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29/01/2010 | FRANCE | N°07MA01264

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 29 janvier 2010, 07MA01264


Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007 sur télécopie confirmée le 16 suivant, présentée par la société civile professionnelle d'avocats Stifani Fenoud pour la société civile immobilière (SCI) ESPACE SAINT CLAUDE, représentée par son gérant en exercice, dont le siège se trouve résidence du Port Vauban, Place Haute à Antibes (06600) ; la SCI ESPACE SAINT CLAUDE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203763 du 22 janvier 2007 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de 464 862,79 euros, augm

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Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007 sur télécopie confirmée le 16 suivant, présentée par la société civile professionnelle d'avocats Stifani Fenoud pour la société civile immobilière (SCI) ESPACE SAINT CLAUDE, représentée par son gérant en exercice, dont le siège se trouve résidence du Port Vauban, Place Haute à Antibes (06600) ; la SCI ESPACE SAINT CLAUDE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203763 du 22 janvier 2007 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de 464 862,79 euros, augmentée des intérêts au taux légal depuis son versement, représentant le montant de participations réclamées par la commune d'Antibes pour le plan d'aménagement d'ensemble (PAE) d'Antibes-Nord ;

2°) de condamner la commune d'Antibes à la restitution de la somme précitée ;

3°) de mettre à la charge de ladite commune le versement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

...................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le Vice-Président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2010 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur ;

- les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

- les observations de Me Berdah pour la commune d'Antibes ,

Considérant que la délibération adoptée par le conseil municipal d'Antibes le 17 décembre 1996, prorogeant le délai de réalisation des équipements publics prévus au programme d'aménagement d'ensemble (PAE) d'Antibes-Nord a été annulée par jugement rendu le 11 octobre 2001 par le tribunal administratif de Nice, confirmé par arrêt rendu le 19 juin 2003 par la présente cour ; qu'en conséquence, la participation réclamée à la SNC BG Promotion par la commune d'Antibes au titre du PAE, à raison du permis de construire qu'elle lui avait délivré le 23 janvier 1991 et dont la commune ne conteste pas avoir perçu le montant, s'est trouvée privée de fondement légal ; que la SCI ESPACE SAINT CLAUDE sollicite la restitution de cette participation qui s'élève à 464 862,79 euros, assortie des intérêts de droit et de leur capitalisation ; qu'à cet égard, elle interjette appel du jugement du 22 janvier 2007 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin de restitution :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société BG Promotion est la gérante de la SCI ESPACE SAINT CLAUDE ; que plusieurs pièces versées au dossier par l'appelante et non contestées par la commune d'Antibes, notamment une attestation jointe au dossier de demande de permis de construire, la déclaration d'ouverture de chantier, la déclaration d'achèvement des travaux, ainsi qu'une photographie jointe au constat d'huissier relatif à la publicité effectuée sur le chantier, attestent que, lorsqu'elle a sollicité le permis de construire à l'origine de la participation en litige, la SNC BG Promotion agissait pour le compte de la SCI ESPACE SAINT CLAUDE qui était la propriétaire du terrain d'assiette du projet ; que, par ailleurs, il ressort des pièces versées au dossier que les sommes réclamées et perçues par la commune sont inscrites pour un même montant dans les documents comptables de la SCI ESPACE SAINT CLAUDE ; que l'appelante établit en effet, par la production de copies de relevés, que son compte bancaire a été débité les 7 novembre 1991 et 21 septembre 1992 des sommes représentant le montant total de la participation en litige et que la trésorerie municipale avait réclamées à la SNC BG Promotion par avis des sommes à payer émis les 23 avril 1991 et 8 avril 1992 ; que l'appelante produit aussi copies des lettres de rappel adressées par la trésorerie ; que la seule circonstance que six mois environ séparent les avis précités des débits sus-rappelés n'est pas suffisante à établir, contrairement à ce que soutient la commune, que la SCI ESPACE SAINT CLAUDE n'aurait pas réglé elle-même la participation demandée au titre du PAE ; qu'enfin, les sommes perçues par la commune au titre du permis concerné n'ont été réclamées par personne d'autre que la SCI ESCPACE SAINT CLAUDE et notamment pas par la SNC BG Promotion ; que par suite, si la dizaine d'années écoulée entre les versements effectués et la demande de restitution présentée par la requérante ne permet plus à la SCI ESPACE SAINT CLAUDE de produire copie des chèques au moyen desquels elle soutient avoir payé le comptable public communal ni à la commune de prouver de qui elle a perçu les sommes en litige, la SCI ESPACE SAINT CLAUDE doit être regardée comme la personne ayant réglé à la commune d'Antibes les sommes demandées au titre du PAE pour la délivrance du permis de construire du 23 janvier 1991 ; que la SCI a, en conséquence, intérêt à agir pour solliciter la restitution de cette participation ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu'il résulte de ces dispositions que ce délai de deux mois ne s'applique pas aux demandes tendant à la perception ou à la répétition de tout ou partie des sommes nécessaires au financement des travaux publics ; qu'une participation réclamée au titre des équipements publics devant être réalisés dans le cadre d'un programme d'aménagement d'ensemble est relative à des travaux publics ; que, dès lors, la SCI ESPACE SAINT CLAUDE est recevable à contester le bien-fondé de cette participation sans condition de délai ni obligation de présenter une demande préalable ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : Sont prescrites au profit de l'Etat, des départements et des communes sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis.(...) ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : La prescription est interrompue par : (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ;(...)// Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. ; que, par ailleurs, l'article L.332-11 du code de l'urbanisme dispose que : (...) Si les équipements publics annoncés n'ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, la restitution des sommes éventuellement versées ou de celles qui correspondent au coût des prestations fournies peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire. Dans les communes où la taxe locale d'équipement est instituée, la taxe est alors rétablie de plein droit dans le secteur concerné et la restitution de ces sommes peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire pour la part excédant le montant de la taxe locale d'équipement qui aurait été exigible en l'absence de la délibération prévue à l'article L.332-9. Les sommes à rembourser portent intérêt au taux légal./ ;

