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03/07/2025 | FRANCE | N°23LY00786

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 03 juillet 2025, 23LY00786


Vu la procédure suivante :





Procédures contentieuses antérieures



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 juin 2021 par laquelle le directeur de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon l'a placé en autorisation spéciale d'absence à compter du 6 février 2019, dans l'attente de l'avis du comité médical, et l'a maintenu à demi-traitement, hors indemnité de fonction, de sujétion et d'expertise (IFSE), jusqu'à la date de la reprise de ses fonctions, de son reclassement, de sa

mise en disponibilité ou de son admission à la retraite.



Par un jugement n° 2105644...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 juin 2021 par laquelle le directeur de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon l'a placé en autorisation spéciale d'absence à compter du 6 février 2019, dans l'attente de l'avis du comité médical, et l'a maintenu à demi-traitement, hors indemnité de fonction, de sujétion et d'expertise (IFSE), jusqu'à la date de la reprise de ses fonctions, de son reclassement, de sa mise en disponibilité ou de son admission à la retraite.

Par un jugement n° 2105644 du 30 décembre 2022, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du directeur de l'INSA de Lyon datée du 15 juin 2021 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

M. B... a également demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon à lui verser la somme totale de 26 538 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de son placement et de son maintien sur un poste ne correspondant pas à ses aptitudes physiques et du délai anormalement long de traitement de sa situation.

Par un jugement n° 2109272 du 30 décembre 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregistrée le 1er mars 2023 sous le n° 23LY00786, M. B..., représenté par Me Leleu, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2105644 du 30 décembre 2022 et la décision du 5 octobre 2021 qui a pour partie modifiée la décision du 15 juin 2021 ;

2°) d'enjoindre au directeur de l'INSA de Lyon de le placer dans une situation régulière à compter du 6 février 2019, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'INSA la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision méconnaît les dispositions des articles 34 et 35 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 dès lors qu'elle a pour effet de le placer en congé de maladie ordinaire d'office sans qu'une procédure d'octroi d'un congé de longue maladie n'ait été menée parallèlement ;

- son placement en disponibilité d'office est illégal dès lors qu'il n'avait pas épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire.

Par des mémoires enregistrés les 10 mai et 10 juillet 2023, l'INSA de Lyon, représenté par Me Gadiou, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de la requête dès lors que :

- par décision du 5 octobre 2021, le directeur de l'INSA a modifié sa décision du 15 juin 2021 en prononçant le placement de l'intéressé en disponibilité d'office à titre conservatoire à compter du 6 février 2019 ;

- par décision du 16 juin 2023, M. B... a été placé en congé ordinaire de maladie du 4 mars 2022 au 3 mars 2023 et en disponibilité d'office à compter du 4 mars 2023.

Par une ordonnance du 24 juillet 2023, l'instruction a été close au 8 août 2023.

II.- Par une requête enregistrée le 1er mars 2023 sous le n° 23LY00787, M. B..., représenté par Me Leleu, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2109272 du 30 décembre 2022 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire présentée le 19 juillet 2021 ;

3°) de condamner l'INSA à lui verser la somme de 26 538 euros à titre de dommages et intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'INSA la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'INSA de Lyon a commis une première faute de nature à engager sa responsabilité en le plaçant et en le maintenant sur un poste de travail ne correspondant pas à ses aptitudes physiques, sans procéder aux examens médicaux préalables et aux adaptations nécessaires à son état de santé ;

- il a été placé pour la première fois en arrêt maladie le 12 septembre 2018 ; en raison de l'absence de diligences de l'INSA, il a fallu attendre plus de deux ans avant qu'il soit statué sur son inaptitude, le comité médical départemental ne s'étant prononcé que le 4 mars 2021 ; il a fait l'objet d'une succession de décisions entre 2019 et 2021, pour certaines retirées du fait de leur illégalité, et il est resté dans l'incertitude quant à sa situation ;

- il n'a pas perçu son plein traitement entre le mois de janvier 2019 et le mois de février 2021, son manque à gagner s'établissant à 21 538,11 euros ;

- son préjudice moral sera justement réparé par une indemnité de 5 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 10 mai 2023, l'INSA de Lyon, représenté par Me Gadiou, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le requérant fait grief d'avoir été affecté sur un poste qu'il a lui-même souhaité occuper ; l'examen médical réalisé le 21 août 2018 concluait à son aptitude à exercer ses fonctions ; il n'a pas porté à la connaissance de l'administration d'éléments de nature à démontrer que son état de santé était incompatible avec l'exercice de ses fonctions ;

