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09/10/2008 | FRANCE | N°06MA02335

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 09 octobre 2008, 06MA02335


Vu la requête, enregistrée le 4 août 2006, présentée pour M. Jean-Claude X, demeurant Chez ..., par la S.C.P. J.-L. Bergel et M.-R. Bergel ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503854 du 1er juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2005 par lequel le maire de la commune du Beausset lui a opposé un refus de permis de construire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Beausset une somme de 2 500 euros

au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 4 août 2006, présentée pour M. Jean-Claude X, demeurant Chez ..., par la S.C.P. J.-L. Bergel et M.-R. Bergel ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503854 du 1er juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2005 par lequel le maire de la commune du Beausset lui a opposé un refus de permis de construire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Beausset une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2008 :

- le rapport de Mme Ségura, rapporteur ;

- les observations de Me Claveau pour M. X ;

- les observations de Me Picardo pour la commune du Beausset ;

- et les conclusions de M. Bachoffer, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par le jugement attaqué susvisé, le Tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2005 par lequel le maire de la commune du Beausset lui a opposé un refus de permis de construire une villa sur le lot A de la parcelle cadastrée section AC 163/164 sise sur le territoire de la commune au lieu-dit Le Pignet ; que M. X relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué

Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant, en premier lieu, que M. X soutient que les premiers juges ont statué au-delà des conclusions qui leur avaient été présentées en procédant à une substitution de motifs alors que la commune du Beausset avait demandé une substitution de base légale ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que c'est à bon droit que les premiers juges ont requalifié la demande de la commune, laquelle tendait à ce que le motif tiré de la violation par le projet litigieux des dispositions du règlement du plan d'occupation des sols approuvé en 1985 relatives à la zone NA soit substitué à celui tiré de la méconnaissance de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme ;

Considérant, en second lieu, que, d'une part, contrairement à ce que soutient M. X, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la commune avait suffisamment motivé sa demande tendant à la substitution sus-évoquée ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que les premiers juges ont mis M. X, à qui le mémoire de la commune du Beausset, contenant la demande de substitution, avait été communiqué, à même de présenter ses observations sur ladite demande ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité ;

Sur la légalité de la décision en date du 20 mai 2005

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les premiers juges ont, à la demande de la commune du Beausset, substitué le motif tiré de la violation par le projet de construction litigieux des dispositions du règlement du plan d'occupation des sols approuvé en 1985 relatives à la zone NA à celui tiré de la méconnaissance de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme ; que M. X soutient que le plan d'occupation des sols approuvé en 1985 n'était pas applicable à la date de la décision attaquée ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.121-8 du code de l'urbanisme, reprenant et modifiant les dispositions du premier alinéa de l'article L.125-5 ancien du même code : L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu d'un principe général, il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal ; que ce principe trouve à s'appliquer, en l'absence même de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les dispositions d'un document d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité ; que celles-ci doivent alors être écartées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, par l'autorité chargée de délivrer des autorisations d'utilisation ou d'occupation des sols, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'illégalité en cause affecterait ou non des dispositions spécialement édictées pour permettre l'opération faisant l'objet de la demande d'autorisation ; que n'étaient de nature à faire obstacle à l'application de ce principe, lorsqu'elles étaient en vigueur, ni les dispositions de l'article L.123-4-1 ancien du code de l'urbanisme, qui interdisaient au conseil municipal d'abroger le plan d'occupation des sols, même illégal, de la commune, ni celles du second alinéa de l'article L.125-5 ancien du même code, qui ne lui permettaient, en cas d'annulation ou de déclaration d'illégalité du plan d'occupation des sols, d'écarter le plan d'occupation des sols immédiatement antérieur au profit des règles générales du code de l'urbanisme que dans le cas où l'illégalité de ce plan résultait de changements intervenus dans les circonstances de fait ou de droit, et non lorsqu'elle l'affectait depuis l'origine ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article L.600-1 du code de l'urbanisme : L'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un schéma directeur, d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan d'occupation des sols, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu ne peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause. / Les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables à l'acte prescrivant l'élaboration ou la révision d'un document d'urbanisme (...) / Les deux alinéas précédents ne sont pas applicables lorsque le vice de forme concerne : / - soit l'absence de mise à disposition du public des schémas directeurs (...) ; / - soit la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l'enquête publique (...) ; / - soit l'absence du rapport de présentation ou des documents graphiques ; que ces dispositions, par lesquelles le législateur a, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 93-335 DC du 21 janvier 1994, entendu prendre en compte le risque d'instabilité juridique, particulièrement marqué en matière d'urbanisme, résultant, pour les décisions prises sur la base des actes qui y sont mentionnés, de la multiplicité des contestations de la légalité externe de ces derniers, ont implicitement mais nécessairement institué une dérogation au principe général rappelé ci-dessus ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions susmentionnées que, saisi d'une demande d'autorisation ou de certificat d'urbanisme, le maire est tenu, lorsqu'il y statue après l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa prise d'effet, de se fonder sur le document d'urbanisme en vigueur dès lors que sa légalité n'est affectée que par des vices de procédure ou de forme au sens des dispositions précitées de l'article L.600-1, réserve étant faite de ceux qui sont mentionnés à ses trois derniers alinéas, au nombre desquels ne figure pas l'insuffisance du rapport de présentation ;

Considérant que le Tribunal administratif de Nice a annulé, par un jugement du 5 novembre 1998 confirmé par un arrêt de la cour de céans du 22 décembre 2003, la délibération en date du 23 février 1995 par laquelle le conseil municipal du Beausset a approuvé la révision du plan d'occupation des sols de la commune ; que si, par une délibération en date du 17 mars 1999, le conseil municipal de la commune du Beausset a considéré que le P.O.S. approuvé en 1985 redevenu applicable, était entaché de la même irrégularité que celle retenue par le juge à l'encontre du document d'urbanisme annulé et tirée de l'insuffisance du rapport de présentation, le maire était néanmoins tenu de faire application du plan approuvé en 1985 et ne pouvait l'écarter du fait de l'expiration du délai de six mois à compter de sa prise d'effet, en se fondant, à le supposer même établi, sur ce vice de forme ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ledit plan était applicable à la date de la décision attaquée et ont procédé à la substitution de motifs sollicitée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article NA1 1° du règlement du plan d'occupation des sols de la commune du Beausset, approuvé le 15 février 1985, sont interdits dans ladite zone : 1- les constructions et installations de toute nature à l'exception des bâtiments et équipements d'infrastructure publics ; qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet de construction présenté par M. X est situé dans la zone NA du plan d'occupation des sols susmentionné ; qu'il s'ensuit que les dispositions précitées, redevenues applicables, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, à la date de la décision attaquée, faisaient obstacle à ce que le maire de la commune du Beausset pût légalement délivrer le permis de construire sollicité ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'en application de ces dispositions, le maire était tenu de refuser ledit permis et que, par suite, les moyens tirés du défaut de motivation, de l'erreur manifeste d'appréciation et du détournement de pouvoir ne pouvaient qu'être écartés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions susmentionnées présentées par M. X ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à la commune du Beausset sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête 06MA02335 de M. X est rejetée.

Article 2 : M. X versera à la commune du Beausset une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune du Beausset et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

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N° 06MA02335


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA02335
Date de la décision : 09/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COUSIN
Rapporteur ?: Mme Françoise SEGURA-JEAN
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : SCP J.L. BERGEL et M.R. BERGEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-10-09;06ma02335 ?
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