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25/06/2025 | FRANCE | N°23LY00216

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 25 juin 2025, 23LY00216


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2020 par lequel le préfet de l'Ain a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles " mouvements de terrain, crues torrentielles et ruissellements sur versant " sur le territoire de la commune de Valserhône, ainsi que la décision du 1er octobre 2020 rejetant son recours gracieux, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant que le plan approuvé classe la parcelle cadastrée sect

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2020 par lequel le préfet de l'Ain a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles " mouvements de terrain, crues torrentielles et ruissellements sur versant " sur le territoire de la commune de Valserhône, ainsi que la décision du 1er octobre 2020 rejetant son recours gracieux, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant que le plan approuvé classe la parcelle cadastrée section E42 en zone rouge et en tant que les dispositions du règlement applicables en zones rouges indicées g et f et en zone bleue indicée g interdisent tout excavation et épandage d'eau, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux dans cette mesure, à titre infiniment subsidiaire, d'une part, d'ordonner une expertise judiciaire aux fins de recenser et décrire les risques naturels existants sur les parcelles cadastrées section E41 et E42 et déterminer le classement adapté à ce terrain, d'autre part, de demander à la préfète de l'Ain d'apporter les précisions chiffrées réglementant les interdictions d'excavation et épandage d'eau en zones rouges indicées g et f et en zone bleue indicée g.

Par un jugement n° 2008415 du 17 novembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2023, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 11 mars et 25 avril 2024, M. A..., représenté par Me Laumet, demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 novembre 2022 ;

2°) à titre principal d'annuler l'arrêté du 3 avril 2020 et la décision du 1er octobre 2020 rejetant son recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler ces décisions en tant que le plan approuvé classe la parcelle cadastrée section E42 en zone rouge et en tant que les dispositions du règlement applicables en zones rouges indicées g et f et en zone bleue indicée g interdisent tout excavation et épandage d'eau ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, d'une part, d'ordonner une expertise judiciaire aux fins de recenser et décrire les risques naturels existants sur les parcelles cadastrées section E41 et E42 et déterminer le classement adapté à ce terrain, d'autre part, de demander à la préfète d'apporter les précisions chiffrées réglementant les interdictions d'excavation et épandage d'eau en zones rouges indicées g et f et en zone bleue indicée g ;

5°) d'abroger l'arrêté du 3 avril 2020 précité, et la décision rejetant son recours gracieux à la date de la notification de ce recours à la préfète de l'Ain ou de la fin des travaux de la rue Marthe Perrin ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a méconnu le principe de concertation du public, les modalités de concertation définies par l'arrêté du 10 juin 2016 n'ayant pas été respectées et le plan de prévention étant déjà été décidé avant cette concertation, en méconnaissance notamment de l'article L. 562-3 du code de l'environnement ;

- le rapport de présentation du plan de prévention des risques naturels (PPRn) en litige est entaché d'inexactitudes matérielles des faits s'agissant du glissement de terrain survenu rue Marthe Perrin, l'évènement n'étant plus en cours et les causes anthropiques de ce glissement n'étant pas mentionnées ;

- le classement de ses parcelles en secteur G3 " aléas forts " de la carte des aléas est entaché d'erreur de droit dès lors que son terrain ne répond pas aux critères caractérisant ce secteur ;

- le classement de ses parcelles en zone rouge est entaché d'erreur de droit dès lors que le terrain en cause présente les caractéristiques définies par le règlement du PPRn en litige pour la zone bleue ;

- le classement des parcelles E41 et E42 en zone rouge est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le zonage retenu révèle une rupture d'égalité des citoyens devant la loi ;

- les dispositions du règlement applicables en zones rouges indicées g et f et en zone bleue indicée g, qui interdisent tout excavation et épandage d'eau sans définir ces notions, sont entachées d'erreur de droit ;

- le rejet de son recours gracieux est entaché d'erreur de droit dans l'application de l'article L. 411-4 du code des relations entre le public et l'administration, à défaut d'avoir pris en compte l'étude de la société AmoGeo réalisée le 1er mai 2020 ;

