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03/03/2011 | FRANCE | N°09MA00437

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 03 mars 2011, 09MA00437


Vu la requête, enregistrée le 4 février 2009, présentée pour l'ASSOCIATION U LEVANTE, dont le siège est au RN 193 E Muchjelline à Corte (20250), par Me Tomasi ; l'ASSOCIATION U LEVANTE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800498 du 4 décembre 2008 du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 07-1333 du préfet de la Corse-du-Sud en date du 19 septembre 2007 transférant la servitude de passage des piétons sur le littoral de la commune de Pianottoli-Caldarello de la Cala di Fornellu

à la tour de Caldarello ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la tot...

Vu la requête, enregistrée le 4 février 2009, présentée pour l'ASSOCIATION U LEVANTE, dont le siège est au RN 193 E Muchjelline à Corte (20250), par Me Tomasi ; l'ASSOCIATION U LEVANTE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800498 du 4 décembre 2008 du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 07-1333 du préfet de la Corse-du-Sud en date du 19 septembre 2007 transférant la servitude de passage des piétons sur le littoral de la commune de Pianottoli-Caldarello de la Cala di Fornellu à la tour de Caldarello ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la totalité de ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2011 :

- le rapport de Mme Ségura, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé, sur demandes de l'ASSOCIATION U LEVANTE et de la commune de Pianottoli-Caldarello, l'arrêté du préfet de la Corse-du-Sud en date du 19 septembre 2007 en tant qu'il a transféré la servitude de passage des piétons sur le littoral de la Cala di Fornellu à la tour de Caldarello au droit de la parcelle D 704 ; que l'ASSOCIATION U LEVANTE relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de ses conclusions ;

Considérant qu'aux termes de l'article de L. 160-6 du code de l'urbanisme : Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. / L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressées et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; b) A titre exceptionnel, la suspendre. / Sauf dans le cas où l'institution de la servitude est le seul moyen d'assurer la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, la servitude instituée aux alinéas 1 et 2 ci-dessus ne peut grever les terrains situés à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d'habitation édifiés avant le 1er janvier 1976 (...) ; que si l'autorité administrative peut, par décision motivée, modifier le tracé ou les caractéristiques de cette servitude afin d'assurer, compte tenu des obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, cette faculté n'est ouverte à l'autorité administrative que dans la stricte mesure nécessaire au respect des objectifs ainsi fixés par la loi ;

Sur la procédure de l'enquête publique :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.160-18 du code de l'urbanisme : Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête peut décider de procéder à une visite des lieux. Dans ce cas, le commissaire enquêteur ou le président de la commission avise le maire et convoque sur place les propriétaires intéressés ainsi que les représentants des administrations ; après les avoir entendus, il dresse procès-verbal de la réunion ; qu'il résulte de ces dispositions intervenues pour l'application de l'article de L.160-6 du code de l'urbanisme précité que seuls les propriétaires des parcelles concernées par le projet de modification d'une servitude de passage doivent obligatoirement être convoqués sur place en cas de visite des lieux par le commissaire-enquêteur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que tous les propriétaires des parcelles concernées par les modifications projetées ont été préalablement avertis des visites effectuées sur leurs parcelles par le commissaire-enquêteur ; que la circonstance que tous les propriétaires des terrains du littoral emprunté par la servitude de passage n'ont pas été convoqués est sans incidence sur le respect de la procédure prévue par les dispositions précitées, quand bien même le commissaire-enquêteur s'est rendu sur leurs parcelles au cours de ses opérations de visite générale du site ;

Sur le transfert de la servitude existante au droit des parcelles D 755 et 756 :

Considérant, que par l'arrêté litigieux, le préfet de la Corse-du-Sud a décidé le transfert de la servitude existante à la Punta di Capineru au droit des parcelles D 755 et 756, à l'intérieur des terres sur un chemin cadastré D 754 et la parcelle D 1141 ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des éléments contenus dans le rapport du commissaire-enquêteur et des observations de ce dernier que, d'une part, la présence de l'amas rocheux qui empêche l'accès au littoral rendait nécessaire, contrairement à ce que soutient l'ASSOCIATION U LEVANTE, le passage du tracé de la servitude à l'intérieur de la parcelle D 755 et que, d'autre part, la maison d'habitation présente sur cette parcelle a été construite avant le 1er janvier 1976 ; qu'en outre, le commissaire-enquêteur et la direction départementale de l'équipement indiquent, dans leurs rapports respectifs, que la distance mesurée sur le terrain entre la maison d'habitation sise sur cette parcelle et l'emprise de la servitude déplacée serait comprise entre 12 et 13 m ; que si l'association requérante fait valoir que la distance entre la construction et la limite du domaine public maritime est d'environ 30 m, elle ne l'établit pas par la seule production d'un cliché photogrammétrique de l'I.G.N. et d'une image satellite ; que, dès lors, en assurant la continuité du cheminement des piétons en modifiant le tracé de la servitude de passage ainsi qu'il vient d'être précisé, le préfet de la Corse-du-Sud a usé de la faculté que lui donnait les dispositions précitées dans la stricte mesure nécessaire au respect des objectifs fixés par la loi ;

