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19/02/2004 | FRANCE | N°99MA00472

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 19 février 2004, 99MA00472


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mars 1999, sous le n° 99MA00472, présentée pour la société LA PATELLE représentée par ses gérants et dont le siège social est ... par le cabinet DEGRYSE, avocat ;

La société LA PATELLE demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 94-2603 en date du 17 décembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la réduction des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990 ainsi qu'au rembourseme

nt des frais exposés ;

2'/ de la décharger desdites impositions et de condamner l...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mars 1999, sous le n° 99MA00472, présentée pour la société LA PATELLE représentée par ses gérants et dont le siège social est ... par le cabinet DEGRYSE, avocat ;

La société LA PATELLE demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 94-2603 en date du 17 décembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la réduction des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990 ainsi qu'au remboursement des frais exposés ;

2'/ de la décharger desdites impositions et de condamner l'intimé aux entiers dépens ;

Classement CNIJ : 19-06-02-07-03

C+

Elle soutient :

- que la procédure de vérification est viciée en raison de l'absence de débat contradictoire pour les années 1989 et 1990 ;

- que l'administration fiscale n'apporte pas la preuve de ce que la comptabilité présenterait de graves irrégularités ; qu'en tout état de cause, à supposer établi le caractère non probant de la comptabilité, compte tenu de l'imprécision qui affecte la reconstitution d'un taux de bénéfice brut et du faible écart qui sépare le taux de bénéfice brut ressortant des documents comptables et un taux théorique reconstitué par l'administration, elle doit être regardée comme établissant l'exagération des bases d'impositions supplémentaires mise à sa charge ;

- les services fiscaux ne justifient pas de la réalité du redressement en ne retenant que 530 bouteilles de vin blanc utilisées sur les 897 annoncées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 1999, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête de la société LA PATELLE ;

Il soutient :

- que la vérification s'est déroulée du 21 juin au 17 septembre 1991 dans les locaux du comptable conformément à la demande du contribuable et que ce dernier ne justifie nullement de ce que le vérificateur aurait refusé tout débat oral et contradictoire ;

- que les diverses irrégularités affectant la comptabilité lui ôte toute valeur probante ; ainsi, le livre de caisse n'a pas été tenu au jour le jour en ce qui concerne les dépenses, les achats de poissons et de coquillages effectués en espèce ont été comptabilisés globalement en fin de mois et les achats n'ont été justifiés que par la production de factures globales sans qu'aucun document ne permette d'établir la quantité, le coût unitaire et la nature de chaque produit ;

- que les insuffisances de la comptabilité et l'absence de justification des achats n'ont pas permis de déterminer le prix de revient des repas servis et donc un coefficient multiplicateur moyen pondéré ; que dans ces conditions, la méthode utilisée par le vérificateur a consisté à appliquer au nombre de bouteilles cachetées manquantes le prix de vente moyen des bouteilles cachetées et le pourcentage des recettes générées par les vins cachetés dans les recettes totales ; que la société n'apporte pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition qui lui incombe en application des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales ;

- qu'aucun dépens n'ayant été engagé dans cette affaire, les conclusions présentées sur le fondement de l'article R.217 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel doivent être déclarées irrecevables car dépourvues d'objet ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 6 mars 2000, présenté pour la société LA PATELLE par le cabinet DEGRYSE, avocat ;

La requérante persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et sollicite en outre la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 7.000 francs au titre des frais d'instance ; elle fait également valoir :

- que les impositions litigieuses sont irrégulières car la durée de la vérification a dépassé les trois mois prévus à l'article L.52 du livre des procédures fiscales ; qu'en effet, alors que la vérification ne devait porter que sur la période du 21 juin 1991au 17 septembre 1991, le vérificateur lui a demandé par écrit un rendez-vous pour le 15 octobre 1991 ; qu'à supposer respecté le délai de trois mois prévu à l'article L.52 précité, les impositions doivent être en tout état de cause déclarées irrégulières en application de l'article L.51 du livre des procédures fiscales dans la mesure où l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes textes pour la même période ;

- que le courrier du 15 octobre 1991 qui mentionnait qu'elle pouvait se faire représenter par le conseil de son choix doit être regardé comme une volonté d'écarter l'expert-comptable des débats ; qu'elle n'a jamais pu avoir un débat contradictoire avec le vérificateur comme en atteste la réponse faite par l'administration fiscale à ses observations du 4 février 1992, laquelle indiquait : le vérificateur n'est pas tenu de faire connaître avant la notification de redressements les redressements qu'il envisage d'apporter aux résultats déclarés ;

- que seule la société LA PATELLE a reçu la notification de redressements alors que les associés de la société, les époux X et Y, auraient dû en recevoir également un exemplaire ;