- le plan étant désormais entaché d'illégalité au regard des travaux intervenus dans la zone, de nature à la conforter, il y a lieu d'abroger l'arrêté l'ayant approuvé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 25 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 ;

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique,

- et les observations de Me Laumet, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 avril 2020, le préfet de l'Ain a approuvé la révision du plan de prévention des risques naturels (PPRn) prévisibles " mouvements de terrain, crues torrentielles et ruissellements sur versant " sur le territoire de la commune de Valserhône. Ce plan classe en zone rouge les parcelles cadastrées 033 E 42 et 033 E 41 appartenant à M. A..., qui étaient classées en zone blanche au précédent plan. M. A... a formé un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, par lequel il a demandé que ses parcelles soient classées en zone Bg Bleu. Après le rejet de ce recours par une décision du préfet du 1er octobre 2020, il a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, d'annuler cet arrêté ainsi que cette dernière décision, à titre subsidiaire, de les annuler partiellement au titre du classement de ses parcelles, au besoin en ordonnant avant dire droit une expertise judiciaire et une mesure d'instruction. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'acte réglementaire attaqué :

S'agissant de la procédure de concertation :

2. Aux termes de l'article L. 562-3 du code de l'environnement : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. / Sont associés à l'élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés. / Après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier et après avis des conseils municipaux des communes sur le territoire desquelles il doit s'appliquer, le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé par arrêté préfectoral. Au cours de cette enquête, sont entendus, après avis de leur conseil municipal, les maires des communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer. ". En vertu de l'article R. 562-1 de ce code : " L'établissement des plans de prévention des risques naturels prévisibles mentionnés aux articles L. 562-1 à L. 562-9 est prescrit par arrêté du préfet. / (...) ". L'article R. 562-2 de ce code, dans sa version alors applicable, prévoit que : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles (...) définit également les modalités de la concertation et de l'association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, relatives à l'élaboration du projet. / (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au préfet de fixer, dans l'arrêté prescrivant l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles, les modalités de l'association des collectivités territoriales et de leurs groupements à l'élaboration de ce plan ainsi que de la concertation avec le public. Dans tous les cas, cette association ou cette concertation doit porter sur la nature et les options essentielles du projet de plan avant qu'il ne soit arrêté.

4. Le préfet de l'Ain a prévu, dans l'article 4 de son arrêté du 10 juin 2016 prescrivant l'élaboration de la révision du plan de prévention, la tenue d'une réunion publique de présentation du projet de dossier avant enquête publique, sur proposition ou avec l'accord des élus communaux, ainsi que la mise en ligne, sur le site internet de l'Etat dans l'Ain, du projet de dossier soumis à l'enquête publique pendant la durée de celle-ci.

5. D'une part, ainsi que les premiers juges l'ont retenu, la mention figurant au bilan de concertation, dans sa partie résumant les neuf réunions s'étant tenues avec les services de la commune et au point 6 de ce document portant sur la réunion du 18 octobre 2018, selon laquelle " la carte des enjeux et de la grille de zonage sont validées par courrier en date du 20 novembre 2018 ", doit être regardée comme manifestant l'accord sur les cartes envisagées, obtenu de la part des services de la commune associés au projet de révision du PPRn en litige à l'issue de cette réunion technique du 18 octobre 2018. Cette circonstance n'engageait pas la suite de la concertation, et ne faisait pas davantage obstacle à ce que celle-ci se poursuive. Enfin, l'absence constatée de modification ou d'évolution ultérieure du projet n'est pas de nature à révéler qu'aucune concertation effective n'aurait été menée.