- à la suite de l'avis du 10 janvier 2019 du comité médical départemental, M. B... a été placé d'office en congé de maladie ordinaire du 2 février au 26 septembre 2019, par décision du 6 février 2019 ; cette décision a été annulée par jugement du tribunal administratif de Lyon du 9 septembre 2020 pour une irrégularité de procédure ; le comité médical a été de nouveau saisi le 4 mars 2021 ; une nouvelle décision a été prise le 9 juin 2021 ; il ne peut être conclu à un délai anormalement long ;

- M. B... n'établit pas qu'il aurait dû percevoir son plein traitement entre le mois de janvier 2019 et le mois de février 2021, alors qu'il avait été déclaré inapte à l'exercice de ses fonctions.

Par une ordonnance du 23 juin 2023, l'instruction a été close au 10 juillet 2023.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;

- le décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2016-580 du 11 mai 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boffy, première conseillère ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Luzineau, pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., fonctionnaire de l'État depuis le 1er septembre 2001 et détaché au sein de l'Institut régional d'administration (IRA) de Lyon du 1er septembre 2017 au 31 août 2018, a été lauréat du concours interne de recrutement dans le corps des adjoints techniques principaux de recherche et de formation 2ème classe - session 2018 en vue d'occuper un poste d'opérateur logistique polyvalent - transport et logistique, situé au sein de la direction du patrimoine et du développement durable (DIRPAT - DD) de l'Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon. Par un arrêté du 23 août 2018, la rectrice de l'académie de Lyon l'a nommé en qualité d'adjoint technique principal de recherche et de formation (ATRF) de 2ème classe, dans la branche d'activité professionnelle " G ", emploi-type " opérateur logistique " et l'a affecté au sein de l'INSA de Lyon à compter du 1er septembre 2018. Victime d'un malaise le 12 septembre suivant et placé en arrêts de travail, M. B... a été examiné par un médecin agréé qui a conclu, le 15 novembre 2018, à son inaptitude permanente et définitive à l'exercice de ses fonctions, à l'absence d'aménagements possibles de son poste de travail et au caractère justifié de ses arrêts de travail au titre d'un état dépressif. Saisi par l'INSA de Lyon, le comité médical départemental du Rhône a émis, le 10 janvier 2019, un avis défavorable à l'aptitude de l'intéressé à l'exercice de ses fonctions et un avis défavorable à son reclassement, en considérant qu'il était inapte de manière absolue, permanente et définitive à ses fonctions et à toutes fonctions. Après avoir été placé en congé de maladie ordinaire du 12 septembre 2018 au 1er février 2019, M. B... a été placé en congé de maladie ordinaire d'office, du 2 février au 26 septembre 2019 inclus, par une décision du directeur de l'INSA de Lyon du 6 février 2019 qui a été annulée par un jugement du tribunal du 9 septembre 2020.

2. Saisi une nouvelle fois par l'INSA de Lyon, le comité médical départemental du Rhône a émis, le 4 mars 2021, un avis défavorable à l'aptitude de l'intéressé à l'exercice de ses fonctions et un avis favorable à son reclassement dans un autre emploi, sur un poste adapté à son état de santé. Par une décision du 9 juin 2021, le directeur de l'INSA de Lyon a placé M. B... en période de préparation au reclassement du 4 mars 2021 au 3 mars 2022 inclus, avec conservation de l'intégralité de son traitement et de ses droits à avancement. Par une décision du 15 juin 2021, le directeur de l'INSA de Lyon l'a placé en autorisation spéciale d'absence à compter du 6 février 2019, dans l'attente de l'avis du comité médical, et l'a maintenu à demi-traitement, hors indemnité de fonction, de sujétion et d'expertise (IFSE), jusqu'à la date de la reprise de ses fonctions, de son reclassement, de sa mise en disponibilité ou de son admission à la retraite. Par une décision du 5 octobre 2021, le directeur de l'INSA de Lyon a partiellement modifié la décision précitée du 15 juin 2021 en substituant au placement de M. B... en autorisation spéciale d'absence à compter du 6 février 2019 un placement de l'intéressé en disponibilité d'office, à titre conservatoire, à compter de la même date. Par une décision du 4 avril 2022, le directeur de l'INSA de Lyon a placé M. B... en disponibilité d'office pour maladie à compter du 4 mars 2022, dans l'attente de l'avis du conseil médical relatif à une mise à la retraite d'office pour invalidité, et l'a maintenu à demi-traitement, sans les primes. Enfin, par une décision du 16 juin 2023, intervenue en cours d'instance, le directeur de l'INSA l'a placé en congé de maladie ordinaire du 4 mars 2022 au 3 mars 2023 puis, à compter du 4 mars 2023, en disponibilité d'office à titre provisoire dans l'attente de la décision définitive portant sur sa mise à la retraite pour invalidité, avec maintien d'une rémunération à plein traitement du 4 mars 2022 au 3 juin 2022, et une rémunération à demi-traitement du 4 juin 2022 au 3 mars 2023.

