'académie de Montpellier.

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N° 10MA007213


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA00721
Date de la décision : 03/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation - Affectation.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection contre les attaques.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Procédure - Incidents - Non-lieu - Existence.


Composition du Tribunal
Président : M. REINHORN
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: Mme VINCENT-DOMINGUEZ
Avocat(s) : GROUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-07-03;10ma00721 ?
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