Sur le transfert de la servitude à l'intérieur des parcelles D 1146 et 1175 :

Considérant, en premier lieu, qu'en examinant les effets de la servitude sur les propriétés privées, les premiers juges se sont limités à apprécier la légalité de la décision attaquée et n'ont pas, contrairement à ce que soutient l'association requérante, procédé à une substitution de motifs ;

Considérant, en second lieu, que, par l'arrêté attaqué, le préfet de la Corse-du-Sud a décidé le transfert de l'assiette de la servitude de l'Anse de Chevanu à l'intérieur des parcelles D 1146 et 1175, situées dans le lotissement dit des Bruzzi ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du commissaire-enquêteur, que, d'une part, la forte pente de la falaise fait obstacle, sur une distance d'environ vingt-cinq mètres, au cheminement des piétons au droit de la parcelle cadastrée D 1143 et impose le passage de l'assiette de la servitude à proximité d'un groupe de bâtiments à usage d'habitation et que, d'autre part, ces habitations ont été édifiées avant le 1er janvier 1976 ; qu'en outre, le franchissement de cet obstacle naturel, contrairement à ce que soutient l'association requérante, ne pouvait être assuré par de simples aménagements ; que si l'ASSOCIATION U LEVANTE invoque les dispositions de l'article R.160-15 du code de l'urbanisme dans leur rédaction alors applicable et soutient qu'il existe un ancien sentier littoral praticable ouvert à la circulation publique sur les parcelles D 1143 et 1175, elle ne l'établit toutefois pas par les documents qu'elle produit ; qu'il s'ensuit que c'est dans la stricte mesure nécessaire au respect des objectifs fixés par la loi que le préfet de la Corse-du-Sud a décidé le transfert de la servitude de passage sur des parcelles mitoyennes de la parcelle D 1143 ;

Sur la suspension de la servitude sur les parcelles D 1232, 65 et 66 :

Considérant que, par l'arrêté querellé, le préfet de la Corse-du-Sud a décidé la suspension de la servitude sur les parcelles D 1232, 65 et 66 dans l'Anse de Chevanu ; que l'ASSOCIATION U LEVANTE soutient en appel que cette suspension est illégale ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : A titre exceptionnel, la servitude instituée par l'article L.160-6 peut être suspendue, notamment dans les cas suivants : a) Lorsque les piétons peuvent circuler le long du rivage de la mer grâce à des voies ou passages ouverts au public ; (...) e) Si le maintien de la servitude de passage est de nature à compromettre soit la conservation d'un site à protéger pour des raisons d'ordre écologique ou archéologique, soit la stabilité des sols. ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du commissaire enquêteur, que, contrairement à ce que soutient l'association requérante, la parcelle D 1232 subit un phénomène d'érosion de nature à justifier la suspension de la servitude de passage au droit de cette parcelle ;

Considérant, en revanche, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles D 65 et D 66 supportent des constructions édifiées antérieurement au 1er janvier 1976 ; qu'à supposer même qu'elles soient bâties depuis cette date, comme le fait valoir le préfet sans toutefois l'établir, il n'existe aucune obstacle naturel imposant le recul de la servitude de passage plus à l'intérieur des terres ; que, dès lors, en suspendant la servitude de passage au droit de ces deux parcelles, alors que les conditions autorisant une suspension de servitude, prévues par les dispositions précitées de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme, n'étaient pas réunies, le préfet de la Corse-du-Sud a entaché sa décision d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION U LEVANTE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas annulé l'arrêté litigieux en ce qu'il suspend la servitude de passage au droit des parcelles D 65 et D 66 ; qu'il y a donc lieu d'annuler le jugement et ledit arrêté dans cette mesure ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à l'ASSOCIATION U LEVANTE au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'arrêté du préfet de la Corse-du-Sud en date du 19 septembre 2007 est annulé en tant qu'il suspend la servitude de passage au droit des parcelles D 65 et D 66.

Article 2 : Le jugement n° 0800498-0800921 du tribunal administratif de Bastia du 4 décembre 2008 est réformé en tant qu'il est contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à l'ASSOCIATION U LEVANTE une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION U LEVANTE et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

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N° 09MA004372

RP


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. D'HERVE
Rapporteur ?: Mme Françoise SEGURA-JEAN
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : TOMASI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 03/03/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09MA00437
Numéro NOR : CETATEXT000023729416 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-03;09ma00437 ?
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