- que la comptabilité répond aux critères d'une comptabilité probante car elle ne présente ni lacune, ni irrégularité graves et répétées ; que par ailleurs, la faiblesse de l'écart entre les chiffres d'affaires déclarés et reconstitués (5,85%) ne peut démontrer à elle seul le caractère non sincère de la comptabilité et dans cette hypothèse, le contribuable doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'exagération des bases d'imposition ; qu'enfin, le rejet de la comptabilité de l'année 1988 ne peut être étendu aux années 1989 et 1990 dans la mesure où l'administration n'a pas vérifié l'existence des prétendues irrégularités graves et répétées au titre de ces années ;

- que la méthode de reconstitution utilisée par l'administration est erronée tant en ce qui concerne le nombre de kirs offerts que l'absence de prise en compte de vin blanc et rouge dans les plats cuisinés ; d'autre part, le caractère sommaire de la reconstitution des recettes d'apéritifs qui ne distingue pas la vente des apéritifs entiers constitue à lui seul la preuve incombant au contribuable de l'exagération de l'imposition ;

- qu'elle est de bonne foi ;

- que l'administration fiscale n'a pas tenu compte dans sa répartition des rémunérations versées aux associés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 12 mai 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre persiste dans ses précédentes écritures tendant au rejet de la requête de la société LA PATELLE par les mêmes moyens en faisant valoir en outre que :

- la requérante ne démontre pas que le vérificateur se serait refusé à tout débat contradictoire et la lettre en date du 19 septembre 1991 qui lui a été adressée démontre l'existence de rencontres les 3 et 17 septembre 1991 ;

- le délai de trois mois prévu à l'article L.52 du livre des procédures fiscales a été respecté dans la mesure où le délai a pour point de départ le jour de la première intervention sur place de l'agent vérificateur et pour point d'arrivée le jour de la dernière intervention sur place ; dans ces conditions, l'entrevue du 15 octobre 1991 qui s'est déroulée dans le bureau du vérificateur ne peut être regardée comme une consultation sur place ;

- le caractère probant de la comptabilité n'est pas établi dans la mesure où le compte de caisse a présenté des soldes créditeurs au cours de la période litigieuse et dans la mesure où les factures récapitulatives n'excluent pas l'obligation de faire figurer par opération, le prix, les quantités et la nature du produit ;

- les irrégularités commises par la requérante dans la tenue de sa comptabilité et la minoration des recettes justifient l'application des pénalités pour mauvaise foi prévues par l'article 1729 du code général des impôts ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 16 août 2002, présenté pour la société LA PATELLE par le cabinet DEGRYSE, avocat ;

La requérante persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et soulève un moyen nouveau tiré de la méconnaissance de l'article R.60-3 du livre de procédure fiscale qui impose que l'avis de la commission départementale soit notifié par l'administration des impôts au contribuable ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 juin 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre persiste dans ses précédentes écritures tendant au rejet de la requête de la société LA PATELLE par les mêmes moyens en faisant valoir en outre que l'administration a notifié l'avis formulé par la commission départementale des impôts ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2004 ;

- le rapport de Mme MASSE-DEGOIS, conseillère ;

- et les conclusions de M. TROTTIER, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes :

Considérant que pour se prévaloir de l'absence de caractère probant de la comptabilité de la société à responsabilité limitée LA PATELLE, l'administration s'est fondée exclusivement sur l'absence de tenue du livre de caisse au jour le jour en ce qui concerne les achats de poissons et de coquillages et sur l'inscription globale de ces achats en fin de mois par une seule écriture alors que les approvisionnements et paiements desdits achats étaient effectués au jour le jour ; que, s'il n'est pas contesté que la comptabilité de la société LA PATELLE ne comportait pas de factures journalières correspondant aux achats quotidiens de ces produits, il n'est cependant pas soutenu que l'intégralité des achats n'était pas comptabilisée à la fin de chaque mois ; que dans ces conditions, et compte tenu, par ailleurs, de la faiblesse de l'écart entre le chiffre d'affaires déclaré et celui reconstitué, ces insuffisances ne sont pas de nature, à elles seules, à priver la comptabilité de la société dans son ensemble de toute valeur probante, et n'autorisaient pas le service à reconstituer le chiffre d'affaires imposable ;

Considérant que par suite, la société LA PATELLE est fondée à solliciter l'annulation du jugement du 17 décembre 1998 rejetant sa demande de décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat (ministre de l'économie, des finances et de l'industrie) à payer à la société requérante une somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 94-2603 du 17 décembre 1998 du Tribunal administratif de Montpellier est annulé ;

Article 2 : La société LA PATELLE est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1988 au 31 décembre 1990.

Article 3 : L'Etat (ministre de l'économie, des finances et de l'industrie) versera à la société LA PATELLE sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative une somme de 500 euros.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société LA PATELLE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 5 février 2004, où siégeaient :

M. DARRIEUTORT, président de chambre,

M. GUERRIVE, président assesseur,

Mme MASSE-DEGOIS, conseillère,

assistés de Mlle MARTINOD, greffière ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 19 février 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Jean-Pierre DARRIEUTORT Christine MASSE-DEGOIS

La greffière,

Signé

Isabelle MARTINOD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

6

N° 99MA00472


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA00472
Date de la décision : 19/02/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : DEGRYSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-02-19;99ma00472 ?
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