Considérant que si les paiements ont été effectués en 1991 et 1992, ils n'ont pris un caractère indu qu'en raison, d'une part, du fait que les équipements publics annoncés n'ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant la participation comme le prévoient les dispositions précitées de l'article L. 332-11, et, d'autre part, du fait que la délibération annulée du 17 décembre 1996 n'a pu proroger légalement ce délai de réalisation ; que, dans ces conditions, le fait générateur de la créance dont se prévaut la société consiste en l'intervention de cette délibération ; que, par suite, en vertu des dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968, si le délai de prescription a commencé à courir à compter du 1er janvier 1997, il a été interrompu par le recours juridictionnel formé contre ladite délibération, et un nouveau délai n'a commencé de courir qu'à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle le jugement rendu le 11 octobre 2001 par le tribunal administratif de Nice est passé en force de chose jugée, soit après sa confirmation par l'arrêt rendu le 19 juin 2003 par la présente cour ; qu'ainsi, contrairement à ce prétend la commune d'Antibes, il n'était pas expiré lorsque la SCI ESPACE SAINT CLAUDE lui a présenté en mai 2002 sa demande de restitution de la participation versée au titre du PAE d'Antibes-Nord ; qu'il en résulte que la créance en litige n'est pas prescrite, et a vocation à être reversée à l'appelante ;

Considérant cependant que, comme le soutient la commune, le montant de la restitution qui devra être opérée par la commune d'Antibes doit être limité, en vertu des dispositions précitées de l'article L.332-11 du code de l'urbanisme, à la part de la participation excédant le montant de la taxe locale d'équipement qui aurait été exigible si la délibération instituant le programme d'aménagement d'ensemble n'était pas intervenue ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant, d'une part, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter de la réception par la partie débitrice de la réclamation de la somme principale ; qu'ainsi la SCI ESPACE SAINT CLAUDE a droit aux intérêts au taux légal sur la somme qui devra lui être restituée par la commune d'Antibes à la date de réception de la demande préalable que la société a envoyé le 3 mai 2002 par lettre recommandée avec accusé de réception ; que la circonstance que le recours contentieux n'est, en l'espèce, pas subordonné à l'intervention préalable d'une telle demande est sans incidence à cet égard ;

Considérant, d'autre part, que, pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée, et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que l'appelante a demandé pour la première fois la capitalisation des intérêts par un mémoire enregistré le 3 septembre 2009 ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande à cette date, et à chaque échéance annuelle, à compter de cette date dans le cas où la commune continuerait à se soustraire à ses obligations ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI ESPACE SAINT CLAUDE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande de restitution de la participation exigée par la commune d'Antibes au titre du PAE d'Antibes-Nord à raison de la délivrance du permis de construire du 23 janvier 1991 ; que, par conséquent, elle est fondée à obtenir l'annulation dudit jugement et la restitution, dans les limites ci-dessus précisées et augmentée des intérêts sus-indiqués, des sommes qu'elle a versées au titre dudit PAE ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune d'Antibes le paiement à la SCI ESPACE SAINT CLAUDE de la somme de 1 500 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement rendu le 22 janvier 2007 par le tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : La commune d'Antibes reversera à la SCI ESPACE SAINT CLAUDE la somme que celle-ci lui avait versée au titre de la participation au PAE, sous déduction de la taxe locale d'équipement exigible. La somme due portera intérêt au taux légal à compter de la réception par la commune d'Antibes de la demande préalable envoyée le 3 mai 2002 par la SCI ESPACE SAINT CLAUDE . Les intérêts échus au 3 septembre 2009, puis éventuellement à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés pour produire eux-mêmes des intérêts.

Article 3 : La commune d'Antibes versera la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à la SCI ESPACE SAINT CLAUDE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI ESPACE SAINT CLAUDE, la commune d'Antibes, et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

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N° 07MA012642


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01264
Date de la décision : 29/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D'HERVE
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : SCP STIFANI-FENOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-01-29;07ma01264 ?
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