6. D'autre part, la circonstance que la réunion publique prévue se soit tenue le 2 décembre 2019, soit moins de dix jours avant l'ouverture de l'enquête publique le 10 décembre 2019, ne contrevient pas aux modalités définies par l'arrêté précité. En outre, le public a été invité à participer à la réunion du 2 décembre 2019 par une campagne de communication composée d'un article publié sur le site internet des services de l'Etat le 18 novembre 2019 et relayé sur le site internet de la commune de Valserhône, un communiqué de presse émis le 26 novembre 2019, ainsi que par des affiches apposées sur le territoire communal le 18 novembre 2019. Le requérant ne saurait déduire de la faible participation de la population à ladite réunion, le caractère succinct de l'information du public sur ce point, et il n'apporte aucun autre élément de nature à établir l'insuffisance alléguée. De la même manière, la mention dans le document de présentation de cette réunion sur le site internet de la préfecture de l'Ain indiquant que la concertation avec le public serait réalisée " auprès de la population, avec un registre de concertation lors de l'enquête publique ", soit donc au cours de l'enquête publique, ne méconnaît pas les modalités fixées.

7. L'ensemble de ces circonstances ne permet pas d'établir que le projet de révision aurait été adopté en méconnaissance des modalités de concertation fixées par l'arrêté du 10 juin 2016, ni de révéler qu'il aurait été élaboré sans aucune concertation du public. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 2 doit être écarté en toutes ses branches.

S'agissant du classement des parcelles appartenant à M. A... :

8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la carte informative des mouvements de terrain du cabinet d'Ingénierie des Mouvements de Sol et des Risques Naturels (IMSRN) établie en janvier 2017, que la propriété du requérant se situe au-dessus des rives du Rhône, sur un versant ayant connu des glissements de terrains notamment en 1988, 1989, 1995 et 2015, et que les phénomènes naturels de mouvements de terrain, dus à la structure géologique, aux fortes pentes caractérisant le secteur et aux résurgences présentes sur ce versant sud du Grand Crêt d'Eau, sont récurrents dans le secteur concerné. Un glissement de terrain a eu lieu au cours du mois de janvier 2018 sur le même versant, dans le secteur de la Serme déjà identifié par la carte IMSRN comme un secteur d'instabilité en janvier 2017, créant des désordres sur certaines bâtisses voisines des parcelles en litige, ainsi que sur la voie publique desservant la propriété du requérant. Ce glissement a été qualifié de " catastrophe naturelle " par arrêté du 22 octobre 2018.

9. Si M. A... soutient que le rapport de présentation du PPRn indique à tort que le glissement de terrain de la rue Marthe Perrin serait encore en cours, il n'apporte pas d'éléments pertinents de nature à remettre en cause cette indication, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les désordres n'avaient pas été résolus à la date de ce rapport. A ce titre, il ressort de la lettre du conseil de la commune adressée en avril 2021 à l'expert initialement désigné par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse sur demande de la commune, qu'à la date de l'adoption du plan de prévention contesté, les travaux de soutènement n'avaient pas débuté. En outre, les causes anthropiques de ce glissement, dont M. A... déplore l'absence de mention dans le rapport de présentation, n'ont été rapportées que par l'étude du bureau GéoArve indiquant que le tènement objet du glissement a servi de dépôt de matériaux, ladite étude imputant toutefois ce glissement à la mise en charge de l'eau circulant à la base de la couverture morainique, en précisant que " cette mise en charge est imputable principalement aux fortes pluies essuyées dernièrement et dans une moindre mesure au poids des remblais récemment apportés. ". Le requérant joint lui-même le rapport du 9 février 2022 concluant l'expertise judiciaire ordonnée le 9 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse dont il résulte que les remblais ne sont pas à l'origine des désordres, aucune étude ni reconnaissance n'ayant pu conclure en ce sens. Le moyen tiré de l'erreur de fait doit ainsi être écarté en toutes ses branches.

10. En deuxième lieu, d'une part, il ressort du rapport de présentation du plan de prévention établi le 3 avril 2020, que les terrains qui présentent les caractéristiques suivantes : " • Glissements et/ou coulées de boue actifs dans toutes pentes avec nombreux indices de mouvements (niches d'arrachement, fissures, bourrelets, arbres basculés, rétention d'eau dans les contre-pentes, traces d'humidité) et dégâts au bâti et/ou aux axes de communications. / • Zones de terrain meuble, peu cohérent et de fortes pentes présentant des traces d'instabilités nombreuses. / • Auréole de sécurité autour de ces glissements et/ou coulées de boue. : • Zone d'épandage des coulées de boue. : • Glissements anciens ayant entraîné de fortes perturbations du terrain. / • Berges des torrents encaissés qui peuvent être le lieu d'instabilités de terrain lors des crues " relèvent de l'aléa " Glissement de terrain / coulée de boue " fort (G3).

