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04/07/2006 | FRANCE | N°01MA01180

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 04 juillet 2006, 01MA01180


Vu l'arrêt en date du 24 mars 2005 par lequel la Cour, avant de statuer sur la requête enregistrée le 23 mai 2001 pour M. Eric X et Mme Carole Y et leur fille mineure Samantha X, élisant domicile 159 boulevard Henri Barnier, La Bricarde, appartement 336 à Marseille (13015), par Me Monneret, a ordonné une expertise ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu le code monétaire et financi

er ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publ...

Vu l'arrêt en date du 24 mars 2005 par lequel la Cour, avant de statuer sur la requête enregistrée le 23 mai 2001 pour M. Eric X et Mme Carole Y et leur fille mineure Samantha X, élisant domicile 159 boulevard Henri Barnier, La Bricarde, appartement 336 à Marseille (13015), par Me Monneret, a ordonné une expertise ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu le code monétaire et financier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2006 :

- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;

- les observations de Me Monneret, avocat de M. X et de Mme Y ;

- les observations de Me Demailly, avocat de l'assistance publique de Marseille ;

- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise déposé en appel le 9 mai 2006 par un collège de trois experts, que la jeune Samantha X, alors âgée de 2 mois, a été amenée le 6 novembre 1994 au service des urgences de l'hôpital de La Timone à Marseille à 20 heures par ses parents qui avaient relevé son comportement anormal manifesté par des gémissements et des mouvements bizarres de la tête à partir de 18 heures ; que durant l'hospitalisation, l'état de la jeune Samantha a été jugé normal par un médecin au vu d'un examen neurologique et d'une échographie cérébrale, ainsi qu'à deux reprises par un interne ; que pendant la nuit, l'enfant est examinée à deux reprises par l'interne de garde qui a seulement décelé une gastro-entérite ; qu'à 7 heures 30, l'enfant est retrouvée geignant, pâle et le teint grisâtre et l'interne décide alors de placer une perfusion et de mettre l'enfant sous oxygène et sous antibiotiques ; qu'à 9 heures 30 elle a été transférée dans l'unité de soins intensifs où l'on a constaté qu'elle avait perdu 8 % de son poids et la présence de convulsions hémicorporelles droites ; que les examens sanguins ont permis de diagnostiquer une défaillance polyviscérale, alors que les électroencéphalogrammes ont démontré une souffrance cérébrale et un scanner des lignes probables d'anoxo-ischémie ; que si l'Assistance publique de Marseille, reprenant sur ce point les dires à l'expert du chef de service de soins intensifs, fait valoir que l'état de l'enfant est imputable à une mort subite manquée antérieure à l'hospitalisation dont les effets ont été masqués par une période de latence de douze heures et qu'aucune faute n'a été commise, une telle hypothèse doit être écartée dès lors que l'enfant n'a présenté au domicile aucun signe de détresse vitale neurologique ou cardiorespiratoire et aucune manoeuvre de ressuscitation n'a été effectuée par les parents, que l'examen clinique aux urgences n'a pas été jugé pathologique et que l'évolution pendant la nuit montre clairement l'existence de pertes digestives conduisant à un état de choc hypovolémique par déshydratation aiguë ; que les conditions de la surveillance du nourisson après 0 heure 30 n'ont pas été conformes aux règles de l'art, la détérioration de l'état d'hydratation pouvant être extrêment rapide, en quelques heures, à cet âge ; que la surveillance, les examens, le diagnostic et les soins apportés à Samantha l'ont privée d'une chance de recours à une thérapie appropriée avant l'aggravation constatée à 7 heures 30 ; que les fautes ainsi commises ont compromis les chances réelles et sérieuses de rétablissement dont bénéficiait l'intéressée et sont de nature à engager la responsabilité de l'Assistance publique de Marseille à qui incombe la réparation intégrale du préjudice ;

Sur le préjudice et les droits de Mlle Samantha X :

Considérant que la jeune Samantha X, née le 2 septembre 1994, présente une encéphalopathie entraînant une incapacité supérieure à 80 %, une dépendance pour les gestes de la vie courante, un préjudice esthétique majeur, un préjudice d'agrément majeur et des souffrances très importantes sans que toutefois son état soit consolidé ; que de ce fait l'étendue du préjudice ne pourra être définitivement fixée qu'au moment où la victime aura atteint l'âge de 18 ans ; qu'il y a lieu, à titre provisoire, d'évaluer le préjudice corporel total de la jeune Samantha X directement imputable à la faute de l'Assistance publique de Marseille au cumul des sommes suivantes : 500 000 euros aux fins de réparation des troubles dans les conditions d'existence de l'enfant, dont les trois quarts réparent les troubles de caractère physiologiques, sans qu'il y ait lieu d'indemniser séparément la période d'incapacité temporaire totale antérieure à la fixation de l'incapacité permanente partielle, 20 000 euros au titre de son préjudice esthétique, 20 000 euros au titre des souffrances physiques endurées ;

Sur le préjudice personnel de M. X et de Mme Y :

Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Assistance publique de Marseille à verser à chacun des parents de la jeune Samantha X la somme de 20 000 euros au titre de leur préjudice moral et des troubles dans les conditions de leur existence ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant, d'une part, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que par suite Mlle X, M. X et Mme Y ont droit aux intérêts au taux légal afférents aux sommes de 540 000 euros, de 20 000 euros à compter du 19 mars 1997, date à laquelle ils ont demandé réparation à l'Assistance publique de Marseille ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que Mlle X, M. X et

Mme Y ont demandé par un mémoire du 15 septembre 2000 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date que, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les requérants n'ont pas ensuite formulé de nouvelles demandes de capitalisation, à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X et Mme Y sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes et à demander l'annulation de ce jugement ;

Sur les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat les frais des expertises ordonnées et décidées en première instance et en appel ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Assistance publique-hôpitaux de Paris à verser à Mlle X, M. X et Mme Y la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 27 mars 2001 est annulé.

Article 2 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à verser à Mlle X la somme de 540 000 euros assortie des intérêts légaux à compter du 19 mars 1997. Les intérêts échus à la date du 15 septembre 2000 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à verser à M. X la somme de 20 000 euros assortie des intérêts légaux à compter du 19 mars 1997. Les intérêts échus à la date du 15 septembre 2000 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à verser à Mme Y la somme de 20 000 euros assortie des intérêts légaux à compter du 19 mars 1997. Les intérêts échus à la date du 15 septembre 2000 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : L'assistance publique de Marseille est condamnée à verser à Mlle X,

M. X, et Mme Y la somme de 4 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et Mme Y, à l'Assistance Publique de Marseille, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et au ministre de la santé et des solidarités.

N° 01MA01180 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA01180
Date de la décision : 04/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : MONNERET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-07-04;01ma01180 ?
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