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05/12/2005 | FRANCE | N°01MA00293

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 05 décembre 2005, 01MA00293


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 01MA00293, le 8 février 2001, présentée pour l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE (OEHC), représenté par son directeur et dont le siège social est situé avenue Paul Giaccobi à Bastia (BP 678 - 20601 Bastia Cedex), par Me Claude THIBAUDEAU, avocat ;

L'OEHC demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 23 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamné solidairement et conjointement avec la commune de Saint-Florent et la SARL Torre Travau

x publics, à verser aux consorts X une indemnité de 75.000 F, ainsi que l...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 01MA00293, le 8 février 2001, présentée pour l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE (OEHC), représenté par son directeur et dont le siège social est situé avenue Paul Giaccobi à Bastia (BP 678 - 20601 Bastia Cedex), par Me Claude THIBAUDEAU, avocat ;

L'OEHC demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 23 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamné solidairement et conjointement avec la commune de Saint-Florent et la SARL Torre Travaux publics, à verser aux consorts X une indemnité de 75.000 F, ainsi que la somme de 5.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et a mis à sa charge, solidairement et conjointement avec ces deux parties, les frais d'expertise s'élevant à 25.615 F ;

2°/ de rejeter la demande présentée par les consorts X devant le tribunal administratif, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

3°/ à titre subsidiaire, de le mettre hors de cause, de condamner la SARL Torre Travaux publics à le garantir de toute condamnation prononcée contre lui, de rejeter au fond la demande des consorts X, ou, en tout état de cause, de limiter leur indemnisation à la moitié des sommes retenues ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2005 :

- le rapport de M. Gonzales, président assesseur,

- les observations de Me Pautot pour MM. X et ZY,

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'Office d'Equipement Hydraulique de la Corse (OEHC) fait appel du jugement du 23 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser aux consorts X et ZY la somme de 75.000 F en réparation des dommages causés par une pelle mécanique à leur quai lors de travaux de curage et de reprofilage du cours d'eau « le Poggio », conjointement et solidairement avec la commune de Saint Florent, maître de l'ouvrage, et la SARL Torre Travaux publics, chargée de l'exécution desdits travaux ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que l'attribution de compétence donnée aux tribunaux de l'ordre judiciaire par l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1957 pour les dommages qui sont le fait d'un véhicule appartenant à une personne publique ou un entrepreneur de travaux publics n'est susceptible de recevoir application que pour autant que le dommage invoqué trouve sa cause déterminante dans l'action d'un véhicule ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dommages causés au quai appartenant aux consorts X et ZY ont été provoqués lors de travaux de curage du lit du Poggio par le maniement de pelles mécaniques, engins qui ont le caractère de véhicules au sens des dispositions, ci-dessus rappelées, de la loi du 31 décembre 1957 ; que ces dispositions n'ont, toutefois, pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de déroger aux règles normales de compétence applicables aux actions en responsabilité engagées sur un fondement autre que celui qui y est seul visé, alors même que les faits ou les fautes invoqués à l'appui de l'action auraient concouru à la réalisation de dommages partiellement imputables à des véhicules ; qu'en l'espèce, les consorts X et ZY ont présenté des conclusions en responsabilité dirigées solidairement contre le maître d'oeuvre, le maître d'ouvrage et l'entrepreneur chargé des travaux, sur le fondement de la mauvaise organisation du chantier, notamment en ce qui concerne la méthode de curage et la période choisies, de l'insuffisance de surveillance du chantier et des réactions inappropriées de l'entrepreneur lors des difficultés d'exécution rencontrées, et non pas sur la garde ou la conduite de véhicules ; que le litige étant ainsi relatif aux conséquences de l'exécution de travaux publics, la juridiction administrative est seule compétente pour y statuer ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par ordonnance de référé, que l'effondrement du quai appartenant aux consorts X-ZY a été provoqué par les travaux de curage et de reprofilage du ruisseau du Poggio exécutés par la société Torre Travaux publics pour le compte de la commune de Saint Florent, sous la maîtrise d'oeuvre de l'OEHC, et ne résulte ni de l'état de vétusté ni de l'insuffisance de l'entretien de ce quai ; que, dans ces conditions, la commune de Saint Florent, l'OEHC et la société Torre Travaux publics ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Bastia a retenu que leur responsabilité solidaire était engagée à l'égard des consorts X-ZY, qui ont la qualité de tiers par rapport à ces travaux publics, la commune ne pouvant notamment utilement soutenir que n'ayant commis aucune faute, elle devrait être exonérée de sa responsabilité ;

Considérant, en revanche, qu'il résulte des attestations produites par les consorts X-ZY, dont les énonciations ne sont pas sérieusement démenties par les autres parties, que le quai endommagé a été édifié à une époque antérieure à l'institution d'un régime d'autorisation de construire ; que les consorts X-ZY sont donc fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que l'édification du quai sans autorisation de construire justifiait une limitation de leur droit à réparation des désordres litigieux ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste réparation de ces derniers en condamnant solidairement la commune de Saint Florent, l'OEHC et la société Torre Travaux publics à verser une indemnité de 23.000 euros, tous préjudices et actualisations confondus ; qu'en déduction de cette somme devra s'imputer la provision de 100.000 F (15.244, 90 euros) accordée aux intéressés par ordonnance du 9 avril 1998, au cas où cette provision leur aurait été effectivement versée ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre définitivement les frais de l'expertise ordonnée le 6 octobre 1997, s'élevant à 3.904, 98 euros (25.615 F), à la charge conjointe et solidaire de la commune de Saint Florent, de l'OEHC et de la société Torre Travaux publics ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que la commune de Saint Florent, l'OEHC, et la société Torre Travaux publics, qui succombent dans la présente instance, ne peuvent prétendre au remboursement de leurs frais de procédure ;

Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer aux consorts X-ZY la somme de 1.500 euros à la charge conjointe et solidaire de la commune de Saint Florent, de l'OEHC et de la société Torre Travaux publics au titre de leurs propres frais de procédure ;

Sur l'appel en garantie formé par la commune de Saint Florent à l'encontre de la société Torre Travaux publics et de l'OEHC :

Considérant que la société Torre Travaux publics a, en choisissant d'utiliser une pelleteuse inadaptée à la configuration des lieux, et dont l'enlisement suivi de son remorquage se trouvent être à l'origine des désordres constatés, commis une faute ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction que l'OEHC a assuré de façon insuffisante la direction et la surveillance des travaux qui lui étaient confiés contractuellement et doit se voir notamment reprocher de n'avoir pas procédé au contrôle des profils des berges du Poggio devant être respectés par les opérations de curage ; qu'il sera fait une juste appréciation des fautes respectives commises par ces deux opérateurs en condamnant l'entreprise Torre Travaux publics et l'OEHC à garantir la commune à hauteur d'un tiers chacun des désordres, des frais d'expertise et des frais de procédure mis à sa charge ;

Sur l'appel en garantie formé par la société Torre Travaux publics à l'encontre de la commune de Saint Florent et de l'OEHC :

Considérant que l'article 2.2 du cahier des clauses techniques particulières régissant la conduite des travaux de réhabilitation du Poggio prévoyait qu'une visite hebdomadaire du chantier serait effectuée conjointement par l'entreprise Torre Travaux publics et par « la mairie de Saint Florent » ; qu'en s'abstenant d'assurer une visite hebdomadaire du chantier, la commune de Saint Florent, qui ne saurait utilement se prévaloir de l'insuffisance de ses services techniques pour justifier cette abstention, a commis une faute ayant concouru à la survenance des désordres ; que, compte tenu de ce qui a été dit plus haut sur la faute pouvant également être reprochée à l'OEHC, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant la commune de Saint Florent et l'OEHC à garantir la société Torre travaux publics à hauteur d'un tiers chacun des conséquences dommageables de ces désordres, des frais d'expertise et des frais de procédure mis à sa charge ;

Sur l'appel en garantie formé par l'OEHC à l'encontre de la seule société Torre Travaux publics :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il sera fait une juste appréciation des fautes reprochées à la société Torre Travaux publics en condamnant cette dernière à garantir l'OEHC à hauteur d'un tiers des conséquences dommageables des désordres, des frais d'expertise et des frais de procédure mis à sa charge ;

DECIDE :

Article 1er : La commune de Saint Florent, l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE et la société Torre Travaux publics sont condamnés conjointement et solidairement à verser 23.000 euros (vingt-trois mille euros) aux consorts X-ZY. En déduction de cette somme, devra s'imputer la provision de 15.244, 90 euros (quinze mille deux cent quarante quatre euros et quatre-vingt dix centimes) allouée à ces derniers si elle leur a déjà été versée.

Article 2 : Les frais d'expertise s'élevant à 3.904, 98 euros (trois mille neuf cent quatre euros et quatre-vingt dix huit centimes) sont mis définitivement à la charge conjointe et solidaire de la commune de Saint Florent, de l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE et de la société Torre Travaux publics.

Article 3 : La commune de Saint Florent, L'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE et la société Torre Travaux publics sont condamnés solidairement à verser 1.500 euros (mille cinq cent euros) aux consorts X-ZY en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE et la société Torre Travaux publics garantiront respectivement la commune de Saint Florent à concurrence d'un tiers des condamnations mises à la charge de celle-ci en application des articles 1 à 3 ci-dessus.

Article 5 : La commune de Saint Florent et l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE garantiront respectivement la société Torre Travaux publics à concurrence d'un tiers des condamnations mises à la charge de cette société en application des articles 1 à 3 ci-dessus.

Article 6 : La société Torre Travaux publics garantira l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE à concurrence d'un tiers des condamnations mises à la charge de cet établissement public en application des articles 1 à 3 ci-dessus.

Article 7 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia en date du 23 novembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 8 : Le surplus des conclusions des parties au litige est rejeté.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à l'OFFICE D'EQUIPEMENT HYDRAULIQUE DE LA CORSE, aux consorts X et ZY, à la commune de Saint-Florent, à la SARL Torre Travaux publics, et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Copie en sera adressée pour information au trésorier-payeur général de la Haute-Corse et à l'expert, M. Charles A.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA00293
Date de la décision : 05/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Serge GONZALES
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : THIBAUDEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-12-05;01ma00293 ?
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