11. D'autre part, selon le règlement du PPRn, dans sa partie relative aux mouvements de terrains - glissement et affaissement : " Le zonage rouge correspond aux secteurs d'aléa fort (G3) de la carte des aléas ainsi qu'aux secteurs d'aléa moyen (F2 et G2) et faible (G1) sans enjeux d'urbanisme ou d'aménagement. / Les espaces naturels ou agricoles soumis aux aléas (quelle que soit leur intensité) sont donc classés en zone rouge. Leur urbanisation reviendrait par effet cumulatif à aggraver les risques ou à en provoquer de nouveaux, notamment dans les zones urbanisées déjà exposées ", et : " Le zonage bleu correspond aux espaces urbanisés et à l'habitat isolé situés dans les secteurs d'aléa moyen (F2 et G2) et faible (G1) de la carte des aléas. / De plus, en aléa faible glissement de terrain, les secteurs classés à urbaniser et les terrains desservis par les réseaux en limite des secteurs urbanisés peuvent faire l'objet d'un classement en zone bleue. La sensibilité aux aléas et l'historique des lieux est pris en compte, afin de ne pas aggraver les risques ou en provoquer de nouveaux, notamment dans les zones urbanisées déjà exposées ".

12. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation précité, que l'étude de la société IMSRN menée en 2016, fondée sur les évènements d'origine naturelle survenus dans le secteur, a permis d'établir la carte des aléas du PPRn attaqué, et que le niveau d'aléa est fort en bordure du Rhône. Si M. A... se prévaut de l'étude géotechnique de la société AmoGeo rendue le 1er mai 2020, il ressort des conclusions de celle-ci que " la stabilité globale du tènement est satisfaisante en situation statique et hydrique normale. Lors d'épisodes sismiques ou hydriques importants, la stabilité du site passe légèrement sous la barre de la valeur de sécurité usuelle, traduisant des mouvements potentiels au niveau des faiblesses du terrain. Néanmoins, aucune trace de mouvement n'est observable sur site au droit des bâtis malgré un grand nombre de ces épisodes durant la durée de vie de la maison. A ce titre, la plateforme bâtie du tènement ne nous parait pas sensible aux glissements de terrain. ". Ces constatations, faites notamment sur le bâti, sont insuffisantes pour établir d'une part, que, à supposer même que le tènement de M. A..., composé des parcelles E41 et E42, ne serait pas sujet aux glissements de terrain, la zone qui l'entoure ne relèverait pas d'une zone d'instabilité ou de mouvement répondant aux critères de l'aléa fort, ni d'autre part, que le classement de la zone incluant ses parcelles en rouge, en conséquence du croisement aléa/enjeux prévalant à cet endroit, serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'une erreur de droit au regard des critères du règlement rappelés au point 11. Sur ce dernier point, si le commissaire enquêteur a recommandé, dans son rapport du 15 février 2020, un classement momentané des parcelles E41 et E42 en zone bleue (Bg), il a conditionné cette position à la confirmation de l'ampleur de l'aléa par une étude complémentaire, et il ne résulte pas des éléments précédemment mentionnés que cette proposition pouvait être confortée.

13. En troisième lieu, le classement en zone rouge des parcelles en litige ne reposant pas sur une appréciation manifestement erronée, le requérant ne peut utilement faire valoir que le classement en zone bleue des parcelles voisines, situées au droit de la route Marthe Perrin affectée par le glissement de terrain survenu en janvier 2018, manifesterait une rupture d'égalité. Par suite, ce moyen doit être écarté.

S'agissant des prescriptions du plan :

14. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations (...). II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures ".