3. Par un jugement n° 2105644 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation de la décision du directeur de l'INSA en date du 15 juin 2021 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. M. B... relève appel de ce jugement sur ce dernier point, sous la requête n° 23LY00786.

4. Le 19 juillet 2021, M. B... a formé une réclamation préalable qui a été implicitement rejetée le 19 septembre suivant. Il relève appel, sous la requête n° 23LY00787, du jugement n° 2109272 du 30 décembre 2022, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'INSA à lui verser la somme de 26 538 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait, d'une part, de son placement et de son maintien sur un poste ne correspondant pas à ses aptitudes physiques et, d'autre part, du délai anormalement long de traitement de sa situation.

5. Ces deux requêtes présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense et l'étendue du litige :

6. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait plus lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution.

7. Toutefois, lorsqu'une décision administrative faisant l'objet d'un recours contentieux est retirée en cours d'instance pour être remplacée par une décision ayant la même portée, le recours doit être regardé comme tendant également à l'annulation de la nouvelle décision. Lorsque le retrait a acquis un caractère définitif, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision initiale, qui ont perdu leur objet. Le juge doit, en revanche, statuer sur les conclusions dirigées contre la nouvelle décision.

8. En l'espèce, M. B..., aux termes de sa requête d'appel, n'entend plus contester la décision du 15 juin 2021, mais dirige ses conclusions aux fins d'annulation à l'encontre de la seule décision du 5 octobre 2021, intervenue en cours de première instance, par laquelle le directeur de l'INSA l'a placé en disponibilité d'office à compter du 6 février 2019, et l'a maintenu à mi-traitement à compter du 6 février 2019. Par une décision antérieure du 9 juin 2021, créatrice de droit et qui n'a pas été retirée, le directeur de l'INSA de Lyon avait placé M. B... en " période de préparation au reclassement " du 4 mars 2021 au 3 mars 2022 inclus, avec conservation de l'intégralité de son traitement et de ses droits à avancement. Si, par une décision du 16 juin 2023, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur de l'INSA de Lyon a partiellement modifié l'article 2 de la décision du 15 juin 2021 relatif aux éléments de rémunération, qui n'avait pas été modifié, et celle du 5 octobre 2021, en plaçant M. B... en congé maladie ordinaire à compter du 4 mars 2022 jusqu'au 4 mars 2023, puis en plaçant l'intéressé en disponibilité d'office, à titre conservatoire, à compter de la même date, cette nouvelle décision, qui vise d'ailleurs celle du 9 juin 2021 et en rappelle les effets, ne peut être regardée comme ayant eu pour effet de retirer ou modifier la décision du 5 octobre 2021 en tant qu'elle porte sur la période contestée par M. B..., soit son placement en disponibilité d'office du 6 février 2019 au 3 mars 2021 à mi-traitement. Par suite, l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense doit être écartée en toutes ses branches.

Sur la requête n° 23LY00786 :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 15 octobre 2021 :

9. En premier lieu, aux termes de l'article 34 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 visé ci-dessus, dans sa version en vigueur à la date de la décision : " Lorsqu'un chef de service estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs hiérarchiques, que l'état de santé d'un fonctionnaire pourrait justifier qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, il peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 35 ci-dessous (...) ". Aux termes de l'article 35 de ce décret dans sa version applicable au litige : " Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, les fonctionnaires en position d'activité ou leurs représentants légaux doivent adresser à leur chef de service une demande appuyée d'un certificat de leur médecin traitant spécifiant qu'ils sont susceptibles de bénéficier des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. ". Enfin, aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 dans sa version applicable à l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. (...) ".