15. Le règlement du PPRn en litige prévoit, pour les zones rouges et bleues indicées g et f, que sont interdits " les travaux de remblaiement, d'excavation et d'affouillement, l'épandage d'eau à la surface du sol ou son infiltration, sans étude géotechnique préalable ". Contrairement à ce que fait valoir le requérant et comme le tribunal l'a retenu, en l'absence de définition, par le règlement du plan attaqué, des termes " excavation " et " épandage d'eau ", le document doit être appliqué en donnant à ces derniers leur sens courant, sans condition quantitative de seuil ou plafond de volume ou de surface. En tout état de cause, il ne ressort pas des dispositions citées au point précédent que ces termes devraient être précisés. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit dont seraient entachées les dispositions du règlement des zones rouges indicées g et f et de la zone bleue indicée g ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision du 1er octobre 2020 de rejet du recours gracieux :

16. Aux termes de l'article L. 411-4 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration se prononce sur le recours formé à l'encontre d'une décision créatrice de droits sur le fondement de la situation de fait et de droit prévalant à la date de cette décision. En cas de recours formé contre une décision non créatrice de droits, elle se fonde sur la situation de fait et de droit prévalant à la date à laquelle elle statue sur le recours. "

17. Par un recours gracieux présenté le 17 juillet 2020, M. A... a demandé au préfet de l'Ain de modifier le classement de ses parcelles, a indiqué qu'il joignait une étude géotechnique de son terrain réalisée le 1er mai 2020 et a précisé que le glissement de terrain s'étant produit à proximité de ses parcelles avait été stabilisé de manière définitive en raison de travaux effectués par la commune. Il ne ressort pas de la décision de rejet du recours gracieux du 1er octobre 2020 que la préfète de l'Ain n'aurait pas pris connaissance des éléments de l'étude géotechnique dont M. A... faisait état dans son recours, alors que cette étude se concentre sur l'analyse de son tènement et l'absence de trace de mouvement sur ses constructions, et se serait ainsi abstenue d'examiner le recours gracieux dont elle était saisie au regard des éléments de droit et de fait existant à la date de sa décision. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-4 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'abrogation du plan de prévention :

18. Lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation d'un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir apprécie la légalité de cet acte à la date de son édiction. Dans l'hypothèse où il ne ferait pas droit aux conclusions à fin d'annulation et où l'acte n'aurait pas été abrogé par l'autorité compétente depuis l'introduction de la requête, il appartient au juge, dès lors que l'acte continue de produire des effets, de se prononcer sur les conclusions subsidiaires tendant à ce qu'il prononce l'abrogation du même acte au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction. Le juge statue alors au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.

19. Si M. A... se prévaut des travaux réalisés par les propriétaires du terrain affecté par le glissement de janvier 2018, ainsi que de l'existence d'un marché de confortement définitif d'un glissement de terrain ayant eu pour objet de fortifier la voirie effondrée, par la réalisation d'un " soutènement définitif type panneaux métalliques cloués fondés sur micropieux, puis remblaiement arrière afin de produire une plateforme accueillant la nouvelle voirie. " et la mise en place de drains subhorizontaux, aucun élément au dossier ne permet de démontrer que l'ensemble de ces travaux aurait eu pour objet ou pour effet de soustraire la zone dont il s'agit à l'aléa fort précédemment retenu, nonobstant l'absence de tout mouvement des terres au droit de la parcelle E 42 depuis quatre ans. Par suite, il n'y a pas lieu de constater que les changements de circonstances dont M. A... se prévaut seraient telles que l'acte qu'il conteste serait devenu illégal et que cette circonstance exigerait que l'arrêté approuvant le PPRn en litige soit abrogé.

20. Il résulte de ce tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise judiciaire sollicitée ni diligenter la mesure d'instruction demandée, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. A... sur leur fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2025 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2025.

La rapporteure,

Emilie FelmyLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Noémie Lecouey

La République mande et ordonne à la préfète de l'Ain en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

2

N° 23LY00216


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00216
Date de la décision : 25/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : LAUMET

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-25;23ly00216 ?
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