10. Il apparaît que M. B... n'a pas sollicité un congé de longue maladie ou de longue durée, et que l'avis d'inaptitude dont il a fait l'objet quelques jours après sa prise de fonction dispensait son chef de service de mettre en œuvre les dispositions précitées. Contrairement à ce qu'il soutient, il ne résulte pas de celles-ci qu'une procédure de congé longue durée ou de congé maladie doive être diligentée préalablement à une décision d'inaptitude. Au demeurant, M. B... ne démontre aucunement que sa situation relèverait des 3° ou 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 34 et 35 du décret du 14 mars 1986, en ce que le directeur de l'INSA de Lyon aurait contourné les garanties instituées en faveur des fonctionnaires placés d'office en congé de maladie, est inopérant et ne peut qu'être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l'article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 dans sa version applicable : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. /Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable, s'il ne bénéficie pas de la période de préparation au reclassement prévue par le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'État reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. /Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le ou les postes qui lui sont proposés peut-être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ".

12. M. B..., qui a pris ses fonctions le 1er septembre 2018 et été déclaré inapte à son emploi le 18 novembre 2018, ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées, relatives à l'évaluation de l'aptitude des fonctionnaires ayant fait l'objet d'un congé de maladie de six mois, ou de douze mois consécutifs, situation dont il ne relevait pas, pour soutenir que le directeur de l'INSA ne pouvait décider de son placement en disponibilité d'office à compter du 6 février 2019.

13. Aux termes de l'article 42 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 : " La disponibilité est prononcée par arrêté ministériel, soit d'office, soit à la demande de l'intéressé. ". Aux termes de son article 43 dans sa version applicable au litige : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, (...) de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. La durée de la disponibilité prononcée d'office ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. (...) ". Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier1984 : " (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants... ".

14. M. B... soutient qu'il ne pouvait être placé en disponibilité d'office à mi-traitement du 6 février 2019 au 3 mars 2021 alors qu'il n'avait pas épuisé ses droits à congé maladie. Il ressort des pièces du dossier qu'il avait été placé en arrêt de congé maladie du 12 septembre 2018 au 1er février 2019, soit moins d'un an. Ainsi qu'il résulte des dispositions précitées, M. B... n'aurait dû être placé en disponibilité d'office qu'après épuisement de ses droits à congé, lesquels n'étaient pas entièrement épuisés à la date du 6 février 2019. La décision du 15 octobre 2021 est ainsi entachée d'une erreur de droit.

15. Il en résulte que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 2105644 du 30 décembre 2022, le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision.

En ce qui concerne les conclusions à fins d'injonction sous astreinte :

16. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision. ".

17. Compte tenu de ses motifs, le présent arrêt implique seulement que l'INSA procède au réexamen de la situation de M. B..., pour la période du 6 février 2019 au 3 mars 2021. Il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen et de lui allouer pour ce faire un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur la requête n° 23LY00787 :

18. En premier lieu, aux termes de l'article 5 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version applicable au litige : " Sous réserve des dispositions de l'article 5 bis nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire : / (...) 5° S'il ne remplit les conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction compte tenu des possibilités de compensation du handicap. ". Selon les termes de l'article 20 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa version applicable au litige : " Nul ne peut être nommé à un emploi public s'il ne produit à l'administration, à la date fixée par elle, un certificat médical délivré par un médecin généraliste agréé constatant que l'intéressé n'est atteint d'aucune maladie ou infirmité ou que les maladies ou infirmités constatées et qui doivent être indiquées au dossier médical de l'intéressé ne sont pas incompatibles avec l'exercice des fonctions postulées. / Au cas où le praticien de médecine générale a conclu à l'opportunité d'un examen complémentaire, l'intéressé est soumis à l'examen d'un médecin spécialiste agréé. / Dans tous les cas l'administration peut faire procéder à une contre-visite par un médecin spécialiste agréé en vue d'établir si l'état de santé de l'intéressé est bien compatible avec l'exercice des fonctions qu'il postule. ". Et aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa version applicable au litige : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...) ".

19. Si M. B... soutient que l'INSA de Lyon a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en le plaçant et en le maintenant sur un poste de travail ne correspondant pas à ses aptitudes physiques, sans procéder aux examens médicaux préalables et aux adaptations nécessaires du poste à son état de santé, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a transmis à l'INSA de Lyon un avis médical en date du 21 août 2018 attestant qu'il était apte au poste avant sa prise de poste. Si, aux termes d'un second avis, le même médecin avait émis certaines réserves, dès lors qu'il n'avait pas eu accès au dossier médical de l'intéressé et ne pouvait se fonder sur le seul examen physique le jour de la consultation, toutefois, M. B... n'établit pas avoir communiqué ce second certificat avant sa prise de poste. Ainsi l'INSA de Lyon ne peut être tenu pour responsable de l'avoir affecté sur un poste ne correspondant pas à ses aptitudes. D'autre part, M. B... n'a exercé ses fonctions qu'entre le 1er et le 12 septembre 2018, avant d'être placé en arrêt de travail. Son invalidité à son poste de travail a ensuite été constatée le 18 novembre 2018. Si l'intéressé soutient que des aménagements de son poste auraient dû être envisagés, d'une part la fiche de poste qu'il produit démontre que les fonctions d'opérateur logistique comportent de nombreuses contraintes physiques, d'autre part, le médecin a conclu à une inaptitude permanente et définitive au poste proposé, en rappelant que celui-ci comprend la manutention d'objets lourds, la remise de gros colis, le démontage et le montage de mobilier, le démontage et le montage d'échafaudage, sans aménagements possibles. Faute pour son employeur de pouvoir lui proposer l'aménagement de son poste, M. B... ne saurait lui imputer une faute à l'avoir placé puis maintenu dans un poste incompatible avec son état de santé sans lui faire une telle proposition.

20. En second lieu, M. B... soutient que les délais de traitement de son dossier auraient été anormalement longs, alors que son premier arrêt de travail remonte au 12 septembre 2018. L'intéressé indique que le comité médical départemental aurait ainsi tardé à être saisi et à rendre ses avis. Il résulte cependant de l'instruction que l'avis d'inaptitude a été établi le 15 novembre 2018. Le comité médical départemental du Rhône a émis, le 10 janvier 2019, soit deux mois plus tard, un avis défavorable à l'aptitude de l'intéressé à l'exercice de ses fonctions et un avis défavorable à son reclassement. M. B... a initialement été placé en congé maladie ordinaire du 2 février au 26 septembre 2019 par une décision du 6 février 2019, intervenue dans les meilleurs délais. Si cette dernière a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 9 septembre 2020, pour des vices de procédure retenus relevant d'ailleurs du secrétariat du comité médical départemental du Rhône, l'INSA a de nouveau saisi ce comité qui a émis, le 4 mars 2021, un avis défavorable à l'aptitude de l'intéressé à l'exercice de ses fonctions et un avis favorable à son reclassement dans un autre emploi, sur un poste adapté à son état de santé, moins de six mois après l'annulation par le tribunal, soit dans un délai raisonnable, d'autant que cette période était marquée par la pandémie de Covid-19. L'INSA a ensuite pris rapidement acte de l'avis du comité médical, par l'intervention de la décision du 9 juin 2021 par laquelle l'intéressé a été placé en " préparation au reclassement " du 4 mars 2021 jusqu'au 3 mars 2022, avec le maintien sur cette période de l'intégralité du traitement et des droits à avancement. Cette décision est intervenue trois mois après l'avis de la commission et a régularisé la situation de l'intéressé. Enfin, par décisions des 15 juin et 5 octobre 2021, la situation antérieure de M. B... a été régularisée. Aucun de ces délais ne peut être regardé comme anormalement long et aucune faute de l'administration ne peut être retenue à ce titre.

21. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de faute de l'administration sa responsabilité ne peut être engagée. Les conclusions à fin d'indemnisation présentées par M. B... ne peuvent qu'être rejetées.

22. Il résulte de ce qui précède que M B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 2109272 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Sa requête dirigée contre ce jugement doit être rejetée en toutes ses conclusions.

Sur les frais liés au litige :

23. Il n'y a pas lieu, en l'espèce, de mettre à la charge de l'INSA, dans l'instance n° 23LY00786, le paiement à M. B... d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ni de ce dernier, dans l'instance n° 23LY00787, le versement à l'INSA d'une somme sur ce même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 23LY00787 de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon n° 2105644 du 30 décembre 2022, en tant qu'il rejette les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 15 octobre 2021, est annulé.

Article 3 : La décision du 15 octobre 2021 du directeur de l'INSA de Lyon est annulée.

Article 4 : Il est enjoint au directeur de l'INSA de procéder au réexamen de la situation de M. B... pour la période du 6 février 2019 au 3 mars 2021, en tenant compte de ses droits à congés à la date du 6 février 2019.

Article 5 : Le surplus des conclusions la requête n° 23LY00786 de M. B... est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par l'INSA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à l'institut national des sciences appliquées de Lyon et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 19 juin 2025 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2025.

La rapporteure,

I. BoffyLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY00786, 23LY00787

ar


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00786
Date de la décision : 03/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-05 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Positions diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Irène BOFFY
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SELARL CHANON LELEU ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-03;23ly00786 ?
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